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Les verbes de position statiques et les verbes de position dynamiquesdynamiques

3. La sémantique et l'utilisation des verbes de position suédoissuédois

3.2. Les verbes de position statiques et les verbes de position dynamiquesdynamiques

En suédois, les verbes de position pour ainsi dire cardinaux et antropomorphiques sont répartis dans deux groupes : les statiques et les dynamiques, s'alignant donc avec les relations spatiales dynamiques et statiques traitées ci-dessus sous les sections 2.5.1 et 2.5.2. Les premiers, qui sont intransitifs, (stå « être debout », ligga « être allongé, couché », sitta « être assis ») décrivent l'emplacement statique d'une personne, d'un animal ou d'un objet concret, alors que les derniers, qui sont transitifs, (ställa « mettre debout », lägga « allonger, coucher », sätta « asseoir ») décrivent le changement de localisation d'une personne, d'un animal ou d'un objet, c'est-à-dire qu'une personne les place quelque part. Voici encore une fois (voir le chapitre 2.5) les verbes de position suédois répartis sur leurs états respectifs.

a) statif – se trouver dans un état : stå (upp), ligga (ner), sitta (ner)

b) inchoatif – entrer dans un état : stå upp/ställa sig, ligga ner/lägga sig, sitta ner/sätta

sig

c) agentif/causatif – mettre dans un état : ställa, lägga, sätta

Rappelons qu'il existe un chevauchement de fonctions entre les verbes statiques et les verbes dynamiques dans le type inchoatif. Dans la construction inchoative, les verbes statiques doivent être suivis par un adverbe directionnel, c'est-à-dire une particule (un satellite, cf. Talmy, 2000b:79). Quant aux verbes dynamiques, ils se pronominalisent afin d'obtenir l'aspect inchoatif par le pronom réfléchi sig « se », ne s'appliquant que si la Figure est animée. Talmy (ibid:81) rappelle que pour les verbes statiques, seulement une entité est incluse dans l'action, comme le livre dans l'exemple suivant.

(3.7) Boken ligger där

livre.DÉF. être couché.PRÉS « Le livre se trouve/est là »

En revanche, dans les constructions agentives, il s'agit toujours de deux entités et deux référents, alors que dans les constructions inchoatives, il y a dans le modèle de lexicalisation (b/c) deux entités avec deux rôles sémantiques, mais un seul référent. Dans le modèle de lexicalisation (a/b), souvent prononcé sous forme d'impératif, seul une entité référente est combinée au verbe à l'état inchoatif. Dans les exemples 3.8 et 3.9 suivants, ce sont boken « le livre » et hon « elle » qui constituent cette entité référente, même lorsque la deuxième entité, dans l'exemple 3.9, représente la même personne que le sujet.

(3.8) Hon lägger boken där.

elle coucher.PRÉS livre.DÉF « Elle pose le livre là. »

(3.9) Hon lägger sig.

elle coucher.PRÉS se.PRON.RÉFL

« Elle se couche. »

(3.10) Ligg ner!

être couché.IMPÉR vers-le-bas ! « Couche-toi ! »

Le verbe pronominal lägga sig « se coucher » fait référence à une seule et même personne, puisqu'il s'agit d'une forme réfléchie. Le terme self-agentive forms (Talmy, 2000a:525ff) signifie que le pronom réfléchi dans ce genre de construction spécifie un objet physique, c'est-à-dire le corps entier de l'agent. Cette partie (entière) du corps prend la fonction de Figure lors d'un simple événement de mouvement, provoqué d'une façon intentionnelle par l'agent. Les verbes dynamiques suédois avec un aspect inchoatif sont surtout utilisés en combinaison avec une Figure animée, ainsi que les verbes statiques inchoatifs qui expriment un mouvement. Néanmoins, nous allons trouver des exemples dans notre corpus des Figures inanimées qui sont encodées par un verbe statique suivi par une particule directionnelle. Par contre, il ne s'agira plus d'un aspect inchoatif et donc plus d'un mouvement, mais de l'aspect statif, et le satellite ne fait que renforcer l'extension verticale (upp) ou horizontale (ner), comme dans l'exemple ci-dessous extrait de nos données.

3.11 En röd bok som ligger ner i

un rouge livre qui être couché.PRÉS vers le bas dans

en bokhylla. SP017-SLMADK008

une étagère

« Un livre rouge qui est couché dans une étagère. »

Les verbes agentifs sont donc les dérivés causatifs des verbes de position statifs et leur parenté se remarque déjà dans leurs formes. Il s'agit d'un phénomène très courant dans les langues germaniques et slaves (Viberg, 2006:118). Les verbes statifs sont intransitifs et les agentifs sont transitifs, et cette manière de dériver morphologiquement des verbes causatifs et transitifs à partir d'un verbe intransitif est un procédé qui s'est montré très productif en suédois. En général, il s'agit surtout de changer la voyelle dans la syllabe accentuée, comme dans les

verbes de position (ex. ligga – lägga)13. Ce changement de voyelle n'est plus productif dans la langue standard aujourd'hui.

Le verbe de position hänga « être pendu / suspendre » est exclu de cette étude, car non antropomorphique. En effet, la position pendue n'appartient pas aux positions cardinales de l'être humain (cf. Lemmens, 2002a, 2005a ; Newman, 2009). Nous avons noté que l'aspect inchoatif peut être rendu par les deux types de verbes (sitt ner! / sätt dig! « assieds-toi ! ») (cf. Newman, 2002a:4). Mais en règle générale, il est possible de classer les verbes en deux types, avec des traits sémantiques différents. Pour les verbes statiques, les traits sont les suivants :

OBJET + LOCALISATION + POSITION. Les verbes dynamiques contiennent davantage de traits sémantiques : AGENT + CAUSE + OBJET + MOUVEMENT + LOCALISATION + POSITION.

Parmi les verbes de position statiques se trouvent également d'autres verbes précisant la relation topologique de la Figure à un Fond. Dans l'allemand, nous avons vu que dix verbes sont utilisés pour localiser les Figures (Kutscher & Schultze-Berndt, 2007:1025), et la plupart de ces verbes ont des équivalents en suédois. D'abord, il y a les verbes de position cardinaux, qui incarnent prototypiquement une posture humaine, cités ci-dessus. Ensuite nous trouvons

hänga « pendre, être suspendu », qui, comme nous venons de le mentionner, n'appartient pas

aux trois premiers. Cependant, son sens peut être élargi de la même manière que les verbes de position antropomorphiques, tout comme il peut figurer dans un usage grammaticalisé. En revanche, les verbes cités ci-dessous ne permettent pas une utilisation grammaticalisée (cf. Newman & Rice, 2004:359). Le fait de s'accroupir, huka (sig), de s'agenouiller stå/sitta på

knä rendent effectivement des positions humaines. Le premier sens n'appartient pas aux

verbes de position cardinaux, alors que le deuxième est construit à partir de ces verbes (stå/sitta). Les verbes luta (sig) « se pencher, s'appuyer », flyta « flotter (dans l'eau) » et sväva « flotter (dans l'air) » peuvent également décrire une situation statique, mais notre intuition prédit une utilisation surtout progressive en combinaison d'un verbe de position prototypique, dont nous parlerons sous la section de la grammaticalisation. Une grande partie des verbes allemands exprimants différents degrés et Manières de l'attachement (haften, kleben,

klemmen) est souvent rendue en suédois par le verbe sitta suivi par un satellite précisant ce

degré et cette Manière, ce que nous allons voir de plus près dans la section sur la sémantique de ce verbe.

13 D'autres exemples existent dans la langue suédoise, comme falla « tomber » - fälla « faire tomber », brinna « brûler intr. » - bränna « brûler tr. », vakna « se réveiller » - väcka « réveiller », etc (cf. Ramnäs, 2000).

Nous avons déjà mentionné que les verbes de position statiques sont souvent interchangeables avec un verbe locatif positionnellement neutre. Après un tel échange, la phrase resterait grammaticalement correcte, mais elle perdrait souvent en idiomaticité. Pour les verbes de position dynamiques, en général rendu en français par « mettre, poser, placer », il n'existe pas d'hypéronyme dans le registre familial (cf. Lemmens & Perrez, 2010). Le verbe

placera « placer, mettre » appartient à un registre très soutenu et n'est pas facilement

accessible pour un locuteur suédois (cf. Viberg, 1998a ; Hansson & Bruce, 2002:402). Seuls les verbes lägga, sätta, ställa sont prêts à encoder le concept de placement en suédois. Le suédois diffère donc de l'anglais, malgré l'appartenance à la même typologie concernant les événements de mouvement. L'anglais a un verbe de placement très fréquent, à savoir put. Il existe d'autres verbes fréquents plus précis au niveau positionnel, comme set et lay, ainsi que le cognat du suédois place, ainsi qu'une multitude de verbes d'une sémantique très précise et limitée et d'une fréquence moins élevée (cf. David, 2003). En français, les verbes de placement les plus fréquents sont mettre, poser, placer, qui ne portent aucune précision sur l'orientation de la Figure. Les verbes de position dynamiques coucher, asseoir et mettre

debout ont un usage très limité en français, et ne sont que très rarement élargis au placement

des Figures inanimées. Pour encoder l'usage inchoatif, ou le changement de posture d'un être humain, ces verbes français se mettent à la forme pronominale, de la manière suivante : se

coucher/s'allonger, s'asseoir, se mettre debout.

Tout comme il existe d'autres verbes statiques que les verbes de position cardinaux qui expriment une Manière dont est localisée la Figure, un assortiment de verbes de placement peuvent être utilisés en suédois. L'équivalent causatif du verbe locatif hänga « pendre, être suspendu » a la même forme hänga « suspendre ». Le verbe hälla est un équivalent parfait du verbe français « verser », alors que le sens correspondant du verbe stuva (in), qui implique une proximité totale entre la Figure et le Fond, pourrait être « envelopper », « empaqueter » ou « emballer ». Les verbes suivants ne figurent que très rarement sans une particule, et certains ont une signification très différente sans celle-ci14. Il s'agit de stoppa (i/in i) et sticka

(i/in i), qui rendent le sens de « insérer », et nita (fast), spika (fast, upp) signifient « river,

clouer». Les premiers encodent différents degrés d'être contenu, ainsi que la forme de la Figure (cf. Lemmens, 2006 ; Gullberg & Burenhult, 2012). En effet, pour utiliser ces verbes, la Figure doit être d'une nature allongée, et pour employer sticka (i/in i), elle doit être aplatie et mince, comme une clé dans une serrure. Lorsque la Figure est très mince, comme un fil que l'on fait passer dans une aiguille, encore un autre verbe de placement est utilisé en suédois, à

savoir trä « enfiler, passer ». La Manière de placer quelque chose quelque part est également rendue par le verbe släppa « lâcher » (Gullberg, & Burenhult, 2012), même si l'action n'est pas contrôlée jusqu'à la fin du mouvement (cf. Narasimhan & Gullberg, 2006:101ff).

Dans notre étude, nous nous concentrerons sur les verbes de position antropomorphiques sitta, ligga, stå et leurs équivalents causatifs sätta, lägga, ställa. Mais parmi nos données, nous trouverons également des occurrences d'autres verbes, dont quelques-uns sont mentionnés ci-dessus.