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Focalisation de l'information, tâche dynamique, élargie

POS MAN NEU ELL AUT NON

par le groupe de contrôle francophone (22,93%) que par son homologue suédophone (10,15%). Les ellipses sont présentes surtout chez les enfants de 4 et de 7 ans (19,55% et 18,42% respectivement), tandis que les apprenants L2in (10,9%) et L2av (12,03%) en font un usage similaire que le groupe de contrôle suédois. Les enfants de 10 ans en utilisent le moins, à savoir 4,51%. Dans la tâche dynamique, aucune phrase elliptique n'a été énoncée par la plupart des groupes d'informateurs, voir ci-dessus. Nous avancerons déjà maintenant une explication à ce fait, à savoir la syntaxe imposée par les verbes transitifs (dynamiques) et par les verbes intransitifs (statiques) ainsi que l'information portée par les différentes entités de la phrase pour les deux situations.

Les suédophones utilisent un peu plus les verbes autres (AUT) dans les situations dynamiques que les francophones (6,5% contre 4,5%), qui, eux, restent au même pourcentage d'usage pour les situations statiques (4,5%), tandis que le groupe de contrôle suédois n'en énonce presque pas (0,5%). En effet, c'est surtout dans la tâche dynamique que les verbes catégorisés sous AUT sont utilisés. Les apprenants L2in en font l'usage le plus développé, avec 21,07%, suivi par les enfants de 4 ans, qui en utilisent dans 17,5% des cas. Ces derniers en énoncent également pour la tâche statique, à savoir dans 0,75%, ce qui est moins que l'usage qui en font les enfants de 7 ans (1,13%). Ces enfants-ci en utilisent aussi dans la tâche dynamique, dans la même mesure que les enfants de 10 ans (5%) et les adultes natifs (6,5%), à savoir 5,36%. Les apprenants L2av en font un usage légèrement au-dessus, avec 7,86% de verbe AUT.

6.5. Résumé du chapitre

Cette partie a montré le choix, opéré par les locuteurs, de l'information à exprimer dans la phrase locative. Les apprenants L1 et L2 approchent l'utilisation cible au fur et à mesure que leurs capacités linguistiques augmentent, avec un choix d'information très conforme chez les enfants de 10 ans et les apprenants L2 avancé à celui des adultes suédophones natifs. Les locuteurs du groupe de contrôle français expriment la Manière dans une mesure plus restreinte que les locuteurs de suédois, et les locuteurs français énoncent les expressions positionnelles surtout dans les situations prototypiques. Pour les autres situations, ces locuteurs optent surtout pour les expressions neutres. Cependant, ces choix informationnels ne disent rien à

propos de la localisation phrastique de cette information, ni à propos du type de verbe de position utilisé. Dans le chapitre 7 suivante, ce premier phénomène sera abordé, tandis que le deuxième sera traité sous la présentation des résultats concernant chaque stimulus, aux chapitres 8 et 9.

7. Localisation de l'information – vue générale

Cette section se donne pour but de présenter l'organisation phrastique de l'information exprimée (en dehors de la préposition), à savoir les verbes et les satellites, susceptibles de porter une information spatiale. Leur signification ont ici été divisée en composantes sémantiques pertinentes pour notre travail, sur le modèle des travaux de Hickmann et al (2011). Rappelons qu'il s'agit des composantes de la Manière (M), de la Causativité (C) et de la Trajectoire (T). L'adverbe « debout », par exemple, ne contient que la composante M, qui correspond à la Manière de se trouver quelque part. Le participe passé adjectival « assis » contient quant à lui les trois composantes MCT, puisqu'il exprime à la fois l'action de (s') asseoir et son résultat. Pour une seule et même entité lexicale, il peut ainsi y avoir plusieurs composantes sémantiques, comptabilisées chacune à part. Par conséquent, il est compliqué de trouver pour chaque groupe un nombre référent avec lequel comparer le chiffre obtenu. Or, c'est justement la comparaison entre les groupes qui nous intéresse. Aussi la ferons-nous à titre indicatif avec les nombres absolus et rarement avec un chiffre maximal ou pourcentuel.

Typologiquement, les verbes de mouvement français fusionnent la Trajectoire dans leur sémantique, comme dans le verbe entrer qui exprime le fait de se déplacer vers l'intérieur (langue à cadrage verbal, cf. Talmy, 2000). La Trajectoire peut même être exprimée deux fois dans un verbe de mouvement français, à l'aide des préfixes. Le verbe remettre, par exemple, contient les composantes sémantiques C pour la Causativité et T pour la Trajectoire inhérente du mouvement, mais également une deuxième composante de T dans le préfixe re- qui exprime la trajectoire de retour (cf. Kopecka, 2004:184). Il en va de même des verbes

apposer et déposer qui, grâce aux préfixes ad- et dé-, ajoutent respectivement le but du

mouvement et la direction du haut vers le bas (ibid:181).

Les verbes qui ne contiennent pas les composantes M, C ou T, ou qui n'encodent pas la situation spatiale en tant que telle, sont considérés comme étant sans information pertinente et ont été groupés ici sous le code Ø. Il s'agit surtout des verbes positionnellement neutres (NEU) comme être, ou des verbes d'activité catégorisés sous « autres verbes » (AUT) comme

åka « aller », mais également des ellipses (ELL) ou des non-réponses (NON). Les verbes

neutres de placement comme poser ou mettre, qui contiennent les composantes de la Causativité et de la Trajectoire, ne sont quant à eux pas codés Ø mais nous comptabilisons ces composantes. En effet, les verbes de position statiques de localisation ne contiennent qu'une information spatiale nous intéressant: la Manière. Les autres verbes de localisation statiques,

qui n'en portent pas, sont codés « Ø » dans les figures ci-dessous. La Causativité et la Trajectoire sont encodées par les verbes dynamiques, ou par les satellites. Pour ces derniers, considérés facultatifs, nous n'avons marqué que la présence de l'information. Aucune colonne nommée Ø ne figure donc dans les graphes montrant l'information satellitaire.

Suivant le même ordre de présentation que la section précédente, nous allons maintenant évoquer les résultats concernant la tâche statique, les usages prototypiques et élargis confondus, puis ceux de la tâche dynamique. Ensuite, nous nous pencherons sur les résultats des usages prototypiques, puis sur ceux des usages élargis séparément.

7.1. La tâche statique

Les verbes français statiques ne contiennent que très rarement un apport sémantique sur la Manière, la Causativité ou la Trajectoire. Les satellites, sous différentes formes, en possèdent au contraire souvent. Le verbe français reste positionnellement neutre. Aussi si l'on veut exprimer la Manière dont une personne ou un objet est placé, c'est dans le satellite que se donnera cette précision. Le français exprime cependant surtout la Causativité et la Trajectoire, principalement par le participe passé des verbes poser, placer, mettre, précédés soit par un verbe neutre, comme être, soit par une ellipse. La Manière est également présente, notamment sous forme de syntagme prépositionnel comme à l'envers (MT), ou dans un participe passé comme retournée (MCT), couché (MCT). La présence de la Trajectoire, composante phare du mouvement, peut paraître insolite dans une situation statique, dans laquelle aucun mouvement n'est décelé, du moins à la première vue. En effet, comme nous l'avons développé plus haut, la Trajectoire n'est pas uniquement liée au mouvement. Elle l'est aussi aux constructions basiques de localisation (CBL, cf. Grinevald, 2011:63ff), dans lesquelles elle constitue un point d'ancrage du point de vue du locuteur (Fortis et al, 2011:34). Les expressions adverbiales telle que à l'envers, nere « en bas (LOC) », ihop « ensemble, l'un vers l'autre » constituent ainsi des exemples de Trajectoires.

Les figures (7.1) et (7.2) ci-dessous nous montrent la façon dont le suédois et le français divisent le travail entre les entités morphosyntaxiques afin de rendre la sémantique d'une situation de localisation statique. En suédois, le verbe porte plus souvent l'information spatiale spécifique dans une situation statique, alors qu'en français, ce sont les satellites qui remplissent cette tâche, les verbes restant neutres (codés sous Ø) au niveau informationnel (305 occurrences sur 308 phrases locatives au total). On retrouve bien chez les adultes suédois

natifs des occurrences d'ellipses, de verbes neutres ou d'autres verbes non-spatiaux (codés sous Ø), mais à hauteur de 101 occurrences, ce qui ne représente environ qu'un tiers des occurrences retrouvées chez les français.

Dans la langue suédoise, la Manière est, à l'opposé du français, principalement encodée dans les verbes de position statiques (205 occurrences). D'après nos résultats, le satellite reste cependant un emplacement important pour l'information spatiale suédoise. Le groupe de contrôle suédois les utilise pour exprimer un total de 301 composantes sémantiques spatiales, dont 114 encodent la Manière. Les locuteurs francophones emploient presque deux fois plus de satellites dans les situations statiques que les adultes suédois, 557 pour les premiers contre 301 pour les seconds. On retrouve par contre presque autant de composantes sur la Manière dans ces situations statiques chez les français que chez les suédophones. En effet, 104 satellites énoncés par le groupe de contrôle français porte une précision sur la Manière dont se trouve la Figure du stimulus en question.

Figure 7.1: Informations spatiales exprimées dans le verbe, tâche statique (utilisations prototypique et élargie confondues) par groupe d'informateurs.

Contr fr 4 ans 7 ans 10 ans L2in L2av Contr sué 0 50 100 150 200 250 300 350