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QUATRE POINTS D’OBSERVATION EN ISERE

A. Evolutions socioéconomiques des quatre territoires

1. Un accroissement démographique généralisé

Si la démographie du département de l’Isère est plutôt stable depuis 1990 avec une augmentation d’environ 1% de la population totale, les points d’observation sélectionnés pour notre enquête connaissent une croissance démographique plus soutenue par rapport à la moyenne départementale, même s’il existe des différences parfois marquées : ainsi les cantons de Villard-de-Lans et de Saint-Ismier voient leur population exploser depuis 1990, tandis que l’attrait pour le canton de Pont-de-Chéruy et la commune d’Echirolles ne se renouvelle qu’à partir de 1999.

L’INSEE classe le canton de Saint-Ismier dans le territoire Pays du Grésivaudan113 qui s’étire le long de la vallée de l’Isère entre Grenoble et Chambéry : le canton ne représente donc qu’une toute petite partie du Pays du Grésivaudan mais sa situation est assez comparable à celle du reste de ce territoire, nous fournissant donc des informations utiles pour caractériser les évolutions démographiques de la zone. Au cours des années 1990, le Pays du Grésivaudan s’est largement urbanisé : en dix ans la proportion de la population du territoire vivant dans un espace à dominante urbaine est passé de 74% à 92%. Cette extension de l’espace urbain dans la vallée est principalement due à l’élargissement de l’agglomération grenobloise qui intègre en 1999 cinq communes supplémentaires dans son aire urbaine par rapport à 1990. Entre 1962

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et 1999, la population a plus que doublé dans le Pays du Grésivaudan, et ce essentiellement grâce à l’apport migratoire. Les nouveaux arrivants sur ces territoires sont essentiellement des jeunes ménages de cadres ou de professions intermédiaires, venus de l’agglomération grenobloise pour près des deux tiers. Mais le Pays du Grésivaudan attire aussi des habitants venus des aires urbaines lyonnaises et parisiennes. Dans le canton de Saint-Ismier, les nouveaux arrivants sont surtout des ménages avec un haut niveau de revenus114, et la part des familles dans les ménages des communes du canton est largement supérieure à la moyenne départementale (cf. tableau 2.3). En 1999, 83,5% des logements sont des logements individuels même si l’on note une augmentation de plus de 70% des logements collectifs. L’augmentation de la population a aussi entraîné une forte augmentation des déplacements : une grande partie des nouveaux arrivants, comme des anciens habitants, travaille dans l’aire urbaine grenobloise située entre Grenoble et le canton de Saint-Ismier (notamment dans les grandes zones industrielles). Ainsi 80% en moyenne des actifs du canton travaillent dans une autre commune du département (cf. Tableau 2.4).

Comme toutes les Alpes, le canton de Villard-de-Lans connaît un premier essor au début du 20ème siècle avec le développement d’un « tourisme climatique », et dans une moindre mesure du tourisme lié à la diffusion de l’alpinisme. Du fait de sa situation en moyenne altitude et de son ensoleillement, le plateau du Vercors - et notamment Villard-de-Lans - bénéficie de l’intérêt porté au climatisme et au thermalisme et devient ainsi un lieu de villégiature estivale pour la bourgeoisie du début du siècle : les premiers hôtels et résidences de tourisme de luxe apparaissent et de nombreuses maisons climatiques ouvrent leurs portes pour accueillir des convalescents venus de la France entière (Sgard 1997). Ce sont souvent les mêmes raisons qui poussent aujourd’hui des jeunes ménages, le plus souvent avec des enfants, à venir s’installer dans le canton de Villard-de-Lans plutôt qu’ailleurs dans l’aire urbaine grenobloise (cf. Tableau 2.3). En effet, même si la part des familles dans les ménages du canton a diminué par rapport à 1999, suivant le même mouvement qu’au niveau départemental, celle-ci reste sensiblement supérieure à la moyenne de l’Isère. D’ailleurs, un peu plus d’un tiers de ces nouveaux arrivants a quitté l’agglomération grenobloise pour s’installer dans le canton, tandis qu’un autre tiers est venu de l’aire urbaine parisienne. Ces ménages sont essentiellement issus des classes moyennes et supérieures : professions intermédiaires, cadres et professions intellectuelles supérieures115. En grande majorité, ces nouveaux arrivants sont de jeunes ménages, avec ou sans enfants, qui choisissent de s’installer

114 INSEE Rhône-Alpes, Portrait du Pays du Grésivaudan, septembre 2008.

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à l’écart de l’aire urbaine grenobloise pour pouvoir continuer à y travailler tout en bénéficiant d’un cadre de vie plus proche de la nature. Il n’est pas rare non plus de voir des jeunes retraités qui décident d’abandonner leur vie urbaine pour passer leur retraite à la « campagne » et « au calme », convertissant leur résidence secondaire en résidence principale, ou construisant une nouvelle maison sur le plateau du Vercors. Du fait de la situation du canton en zone rurale, l’essentiel de ses résidences principales sont des maisons individuelles, l’habitat collectif étant plutôt réservé au tourisme et aux résidences secondaires.

A l’inverse de ces deux premières zones, le canton de Pont-de-Chéruy et la commune d’Echirolles ont vu leur attrait se renouveler plus récemment. Entre 1990 et 1999, alors que la population augmente de près d’un quart dans le territoire Nord-Isère Boucles du Rhône, défini par l’INSEE, le canton de Pont-de-Chéruy est l’une des rares zones du territoire à voir sa population n’augmenter que légèrement (+2 points en moyenne sur le canton). Cette faible augmentation de la population est essentiellement due à la crise industrielle locale (métallurgie, tréfilerie, textile) qui touche l’ensemble du canton à partir des années 1980, entraînant de nombreux départs de populations. Mais la dureté de la crise économique est compensée, au moins au niveau démographique, à partir du début des années 1990, par des arrivées assez nombreuses de nouveaux résidents dans l’ensemble du Nord-Isère, provenant pour deux tiers de l’aire urbaine lyonnaise, notamment de « la ceinture rouge lyonnaise » (Villeurbanne, Vaulx-en-Velin et Saint-Priest)116, et parmi le tiers restant, de l’aire parisienne pour un tiers117. Ces nouveaux arrivants sont en grande partie des familles qui quittent la banlieue lyonnaise pour acheter ou construire un pavillon, contribuant ainsi à la forte présence des familles dans les ménages du canton (cf. tableau 2.3). Comme dans le canton de Saint-Ismier, l’afflux de population venue de l’agglomération voisine entraîne un accroissement important des déplacements quotidiens entre l’agglomération lyonnaise et le Nord-Isère : 54,4% des habitants du canton de Pont-de-Chéruy travaillent hors du département de l’Isère, dont plus de 65% des professions intermédiaires et des cadres ou professions intellectuelles supérieures (cf. tableau 2.4). Ce mouvement se poursuit et se renforce dans les années 2000, notamment avec l’augmentation des prix immobiliers dans l’aire urbaine lyonnaise, forçant les jeunes ménages souhaitant accéder à la propriété à s’en éloigner.

La dernière de nos zones d’enquête, la commune d’Echirolles, a eu une évolution similaire à celle du canton de Pont-de-Chéruy, mais de façon bien plus accentuée. Entre 1982 et 1999,

116Nous reviendrons par la suite sur la provenance des habitants du canton de Pont-de-Chéruy mais soulignons

d’ores et déjà que ces informations recoupent celles recueillies dans nos entretiens semi-directifs. 117

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la ville d’Echirolles a perdu 12,2% de sa population, mais la tendance s’est inversée avec une augmentation de 10%, entre 1999 et 2006, notamment sous l’effet de la construction de 9,6% de logements supplémentaires. Ces constructions de nouveaux logements sont pour l’essentiel dues au grand projet d’urbanisme lancé au début des années 1990 avec l’objectif de doter la ville d’un véritable centre-ville, celle-ci n’étant jusqu’alors qu’une succession d’immeubles, dont une grande partie de logements sociaux, construits dans la précipitation pour tenter de suivre l’essor économique de l’après-guerre et de loger les milliers d’ouvriers français et immigrés venus travailler dans les usines de l’agglomération grenobloise. Petit à petit, Echirolles est complètement absorbée par l’agglomération grenobloise, les champs laissent place aux centres commerciaux, les franges les plus aisées de la population quittent les tours pour acheter des pavillons à l’extérieur de la ville. Durement touchée par la crise industrielle dans les années 1990 et la fermeture de nombreuses usines, la ville souffre d’une mauvaise image due à la dégradation des logements construits trop rapidement, au fort taux de chômage et commence à se transformer en « ghetto urbain », concentrant tous les problèmes liés à la crise économique et à l’intégration des populations immigrées118. Le projet de centre-ville, profitant de l’arrivée du tramway dans la commune, est donc destiné à lutter contre cette évolution. Un nouveau quartier surgit de terre avec d’abord la construction d’un lycée, d’un équipement culturel, d’un multiplexe et de quelques immeubles. Puis rapidement toute une zone commerciale s’installe, une clinique du centre-ville de Grenoble choisit d’y déplacer ses locaux pour les agrandir, des dizaines d’immeubles sont construits ainsi qu’un nouvel hôtel de ville, respectant les normes de construction « haute qualité environnementale » (HQE). L’architecture nouvelle de la ville et la construction de nombreuses infrastructures permettent alors l’arrivée de nouveaux habitants, qui sont plus souvent des ménages sans enfants que dans les autres zones sélectionnées ou dans le reste du département : en effet, la part des familles dans les ménages de la ville diminue de 7 points entre 1999 et 2006, malgré l’augmentation de 10% de la population sur la même période (cf. Tableau 2.4).

118 Les quartiers les plus en difficulté de la ville sont inclus dans les différents dispositifs mis en place par la politique de la ville depuis les années 1980. Depuis 2005, la mairie d’Echirolles a élaboré un dispositif particulier sur ces quartiers, la Gestion urbaine et sociale de proximité, qui associe les habitants aux opérations d’aménagement (http://www.ville-echirolles.fr/citoyennete/gusp/index.php)

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Tableau 2.3.

4 zones : évolution de la population et part des familles dans les ménages119

Pop. totale 2006 Evo. pop. 1999-2006 (%) Evo. pop. 1990-99 (%) Part des familles 2006 (%) Part des familles 1999 (%) Canton de Villard-de-Lans 11604 +17 +21 69,1 71,6 Canton de Saint-Ismier 19765 +14 +18 80,2 83,8 Canton de Pont-de-Chéruy 23431 + 5 + 2 77 80 Echirolles 36112 + 10 - 5 63,2 70,3 Isère 1169491 +0,8 +1 66,6 69,3 Tableau 2.4

4 zones : lieu de travail en fonction des catégories socioprofessionnelles (en %)120

Dans la commune de résidence

Dans une autre commune du

département

Dans un autre département de la

région

SI VDL PDC ECH SI VDL PDC ECH SI VDL PDC ECH Agricul. et PIC 36,2 78,7 44,1 49,2 60,6 22,6 14,3 49,1 2,7 1,4 40,4 1,1 Cadres sup., prof. intellec. 9,0 31,9 11,9 19,8 85,3 59,5 16,7 75,4 3,4 6,6 68,3 3,2 Prof. interm. 13,3 34,7 11,9 24,3 85,7 60,0 20,6 72,7 0,8 3,4 65,4 1,9 Employés 24,4 55,5 27,7 36,5 72,8 43,1 22,4 62,9 1,9 0,8 49,4 0,2 Ouvriers 28,0 45,7 17,4 28,7 72,0 52,9 33,2 70,5 0,0 0,0 49,1 0,6 Ensemble 15,9 47,1 20,0 29,7 80,6 49,1 24,5 68,4 2,2 2,4 54,4 1,2

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