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CHAPITRE 3 : CADRE DIDACTIQUE LA SCENE ET LE METTEUR EN SCENE LA SCENE ET LE METTEUR EN SCENE

2. L’enseignant et ses rôles dans le CM

2.1. Les universitaires

2.1.1. Comprendre le métier d’enseignant universitaire en général

L’enseignant dans le CM travaille à l’université, il est donc « universitaire », « enseignant à l’université » ou « enseignant du supérieur ». Comment s’entendent ces termes désignant cette profession ?

Le terme universitaire porte trois acceptions concernant une personne appartenant à l’Université : ce qui y est attaché et ce qui s’y déroule. En effet, premièrement, en tant que substantif, c’est celui qui dépend de l’université. Un universitaire peut être un membre de l’Université, enseignant(e) ou chercheur. Il s’appelle aussi académique dans

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d’autres pays francophones comme au Canada et en Belgique et le terme universitaire peut aussi désigner un étudiant ou une étudiante dans une université. Deuxièmement, en tant qu’adjectif, il s’agit de tout ce qui concerne l’université, les universités, au profit de leurs étudiants et de l’enseignement supérieur, par exemple études universitaires, restaurant universitaire. Troisièmement, cet adjectif se réfère à ce qui « est pratiqué à l’université », par exemple la critique universitaire, travaux universitaires. S’y ajoute la dernière acception dans ville universitaire pour souligner la présence importante des campus pour les études supérieures dans une ville.

L’universitaire ou l’enseignant du supérieur désigne :

« toute personne enseignant dans un établissement d’enseignement supérieur, qu’elle ait ou non des activités de recherche212 ».

L’enseignant universitaire est aussi désigné par un nom plus honorifique, professeur. En France, le titre « professeur des universités » est accordé via les concours à

« (tous) fonctionnaires titulaires nommés sur un emploi dans un établissement public d’enseignement supérieur et de recherche213 ».

La définition de ce métier est abordé d’une autre manière dans le dictionnaire du Robert : Le professeur est celui qui non seulement

« enseigne une discipline, un art, une technique ou des connaissances d’une manière habituelle et le plus souvent organisée214 »,

mais aussi est celui qui est

« titulaire d’une chaire d’enseignement supérieur215 ».

D’où l’intérêt d’étudier le terme chaire qui lui est étroitement rattaché. En effet, venu du latin cathedra et du grec kathedra, signifiant « siège à dossier », il désigne à l’origine le « siège d’un pontife dans le chœur d’une église », ensuite par extension la « dignité pontificale ». Au XVIème siècle, il désigne la « tribune élevée, du haut de laquelle un ecclésiastique adresse aux fidèles ses instructions et ses enseignements ». Un siècle après, la chaire est attribuée à la « tribune du professeur », et ensuite au « poste le plus élevé du professorat dans l’enseignement supérieur » qu’assume ce dernier (par exemple : une chaire de droit, de littérature. La création d’une chaire officialise un enseignement).

Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, dès le Moyen Âge, une des fonctions de l’université consiste à recruter du personnel, et aussi des élites au service du savoir et

212 Musselin Christine, 2008, Les universitaires, Paris, La Découverte, p. 8.

213 Selon article 3 – 13 octobre 2008, disponible sur le site MESR (Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche) : http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid22705/professeur-des-universites.html.

214 Le Robert, 1977, p. 2035. 215 id.

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de la formation au savoir. Aujourd’hui, cette tâche perdure et les enseignants sélectionnés sont appelés également des universitaires, en tant que personnel travaillant à l’université. Depuis la conception des universités, les universitaires se sont vus accorder un statut singulier dans la société française216. Ils étaient placés parmi les clergés et des officiers royaux lors des messes au Moyen-Âge. Pourtant, « l’appartenance au corps universitaire se fondait sur un serment, prêté au moment de l’entrée aux études, qui engageait pour la vie », s’agissant d’ « une mission scolaire » dès le Moyen-Âge, même si ces études faisaient partie de la chrétienté. Le maître est fort respecté, comme l’évoque l’écolâtre Bernard de Chartres au XIIème siècle : « Nains juschés sur les épaules de géants, nous voyons plus loin qu’eux ».

Cependant, la profession universitaire actuelle, désignant ici les enseignants-chercheurs, fait l’objet de peu de recherches, dont une des premières date de 1984. Cette étude a été menée par le sociologue Pierre Bourdieu afin de connaître Homo Academicus suivant des données des années 1969 : le sociologue démontre comment le pouvoir se construire à partir du savoir. Les travaux qui suivent dans les années 1990 constituent des enquêtes sur la génération des enseignants-chercheurs de la fin des années 1980. En l’occurrence, l’étude de Marie-Françoise Fave-Bonnet en 1993 et celle du Centre d’étude des revenus et des coûts en 1992 ont permis d’apporter une image plus contemporaine des universitaires, quoique datant de 20 ans par rapport au moment de réalisation de cette thèse. Elles nous livrent, en effet,

« une série d’observations qualitatives […] regroupées dans un “corps commun d’affirmation, d’analyses et de jugements de valeurs [qui] sous-tend le corpus recueilli :

précarité des rémunérations et bénéfice irremplaçable d’une extraordinaire liberté ;

imbrication et fécondation réciproques de l’enseignement et de la recherche ;

poids croissant du nombre et des charges ;

crainte d’une division interne de l’université en secteurs secondarisés et îlots préservés ;

caractère souvent ubuesques de l’organisation universitaire et de ses fonctionnements quotidiens ;

sentiment profond d’un non-reconnaissance sociale qui redouble le blocage des carrières en jetant la suspicion sur l’ensemble des procédures internes d’évaluations217 ».

Selon les analyses des chercheurs qui s’intéressent à ce public d’enseignants-chercheurs, la génération des années 80 connaît une inquiétude due au mélange entre un

216 Lusignan, 1999, p. 123, « On prouvait son droit d’en jouir soit par le témoignage de son maître ou du recteur, soit en produisant une lettre de l'université certifiant de son état. ».

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changement contextuel radical de l’enseignement supérieur, hérité du mouvement soixante-huitard et paradoxalement des contraintes persistant dans les vieilles facultés, engendrant une baisse de reconnaissance sociale des enseignants-chercheurs. Certes, une autre étude, menée par Jodelle Zetlaouis en 1999 à l’université de Paris 12 Val-de-Marne, souligne que « le passage d’une université élitiste à une université de masse » provoque une « remise en question des distances hiérarchiques entre enseignants et étudiants ». Cela met en place une « contestation du caractère « atemporel » des missions traditionnelles de l’université », c’est-à-dire de l’enseignement et de la recherche, « avec introduction d’une nouvelle fonction à dimension « utilitaire », dont nous parlerons dans les paragraphes qui suivent.

Au sujet de la profession d’enseignant-chercheur, l’article 3 du même décret est remplacé par les dispositions suivantes :

« Article 3 - Les enseignants-chercheurs concourent à l’accomplissement des missions du service public de l’enseignement supérieur prévues par l’article L. 123-3 du code de l’éducation ainsi qu’à l’accomplissement des missions de la recherche publique mentionnées à l’article L. 112-1 du code de la recherche.218 ».

Selon l’article, l’enseignant-chercheur fait partie d’abord des métiers au profit du service public. Qui dit public dit relatif au peuple, qui est à son service. C’est une personne qui contribue au domaine de l’enseignement, destiné à un public dans un pays où ce service est connu par son accès gratuit et obligatoire. En parallèle de cette mission, elle est appelée à faire de la recherche dite publique, constituant sa mission particulière en tant que chercheur. Les enseignants-chercheurs jouent un rôle tellement important dans l’enseignement supérieur qu’on disait que « l’université en France s’était construite essentiellement autour de ses professeurs, par comparaison avec les universités du nouveau monde qui se seraient plutôt articulées autour des étudiants219 ». En effet, ils assument un bon nombre de tâches liées à cette appellation, voire des extras dues aux modifications de leurs fonctions. A titre d’exemple, du côté de l’enseignement, s’agissant ici à la fois de la formation académique et de la formation professionnelle et aussi de différents types de formation, l’article dit qu’

« Ils participent à l’élaboration et assurent la transmission des connaissances au titre de la formation initiale et continue incluant, le cas échéant, l’utilisation des technologies de l’information et de la

218 Décret du Modifiant le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences et portant diverses dispositions relatives aux enseignants-chercheurs, août 2007.

91 communication. Ils assurent la direction, le conseil et l’orientation des

étudiants et contribuent à leur insertion professionnelle… Ils concourent à la formation des maîtres et à la formation tout au long de la vie.

… Ils ont également pour mission le développement, l’expertise et la coordination de la recherche fondamentale, appliquée, pédagogique ou technologique ainsi que la valorisation de ses résultats. Ils participent au développement scientifique et technologique.

… Ils participent à la diffusion de la culture et de l’information scientifique et technique. Ils assurent, le cas échéant, la conservation et l’enrichissement des collections confiées aux établissements et peuvent être chargés des questions documentaires.220»

S’y ajoutent de nouvelles fonctions administratives ou organisationnelles de la vie universitaire, à savoir :

« Ils participent aux jurys d’examen et de concours. Ils participent à la vie collective des établissements, aux conseils et instances prévus par le code de l’éducation et le code de la recherche ou par les statuts des établissements221 ».

Ces réseaux de travail vont des membres des équipes pédagogiques aux acteurs des milieux professionnels, des communautés scientifiques ultra-universitaires aux instances sociales économiques concernées.

Les fonctions de l’enseignant-chercheur sont donc d’une part, d’enseigner, de transmettre des savoirs et, en particulier à ce niveau, d’assurer la formation à la recherche, et d’autre part, de faire la recherche lui-même et d’intégrer ou de gérer des unités de recherche.

« Ils contribuent au sein de la communauté scientifique et culturelle internationale à la transmission des connaissances et à la formation à la recherche et par la recherche. Ils contribuent également au progrès de la recherche. Ils peuvent se voir confier des missions de coopération internationale.

Les professeurs des universités ont vocation prioritaire à assurer leur service d’enseignement sous forme de cours ainsi que la direction des unités de recherche.222 »

L’étude de Jodelle Zetlaouis sur les universitaires à Paris, mentionnée ci-dessus, identifie une typologie des conditions de l’enseignant-chercheur en fonction de nombreux facteurs223 : « selon leur façon d’exercer et de concevoir le métier d’enseignant, selon leurs attitudes par rapport à leur environnement de travail, selon les liens entre leurs pratiques et leurs représentations et selon leurs pratiques spatiales224 ». Or, une des typologies définie dans ce rapport montre une liaison entre les enseignants-chercheurs et

220 id. 221 id. 222 id.

223 Selon son enquête à travers un questionnaire auprès de 200 enseignants et une trentaine d’entretiens semi-directifs réalisés en fonction des résultats du questionnaire.

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leur degré d’attachement à leur espace de travail. Elle recense des principaux types d’enseignants-chercheurs suivant leur fréquentation d’établissement. Les premiers intéressés par leurs motivations personnelles vis-à-vis de l’université, et par leur carrière scientifique ou la reconnaissance sociale, se plaignent des locaux et des matériels dégradés, en les considérant comme un signe de la « dégradation sociale ». Alors que les seconds, soucieux plutôt de la vie commune et de l’environnement de l’établissement au lieu de leur carrière, se consacrent essentiellement à l’enseignement et à l’administration.

2.1.2. Qui sont en réalité des enseignants pouvant assumer des cours magistraux à l’université en France ?

En France, le nombre des enseignants dans l’enseignement supérieur est passé de 8131 en 1960 à 89 400 en 2005-2006, soit un taux d’augmentation de 0,03% à 0,4% de la population active. On en trouve plusieurs sortes.

Premièrement, ce sont des professeurs d’université et des maîtres de conférences, titulaires d’un poste dans l’enseignement supérieur, qui sont appelés autrement en France « enseignants-chercheurs » et dispensent les cours magistraux. Ils ont pour tâches, outre l’enseignement, la recherche prescrite par leur titre, l’encadrement des étudiants (pour leur mémoire ou thèse) et aussi la direction d’une ou des unités de recherche auprès de leurs collègues.

Deuxièmement, ce sont des personnels contractuels salariés de l’Etat pour une période de trois ans comme moniteurs en vue de préparer leur doctorat225. On compte aussi parmi des contractuels des attachés temporaires d’enseignement et de recherche (ATER) qui sont souvent des doctorants en fin de thèse ou de jeunes docteurs.

Troisièmement, il s’agit de professeurs certifiés (PRCE), enseignants du secondaire en poste à l’université, « titulaires du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré » (CAPES), mais surtout de professeurs agrégés du secondaire (les Prag).

Enfin, la quatrième catégorie regroupe des personnes qui ont des compétences pointues et spécifiques pour assurer des postes vacants. Ils peuvent être spécialistes des organismes de recherche ou des professionnels dans un domaine particulier, connus comme intervenants occasionnels.

Les enseignants universitaires représentent ainsi une grande variété de statuts et de carrières. Nous allons voir maintenant leurs rôles dans le cours magistral.

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