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Comme évoqué précédemment, les espaces agricoles occupent une place spécifique dans la question de la consommation foncière liée à l’étalement urbain. Si historiquement, le développement spatial de la ville s’est effectué au détriment des espaces agricoles environnants, qui par ailleurs assuraient une vocation nourricière directe des populations urbaines, une lecture plus contemporaine du phénomène met en exergue deux aspects singuliers : d’une part, l’accélération de cette consommation au cours des cinq dernières décennies, d’autre part, l’évolution de la place de ces espaces dans leur fonction initialement nourricière vers des fonctions agro-industrielles, paysagères, récréatives et plus récemment écologiques. Sur le premier point, toutes les études menées depuis plusieurs années témoignent sans conteste de la consommation exponentielle des espaces agricoles depuis les années soixante207

. Sur le second point, la période des années soixante constitue également un basculement dans le rapport qu’entretiennent les espaces agricoles avec la ville : la modernisation de l’agriculture fait évoluer ces espaces d’une fonction nourricière à une fonction d’espace de production agro-industrielle déconnectée du contexte économique local. Au même titre que les documents d’urbanisme affectent du foncier à l’habitat, aux équipements, aux infrastructures, le territoire agricole devient une surface foncière de production agricole. Dans un contexte d’enjeu économique déséquilibré au profit du

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Depuis 1960, date du maximum d’extension de sa Surface Agricole Utile (34,5 millions d’ha), et jusqu’en 2007, la France a perdu 5,1 millions d’hectares de terres agricoles, soit une perte moyenne de 111 000ha par an (Source : Statistique agricole annuelle). Selon les données de l’enquête TERUTI-LUCAS, la perte de poursuit à une rythme de 62 000 ha/an entre 1988 et 2000, 74 000 ha/an entre 1989 et 2007, 98 000 ha/an entre 1989 et 2007.

développement résidentiel (et des activités économiques industrielles et tertiaires) et considérés abusivement comme des réserves foncières mobilisables pour répondre au besoin de développement spatial de la ville, les espaces agricoles ont été particulièrement utilisés à ces fins à partir des années quatre vingt dix, période d’émergence de la mise en jachère d’une partie des terres agricoles du fait de la crise agricole. En effet, la Politique Agricole Commune (P.A.C.)208

étant confrontée à une surproduction agricole, une part importante des surfaces agricoles est mise en jachère moyennant la mise en œuvre d’aides financières par l’instauration des mesures agro-environnementales. Cette mesure conjoncturelle contribue à donner l’illusion d’un « trop plein » de terres non utilisées et donc inutiles pour l’agriculture facilitant la justification à cette consommation d’espace au profit de l’étalement de la ville. Mais il s’agit bien d’une illusion car les espaces consommés ne sont pas imputables au simple abandon de terres agricoles209 (estimé à environ 49 000 ha/an) qui seraient ainsi récupérés au

profit du développement urbain mais bien à l’artificialisation de terres initialement occupées par l’agriculture. En effet, si le chiffre de 66 000 ha/an est communément retenu pour apprécier l’artificialisation des sols agricoles (période de référence 1992-2003), il conviendrait d’ajouter la part des friches et des landes converties en sols artificialisés estimée à 12 000 ha/an (avec des situations géographiques très contrastées selon le type d’agriculture et des contextes urbains où l’abandon s’inscrit d’abord dans une démarche de spéculation foncière).

Les sols agricoles cultivés et notamment les terres labourées sont bien le principal pourvoyeur des sols artificialisés (environ 80 %), artificialisation imputable pour 23 % à l’augmentation nette de la population (habitat), pour 7% aux infrastructures de déplacement, pour 50 % à une augmentation de la demande par habitant et pour 20% aux résidences secondaires210

.

208 Le mécanisme de « jachère » ou de « gel des terres » a été introduit pour la première fois en 1988-1989 ;

établi sur une base volontaire et contractuelle, le dispositif a été généralisé et rendu obligatoire par la réforme de la P.A.C. en 1992. Initialement instrument de régulation du marché, la mesure est désormais assortie d’objectifs environnementaux ; en 2007, la France comptait 1 500 000 ha de jachères dont 400 000 ha avaient été reconvertis en cultures industrielles (agro-carburant) et 1 100 000 ha de jachères agronomiques.

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Une terre dite abandonnée n’est plus utilisée par l’agriculture pour des raisons économiques, sociales ou autres. Elle évolue vers différentes formes selon les conditions pédoclimatiques : pelouses, landes, boisements spontanés… non comptabilisés dans la S.A.U. Ces espaces ont notamment contribué au fort développement des surfaces boisées constaté depuis les années quatre vingt mais sur des espaces abandonnés depuis longue date (landes de la fin du XIXe siècle) : 32 000 ha/an entre 1989 et 2007.

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POINTREAU Philippe, COULON Frédéric, 2009, « Abandon et artificialisation des terres agricoles »,

a) Le diagnostic

Introduisant le paragraphe consacré à l’agriculture « Intensification de l’agriculture et exode rural » par un rappel des orientations du S.D.A.U., le Schéma directeur de 1996 pose clairement les effets de « mitage » de l’espace rural du fait de l’absence de documents d’urbanisme :

« Le S.D.A.U. de 1976 réaffirme la vocation agricole de la région angevine : espace rural affecté pour l’essentiel à « l’agriculture protégée » ; définition de coupures agricoles ; refus du scénario « Angers sur Loire » (préservation des cultures intensives, des sites de qualité, développement possible de la voie d’eau…). Toutefois, l’espace rural n’est pas directement traité : l’extension des bourgs et des hameaux n’est pas délimitée ; la plupart des communes n’étant pas alors dotées de P.O.S., cela contribuera à l’ouvrir au mitage et plus généralement à la dilution de l’urbanisation ».

Ce phénomène ne porte pas pour autant atteinte à l’économie générale agricole qui, dès les années soixante, entre dans une profonde phase de mutation : pertes massives d’emplois agricoles, disparition de petites exploitations au profit du regroupement d’exploitations de plus de vingt hectares, exode rural…Les atouts agronomiques du territoire (grande diversité de sols et terroirs) permettent cependant de maintenir un fort dynamisme de l’économie agricole grâce notamment aux productions à forte valeur ajoutée : horticulture, maraîchage, cultures spécialisées…

Cependant, la pression urbaine sur les espaces agricoles situés aux portes de la ville d’Angers entrainera le transfert de ces activités vers la vallée de l’Authion reconvertie en vaste complexe maraîcher et horticole.

La crise agricole des années quatre-vingt remettant en cause les scénarii précédents (productivité, intensification…), de nouvelles voies sont explorées et énoncées dans le paragraphe intitulé « Recomposition des activités ». Un nouveau rôle est proposé au secteur agricole en lien avec la question des paysages, du tourisme vert et de l’environnement :

- « maintien d’un nombre suffisant d’agriculteurs avec reconnaissance de la double fonction (production et protection du milieu naturel, développement rural) ;

- essor d’activités non agricoles en milieu rural (tourisme « vert » en particulier) ».

A la date d’élaboration du S.D.R.A., l’économie agricole représente 7% des actifs ; deux secteurs, la viticulture et les cultures spécialisées, y représentent 30% des emplois

agricoles directs du territoire. Pour autant, la situation économique des différents systèmes agricoles occupant le territoire n’influe pas sur la pression urbaine et le mitage de l’espace :

- Les espaces de forte déprise agricole sont principalement les vallées (Loire, Louet, Basses vallées angevines) qui sont soumises aux inondations et ainsi considérées comme non urbanisables. Ces espaces feront par ailleurs l’objet de mesures agro- environnementales (O.G.A.F.) permettant le maintien d’une activité agricole dans le respect de la dynamique environnementale des milieux naturels ;

- Les espaces de polyculture/élevage occupant toute la moitié Ouest du territoire et qui sont soumis aux crises sanitaires et conjoncturelles du marché agricole ; la consommation foncière s’opère selon une logique d’extension des bourgs s’appuyant, au cas par cas, sur la situation des exploitations agricoles impactées ;

- Les espaces de cultures spécialisées situées sur un quart est et sur la Vallée de l’Authion qui résistent mieux à la consommation foncière, du fait, pour la vallée de l’Authion, de la contrainte majeure de l’inondabilité, pour les territoires de l’est, du poids économique des cultures spécialisées ;

- Les espaces de viticulture et céréaliculture du sud-est, qui malgré une distance relative plus importante du fait du franchissement de la Loire, sont soumis à une pression grandissante.

La place et le rôle de l’agriculture dans la préservation des paysages ainsi que sa capacité à résister face à l’étalement urbain ont été abordés dans le chapitre « Les questions pour demain », chapitre identifiant les risques d’évolution des paysages :

- Tentations d’extensions urbaines sur les sites attractifs de coteaux de bord de rivière ; - Même problématique sur les secteurs viticoles avec une interrogation sur leur capacité à résister à la pression urbaine ;

- Un développement de l’habitat diffus dans les territoires de cultures spécialisées lié à une logique de libération du foncier menée au cas par cas selon les opportunités offertes ;

- Une ouverture du bocage liée au maintien d’une logique d’intensification et de rationalisation des exploitations agricoles ;

b) Les options de développement

Absente en tant que telle de cette partie, l’agriculture n’apparaît qu’à travers la question du paysage que nous aborderons plus loin. En résumé, l’espace agricole se voit assigner un rôle de composante verte dans un projet de renforcement de l’armature paysagère :

- Par la protection de zones de contact entre ruralité et ville (confluence de la Maine et sa vallée) ;

- Par la gestion des paysages des Basses vallées angevines à travers les Opérations Groupées d’Aménagement Foncier (O.G.A.F.);

- Par la maîtrise du front urbain à travers la définition de coupures vertes ; - Par la gestion des structures végétales et en particulier du bocage.

Il est surtout intéressant de noter que la question centrale de la limitation de l’habitat diffus en secteur rural se limite à l’énoncé de la nécessité « d’une attention soutenue » renvoyant sa traduction aux P.OS.

c) Le parti d’aménagement

Les principes généraux précédemment cités sont repris en synthèse dans cette dernière partie où les espaces agricoles sont à nouveau évoqués dans leur participation à la constitution de la trame verte.

d) La mise en œuvre des options

Elles portent exclusivement sur la mise en œuvre des O.G.A.F. et de mesures agro- environnementales et ne concernent en ce sens que les vallées.

e) Remarques des Personnes Publiques Associées (P.P.A.) : la Chambre

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