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Apprendre les verbes de position

4. L'acquisition des langues

4.1. Acquisition d'une langue première

4.1.3. Apprendre les verbes de position

Dans le chapitre 3 ci-dessus, nous avons rendu compte de la sémantique des verbes de position suédois et leurs utilisations. Nous avons vu que pour les situations d'emplacement statiques (« se trouver quelque part »), le suédois permet plusieurs types de verbes, dont les positionnels, mais également les verbes existentiels. En ce qui concerne les verbes de position dynamiques, c'est-à-dire les verbes de placement (poser, mettre), nous avons constaté qu'il n'existe pas de verbe positionnellement neutre « prêt à l'emploi » dans la langue courante. Selon Toivonen (1997:2), une connaissance complète des verbes de position inclut les points suivants :

• la forme de mots (la représentation phonologique)

• l'information syntaxique (la catégorie du mot, le cadre syntaxique) • l'information morphologique (les conjugaisons)

• les sens (incluant la position inhérente de la Figure, l'orientation de la Figure et sa relation avec le Fond, si la Figure est attachée à quelque chose)

• les sens élargis (métaphores, expressions idiomatiques)

La complexité sémantique des verbes de position ainsi que leurs utilisations élargies peuvent nous inciter à croire que leur acquisition est un défi pour les enfants. Viberg (1993:375) conforte cette idée en prétendant que les mots ayant une grande polysémie sont difficiles à

apprendre. Or, nous avons également vu que ces verbes appartiennent aux verbes les plus fréquents dans la langue suédoise, avec le placement suivant : stå « être debout » (17ème),

ligga « être couché » (23ème), lägga « coucher » (31ème), sitta « être assis » (35ème), sätta

« asseoir » (36ème) et ställa « mettre debout » (53ème) (cf. SUC, 1997). Une telle fréquence laisserait croire que ces verbes s'acquièrent tôt (cf. Brown, 1958 ; Viberg, 1985 ; Naigle & Hoff-Ginsberg, 1998 ; Bates & MacWhinney, 1989) et sans trop de difficulté, même si la fréquence n'entraine pas obligatoirement une saillance perceptuelle pour le cerveau (cf. Guilquin & Viberg, 2009). En outre, comme mentionné précédemment, les événements de localisation et de placement font partie des événements les plus fondamentaux conceptuellement et perceptuellement, et leurs expressions sont souvent entendues et employées par les enfants. Les verbes encodant ces événements concrets appartiennent au niveau basique et par conséquent, leur acquisition devrait se faire tôt (cf. Brown, 1958). Selon Clark (1978) et Pinker (1989, cités dans Gullberg & Narasimhan, 2010:240), les verbes « légers » (light) comme le verbe put « mettre » sont appris d'une manière précoce et facile. Les résultats de Choi & Bowerman (1991) suggèrent que les jeunes enfants règlent leur production aux traits spécifiques à la langue maternelle très tôt. Transféré à notre étude, cela voudrait dire que les enfants suédophones apprendraient ces verbes tôt, facilement et d'une manière homogène. Voici donc les questions auxquelles nous allons essayer de répondre dans notre étude : la fréquence de l'utilisation des verbes de position en facilite-t-elle l'acquisition ? Ou bien, la complexité sémantique des verbes rend-elle la tâche laborieuse ?

Comme il n'existe pas d'étude récente sur l'acquisition des verbes en question chez les enfants monolingues, nous allons nous référer aux articles suivants pour les verbes de position suédois : Toivonen (1997), Hansson & Bruce (2002) et Viberg (1993), et en tant que matière de comparaison proche du suédois, les articles de Narasimhan & Gullberg (2011), et de Gullberg & Narasimhan (2010) pour, entre autres, les verbes de placement néerlandais. Dans les données de CHILDES, il est constaté que les enfants suédophones font une utilisation des verbes de position statiques et dynamiques bien avant leurs trois ans (cf. Toivonen, 1997:13ff). Les enfants dans l'étude de Plunkett & Strömqvist (1992) utilisent les verbes dans leurs contextes naturels, mais les verbes statiques et intransitifs sont cinq fois plus fréquents, ce qui indique que ceux-ci sont appris en premier. En outre, ils sont tout d'abord appliqués dans des situations où la Figure est animée, suivi par les Figures inanimées (cf. Toivonen, 1997:19).

Dans le tableau (9) ci-dessous, nous présentons les listes de fréquence des verbes de position selon les études de Toivonen (1997), de Viberg (1993), la présente thèse (2013), ainsi que du corpus SUC (1997).

Enfants de 1 à 3 ans CHILDES, Toivonen

(1997)

Enfants de 6 ans

Viberg (1993) Corpus écrit(SUC, 1997) présente étude (2013)Les données de la

sitta sitta stå stå

ligga ligga ligga ligga

sätta stå lägga sätta

stå sätta sitta ställa

lägga - sätta lägga

ställa - ställa sitta

Tableau 9: Liste de fréquence de l'usage des verbes de position suédois par les enfants de 1 à 3 ans, les enfants de 6 ans, dans un corpus écrit, ainsi qu'à partir de nos données.

A partir des données de CHILDES, Toivonen a établi un ordre de fréquence d'utilisation par les enfants (idem:15) : sitta « être assis », ligga « être couché », sätta « asseoir », stå « être debout », lägga « coucher », ställa « mettre debout ». Nous voyons que les verbes statiques sont employés le plus souvent, à l'exception du verbe dynamique sätta, ce qui pourrait s'expliquer par le fait que ce verbe, suivi par la particule på « sur, dessus », est très souvent utilisé dans les contextes d'habillage, très présents dans la vie d'un jeune enfant.

Dans Viberg (1993:354ff), une liste des 20 verbes les plus fréquents chez des enfants suédophones monolingues de six ans montre que sitta se trouve en 7ème place, ligga en 8ème, stå en 12ème et sätta en 17ème place.

Ces deux listes de fréquence peuvent être comparées avec celle établie par Viberg (2006:108) à partir de Stockholm Umeå Corpus (SUC, 1997). Cette dernière reflète le langage écrit dans des journaux et des romans. Dans le tableau (9) ci-dessus, l'ordre de fréquence des verbes de position énoncés par les informateurs natifs (adultes) dans l'étude ci-présente est également présentée.

Nous voyons que chez les jeunes enfants, sitta tient une place plus importante que dans le discours écrit des adultes (cf. SUC, 1997), qui l'utilisent en 4ème place, après stå,

ligga et lägga. Ce résultat a sans doute deux explications. En ce qui concerne les très jeunes

enfants, leur production est spontanée et décrit leur quotidien (CHILDES, cf. Toivonen, 1997). L'utilisation du verbe sitta est ici très certainement prototypique, en décrivant la posture corporelle de l'enfant et des personnes l'entourant. Les verbes énoncés dans l'étude de

Viberg sont élicités à l'aide de différentes tâches, dont une comprenant le placement d'images sur un tableau en flanelle, pour laquelle grand nombre d'enfants ont utilisé le verbe sitta dans des phrases comme den ska sitta här « il doit être placé (assis) ici » (cf. Viberg, 1993:357). En effet, la notion de contact étant présent dans cette situation, ce verbe y est applicable. Comme Viberg (idem) n'avait comptabilisé que les 20 verbes les plus fréquents, nous ne pouvons pas savoir l'ordre des verbes lägga et ställa chez les enfants de 6 ans. Dans la liste tirée de notre corpus, l'ordre ne correspond aucunement aux ordres précédents. Le verbe stå est le plus courant (109 occurrences), tandis que le verbe sitta est le moins employé (34 occurrences). Encore une fois, l'explication vient très probablement de la situation artificielle, où ces verbes sont élicités à partir de certaines tâches (voir 5.2 ci-dessous) et des stimuli élaborés (voir 5.4). En effet, les situations où les verbes sitta et lägga sont attendus sont moins nombreuses que pour les autres verbes. Ces résultats élicités sont ainsi biaisés, mais il est intéressant de noter que le verbe ligga se trouve en deuxième place dans toutes les listes, et que stå est le verbe le plus utilisé par les adultes.

Comme nous avons vu ci-dessus (chapitre 3), les verbes de position statiques incarnent le sens d'un objet (une Figure) qui est localisé quelque part et qui est placé dans une certaine position/orientation par rapport au Fond. Les traits sémantiques peuvent donc être décrits comme OBJET + LOCALISATION + POSITION. Pour les verbes dynamiques, rappelons que les traits sémantiques sont plus nombreux, la signification exprimée dans ces verbes incarnant un objet (une Figure). Le mouvement vers un emplacement pour se trouver dans une certaine position de ce dernier est provoqué par un agent. Nous pouvons schématiser de la manière suivante :

AGENT + CAUSE + OBJET + MOUVEMENT + LOCALISATION + POSITION. Il est possible que les verbes statiques soient appris en premier à cause de leur facilité relative quant aux traits sémantiques (cf. Toivonen, 1997:25). Un enfant dans les données de CHILDES (présentées dans Toivonen, 1997:18) n'utilise qu'un des verbes, à savoir sitta, qu'il semble appliquer d'une manière correcte. Lorsqu'un autre verbe de position statique est requis, cet enfant recourt à un verbe existentiel, typiquement vara « être ». Il est possible que ce verbe soit une sorte de verbe passe-partout, puisqu'il couvre le sens de la localisation sans préciser la position de l'objet, tout en étant grammaticalement correct, même s'il est moins idiomatique dans de telles situations. En outre, le verbe vara « être » est le verbe le plus fréquent dans la langue parlée, chez les enfants comme chez les adultes (cf. Strömqvist, 1997). Or, il s'agit d'un verbe hautement polysème, étant à la fois une copule, un verbe auxiliaire, un verbe existentiel, qualificateur et localisateur, et il semble peu probable que l'enfant fasse la différence entre

toutes ces fonctions. En revanche, les verbes dynamiques semblent poser plus de problèmes, et ils n'ont pas d'hypéronyme auquel les apprenants peuvent avoir recours. Dans les études citées ci-dessus, il est constaté que l'usage des verbes de position chez les enfants (âgés de 2 à 6 ans) n'est pas conforme à la langue des adultes. Il est évident que les enfants sont conscients de ce trait spécifique à leur langue maternelle, et qu'ils savent que la position de l'objet doit être précisée. Dans l'étude de Toivonen (op.cit), les enfants remplacent souvent un verbe dynamique par son équivalent statique, et dans la majorité des cas, la position correcte de l'objet est exprimée dans ce verbe. Les résultats de Gullberg & Narasimhan (2010) montrent également que les enfants néerlandophones de 3 à 5 ans prêtent l'attention à l'orientation de l'objet, en choisissant le verbe statique correspondant, mais ne savent pas toujours utiliser le bon verbe dynamique (idem, 2010:255). Or, il y a aussi des cas où les enfants semblent ne pas toujours savoir choisir le verbe exprimant la position correspondante (cf. Hansson & Bruce, 2002:410). Ce résultat est conforté dans l'étude de Toivonen (1997:21ff), où l'usage correct des trois verbes statiques est d'environ 30 % chez les enfants de 2 à 6 ans. Pour les verbes dynamiques, les écarts sont plus importants, avec une utilisation correcte de sätta à 67 %, de

lägga à 6 % et de ställa à 0 %. Toivonen a constaté une certaine sur-utilisation de sätta

(idem:25), qui, selon nous, est surtout due à l'omniprésence de ce verbe comme verbe de placement général dans le dialecte suédois (le suédois de Finlande) étudié dans cet ouvrage. Dans l'étude de Hansson & Bruce (2002), il est mentionné que les enfants (âgés de 3 à 4 ans) se trompent concernant la précision de l'orientation en prenant un autre verbe de position, mais les auteurs ne déterminent pas une éventuelle sur-extension d'un verbe spécifique. En revanche, Gullberg & Narasimhan (2010) établissent une sur-utilisation du verbe néerlandais

leggen « coucher » chez les enfants néerlandophones de 3 à 5 ans, surtout présente chez les

plus jeunes. Gullberg (2009:237) estime que cela dépend d'un sens plus concret et d'une utilisation moins élargie chez ce verbe et par conséquent un niveau de transparence sémantique plus élevé. Les résultats de Narasimhan & Gullberg (2011) laissent entendre que malgré la fréquence élevée des verbes de position dynamiques dans l'input des enfants néerlandophones, leur acquisition semble laborieuse. Les auteurs avancent l'idée que cela est dû à la complexité sémantique qui entraîne une certaine opacité au niveau de la compréhension directe du verbe, ainsi qu'au grand nombre de contextes d'utilisation de ces verbes dans la vie quotidienne (idem:521ff).

Ci-dessus, nous avons vu que, alors que certains auteurs (Hickmann, 2006; Narasimhan & Gullberg, 2011) estiment que les jeunes enfants acquièrent d'abord les expressions pour la direction et le mouvement, d'autres (Toivonen, 1997; Hansson & Bruce,

2002; Gullberg & Narasimhan, 2010) ont constaté que les verbes exprimant une situation statique sont acquis avant ceux exprimant une situation dynamique. Les particules exprimant la direction (upp « vers le haut », ner « vers le bas », dit « par là » in « vers l'intérieur », ut « vers l'extérieur ») sont acquises tôt chez les jeunes suédophones aussi (cf. Plunkett & Strömqvist, 1992; Strömqvist et al., 1998). Cette opposition d'idées peut n'être valable que pour les verbes de position, comme la complexité sémantique est plus élevée chez les verbes de position dynamiques. D'un autre côté, Clark (2003:22) propose qu'il existe une organisation universelle des catégories et des relations conceptuelles chez les enfants, établie très tôt. Celle-ci serait l'explication de l'application par l'enfant d'une différenciation conceptuelle habituellement non codée dans la langue maternelle. Or, d'autres chercheurs estiment que l'enfant combine ses connaissances non-linguistiques avec les schématisations spécifiques à leur langue maternelle dans chaque domaine, de sorte que la langue en influence la conceptualisation fondamentale (cf. Bowerman, 1996b ; Levinson, 1996).

Il y a également d'autres sortes d'usages erronés, qui semblent plutôt être dues aux ressemblances phonologiques des formes dans les différents temps verbaux. Le tableau (5), ici sous le numéro de (10), déjà publié dans le chapitre 3.3 nous permet de rappeler ces formes.

Verbe à l'infinitif présent préterit supin

Stå står stod stått

ställa ställer ställde ställt

ligga ligger låg legat

lägga lägger la(de) lagt

sitta sitter satt suttit

sätta sätter satte satt

Tableau 10: Les formes verbales exprimant différentes notions temporelles.

Hansson & Bruce (2002:411) maintiennent que la ressemblance de certaines formes de prétérit et de supin peut rendre plus difficile la maîtrise des verbes, alors que Toivonen (1997:9) fait valoir l'idée que ces ressemblances constituent un facteur facilitant l'acquisition. Le dernier argument repose sur l'idée que les enfants acquièrent au fur et à mesure les paramètres sémantiques des concepts positionnels encodés dans les verbes de position statiques, et qu'ils transfèrent ce savoir sur les verbes de position dynamiques. Par conséquent, ils utilisent leurs équivalents (formels) d'une manière correcte. Il est vrai que pour la plupart du temps, les verbes dynamiques sont les équivalents causatifs des verbes statiques, et le transfert se fait sans problèmes. De prime abord, les deux arguments ci-dessus peuvent

paraître contradictoires, mais nous ne pensons pas que ce soit le cas. Le premier ne porte que sur la maîtrise, c'est-à-dire que l'acquisition est en cours, et que dans ce lecte d'apprenant, les formes diverses sont interchangées, laissant quand même entendre que l'enfant maîtrise le concept positionnel, mais pas la forme du verbe. Le deuxième argument se rapporte à l'acquisition en elle-même, où les formes ressemblantes sont des indices sur l'orientation de la Figure, que ce soit une situation statique ou dynamique, facilitant ainsi la compréhension du verbe en question.

Selon deux études citées dans Newman & Rice (2004)29, il y a des constructions, contenant un petit ensemble de verbes fréquemment utilisés, qui sont apprises par les enfants d'une manière collocationnelle (idem:365). Les verbes de position constituent un exemple d'un tel ensemble de verbes. Il est fort probable que certaines combinaisons presque figées de Figure + verbe de position fassent partie de la vie quotidienne de l'enfant, qui les entend très souvent et apprend que tel verbe va avec tel Figure. Selon Tomasello (2000), les enfants apprennent une langue en grande partie en imitant ce qu'ils entendent tout simplement. En exemplifiant avec l'acquisition des verbes de position, l'enfant entend souvent la phrase sätta

på kläder « mettre des habits » et apprend probablement le verbe sätta (på) + habit d'une

façon figée30. Selon Bowerman (1978a, 2005), les enfants semblent apprendre et utiliser chaque mot dans une situation très limitée, comme celle du verbe sätta pour une situation d'habillage. Ce n'est que plus tard que l'enfant fait une analyse du sens du verbe, et assemble les verbes (de position) dans un même domaine sémantique. A partir de ce moment, il est possible que l'enfant se trompe de verbe par rapport à la position de la Figure, car les verbes dans ce même domaine sémantique commencent à se faire de la concurrence (idem). Donc, si un enfant se trompe pour une situation statique où des chaussures se trouvent par terre, désordonnées et dans une position non-canonique, en utilisant le verbe stå « être debout » pour encoder la localisation de ces chaussures, nous pouvons l'expliquer de deux manières : soit l'enfant dit un verbe quelconque du champ sémantique de la localisation, soit il n'analyse pas la position réelle de l'objet, mais fait confiance au verbe qui pour lui fait partie de la situation de localisation « les chaussures se trouvent par terre », et produit l'expression pour lui collocationnelle skorna står på golvet « les chaussures sont debout par terre ».

29 Gries, S. & Stefanowitsch, A. (2002. Collostructions. On the interaction between verbs and constructions.) et Deane, P. (2002. Zip's law and the analogical induction of lexical properties.) Les deux communications étaient présentées lors du CSDL, du 11 au 14 octobre 2002, Rice University. Déjà cités dans la note de bas de page à la page 91.

Pour certaines Figures, il existe une position inhérente, souvent liée à la fonctionnalité de l'objet (cf. Vandeloise, 1986:50ff). Plusieurs objets de la vie quotidienne d'un enfant ont une position inhérente, par exemple une chaise, ou les chaussures dans l'expression ci-dessus. Dans l'étude de Toivonen sur la compréhension des verbes de position (1997:28), il est proposé que les jeunes enfants préfèrent mettre les objets dans leur position inhérente (lorsque ceux-ci en ont une) plutôt que de suivre l'invitation de mettre un objet dans une position insolite et inattendue. Ces résultats se rapprochent de la théorie sur les collocations, mais à la place de produire la collocation verbalement, les enfants la mettent en oeuvre physiquement. Selon Vandeloise (1986:56), l'enfant apprend d'abord les orientations inhérentes des objets, se basant sur l'anthropomorphie. Cette inhérence de la position à certaines Figures s'apparente aux catégories sous-jacentes des objets, proposées par Bowerman (2005). L'auteur souligne que dans le sens de certains verbes, un objet est sous-jacent, comme le pied pour le verbe kick « donner un coup de pied »31. Il est possible qu'il existe des catégories sous-jacentes pour les verbes de position, par exemple dans l'utilisation du verbe sitta « être assis », l'objet sous-jacent est un derrière humain, alors que dans l'utilisation du verbe stå « être debout », des pieds sont inclus d'une manière sous-jacente (voir aussi l'idée de la zone active de Langacker, 1987, cité sous 3.5.1 ci-dessus). Or, selon nous, une présence obligatoire d'un certain Fond peut aussi être en question, c'est-à-dire que pour le verbe sitta, un support ressemblant à une chaise doit être présent dans la situation de l'emplacement. Bowerman suggère que les enfants font une sur-utilisation de ce type de verbe avant d'apprendre l'obligation de la présence de la catégorie sous-jacente (2005:209). Toutes ces connaissances se rapportent et se mêlent évidemment aux paramètres sémantiques des verbes, et il est difficile d'en faire une différence nette.

Selon Ellis, l'apprenant établit une collection d'exemples à partir des collocations, et ensuite fait l'analyse des traits en commun de ces collocations. Cette analyse aboutit au développement d'un schéma abstrait (2003:69), qui pour les verbes de position est représenté par les paramètres sémantiques. Une fois que les paramètres sémantiques sont établis chez les enfants, les choix de verbe ne doivent plus poser de problèmes. Or, cela est sans doute vrai pour toutes les positions pour ainsi dire évidentes, c'est-à-dire où les paramètres les plus saillants sont présents dans l'événement de localisation. Selon Fischer (1990, cité dans Serra Borneto, 1996:466) et Lyons (1980:311), la dimension verticale est la plus saillante et celle que tous les locuteurs préfèrent, aussi bien les nourrissons et les jeunes enfants que les

31 Comme il n'existe pas de verbe lexicalisé pour rendre cette action en français, la périphrase française inclut obligatoirement l'objet du pied, ce qui n'est pas le cas ni en anglais (kick), ni en suédois (sparka).

adultes. L'horizontalité est également un trait qui est remarqué, mais moins préféré que celui