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Zoom sur la prise en charge des personnes ayant subi un traumatisme crânien et cérébrolésées

Histoire et diagnostic

du 18 mai 2006 et 26 mars 2007 sur les Contrats pluriannuels d‟objectifs et de moyens (CPOM)

2.3. Zoom sur la prise en charge des personnes ayant subi un traumatisme crânien et cérébrolésées

Chaque année, 155 000 personnes subissent un traumatisme crânien et parmi elles, 8 500 sont des traumatisés graves avec des séquelles invalidantes. Parmi ces dernières, se trouveront les états végétatifs persistants et les états pauci-relationnels présentant une situation de

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Nous aurions pu aussi choisir les personnes ayant un handicap d‟origine psychique, étant donnés l‟importance de la population concernée, les enjeux de coordination dans ce domaine et les parallèles possibles avec les personnes atteintes de la maladie d‟Alzheimer. Mais la prise en charge des ces personnes est un sujet en soi et trop complexe pour être abordé dans le temps imparti à ce rapport. On peut indiquer toutefois, au passage, que des travaux ont été conduits sur la coordination des soins pour les personnes en situation de handicap psychique : voir notamment l‟article de Petitqueux-Glaser et al. (2010), ainsi que les actes du « Colloque Handicaps d‟origine psychique : Une évaluation partagée pour mieux accompagner les parcours des personnes » organisé par la CNSA le 23 mars 2009.

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dépendance quasi-totale. Mais l‟état de gravité étant établi à partir d‟un score clinique lié au coma et à plusieurs signes codifiés de la gravité médicale, il n‟est pas toujours prédictif des conséquences en terme de handicap pour la personne. Ainsi, même parmi les personnes considérées comme traumatisées légères, environ 20% pourront avoir des troubles durables de type cognitifs et comportementaux, pas toujours faciles à caractériser et souvent méconnus de la plupart des soignants et du monde médico-social. La situation de handicap de ces personnes est alors souvent complexe (évolutivité dans le temps, handicap aux multiples facettes avec association d‟un handicap physique, cognitif, psychique, contexte familial très perturbé (majorité d‟adultes jeunes) et réinsertion socio-professionnelle difficile pour les patients pour lesquels les déficits cognitifs et les troubles comportementaux demeurent. La prise en charge et l‟accompagnement qui en résultent, nécessitent la plupart du temps de multiples intervenants qu‟il faut coordonner dans le temps. Elle peut faire penser à la situation de certaines personnes atteintes de la maladie d‟Alzheimer. Ceci nous permettra par ailleurs plus facilement de faire des comparaisons sur la coordination dans le cadre de la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d‟Alzheimer et de celle des personnes ayant subi un traumatisme crânien. De plus il se trouve qu‟une mission vient d‟être confiée par les ministres au Professeur Pradat-Diehl, médecin de médecine physique et de réadaptation à l‟hôpital de la Salpêtrière, pour faire un bilan de la prise en charge des personnes ayant subi un traumatisme crânien et faire des propositions pour un nouveau plan. Il nous a paru intéressant de bénéficier de ce bilan et de pouvoir observer « en temps réel » la manière dont une nouvelle politique publique était en train de se concevoir.

Nous n‟avons trouvé que très peu de travaux de recherche documentant la prise en charge de ces personnes et en particulier la question de l‟organisation de cette prise en charge et les problèmes qu‟elle soulève24

. Pendant longtemps, il y a eu carence de structures permettant de proposer des solutions adaptées aux personnes porteuses de séquelles neuro-psychologiques. Ce sont les familles de traumatisés crâniens, réunies notamment au sein de l‟union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et cérébrolésés (UNAFTC) et quelques professionnels militants qui se mobilisent pour créer des structures d‟accueil associatives. C‟est le cas par exemple de l‟ensemblie d‟Arceau Anjou à Angers, un ensemble d‟établissements pour personnes cérébro-lésées et handicapées physiques créés à partir de 1984, à l‟initiative d‟un mouvement associatif conduit par le Professeur Truelle de l‟hôpital de Garches. Cet ensemble a été repris plus récemment par la Mutualité Française et intègre, depuis 2006, un SAMSAH auquel nous nous sommes intéressées25. Peu à peu, les pouvoirs publics et les professionnels des secteurs sanitaires et médico-sociaux ont pris conscience de ces difficultés et cherché à aménager des dispositifs adaptés.

En 1990, c‟est la création de France Traumatisme Crânien (FTC), association de professionnels « au service du traumatisé crânien et de sa famille ». Initialement organisée autour de professionnels de la santé engagés dans l‟identification des besoins et l‟amélioration

24 Le Professeur Azouvi de l‟hôpital de Garches conduit actuellement une enquête consistant à suivre une

cohorte de patients traumatisés crâniens sur 3 ans, afin de mieux connaître la filière de soins, d‟évaluer leurs déficiences, leurs limitations d‟activités, leur restriction de participation sociale, leur qualité de vie et leur évolution au fil du temps et d‟évaluer aussi la qualité de vie de leurs proches. Les résultats devraient être rendus disponibles prochainement.

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des solutions à apporter aux personnes traumatisées crâniennes, elle s‟enrichit ensuite de professionnels issus d‟horizons différents et concourants tous à accompagner cette situation de handicap particulière. Elle œuvre en partenariat étroit avec l‟UNAFTC avec laquelle elle a signé une charte de coopération en 2006. Elle est force de proposition vis-à-vis des pouvoirs publics et c‟est par son insistance aux côtés de l‟UNAFTC, que la mission interministérielle pour l‟élaboration d‟un plan d‟action en faveur des traumatisés crâniens et des blessés médullaires sera initiée au printemps 2010.

A notre connaissance, le premier rapport qui fait date dans ce domaine est le rapport IGAS de Lebeau de 1995qui souligne les problèmes d‟articulation entre le sanitaire et le médico-social et les manques de l‟offre dite « d‟aval » quasi inexistante. Il met aussi en évidence la nécessité d‟améliorer l‟évaluation des besoins des personnes, leur orientation, leur suivi et leur intégration sociale et professionnelle. Il propose de mettre en place des conventions entre les structures d‟insertion, l‟AGEFIPH, les collectivités territoriales et la direction départementale du travail.

A la suite de ce rapport, la circulaire du 4 juillet 1996 sur le traumatisme crânien (dite circulaire Bauduret) met l‟accent sur la nécessité de privilégier l‟insertion sociale et professionnelle de ces personnes. Programmée sur 5 ans (1996-2000), elle permet la création des Unités d‟évaluation, de ré-entraînement et d‟orientation sociale et professionnelle (UEROS) à titre expérimental au plan régional26, ainsi que la création d‟un certain nombre d‟établissements et services spécifiques. Elle est complétée en 2004 par une circulaire relative à la filière de prise en charge des blessés crâniens et médullaires. Ces UEROS, sorte de centres de ressources, ne sont complètement institutionnalisés et définis qu‟en 2009, dans le cadre d‟un décret fixant leur organisation et leur fonctionnement. Sont ainsi précisés, dans ce décret, les rôles qu‟elles ont à joué pour améliorer la continuité des parcours des personnes

entre le sanitaire, le médico-social et le secteur professionnel dans le cadre d‟un

accompagnement pluridisciplinaire et global. Pour les personnes en état végétatif chronique (EVC) ou en état pauci-relationnel (EPR), la circulaire du 3 mai 2002 crée des unités de soins spécifiques mais qui doivent être inscrites « à la fois dans un contexte de filière et dans un réseau ». La circulaire mentionne : « Enfin, les unités d'accueil pour personnes en EVC ou en EPR s'inscriront chaque fois que ce sera possible dans un réseau de prise en charge des personnes cérébro-lésées, ou plus spécifiquement des traumatisés crâniens ou des personnes en EVC ou en EPR. Ce réseau pourra regrouper des composantes sanitaires et médico- sociales. Les différentes composantes du réseau (services de prise en charge initiale, SAMU, réanimation, neurochirurgie, services de suite, MPR, unité d'accueil spécifique, structures médico-sociales d'aval) peuvent avoir intérêt à formaliser leurs liens par conventions, voire à mettre en place un dossier partagé. Ainsi seront favorisées la continuité des soins, la régulation des admissions et des transferts, la formation des personnels, l'élaboration et la diffusion de bonnes pratiques professionnelles, l'évaluation des structures et des services rendus. »

La circulaire du 18 juin 2004 relative à la filière de prise en charge sanitaire, médico-sociale et sociale des traumatisés crânio-cérébraux et des traumatisés médullaires, très complète,

26 Voir en annexe l‟encadré sur les UEROS.

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propose aussi l‟identification de référents successifs pour la personne handicapée : médecin référent de médecine physique et de réadaptation, référent au sein de l‟équipe pluridisciplinaire du service de soins de suite et de réadaptation, puis référent au sein du SAMSAH, du SAVS ou de l‟équipe mobile. Elle propose aussi la mise en réseau formalisé de tous les établissements et services impliqués dans la prise en charge de ces personnes. Il est frappant de constater que cette notion de réseau est une sorte de MAIA avant l‟heure ! Si tout semble avoir été prévu par le législateur, cependant, il semble que ce ne soit hélas pas si simple et que les évaluations de ces politiques publiques ne soient pas à la hauteur de leurs promesses. C‟est ce que nous allons développer maintenant, en essayant de comprendre pourquoi les résultats ne sont pas au rendez-vous.

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