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a Les outils « classiques » de catégorisation

Chapitre 2 : Pratiques actuelles de catégorisation

VI.2. a Les outils « classiques » de catégorisation

Les outils de catégorisation que nous qualifierons de "classiques" sont ceux qui reviennent de façon récurrente dans le discours des enquêtés lors de la présentation de leur

méthode. Ces outils servent de base à de nombreuses études. Les enquêtés les nomment indices, indicateurs ou variables les qualifient de classiques, traditionnels, habituels ou de base. Ces outils semblent utilisés dans les méthodes quantitatives comme qualitatives, et par toutes les professions interrogées. Ils constituent un ensemble de référence mobilisé pour toute catégorisation.

Il s'agit en fait essentiellement de variables socio démographiques. Ce sont les outils de catégorisation mis au point après la seconde guerre mondiale par l'Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques afin de développer les statistiques démographiques économiques et sociales en France. Ce sont notamment les outils utilisés pour le recensement et les grandes études statistiques.

« On utilise des indices comme l’âge, le sexe, la catégorie socioprofessionnelle, le niveau de revenus, le niveau de diplômes. On utilise les catégories employées par la plupart des instituts de sondage, par l’INSEE » (homme, 49 ans, ETU)

« Donc, moi je commence avec le recensement de l’INSEE, qui fonctionne aussi selon le lieu de travail.

Donc on prend la question lieu de travail à la fin. En fait deux paquets de codes INSEE m’intéressent particulièrement : les communes, cantons, agglomérations, et ce qui s’appelait avant peuplement industriel ou urbain, qui s’appelle maintenant aire urbaine, villes nouvelles. Ce sont les outils dont je me sers. Sur ces bases géographiques-là, je m’intéresse à l’activité géographique, en comparaison avec les activités personnelles. Le code CSP sert alors à son niveau le plus fin, avec les 4 chiffres pour la profession. » (femme, 55 ans, UNIV)

« Les catégories traditionnelles sont le sexe, l’âge, la profession du chef de famille ou de la personne interrogée, le découpage régional et la nature des communes (rurales ou urbaines). De plus en plus, on réfléchit en terme d’évolution de l’échantillon : on regroupe par catégorie : populaire, classes moyennes (professions intermédiaires), classes supérieures et on observe l’évolution de leur regard. » (femme, 33ans, REVUE)

« Pour construire les échantillons, on découpe l’univers par le sexe, l’âge et la PCS principalement. » (femme, 33ans, REVUE)

Les quatre verbatim précédents montrent qu'il existe des catégories de base (ou traditionnelles comme dit l'enquêté de la revue) mobilisés dans de nombreuses enquêtes quelle que soit la profession. Les professionnels du classement utilisent fréquemment les outils INSEE de catégorisation que sont :

 l'âge (en nombre d'années, en tranche d'âge ou en génération)

 le sexe

 la catégorie socioprofessionnelle

 le niveau de revenu

 le niveau de diplômes

 la situation familiale (situation matrimoniale, composition du ménage, nombre d'enfants)

 la situation géographique (rural/ urbain, commune, canton, département)

 le type de logement

Les trois premiers critères (âge, sexe, CSP) sont les plus fréquemment usités, ils semblent être des outils de catégorisation préalables à toute étude plus pointue.

« La situation, l’âge, le sexe. Ce sont vraiment les données de base qui ne sont pas forcément pertinentes pour tout, mais je vais me poser la question de savoir si elles le sont. Et puis je vais voir si je pense à autre chose. » (femme, 34 ans, UNIV)."

Ces outils de base peuvent être utilisés à deux moments différents du travail d'enquête : ils permettent à la fois de cibler, au préalable, la population que l'on veut toucher ans avec l'enquête mais ils servent aussi à qualifier et à analyser la catégorisation obtenue in fine.

Au sein même de ces grandes catégories, des découpages sont effectués; en tranche d'âge : les 15- 25 ans, les Seniors par exemple pour ce qui est de la catégorie âge; en CSP différentes pour l'appartenance sociale :

« Bon, il y a aussi les segmentations par rapport aux catégories CSP du foyer, en gros ça donne les CSP+ et les CSP-. Ca c’est le quotidien, c’est la segmentation de base, quand on parle avec quelqu’un c’est ça, dans les études d’audience, c’est ces segmentations qu’on utilise. » (femme, 33ans, REVUE)

La catégorisation socio professionnelle permet de déterminer un niveau social. Le Marketing utilise les CSP de façon tranchée en réinterprétant les critères de l'iNSEE :

« Les CSP + : C’est un critère de l’INSEE, ce sont les célibataires qui ont un revenu de plus 15000, 20000 pour les couples, je crois. Je ne sais plus la fourchette exacte. » (femme, 34 ans, ETU).

Cet enquêté s'intéresse aux CSP+ (opposées aux CSP–) qui jouissent d'un certain pouvoir d'achat.

Les grandes variables socio-démographiques ne sont pas uniquement descriptives, elles sont aussi explicatives. D'abord des corrélations existent entre elles.

« On utilise les CSP. Mais elles sont faites d’après quels critères ? si c’est d’après la profession, le découpage cadre sup, etc., qu’est-ce que ça m’apprend ?Dans la mesure où on suppose que les CSP reflètent aussi le capital culturel de la personne, il est important pour nous d’en tenir compte. Ça dépend de l’étude mais il est important pour nous d’avoir des gens qui sachent s’exprimer, qui aient des opinons sur certains sujets, les catégories réputées plus à même de nous aider que le pauvre ouvrier de base ou la mère au foyer. Si on prend en compte le critère niveau de revenu ça joue un rôle dans la mesure où certains produits ou services s’adressent à des populations très ciblées et où le critère revenu est fondamental » (homme, 28 ans, ETU)

La corrélation la plus forte est celle existant entre CSP, niveau de diplômes et niveau de revenu. En effet, les CSP sont le reflet du capital économique et culturel des individus. Cela permet de définir des groupes sociaux. Les CSP comme le niveau de diplôme et de revenu

permettent de définir une position sociale. Ces outils permettent d'expliquer un certains types de pratiques culturelles ou de consommation, elles deviennent des variables explicatives quand elles sont liées à d'autres indices de catégorisation.

«Un autre type de catégorisation c’est ce que je t’ai dit tout à l’heure : revenu, profession, diplôme, situation matrimoniale. Est-ce que c’est une catégorisation sociale d’avoir deux enfants ? C’est sûr que ça va avoir une influence sur les pratiques de consommation. L’âge des enfants aussi.» (homme, 28 ans, ETU).

Ici, l'enquêté considère que la catégorisation sociale déterminée à partir des outils de catégorisation traditionnels que sont le niveau de revenu, la profession (c'est-à-dire la CSP), le diplôme, la situation familiale détermine en partie les pratiques de consommation. Ces outils cumulés permettent donc de définir des consommateurs types.

Les enquêtés expriment souvent clairement l'intérêt d'utiliser ces outils de catégorisation de base afin de définir et de qualifier la population de leur étude.

« On se sert principalement des découpages par sexe, âge et PCS parce que nous disposons de sources officielles qui garantissent la représentativité des échantillons ! On utilise les données de l’INSEE, des choses qui existent à l’extérieur ! On ne va pas créer des nomenclatures !» (homme, 34ans,SOND)

« On utilise des indices comme l’âge, le sexe, la catégorie socioprofessionnelle, le niveau des revenus, le niveau de diplômes. On utilise les catégories employées par la plupart des instituts de sondage, par l’INSEE et on les utilise parce que ça rend les comparaisons plus faciles qu niveau national » (homme, 49 ans, ETU)

Ainsi utiliser les nomenclatures INSEE permet un gain de temps (ne pas avoir à créer de nomenclatures ad hoc), une garantie de représentativité car la méthode statistique de l'INSEE est reconnue et jugée globalement fiable. De plus ces nomenclatures sont aussi utilisées par les instituts de sondage ce qui facilite une comparaison entre les différentes études tant au niveau national qu'au niveau international.

« On les utilise parce que ça rend les comparaisons plus faciles au niveau national. Après, on est en train de travailler sur un eurobaromètre qui est mis au point par EUROSTAT, un organisme qui est l’équivalent de l’INSEE au niveau européen. Mais il y a une spécificité des Français dans le domaine des études sur les pratiques culturelles : on prend en compte plus d’indicateurs que la plupart des pays européens» (homme, 49 ans, ETU)

Néanmoins les comparaisons internationales demeurent relatives et difficiles à mener car les indicateurs utilisés ne sont pas les mêmes : notamment le niveau de diplôme est constitué de manière nationale suivant les cursus d'études supérieures existant dans le pays. Il est donc difficile d'harmoniser les outils de catégorisation; un institut s'y emploie, il s'agit d'Eurostat qui travaille à l'élaboration d'un "eurobaromètre", c'est-à-dire d'une enquête au niveau européen portant sur les pratiques et les opinions. Dans le verbatim précédent, l'enquêté explique que ce qui complique la comparaison n'est pas uniquement le manque

d'harmonisation des indices mais aussi le nombre de variables utilisées pour analyser un phénomène donné, or les Français auraient tendance à multiplier les variables à prendre en compte (donc supposées explicatives) dans l'analyse d'un phénomène.

« Il y a quand même une universalité des outils qui fonctionne bien parce qu’ils permettent la référence et la comparaison avec d’autres études. Mais ça peut arriver que ça ne rentre pas dans la classe.»

(homme, 34ans,SOND)

Pour synthétiser, l'intérêt de l'utilisation des outils de catégorisation de l'INSEE réside dans leur "universalité" (même si celle-ci demeure relative et limitée ) qui permet des comparaisons, des économies de temps et de construction de l'étude tout en apportant un gage de scientificité car ces nomenclatures sont reconnues par tous. Ce qui n'empêche pas la réflexion sur leur définition : ainsi la définition des PCS est réactualisée de temps à autre et sa pertinence réinterrogée, comme nous le verrons ultérieurement.

« Il y a toujours les découpes classiques qui sont âges, CSP, bidule etc, ça c’est pour repérer les gens et ça on en a besoin parce que…Essentiellement pour par exemple…Nous pour communiquer auprès des gens, il faut qu’on puisse les toucher. Pour les toucher, il faut qu’on sache les repérer et savoir où ils sont. Donc généralement, on essaye de toujours avoir des choses qui soient repérables » (homme, 40 ans, MKG)

Les variables socio démographiques permettent de partir du connu, donc d'effectuer sans trop de difficulté le repérage de la population à analyser. Ce qui est un atout tant dans la mise en place de l'étude en terme de gain de temps et de facilité de mise en œuvre mais aussi dans la communication autour de l'enquête : cela permet de partager des références communes avec les commanditaires, le public et les collègues : tout le monde a une idée de ce qu'est l'âge, le sexe, la catégorie sociale, etc..

« Donc, en fait, on part de catégories déjà établies pour élargir, et que tout le monde s’y intéresse.»

(femme, 27 ans, POL)

Partir de ces grandes variables déjà établies permet grâce à un langage commun de communiquer autour de l'enquête et d'y intéresser le plus grand nombre. Mais au-delà du passage obligé que constitue la mobilisation d'outils classiques de catégorisation reconnus comme quasiment universel, enfin tout du moins en France, il s'avère le plus souvent nécessaire d'affiner les catégories établies par la combinaison de variables classiques avec d'autres variables, dépendantes du sujet d'études.

VI.2.b D'autres outils de catégorisations : « après