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4. L'acquisition des langues

5.5. Les informateurs

Les informateurs sont divisés en sept groupes avec quatorze personnes (sept de chaque sexe) dans chaque groupe, faisant un total de 98 personnes. Les trois groupes d'enfants sont divisés par tranche d'âge pour simuler l'évolution langagière, et dans le même but, les deux groupes d'apprenants L2 sont divisés par niveau de compétence dans la langue cible. Nous avons également deux groupes de contrôle. Tous les groupes d'informateurs seront présentés plus en détail ci-dessous.

Il est évident qu'il existe une grande difficulté pour constituer des groupes d'informateurs qui se valent exactement au niveau sociolinguistique, mais nous sommes assez confiante lorsque nous disons que dans l'étude en question, cela a une moindre importance. Il s'agit effectivement de verbes très fréquents qui appartiennent à la langue quotidienne, et leur usage n'est pas conditionné par le registre de langue, ni par le niveau d'étude du locuteur.

Dans le tableau (12) ci-dessous, les groupes d'informateurs sont présentés selon la répartition du nombre et du sexe.

Informateurs Total L1 4 ans 7 7 14 L1 7 ans 7 7 14 L1 10 ans 7 7 14 L2in (niveau intermédiaire) 7 7 14 L2av (niveau avancé) 7 7 14 Contrôle suédois 7 7 14 Contrôle français 7 7 14

Total 49 49 98

Tableau 12: Les groupes d'informateurs divisés par leur nombre et leur sexe.

5.5.1. Les groupes de contrôle

Pour avoir une confirmation du choix des phrases cibles, ainsi qu'un éventail d'autres phrases acceptables pour les mêmes contextes, un groupe de contrôle a été constitué d'adultes suédois, composé de sept femmes et sept hommes entre 20 et 44 ans appartenant au même groupe socio-économique. Dans la mesure du possible, nous avons choisi des personnes monolingues, en sachant qu'aucun jeune Suédois ne parle que sa langue maternelle. Ils ont tous une bonne maîtrise de l'anglais, et souvent également d'une autre langue. Or, nous avons choisi seulement des personnes ayant séjourné dans un pays étranger pendant au maximum 6 mois, pour éviter une influence trop présente d'une autre langue.

Les informateurs dans le groupe de contrôle français correspondent aux mêmes critères d'âge, de niveau socio-économique et linguistique que ceux du groupe de contrôle suédois (voir Annexe VI pour l'enquête sociolinguistique qui leur a été soumise). Ce groupe est inclus dans le but de pouvoir étudier les formes d'expression de la spatialité en français dans les situations que nous présentons dans notre stimulus. Ainsi, nous pourrons faire une étude interlinguistique et typologique, afin d'examiner l'influence éventuelle du français sur le suédois chez les apprenants L2.

5.5.2. Les apprenants de suédois L1

Les enfants sont choisis dans différentes écoles dans des villes de taille moyenne autour de Stockholm. Leur profil socio-économique, dressé à partir de l'enquête socio-linguistique que leurs parents ont remplie, se ressemble et les groupes sont constitués d'autant de filles que de

garçons (voir l'enquête dans l'Annexe VI). La répartition égale des filles et des garçons nous permettra de contrôler les résultats de Johnston & Slobin (1979:535), qui avancent que les filles produisent davantage d'expressions locatives que les garçons. Toutefois, cette étude sera conduite dans des travaux ultérieurs. Il y a trois groupes d'âge, un de quatre ans (de 3 ans et 10 mois jusqu'à 4 ans et 10 mois, dorénavant intitulé 3;10 et 4;10 respectivement), un groupe de sept ans (de 6;10 jusqu'à 7;10) et un de dix ans (de 9;10 jusqu'à 10;10). Ces âges ont été choisis, en concertation avec Maya Hickmann, pour simuler l'évolution langagière, comme nous n'avons pas la possibilité de faire une étude longitudinale. A l'âge de 4 ans, il s'avère que presque toutes les notions spatiales et leurs expressions dans la langue sont acquises dans la plupart des cas (cf. Johnston & Slobin, 1979). Hickmann, dans sa thèse (1982, citée dans Watorek, 2004:7) a identifié ces trois âges comme étant significatifs dans l'évolution langagière des enfants, et Piaget (1968) a constaté que les enfants se trouvent dans une phase inférieure de développement vers la pensée adulte jusqu'à l'âge de 7-8 ans. Vers 9 ans, les enfants commencent à produire du langage très proche des locuteurs adultes de leur langue (Kail, 2012:607). Cette répartition des âges a été appliquée dans plusieurs études (notamment Benazzo, Dimroth, Perdue, Watorek, 2004 ; Hickmann, 2004 ; Watorek, 2004 ; Hendriks, Watorek & Guiliano, 2004 ; Lenart, 2012 ; Hendriks & Watorek, 2012 ; Benazzo, Perdue & Watorek, 2012 ; Giuliano, 2012). Les enfants de notre étude sont monolingues, et même si les enfants de dix ans commencent à apprendre l'anglais à l'école, nous n'avons aucune raison de croire que cela les influencerait d'une manière quelconque.

5.5.3. Les apprenants de suédois L2

Nous avons indiqué dans le chapitre 4.2 que nous appelons L2 une langue apprise après la langue maternelle, même s'il s'agit d'une troisième, quatrième ou même cinquième langue. Nos informateurs francophones ont tous appris le suédois à l'âge adulte, souvent en quatrième ou cinquième langue. A cause du nombre réduit de personnes ayant un certain niveau de suédois langue étrangère, nous n'avons pas pu établir des groupes homogènes concernant les langues apprises avant le suédois, ni l'ordre desdites langues. Dans une étude idéale, tous les informateurs auraient appris par exemple l'anglais en L2 et l'allemand en L3, avant de s'attaquer au suédois. Or, la réalité ne se présente pas d'une façon parfaite, et nous avons dû adapter nos critères dans une certaine mesure à cette réalité imparfaite. Suite à la discussion sur les facteurs qui influencent l'acquisition d'une deuxième langue (cf. Ellis, 1994), nous pouvons constater que nos informateurs ont dû avoir une motivation élevée pour apprendre le

suédois, puisqu'ils l'ont choisi de leur plein gré à l'âge adulte. La nature de la motivation (curiosité, travail, amour...) nous reste inconnue, car nous n'avons pas inclus des questions portant sur cet aspect dans l'enquête donnée aux informateurs (voir cette enquête dans l'Annexe VIII). Aucun des sujets n'est bilingue du jeune âge d'une autre langue quelconque, et le français est leur langue maternelle. Ils ont entre 20 et 43 ans et il y a autant d'hommes que de femmes dans les groupes. Ils ont tous suivi, ou sont en train de suivre, une formation universitaire, ce qui est la seule indication que nous avons sur leur classe sociale. Certains résultats (Ohlstein, Shohamy, Kemp, & Chatow, 1990 ; Skehan, 1990, présentés dans Ellis, 1994:205) attestent une différence d'accomplissement en L2 entre les jeunes apprenants venant d'une classe ouvrière et ceux d'une classe moyenne et au-dessus. Il s'agit surtout d'un niveau plus élevé en L1 pour ces derniers, les aidant à acquérir une nouvelle langue plus aisément. Ce niveau plus élevé expliquerait mieux la différence que les attitudes et les motivations. Notre étude concerne les apprenants adultes, qui ont très probablement effacé les éventuelles différences, en faisant des études supérieures et en voyageant à l'étranger. Selon certaines études (citées dans Ellis, 1994:202ff), les femmes devraient être plus performantes que les hommes en apprenant une langue étrangère. En revanche, d'autres études n'ont pas montré de tels résultats. C'est pourquoi nous avons décidé d'avoir un nombre égal d'hommes et de femmes parmi nos informateurs. Ainsi, s'il existe une différence dans l'acquisition des verbes de position suédois entre les sexes, elle sera mise à jour. Or, comme nous l'avons déjà mentionné, ces résultats seront traités dans un travail ultérieur.

Les apprenants L2 sont divisés en deux groupes de niveau de compétence (cf. Bartning, 1997, Bartning & Schlyter, 2004). Un groupe contient les apprenants d'un niveau intermédiaire, voire avancé bas (entre B1 et B2 selon le cadre européen commun de référence élaborée par le Conseil de l'Europe, voir l'Annexe IX), et l'autre groupe est constitué d'apprenants avancés et très avancés (entre C1 et C2, selon la même échelle). Certains dans le deuxième groupe pourraient sans doute être qualifiés de quasi-natifs (cf. Bartning, 1997 ; Coppieters, 1987 ; Palmen et al, 1997), vu leur production presque parfaitement conforme à la langue cible, aussi bien au niveau des choix léxicaux et des compétences grammaticales qu'au niveau prosodique. Pour déterminer les niveaux de compétence, nous avons évalué la production des informateurs à partir des enregistrements, en utilisant les traits caractéristiques des variétés avancés proposés par Bartning et Schlyter (1997, 2004). Nous avons également fait passer un test écrit tiré de Dialang (copyright © Dialang Consortium) aux apprenants L2 (un test pour chaque niveau), pour ne pas nous limiter à la production orale. Tout cela en sachant qu'il n'y a

pas un seul niveau avec une seule compétence qui est la même pour tous les membres du groupe (cf. Dörnyei & Skehan, 2003). Dans les Annexes X et XI, nous retrouverons ces tests dans leur intégralité.

Le groupe dorénavant appelé intermédiaire (avec l'abbréviation L2in) est constitué de personnes vivant en France, dont certaines ont déjà fait un séjour en Suède. Elles ont passé au maximum un an dans un autre pays, la Suède incluse. Il est possible d'étudier le suédois dans plusieurs universités en France, mais pour des raisons surtout pratiques et économiques, nous n'avons pas parcouru le pays entier pour trouver des informateurs de ce niveau, mais nous nous sommes limitée aux universités de Lille 3 et de Paris 4. Cela s'est avéré relativement laborieux, car le nombre d'étudiants qui poursuivent leurs études et développent ce niveau de compétence est réduit. Donc, afin de compléter ce groupe, nous avons également fait appel à l'Institut Suédois à Paris, où des cours de soir pour les adultes sont dispensés. Les critères posés (âge, absence de bilinguisme et de séjour long à l'étranger) ont écarté quelques personnes se portant volontaires pour participer à l'étude. En outre, plusieurs personnes conformes aux critères ne voulaient pas en faire partie, possiblement par peur de se sentir jugées. Par conséquent, nous avons manqué d'informateurs et nous avons dû accepter deux personnes dont le niveau de compétence est légèrement au-dessous des autres.

Les informateurs du groupe dorénavant appelé très avancé vivent en Suède depuis au moins deux ans, souvent bien plus. Ils ont tous suivi une instruction formelle de suédois, en France ou en Suède, dont la longueur varie de quelques mois à quelques années. Le critère d'absence de séjour long à l'étranger (hormis la Suède) ne fut pas applicable, car le profil de ces gens est plutôt voyageur, et en excluant ceux qui ont passé du temps dans d'autres pays, nous n'aurions jamais réussi à réunir le nombre requis. De toute façon, les informateurs dans ce groupe maîtrisent tous plusieurs langues, et ils sont nombreux à en utiliser quotidiennement dans leur travail. Selon Malt & Sloman (2003:47), le temps de séjour dans un pays est un meilleur marqueur de la prédiction du niveau de langue d'un apprenant que la longueur d'une formation institutionelle suivie par cet apprenant. Chez les apprenants avancés, le temps de séjour en Suède variait de 2 à 20 ans.