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Dans le même temps, et soutenues par la Commission européenne qui engage son projet « Villes durables »134

, les collectivités territoriales s’engagent dans la mise en œuvre de politiques urbaines durables dès les années quatre-vingt-dix à travers la première conférence des Villes durables à Aalborg (Danemark) qui se tient le 27 mai 1994 et qui conduit à la rédaction de la charte des villes durables dite Charte d’Aalborg. Rappelant préalablement le rôle historique qu’ont joué les villes européennes, organisation de base des sociétés et des Etats, rappelant également le poids culturel, économique et social qu’elles représentent (quatre-vingts pour cent de la population européenne vit dans des zones urbaines) et les enjeux environnementaux qui se présentent face à elles, la charte constitue un acte d’engagement de ces villes à fonder un socle de durabilité à travers différents axes d’action :

- à l’échelle de chacune des villes, la mise en œuvre de plans locaux de durabilité ; - la négociation comme méthode de résolution des problèmes ;

- la mise en œuvre d’une économie urbaine durable s’appuyant sur la conservation et la croissance du capital naturel ;

- la mise en œuvre d’une justice sociale par des programmes d’action sanitaire, l’accès à l’emploi et au logement et en intégrant à la protection de l’environnement les exigences sociales essentielles de la population ;

- l’aménagement durable du territoire par la rénovation des centres-villes, l’équilibre des flux entre villes et campagne… ;

- la réduction des besoins de mobilité et le recours aux transports respectueux de l’environnement… ;

- la responsabilité à l’égard du changement climatique notamment par la réduction des émissions de gaz à effet de serre… ;

- la prévention de l’intoxication des écosystèmes ;

- l’autogestion au plan local conférée aux villes en vertu du principe de subsidiarité ;

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Ce programme « Villes durables » s’ouvre par la publication en juin 1990 du Livre vert sur l’environnement urbain, rapport commandé par Carlo Ripa Di Meana, Commissaire européen pour l’environnement. Ce diagnostic urbain, réalisé à l’échelle européenne, souligne le caractère commun des problématiques des villes européennes, la nécessité d’une coopération et d’échanges d’information ; il préconise la création d’un groupe d’experts indépendants sur l’environnement urbain. Le Conseil européen adopte en janvier 1991 une résolution approuvant le Livre vert et la création du groupe d’experts. Ce dernier lance en 1993 le programme « Villes durables » auquel un certain nombre de villes vont s’intéresser et proposer d’organiser la première rencontre à Aalborg. Le groupe remet en octobre 1994 son premier rapport « Villes durables européennes » à la Commission européenne qui souligne la nécessité d’une « application du concept de durabilité en zone urbaine ». Le rapport fait un certain nombre de préconisations en matière de politiques urbaines. La commission lance la même année le programme URBAN visant à soutenir financièrement les projets novateurs dans ce domaine.

- les citoyens, protagonistes de la durabilité, et la participation collective à travers l’élaboration des Agendas 21 et supposant la coopération avec tous les acteurs concernés ;

- la mise en œuvre des instruments de la gestion urbaine orientée vers la durabilité et s’appuyant sur des outils de surveillance, d’évaluation permettant de concevoir et d’orienter les stratégies.

Lancée en partenariat avec la Commission européenne, l’International Council for Local Environnemental Initiatives (I.C.L.E.I.) et le réseau des villes, la charte aboutit à l’engagement de trente-huit Etats européens et 1 300 collectivités.

Soixante ans après la Charte d’Athènes du mouvement moderne initié en France par Le Corbusier et par le mouvement du Bauhaus135, la charte d’Aalborg marque le renversement de

perspectives et retourne tous les fondamentaux qui avaient été introduits par cette vision de l’urbanisme moderne :

- la décontextualisation de l’architecture moderne laisse place à un souci d’adaptation au milieu, de prise en compte et de mise en valeur des éléments culturels, écologiques, paysagers… ;

- la fin du principe de la « table rase » au profit d’une redécouverte identitaire supposant une meilleure prise en compte des formes urbaines existantes ;

- la mixité fonctionnelle et sociale en contrepoint du zonage sectoriel ;

- la lutte contre l’étalement urbain là où le mouvement moderne cherchait à étendre les limites de la ville notamment par le développement des infrastructures routières ; - un urbanisme participatif fondé sur la concertation, voire la co-construction face à

l’urbanisme des experts.

Cette première conférence est suivie deux autres conférences en 1996 à Lisbonne et en 2000 à Hanovre. La Conférence de Lisbonne, qui s’est tenue du 6 au 8 octobre 1996, vise à passer à la mise en application des principes adoptés dans la Charte de 1994, notamment par la réalisation des Agendas 21 du sommet de Rio et des Agendas Habitat issus de la Conférence d’Istanbul Habitat II. L’adoption du document « De la charte à la pratique » marque l’engagement des villes européennes dans la mise en œuvre du « plan d’action de Lisbonne ». Cette conférence est marquée par une participation record de mille participants et

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Les protagonistes majeurs de ce mouvement furent également les architectes Walter Gropius, Auguste Perret, Ludwig Mies van der Rohe, Oscar Niemeyer…

231 représentants d’autorités locales mais aussi par l’ouverture aux villes européennes hors union européenne et notamment les villes du sud de la Méditerranée, du nord de l’Europe, d’Europe centrale et orientale. La volonté de passage à l’action est marquée lors de cette conférence par la remise des Prix européens des villes durables : Dunkerque (France), La Haye (Pays-Bas), Graz (Autriche), Leicester (Royaume-Uni), Albertlund (Danemark) et des certificats de distinction aux villes françaises de Rennes et Montpellier. L’opération reconduite en 1997 distinguera les villes de Heidelberg (Allemagne), Stockholm (Suède) et Calvia (Espagne).

La conférence d’Hanovre qui se réunit du 9 au 12 février 2000 rassemble 1 400 personnes, dont 250 responsables municipaux de 36 pays européens. Faisant suite à un cycle de quatre conférences régionales (Turku en Finlande, Sofia en Bulgarie, Séville en Espagne et La Haye aux Pays-Bas), cette troisième conférence réaffirme le rôle essentiel des villes (130 millions de citoyens sont concernés par la Campagne des villes durables européennes initiée à Aalborg) et la nécessité de mettre en œuvre des outils d’évaluation et de mesure des politiques urbaines. Les maires et élus réaffirment également l’importance de leur rôle et sollicitent le soutien des instances européennes dans leurs actions à travers leur document intitulé « l’appel

de Hanovre lancé par les maires européens à l’aube du XXIe

siècle ». 250 maires de 36 Etats

européens s’engagent dans ce document à mettre en œuvre les actions nécessaires pour assurer une durabilité de leurs politiques urbaines mais sollicitent également l’appui des instances européennes pour atteindre ces objectifs.

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