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CHAPITRE 2 : CADRE CONCEPTUEL EN TROIS VOLETS

3. Le cours magistral

Selon les historiens de l’éducation, la leçon ou le cours figure en première place parmi les activités pédagogiques en vigueur dans les collèges et l’université. Et « aujourd’hui encore, c’est la forme la plus commune d’enseignement dans le monde200 ». En effet, à l’université, le cours magistral est une des formes courantes de transmission des savoirs. Les CM prennent en général un volume important dans l’ensemble des enseignements dispensés à l’université (dans une discipline, 60% des cours sont des CM contre 40% de TD). Nous en arrivons maintenant à l’étude de notre objet principal, le cours magistral.

Nous avons cherché à comprendre ce que signifie le cours magistral en commençant par l’adjectif magistral et ensuite par le substantif cours. Pour comprendre ce qu’est un cours magistral, nous avons dû nous baser sur l’étude de l’ensemble des termes qui se réfèrent à cette notion, à savoir : maître, chaire, professeur.

3.1. Magistral

L’adjectif magistral vient du mot latin magistralis201 qui vient lui-même de « magister », le maître. Au sens littéraire, il renvoie à ce qui « par son caractère imposant pourrait appartenir, convenir à un maître ». Par exemple : un ton magistral veut dire un ton « doctoral, dogmatique, impérieux, péremptoire, solennel ». Au sens figuré c’est ce « qui est digne d’un maître, qui atteste la maîtrise », le terme a donc pour synonymes beau, grand, parfait, souverain, par exemple habileté magistrale.

Le terme adopte rarement, d’après le dictionnaire Robert, la signification « du maître », mais donne naissance au terme cours magistral. Nous allons ouvrir une parenthèse dédiée à cette notion de maître en nous demandant pourquoi ce type d’enseignement insiste sur cette caractéristique qui a donné sa dénomination.

3.1.1. Définition du maître

Le terme est issu du latin magister, voulant dire « chef, maître ». Dans le Robert, nous observons trois grandes acceptions du terme, dont la première désigne une personne qui exerce une domination, la deuxième se réfère à une personne qualifiée pour diriger, parue depuis le XIIème siècle et la troisième indique :

200 “Lecture”, dans The International Encyclopodia of Education. Research and Studies,, éd. Torsten Husen et T. Neville Postlethwaite, Owford, Pergamon Press, 1991 (éd. Orig. 1085), p. 2987, cité par Waquet Françoise, 2005, op. cit., p. 72.

79 « un titre donné à certaines personnes d’autrefois qu’on ne pouvait appeler

« Monsieur » ou encore au XIXème siècle aux paysans, aux partisans202 ».

Par ailleurs, nous avons trouvé dans le Dictionnaire de la langue pédagogique203, deux voies étymologiques issues du latin pour interpréter la notion maître. La première, à partir de dominus, indique celui qui commande, ordinairement parce qu’il possède, le maître de la maison. Elle s’utilise dans un sens moral pour désigner « celui qui domine ses passions et ses impulsions spontanées ». La seconde voie, magister, vient de magis, ce qui signifie « plus, davantage ». Il s’agit de « celui qui enseigne », qui possède en lui quelque chose de plus. Foulquié a expliqué deux emplois du terme en fonction du niveau d’enseignement : « au niveau élémentaire, comme corrélatif d’élève et équivalent d’instituteur ; au niveau supérieur, comme corrélatif de disciple et équivalent de professeur de faculté ».

Nous nous intéressons aux deux premières définitions du Robert qui servent à expliquer le rôle du maître dans le cours magistral.

3.1.2. Celui qui possède de l’autorité

Dans la première définition, le maître est celui qui « a pouvoir et autorité sur quelqu’un pour se faire servir, obéir » (synonyme de patron, seigneur), ou bien « a pouvoir d’imposer aux autres sa volonté » (maître de la maison)204. Être maître veut dire d’une part dans être maître quelque part « avoir plein d’autorité, toute licence là où on est », et d’autre part dans être maître de faire quelque chose « avoir entière liberté de ». Certaines expressions en français illustrent, cette interprétation, telles que l’œil du maître, parler en maître, agir en maître. D’où la désignation dérivée de celui en tant que maître qui « possède une chose » en se l’appropriant ou même en la conquérant, et puis qui se maîtrise soi-même, ou maîtrise les autres en les dominant.

On appelle enfin maître, au sens figuré, ce qui « gouverne quelqu’un, commande sa conduite ». En bref, la première définition de la notion de maître nous révèle l’idée d’une autorité presque absolue d’une personne sur une autre. Elle montre l’influence dont peut faire preuve quelqu’un sur autrui, notamment sur sa conduite, ses actes et ses comportements.

3.1.3. Celui qui excelle dans son art

Quant à la deuxième acception, elle s’intéresse à celui qui est « qualifiée pour diriger », il s’agit d’une personne qui « exerce une fonction de direction, de

202 Robert, 1977, p. 1134. 203 Foulquié Paul, 1971, id. 204 id.

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surveillance »205, maître de forges, maître d’œuvre, ou comme directeur de travaux intellectuels. Cette signification est tirée d’abord du monde de l’apprentissage des savoir-faire, pour désigner « le premier, le chef de ceux qui exercent la même profession dans un corps de métier, une entreprise », par exemple : maître cuisinier. Ce sens s’applique ensuite dans l’enseignement pour désigner la « personne chargée d’un cours dans une grande école ou enseignant dans une université avant d’accéder au titre de professeur, maître de conférence. Le fait que le titre maître de recherche soit transformé en directeur/directrice de recherche atténue-t-il la posture autoritaire de la personne qui a aujourd’hui pour vocation de diriger, d’orienter le travail de recherche ?

Resté dans le domaine de l’éducation en France, le terme maître ou maitresse renvoie à l’instituteur ou l’institutrice, qui enseigne aux enfants dans une école. Il s’agit d’une appellation en France et non d’un titre, qui est professeurs des écoles en France, les enfants parlent de maître ou maitresse à l’école. Un maître est considéré comme « modèle » et comme celui qui « excelle dans son art », dans la transmission ou le processus pour acquérir des savoirs et des savoir-faire.

En bref, l’étude de l’adjectif magistral renvoie à une idée d’autorité mais aussi de maîtrise du domaine où exerce le sujet. Afin de bien saisir la notion cours magistral, nous allons à présent examiner le terme cours qui détermine le cadre principal de notre objet.

3.2. Cours

Le terme « cours » est d’origine latine cursus206 : il porte trois acceptions majeures.

La première définition exprime un « écoulement continue » de l’eau, des fleuves. L’expression donner cours veut donc dire les laisser couler. La deuxième signification renvoie, aussi à « une suite continue », « une évolution dans le temps ». Le terme a pour synonymes déroulement, développement, enchaînement, succession, suite. Par ailleurs, le lexique donne aussi le sens de tournure dans le cours que prend une affaire, un fil dans reprendre le cours de ses idées, un courant dans le cours de l’ouvrage ou une durée dans le cours de la vie. Le terme est présent dans les expressions de l’ancien français (voyage au long cours) pour désigner une « longue traversée qu’accomplit un navire par opposition au cabotage ». Ces premières définitions du mot « cours » nous donneraient l’idée d’un parcours duratif et d’une suite continuelle et évolutive, ce qui peut être le commencement mais aussi une succession d’événements.

205 id.

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Dans la deuxième définition, nous trouvons trois sous-acceptions appartenant au thème de l’enseignement. En effet, premièrement, un cours est traduit par un « enseignement suivi » (sur une matière déterminée), depuis 1331, autrement dit il s’agit des enseignements tenus sur une suite de séances à propos d’une matière, par exemple cours de chimie, cours de littérature. Il est présenté comme « une des leçons au cours de laquelle un enseignement est donné », ce qui correspond à une séance de cours. Le terme employé au pluriel désigne un enseignement, par exemple des cours par correspondance. Deuxièmement, en disant qu’il s’agit d’un cours élémentaire, d’un cours intermédiaire ou d’un cours avancé, nous parlons du « degré d’études »207. Et troisièmement, un cours se transforme en matériel pédagogique de l’enseignant et de l’apprenant : c’est aussi un « livre pédagogique exposant une matière d’enseignement, c’est-à-dire un manuel ; c’est aussi un « livre reproduisant les leçons d’un cours », fréquemment désigné sous le terme de « polycopiés » préparés par l’enseignant ou de « notes » prises par l’apprenant.

La troisième acception, utilisée à partir du XVIIème, se rapporte au domaine d’échange monétaire en désignant « une circulation régulière, une marchandise ou une monnaie pour une valeur donnée ».

Nous allons suivre les éclairages explicatifs de la première définition pour tenter d’approfondir ce qu’est un cours magistral.