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4. L'acquisition des langues

5.6. Le dépouillement des données

Avec 98 informateurs, dont 14 (les informateurs du groupe de contrôle français) ont réalisé uniquement les deux tâches de production, nous nous trouvons avec plus de cent heures d'enregistrements. Pour pouvoir dépouiller les données, nous avons d'abord procédé à la transcription orthographique et non phonétique des enregistrements, que nous avons réalisée dans le programme CLAN (http://childes.psy.cmu.edu/). Nous avons choisi ce programme pour deux raisons. Premièrement, il fournit des outils qui nous permettent de faire des recherches de données spécifiques. Deuxièmement, en transcrivant dans ce programme, nous pouvons contribuer à l'élaboration d'un corpus du suédois parlé par des apprenants L1 et L2 aux bénéfices de la communauté scientifique. La plupart des informateurs se sont prononcés en faveur de la mise en ligne de leurs productions pour les rendre accessibles à d'autres chercheurs. Ainsi, ce travail terminé, nous ajouterons ces données à celles déjà existantes sur ce site internet.

La transcription des données des enfants et des apprenants L2 peut poser des problèmes, car une grande partie idiosyncrasique et idiomorphologique y est présente. Or, en ce qui concerne la morphologie, nous nous intéressons surtout au choix de verbe, quelle que soit sa forme verbale. Ainsi, nous comptabilisons par exemple la forme prétérit erronée

läggde comme le verbe lägga. Pour les formes de mots idiosyncrasiques, surtout présentes

chez les apprenants L2, nous les catégorisons dans le groupe AUT (autres verbes, voir 5.5.1 ci-dessous), et nous soulevons les cas intéressants, soit à cause d'une influence interlinguistique d'une langue apprise avant le suédois, soit à cause d'une innovation linguistique créative. Le terme « idiosyncrasie » souligne le fait que l'interlangue n'est pas une déviance par rapport à la norme, mais un système propre à l'apprenant et souvent ingénieux.

5.7. Le codage

Dans les transcriptions, surtout celles de la production statique, il y a un grand nombre d'énoncés qui ne portent pas sur le sujet de notre étude, car les locuteurs faisaient des descriptions parfois très détaillées des images. Après avoir écarté ces séquences non pertinentes, nous avons identifié les phrases locatives qui contiennent de l'information sur la relation spatiale recherchée. Une phrase locative canonique contient une entité identifiée comme la Figure, un élément verbal, une entité comprise comme le Fond et une préposition encodant la relation spatiale entre la Figure et le Fond. Cette phrase, si elle décrit une situation

statique peut également être appelée CLB (construction locative de base). En suédois, les verbes de position statiques peuvent être précédés par un sujet formel, det « il », et la Figure prend la fonction du complément d'objet direct. Vu sa fréquence dans la langue suédoise de tous les jours, nous considérons cette construction comme une phrase locative idéale aussi. Certaines phrases n'ont pas de préposition encodant la relation spatiale, ni d'entité représentant le Fond. S'il s'agit d'une phrase désignant une situation statique, avec un verbe positionnel, la localisation est induite comme dans l'exemple (79). Un verbe neutre comme vara « être » n'exprime que l'existence de la Figure, voire l'identification et la présentation de celle-ci, voir l'exemple (80) ci-dessous52.

(79) Mattan står. SP005-S4F008

tapis.DÉF être debout.PRÉS

« Le tapis est debout. »

(80) Det är ris. SP010-S4P002

cela être.PRÉS riz « C'est du riz. »

Or, puisque nous catégorisons les verbes neutres comme des verbes locatifs, nous avons décidé de les inclure même dans ce genre de construction. En français, la construction contenant l'expression il y a peut dans bien de cas remplacer celle dans (80). Pour les situations dynamiques, l'omission du syntagme prépositionnel contenant le Fond est agrammaticale, et malgré cela, elle est employée à plusieurs reprises dans la production des jeunes enfants, comme dans la phrase (81).

(81) Han ställde kaffekopp. DP004-S4P003

il poser.PRÉT café-tasse « Il a posé tasse de café. »

Nous avons inclus ce type de phrases, car elles nous semblent locatives malgré leur agrammaticalité. Il est possible que cette manière de construire une phrase reflète le développement discursif de cet enfant, qui n'est pas très à l'aise avec les extensions prépositionnelles. Dans l'étude de Strömqvist et al. (1998:92ff), on a constaté que les sujets suédophones (entre 5 et 15 ans), en décrivant une situation dynamique, laissent implicite le

52 Les abbréviations pour les informateurs sont introduites par S pour sujet, suivi par le groupe d'informateur, par exemple 4 pour l'âge. Ensuite, il y a une indication du sexe, F pour flicka « fille » (K pour kvinna « femme »), P pour pojke « garçon » (M pour man « homme »), suivi par le numéro d'informateur.

Fond dans 50% des énoncés (et dans 62% chez les enfants de 5 ans) en utilisant une particule ou un adverbe pour encoder la direction du mouvement. Or, dans notre exemple (81) ci-dessus, une éventuelle particule est également absente. Les phrases locatives qui contiennent un élément verbal ont la priorité dans nos analyses et ont été selectionnées devant les types de phrases décrites ci-dessous, qui ont été prises en compte uniquement si aucune phrase du type présenté dans la partie suivante ne se trouvait dans la production de l'informateur. La notion d'ellipse porte dans cette étude sur l'omission du verbe principal conjugué. Plusieurs types de phrases elliptiques se trouvent dans nos données concernant la production des verbes statiques. Tout d'abord la phrase elliptique pour ainsi dire canonique, qui inclut la Figure, le Fond et leur relation spatiale, comme dans la phrase (82) ci-dessus53.

(82) En glasflaska en trästol. SP004-SLMADM002

une verre-bouteille sur une bois-chaise « Une bouteille en verre sur une chaise en bois. »

Une autre phrase elliptique est appelée non-autonomous par Lemmens (communication personnelle, 2012), et consiste en une concomitance entre la Figure et le Fond, liés par la préposition med « avec ». Souvent, il s'agit surtout d'une co-existence des deux entités, mais une existence sous-entend toujours une localisation. Dépendant du point de vue du locuteur qui considère la Figure ou le Fond comme l'entité la plus saillante (cf. Svorou, 1994 ; Talmy, 2000 ; Kopecka, 2004), c'est la Figure qui est avec le Fond (voir l'exemple (83)), ou le contraire, voir (84).

(83) En gubbe med en bil. SP003-S4P010

un bonhomme avec une voiture « Un bonhomme avec une voiture. »

(84) En pinne med en ring på. SP012-S7P001

un bâton avec une bague sur « Un bâton avec une bague dessus. »

Dans l'exemple (84), une préposition est présente pour encoder la relation spatiale entre la Figure et le Fond, ce qui souligne la nature locative de cette phrase non autonome.

53 Le code de l'informateur : S = sujet; LM = langue maternelle; AD = adulte; K = kvinna « femme » / M = man « homme », suivi du numéro de l'informateur.

Parmi les phrases locatives elliptiques, nous avons comptabilisé les phrases contenant seulement la Figure, qu'une précision sur la manière de localisation soit présente (exemple (85)) ou non (exemple (86)).

(85) En tallrik uppochner. SP008-S7P003

une assiette vers le haut-et-vers le bas « Une assiette sens dessus dessous. »

(86) En tallrik. SP008-S4F001

une assiette

Ces phrases comptent bien évidemment en dernier lieu, s'il n'existe aucune autre entité locative dans la production de l'informateur concernant le stimulus en question. Par conséquent, nous n'avons pas laissé de côté les énumérations faites par les apprenants de compétence linguistique inférieure, comme dans l'exemple (86) ci-dessus. Il s'agit d'une sorte d'ellipse, que nous appelons « fausse » ellipse, où seulement un élément de la relation spatiale est linguistiquement exprimé. Dans la plupart des cas, ce sont des énoncés par les jeunes enfants, et parfois ils énoncent également le Fond, mais sans préposition qui lie les deux entités.

Les phrases pour ainsi dire possessives sont comptabilisées en tant que phrase locative, lorsqu'il s'agit du Fond qui est en possession de la Figure. Ce rapport de possession est encodé par le verbe avoir. L'énoncé (87) ci-dessous exemplifiera ce genre de constructions, surtout utililisées par de jeunes enfants, en l'occurrence un enfant de sept ans.

(87) Det där är en gren som har

cela être.PRÉS une branche qui avoir.PRÉS

en ring. SP012-S7F004

une bague

« Voilà une branche qui a une bague. »

Si plusieurs phrases locatives concernant le même stimulus se trouvent dans le récit de l'informateur, nous avons élaboré une échelle de pertinence basée sur des critères informationnels, où la Manière tient la première place. Bien que la position soit comprise dans la Manière, nous avons décidé de les séparer pour deux raisons. D'une part, cela nous permet de confirmer l'usage par les suédophones des expressions dérivées des verbes de position (par exemple uppställd « vers le haut-mis debout », et d'autre part, nous pourrons voir que les

précisions sur la Manière ne manquent pas chez les francophones, même si elles ne sont pas de la même nature que celles des suédophones. Ainsi, nous prenons en compte toute information spatiale sur la Manière, quelle que soit sa forme et sa position dans la phrase. Les organisations discursives ne sont pas toujours les mêmes entre les deux langues, et l'information spatiale la plus riche peut se trouver ailleurs que dans un élément verbal en français (cf. Hickmann, 2006), par exemple dans le participe passé adjectival alignées que nous verrons dans nos données. En suivant la logique du manuel de codage de Hickmann et al (2011:17ff), nos critères de sélection distinguent d'abord la richesse sémantique d'une phrase, à savoir qu'un énoncé contenant plusieurs éléments sémantiques encodant la Manière est prioritaire devant une phrase avec seulement un élément, produit par le même informateur54. Pour toutes les situations, la position (codée POS) est l'élément sémantique primaire, suivie par la manière en général (codée MAN). En effet, les phrases contenant une précision positionnelle incluent une expression anthropomorhique, qui pour le suédois implique un verbe de position ou un dérivé, comme un participe passé ou présent. Pour le français, les verbes de position (ex. s'asseoir) ou périphrases verbales de posture, comme être debout, à la

verticale sont comptabilisés comme des expressions positionnelles. S'il existe plusieurs

phrases contenant l'information POS, la phrase qui présente la plus grande richesse informationnelle sera selectionnée. Si une phrase contient POS et MAN, l'information positionnelle est comptabilisée en premier, ce qui veut dire que dans les énoncés suivants, le (88) est catégorisé comme POS, alors qu'il contient les deux informations (stå – POS, på en

rad - MAN), et le (89) est catégorisé comme MAN.

(88) Det står skor en rad

il être debout.PRÉS chaussures.INDÉF sur une ligne sur

ett golv. SP007-S7F003

un sol

« Il y a des chaussures alignées par terre. »

(89) Skor en rad. SP007-S7F005

chaussures.INDÉFsur une ligne « Des chaussures alignées. »

Les phrases contenant un verbe positionnellement neutre et/ou sans aucune autre information spatiale sont codées avec NEU (neutre), comme dans la phrase (90) ci-dessous55.

54 Par exemple un énoncé contenant l'expression står uppställd « est debout vers le haut-mis debout » est prioritaire devant un énoncé contenant seulement le verbe står « est debout ».

(90) Une banane posée dans un verre. SP006-SGFK003

Les phrases sans élément verbal qui contiennent soit uniquement une préposition qui indique la relation spatiale entre la Figure et le Fond, soit seulement un étiquetage (« fausse » ellipse), sont codées ELL (ellipse). Les énoncés qui contiennent des verbes non-spatiaux (souvent d'activité, ou de possession) sont catégorisés comme AUT, une abréviation pour « autre ». Les transferts inspirés par la langue maternelle aussi bien que par les différentes L2, et qui ont été adaptés phonétiquement au suédois (cf. Viberg, 1998b:183) sont également codés par AUT dans ce codage général. Pour les cas où aucune réponse n'a été donnée, souvent à cause d'un manque de vocabulaire chez les apprenants L2 de niveau intermédiaire, l'énoncé est catégorisé comme NON (non-réponse). Les phrases contenant des alternances codiques ou qui sont inaudibles ont également été classées comme NON.

Pour chaque entité sémantique spatiale, à savoir le verbe et le satellite56, nous avons marqué les informations pertinentes exprimées, en nous limitant aux composantes sémantiques suivantes (inspirées de Hickmann et al, 2011:25) : M (Manière), couvrant toute information sur la manière ; C (Causativité), pour la causalité exprimée dans un mouvement provoqué ; T (Trajectoire), englobant les expressions qui indiquent la direction d'un mouvement. Selon la dichotomie de Talmy (2000), présentée au chapitre 2.5, la Trajectoire est exprimée soit dans le verbe, soit dans le satellite. Mais nous allons voir que l'expression de la Trajectoire peut se trouver dans les deux entités en même temps, ce qui donne un cadrage multiple (cf. Fortis & Vittrant, 2011:77). Ainsi, les langues du monde se diffèrent non seulement quant à l'entité sémantique qui exprime la Trajectoire, mais aussi dans le nombre d'entités où l'on peut trouver cette information (ibid:86). Dans les travaux de Fortis et al (2011), une discussion autour de la notion de la trajectoire est menée, et nous adoptons leur définition : « une ligne ou ensemble de points qui sont situés par rapport à un point de vue, i.e. un centre déictique ou point d'ancrage choisi par le locuteur ». Selon Grinevald (2011:55), la Trajectoire est construite à partir d'un calcul mental fait par le locuteur pour dégager la relation spatiale entre plusieurs entités. Par conséquent, la composante de la trajectoire se trouve également dans des relations spatiales sans mouvement (ibid:56, 64). Ainsi, les adverbes spatiaux suédois décrivant une

neutralité par rapport à l'élément sémantique de la manière.

56 La préposition contient bien évidemment une information spatiale, mais nous considérons que pour la plupart du temps, elle encode la relation entre la Figure et le Fond d'une manière fondamentale et neutre, même s'il existe des prépositions avec un sens plus spécifique (cf. Hickmann & Hendriks, 2006). Nous nous pencherons sur ces entités dans une étude ultérieure.

localisation, comme inne « à l'intérieur », uppe « en haut », ihop « l'un vers l'autre, ensemble », contiennent la notion de la trajectoire, voir l'exemple (91) ci-dessous, avec l'adverbe uppe.

(91) En vit och svart fågel uppe en gren.

un blanc et noir oiseau en haut sur une branche

« Un oiseau blanc et noir perché sur une branche. » SP011-SLMADK009

L'oiseau se trouve en haut dans l'arbre comme une conséquence de sa montée vers cet endroit. Or, ce mouvement ascendant est celle aperçue par le locuteur, qui lui se trouve en bas de l'arbre. Pour l'oiseau, s'il pouvait l'exprimer, la Trajectoire ressemble sans doute plus à une descente à partir du vol vers l'arbre.

Les composantes sémantiques exposées dans cette section peuvent être combinées entre elles dans une seule expression (cf. Grinevald, 2011:57). Prenons l'exemple du verbe de position dynamique ställa « mettre debout », qui contient M pour la position, C pour la Causativité du mouvement provoqué, ainsi que T pour la direction inhérente au mouvement. Les verbes positionnellement neutres, comme poser sont dénotés par C et T (cf. Kopecka, 2004:154), car le mouvement avec sa direction est causé par un agent. Or, lorsque ces verbes français sont préfixés par dé-, re- ou a(d)-, (ex : déposer, remettre, apposer) ils reçoivent le code sémantique CTT, car la Trajectoire est exprimée deux fois, une fois par la Trajectoire inhérente au mouvement provoqué, et une fois dans la signification du préfixe57. Le préfixe

dé- indique un mouvement à partir du lieu initial (Kopecka, 2004:135), ou la direction du haut

vers le bas (ibid:181), alors que re- représente le retour à l'endroit initial et porte un sens itératif (ibid:184). Le préfixe a(d)- exprime le fait d'atteindre le but et représente le lieu final du déplacement (ibid:181).

Les périphrases verbales françaises désignant la position sont considérées comme deux entités différentes, et nous comptabilisons le verbe conjugué (la copule) en tant que tel, et le syntagme adverbial, constitué par l'adverbe debout ou les participes passés adjectivaux

allongé et assis, dans les satellites (voir la phrase (93)). Or, lorsque le participe passé n'est pas

un attribut du sujet, mais fait partie du syntagme verbal dans l'expression de la temporalité, il appartient au verbe, comme dans la phrase (92)58.

57 Le préfixe dé- peut également avoir la signification privative, c'est-à-dire qu'il exprime le contraire du sens du verbe, mais ce n'est pas le sens présent pour ce cas (cf. Kopecka, 2004:175).

58 L'abbréviation pour l'informateur : S = sujet; GF = groupe français; K = kvinna « femme », suivi du numéro de l'informateur.

(92) Un homme s'est allongé sur un lit. DP002-SGFK001 (93) Une poupée qui est allongée sur un lit. SP002-SGFK004

Le point le plus important dans notre recherche est le contenu sémantique des expressions spatiales, mais nous nous intéressons également à certains aspect syntaxiques touchant les situations statiques. Le choix entre la Figure et le pronom formel comme sujet de la phrase constitue une spécificité suédoise. L'usage du sujet formel det est très productif en suédois (voir le chapitre 3.1. ci-dessus), surtout en combinaison avec des verbes de position statiques et intransitifs (cf. Svenska Akademiens grammatik, 1999:384ff), comme dans l'exemple (94)59.

(94) Det står en tom vinflaska

il être debout.PRÉS une vide vin-bouteille sur

en trästol. SP004-SLMADK006

une bois-chaise

« Il y a une bouteille en verre vide sur une chaise en bois. »

Nous avons codé ce choix dans les productions, afin d'évaluer l'usage du sujet formel parmi les apprenants L1 et L2. Ces constructions sont souvent utilisées par des enfants germanophones dans des narrations (cf. Hickmann, 2003:256). En suédois, les verbes de position statiques sont combinés à ce type de sujet dans 56,5% des cas (Hellerstedt, 2005:47). L'analyse de nos données montrera si ces résultats sont valables également dans l'étude actuelle.

L'emploi d'une phrase présentative est également codé, pour voir la charge informationnelle qu'une telle phrase porte, ainsi que la répartition de l'information spatiale entre la phrase introductive et la phrase locative. L'exemple ci-dessous éclairera nos propos.

(95) Det är en vinflaska som står

ce être.PRÉS une vin-bouteille qui être debout.PRÉS

en brun stol. SP004-S10P007

sur une marron chaise

« C'est une bouteille de vin qui est sur une chaise marron. »

59 Cette façon de construire la phrase existe également en allemand et semble très courante (cf. Hickmann, 2003:255). Or, en allemand, il ne s'agit que rarement du pronom impersonnel, mais d'un adverbe de lieu, comme da « là », parfois hier « ici ». Ce dernier usage a son équivalent dans le suédois du sud, où l'on préfère un adverbe de lieu (där « là », här « ici ») au pronom impersonnel dans ces constructions. Ce trait de langage pourrait être un vestige du danois, où la construction impersonnelle est introduite par un adverbe de lieu (cf. Plunkett & Strömqvist, 1992:466).

Les phrases présentatives introduites par det är « c'est » sont surtout d'une nature identificatrice, comme dans l'exemple (95). Mais elles peuvent également être locatives, si elles contiennent un complément adverbial de lieu, par exemple här « ici ». Les structures présentatives de perception contiennent un verbe du type voir (on voit une bouteille qui...), et le verbe avoir indique une expression présentative possessionnelle (nous avons une bouteille

qui...). En revanche, nous ne rendrons pas compte de ces phrases dans le chapitre des

résultats, pour faute de place. Toutefois, nous y reviendrons dans de futurs travaux.

Les autocorrections réalisées sur le choix de verbe sont intéressantes et surviennent dans tous les groupes d'informateurs. Nous marquons le verbe choisi au départ ainsi que le choix de verbe final, afin d'étudier les types de verbes et entrevoir le raisonnement inconscient du locuteur autour du sémantisme du verbe sélectionné pour la situation. Le verbe codé dans la phrase locative est celui pour lequel l'informateur s'est décidé, à savoir le dernier verbe énoncé. Les autocorrections des adultes peuvent être la conséquence d'un lapsus (cf. Bowerman, 1978a:979), alors que celle des enfants (et peut-être des apprenants L2) sont éventuellement dues à l'activation du domaine sémantique de la localisation, encodé par différents verbes, qui sont produits en désordre lors de la formulation (cf. Hellerstedt, 2011). Certains apprenants ont utilisé les verbes dynamiques dans les situations statiques. Il s'agit