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Des efforts pour mettre en cohérence l’action de ces différentes structures

dépendance au sentier, et décalage entre prescrit et réel

C. Coordonner les structures de coordination : vers les méta-réseaux ?

2. Les méta-réseaux, la condition d’une meilleure intégration des services

2.2. Des efforts pour mettre en cohérence l’action de ces différentes structures

Le premier problème soulève la question de l’intégration des services. Cette question a été théorisée depuis une dizaine d‟années. Leutz (1999) propose 3 niveaux correspondant à une intégration plus ou moins importante allant du niveau le moins fort dit de « liaison », au niveau de « coordination » puis au niveau d‟ « intégration complète ». Pour lui les niveaux sont adaptés par type de population. Ainsi le niveau de « liaison » est adapté pour des personnes ayant des handicaps légers à modérés qui peuvent ainsi être identifiées au sein de la population générale. Le niveau de « coordination » est pertinent pour des personnes recevant des soins de deux types de service au moins en simultané ou en séquentiel. Le niveau « intégration complète » correspond au système où toutes les compétences multidisciplinaires sont regroupées au service de populations avec des besoins complexes, souvent dans un souci de désinstitutionalisation. Comme on le verra de façon plus détaillée dans la deuxième partie de ce rapport lors de l‟analyse de la fonction de gestionnaire de cas, de multiples essais d‟intégration des services impliqués dans la prise en charge des personnes en perte d‟autonomie ont pu être réalisés dans de nombreux pays mais l‟OMS, en 2008, soulignait qu‟il y avait sans doute plus de politiques en faveur de l‟intégration des services que de réelle mise en place de cette intégration.

Comme cela a été présenté dans la partie historique, les différents types d‟établissements et de services d‟accueil des personnes âgées en perte d‟autonomie ont été créés successivement, sans nécessairement prendre le temps de définir leurs rôles respectifs et surtout leurs modes d‟interaction. L‟offre, initialement restreinte à l‟hôpital, aux maisons de retraite et aux aides à domiciles, s‟est ainsi étoffée par une diversification des services hospitaliers, la création des maisons de retraite médicalisées, des services d‟aide à domicile, des SSIAD, des consultations mémoires, des structures de répit, etc. Le positionnement respectif de ces différentes offres n‟a pas été toujours clairement défini ni leur mode d‟interaction. Comme décrit dans notre historique, sont apparus en parallèle tous les dispositifs de coordination, coordination gérontologique, réseau de soin gérontologique, CLIC, équipe APA, équipe mobile gériatrique qui se sont surajoutés les uns aux autres sans que soit bien défini qui coordonnait quoi. On a donc pu observer l‟apparition simultanée d‟une multiplicité d’offres de service avec une

multiplicité de dispositif pour les coordonner.

Les premiers efforts de mise en cohérence ont été de préciser dans des textes règlementaires (des circulaires pour la plupart), le rôle respectif d’un dispositif de coordination par

rapport à un autre comme on l‟a vu pour les réseaux et les CLIC.

L‟étape suivante a consisté à définir la notion de filière. Frossard (2002) définit la logique de

filière par : « Les trajectoires des personnes sont prédéfinies et légitimées en fonction de l‟état

des connaissances scientifiques, soit par l‟expérience professionnelle, soit par des logiques règlementaires ou tarifaires ». Les offres de service s‟enchainent les unes après les autres de manière prédéterminée. La cohérence s‟organise autour de l’offre. Pour le Pr Pradat Diehl, le

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sanitaire est organisé en filière. La circulaire de 200448 sur la prise en charge des traumatisés crâniens décrit toutes cette filière avec l‟enchaînement entre les services d'hospitalisation aiguë, les structures de médecine physique et de réadaptation, l'hôpital de jour, l'hospitalisation à domicile et les secteurs de psychiatrie. Du côté des personnes âgées de la même manière, c‟est la circulaire de 200749

qui définit la filière gériatrique.

Il existe une autre logique, celle de l‟accompagnement. Frossard (2002) en donne la définition suivante : « la trajectoire est un parcours effectué par une personne ou un patient dans un dispositif d‟offre de service ou de soins ». Ce dernier « se caractérise par des passages d‟un service à l‟autre et par des ensembles d‟aides et de soins ». La cohérence dans ce cas là est autour du besoin de la personne. Pour le Pr Pradat Diehl, on a effectivement pour l‟aval du parcours des personnes, c'est-à-dire quand elles sont dans le champ médico-social ou social plus une plate-forme d’offres, qui permet de proposer plusieurs solutions pour un patient, qui peut avoir des besoins successifs qui évoluent dans le temps.

On peut repérer deux philosophies différentes voire concurrente entre le sanitaire et le médico-social. Martinez (2002) suggère qu'une des difficultés pour la coordination est la divergence idéologique entre les approches sanitaire et sociale. Pour les acteurs du sanitaire et en particulier de l'hôpital, la dépendance s'exprime par une causalité linéaire entre la déficience physique ou psychique, l'incapacité fonctionnelle et le désavantage social (modèle de Wood). C‟est ce caractère linéaire qui est à la base de la notion de filière. Le médico-social apparaît donc comme il écrit comme un pis-aller quand l'intervention médicale est arrivée à ses limites (impuissance momentanée de la science). Pour les représentants du secteur social, l'analyse est inverse et met en avant les déterminants environnementaux et l'hostilité des milieux. Cette approche plus systémique et évolutive nécessite alors des accompagnements personnalisés et adaptés à l‟environnement de la personne, ce que peut plus facilement permettre une plate-forme service. De fait ces approches sont complémentaires et le problème est quand elles s'excluent mutuellement. Il préconise une approche empirique de terrain avec des espaces pour des pratiques coordonnées et des échanges culturels. De fait certaines structures peuvent jouer un rôle pivot, comme les services de réadaptation fonctionnelle ou de gériatrie de moyen séjour en permettant de croiser les approches sanitaires et médico-sociales. Sur un territoire, il conviendra donc de s‟assurer que l‟offre proposée comprend à la fois tous les éléments de la filière (et dans les bonnes proportions)50 mais aussi une palette d‟offres suffisante pour couvrir toutes les situations de perte d‟autonomie ou de handicap et proposer des choix aux personnes et à leurs familles.

On voit donc émerger le besoin d‟un chef d’orchestre qui pourra sur ce territoire, en lien avec toutes les structures d‟accueil et dispositifs de coordination, faciliter le processus d‟explicitation des offres de service, de prise de conscience des possibilités et des limites de

48 Circulaire DHOS/SDO/01/DGS/SD5D/DGAS/PHAN/3 B n° 2004-280 du 18 juin 2004 relative à la filière de

prise en charge sanitaire, médico-sociale et sociale des traumatisés crânio-cérébraux et des traumatisés médullaires

49 Circulaire DHOS/02 n° 2007-117 sur la filière de soins gériatriques dans le cadre du PSGA

50 On observe parfois des manques de places dans des structures dites d‟aval, ce qui amènent les personnes à

rester dans des services d‟amont : par exemple, quand il n‟y a pas de place dans des établissements médico- sociaux, des personnes peuvent rester des mois à l‟hôpital.

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chaque structure et de leur complémentarité ; aider à l‟orientation des personnes vers ces différents services en fonction de leur besoin ; faire remonter à qui de droit les besoins non couverts pour faire évoluer l‟offre de service ; aider au calibrage entre les soins fournis par le secteur sanitaire, par le secteur médico-social et/ou social et par les familles51.

Toute la difficulté est de garder suffisamment de souplesse à ce système pour éviter, comme indiqué par Ennuyer (2002) dans une critique des CLIC, un risque d'enfermement des personnes vieillissantes, par une trop grande formalisation et des procédures trop rigides risquant de déposséder les personnes du peu de choix qui leur reste. Il relève ainsi un extrait de la circulaire DGAS/AVIE/2C du 18 mai 2001 op.cit., cahier des charges national pour 2001 du dossier de labellisation d'un centre local d'information et de coordination gérontologique : « la coordination ne peut subsister dans l'informel ». Lui préfère la formule du réseau, plus souple et informelle.

Nous proposons de décrire comment, dans le cadre de l‟expérimentation de la MAIA 13, une bonne coordination entre les différents dispositifs se met concrètement en place. Nous essaierons alors de dégager les facteurs qui concourent au succès de cette opération ainsi que les limites qui ont pu apparaître. Nous examinerons aussi comment les situations dites

orphelines ont plus de chance de recevoir une réponse appropriée dans le cadre de la MAIA

par rapport à ce qui se faisait auparavant.

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