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DECOMPOSITION ET RECOMPOSITION DES POINTS D’OBSERVATION

A. Hétérogénéité socioéconomique des zones sélectionnées

1. Spécificités de l’accroissement démographique

Si, comme nous l’avons montré dans le chapitre 2, l’accroissement démographique est commun à nos quatre points d’observation et largement supérieur à celui du département de l’Isère – avec des spécificités propres aux quatre contextes –, des différences sont néanmoins observables entre les différentes communes des trois cantons, respectivement, ainsi qu’entre les différents quartiers d’Echirolles. Il est essentiel de souligner ces répartitions différenciées de nouveaux arrivants dans les villages et bourgs concernés, en raison des bouleversements

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non négligeables, qu’ils amènent dans les structures sociales existantes, dans des villages qui ne comptent parfois que quelques centaines d’habitants.

Dans le canton de Saint-Ismier, la plus forte période de croissance démographique a eu lieu entre 1990 et 1999. Même si la croissance est toujours positive, on observe aujourd’hui son ralentissement (cf. tableau 3.1) car les communes les plus proches de Grenoble ont légèrement perdu de leur attrait au profit des communes situées plus au nord, hors du canton, en direction de la Savoie, en raison d’un marché immobilier moins saturé. La seule commune à connaître encore une très forte croissance démographique est Montbonnot-Saint-Martin, en raison du développement sur la commune d’une nouvelle ZIRST, accompagnée de nombreux programmes immobiliers de construction de logements collectifs neufs, à la différence des autres communes où l’habitat individuel est privilégié213.

Carte 3.1

Carte du canton de Saint-Ismier

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En effet, la commune de Montbonnot compte environ 35% d’appartements dans son parc immobilier en 2008, un chiffre en constante augmentation, alors que dans les autres communes, la part des appartements représente entre 7% et 12% du parc immobilier. A Saint-Ismier, cette part est même en diminution puisque, en 1999, elle représentait 18% contre 17% du parc immobilier aujourd’hui, ce qui signifie que proportionnellement il y a eu plus de construction de maisons que d’appartements dans la commune (INSEE, Chiffres-clés 2010).

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Tableau 3.1.

Canton de Saint-Ismier : évolution de la population et part des familles dans les ménages (par canton et par commune)214

Pop.totale 2006 Evo. pop. 1999-2006 (%) Evo. pop. 1990-99(%) Part des familles 2006 (%) Part des familles 1999 (%) Canton de Saint-Ismier 19765 +14 +18 80,2 83,8 Bernin 3079 +6 +17 81,9 88,1 Biviers 2470 +4 +6 82,7 85,2 Montbonnot-Saint-Martin 5017 +31 +36 75,7 78,1 Saint-Ismier 6543 +10 +12 80,9 84,2

Saint-Nazaire les Eymes 2656 +13 +21 82,2 85,8

Isère 1169491 +0,8 +1 66,6 69,3

Dans le canton de Villard-de-Lans, l’augmentation de la population est généralisée mais toutes les communes du canton ne voient pas leur population augmenter de la même façon : les communes les plus prisées sont celles situées le plus près des grands axes de circulation et de l’agglomération grenobloise (cf. tableau 3.2) : ainsi, les communes de Saint-Nizier du Moucherotte et de Lans-en-Vercors ont connu une croissance d’abord exponentielle sur la période 1990-1999, puis encore soutenue sur la période de 1999-2006. La commune de Méaudre figure parmi celles qui présentent un accroissement démographique important, mais démarrant en 1999, ce qui s’explique par l’augmentation de la pression immobilière sur les communes les plus proches et donc le choix plus tardif des nouveaux arrivants des communes un peu plus éloignées des grands axes de communication du plateau du Vercors.

Tableau 3.2.

Canton de Villard-de-Lans : évolution de la population et part des familles dans les ménages (par canton et par commune)215

Pop.totale 2006 Evo. pop. 1999-2006(%) Evo. pop. 1990-99 (%) Part des familles 2006 (%) Part des familles 1999 (%) Canton de Villard-de-Lans 11604 +17 +21 69,1 71,6 Autrans 1739 +13 +10 // // Corrençon-en-Vercors 375 +16 +22 // // Engins 473 +13 +19 // // Lans-en-Vercors 2387 +18 +40 70,2 74,3 Méaudre 1334 +28 +24 // // Saint-Nizier du Moucherotte 1000 +24 +40 // // Villard-de-Lans 4296 +13 +14 65,1 66,8 Isère 1169491 +0,8 +1 66,6 69,3

214 Source : INSEE, RGP 1990, RGP1999, Populations légales 2006 (entrées en vigueur au 1er janvier 2009), RP

2006, Chiffres-clés.

Nota bene pour tous les tableaux de ce chapitre : nous faisons apparaître en surlignage bleu les chiffres des

communes et des quartiers sensiblement supérieurs aux données cantonales et communales.

215 Source : INSEE, RGP 1990, RGP 1999, Populations légales 2006 (entrées en vigueur au 1er janvier 2009), RP

2006, Chiffres-clés.

Les communes dont le nombre d’habitants est inférieur à 2000 ne figurent pas dans les tableaux car l’INSEE ne peut fournir des données détaillées sur des communes aussi petites, pour cause de secret statistique.

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Carte 3.2.

Carte du canton de Villard-de-Lans

Du côté des zones dont l’attrait ne s’est que récemment renouvelé, le constat d’une augmentation différenciée de la population selon les communes est également valable. Ainsi, dans le canton de Pont-de-Chéruy, ce sont les communes de Pont-de-Chéruy et de Charvieu-Chavagneux, soit les deux communes les plus peuplées et les pôles industriels du canton, qui ont le plus souffert de défection de la part de la population. A l’inverse, les petites communes rurales du nord du canton, limitrophes du département du Rhône, voient, parfois de façon exponentielle, s’accroître leur population. Cette tendance se prolonge encore aujourd’hui avec un attrait supérieur des petites communes, plus rurales, que des bourgs industriels du canton (cf. tableau 3.3). En effet, le canton de Pont-de-Chéruy n’est pas composé de communes homogènes : les villes de Pont-de-Chéruy, de Charvieu-Chavagneux et, dans une moindre mesure, de Chavanoz, ont été le lieu d’implantation de l’industrie locale (métallurgie, tréfilerie, textile…), gravement touchée par la crise à partir des années 1980 et dont les communes peinent à se remettre aujourd'hui. L’industrie locale fonctionnait sur un modèle paternaliste, prévoyant la totalité de la vie de ses ouvriers par la construction de cités ouvrières à proximité des usines et d’écoles techniques destinées à la formation de leurs enfants, attirant ainsi une main d’œuvre nombreuse, souvent immigrée et peu qualifiée

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Gilbert Parent 2007). La désindustrialisation locale entraîne donc une nécessaire reconversion des anciens ouvriers et de leurs enfants vers de nouvelles activités, qu’il leur est parfois difficile d’envisager216. A l’inverse, les trois autres communes (Anthon, Janneyrias, Villette d’Anthon) sont restées des communes beaucoup plus rurales, malgré l’industrialisation des autres communes, et sont en outre les plus proches du département du Rhône : pour ces deux raisons, ces communes sont les plus attractives actuellement, essentiellement pour des familles issues des classes moyennes, venues de l’agglomération lyonnaise et cherchant à acheter un pavillon sur un marché moins saturé.

Carte 3.3.

Carte détaillée du canton de Pont-de-Chéruy

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Sur la question de la reconversion des ouvriers de l’industrie, voir :

- Stéphane Beaud, Michel Pialoux, Retour sur la condition ouvrière, Paris, Fayard, 1999 ; - Pierre Bourdieu (dir.), La misère du monde, Paris, Seuil, 1993.

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Tableau 3.3

Canton de Pont-de-Chéruy : évolution démographique dans le canton, par commune217

Pop.totale 2006 Evo. pop. 1999-2006(%) Evo. pop. 1990-99 (%) Part des familles 2006 (%) Part des familles 2006 (%) Canton de Pont-de-Chéruy 23431 + 5 + 2 77 80 Anthon 954 + 4 + 32 // // Charvieu-Chavagneux 7856 0 -3 79,5 82,8 Chavanoz 4167 + 5 + 1 78,1 79,5 Janneyrias 1398 + 20 + 15 // // Pont-de-Chéruy 4866 + 7 -3 64,6 68,9 Villette d'Anthon 4190 + 7 + 11 84,7 88,6 Isère 1169491 + 0,8 + 1 66,6 69,3

Bien que nous ne disposions pas de l’ensemble des chiffres par quartiers pour la commune d’Echirolles, la croissance démographique de la ville est certainement due à la construction de nouveaux programmes immobiliers, qui créent notamment un nouveau quartier et un nouveau centre-ville pour Echirolles218 (cf. Tableau 3.4). En effet, les quartiers situés au centre de la commune connaissent respectivement un accroissement de leur population de 24% et 30% entre 1999 et 2006, alors même que les quartiers plus anciens perdent encore des habitants (cf. carte 3.4). Les quartiers ont été très structurants dans l’histoire de la ville : ainsi, le premier quartier ouvrier de la ville, construit dans l’entre-deux-guerres, la Viscose (Szenes 1988), était situé à plusieurs kilomètres du centre-ville historique d’Echirolles et reste aujourd’hui assez éloigné du centre-ville actuel. En raison de son éloignement du bourg, mais aussi du paternalisme des dirigeants de l’usine, le quartier ouvrier est doté, dès sa construction, de toutes les commodités : commerces, églises, amicales sportives, etc. (Blondé 2008). La constitution du quartier de la Viscose, qui accueille rapidement plus de 2000 habitants, soit plus que la population du vieux bourg, entraîne alors des conflits politiques à l’échelle municipale sur les choix d’action publique, notamment autour de la création d’une nouvelle école destinée aux enfants des ouvriers (Mischi 2002, p.337). L’apparition de cette cité ouvrière peut être considérée comme la première étape de la transformation du village d’Echirolles en banlieue de Grenoble, pôle industriel naissant. Par la suite, lorsque les communistes parviennent à la tête de la mairie, en 1945, ils travaillent à l’inclusion de leur bastion de la Viscose dans la ville, commençant ainsi à donner un début de cohésion à ce qui n’était jusqu’alors que deux « bourgs » rivaux – et ne ressemblait pas beaucoup à une ville –,

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Source : INSEE, RGP 1990, RGP 1999, Populations légales 2006 (entrées en vigueur au 1er janvier 2009), RP

2006, Chiffres-clés.

Les communes dont le nombre d’habitants est inférieur à 2000 ne figurent pas dans les tableaux car l’INSEE ne peut fournir des données aussi détaillées sur des communes aussi petites pour cause de secret statistique.

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même si la construction de nombreux grands ensembles à partir des années 1960 (la Ponatière, la Luire, Jean Jaurès, puis la Villeneuve d’Echirolles ou le Village 2) a finalement contribué à maintenir l’isolement du vieux quartier ouvrier, en reproduisant l’apparition d’îlots urbains faiblement reliés entre eux (cf. carte 3.4). Enfin, plusieurs quartiers de la ville regroupent des populations qui connaissent d’importantes difficultés socioéconomiques : une zone urbaine sensible, composée des quartiers des Essarts et de Surieux, soit 19% de la population de la ville. Trois autres quartiers font l’objet de contrats urbains et de cohésion sociale (La Luire, Viscose et le Village 2) : tous trois sont des quartiers populaires avec une forte présence des ouvriers et des employés et une importante présence de population immigrée, comme nous le verrons. Le quartier de la Luire présente de surcroît la caractéristique d’avoir accueilli une large part des pieds-noirs rapatriés d’Algérie à Grenoble en 1962 (Comtat 2006). Les autres quartiers de la ville sont des quartiers résidentiels où la population est plus mélangée (Français d’origine et immigrés, classes populaires et classes moyennes ou supérieures, propriétaires et locataires).

Tableau 3.4

Echirolles : évolution démographique de la commune219

Pop.totale 2006 Evo. pop. 1999-2006(%) Evo. pop. 1990-99 (%) Part des familles 2006(%)

Part des familles 1999 (%) Echirolles 35687 + 8,1 -5 63,2 70,3 Jean Jaurès 2076 - 7,1 // // // Luire / Viscose 3448 - 5,2 // // // La Ponatière 3293 + 4 // // // Centre 4075 + 24,4 // // // Village 2 2456 + 0,1 // // // Les Granges 4345 + 1,4 // // // Surieux 3134 - 2,8 // // // Les Essarts 4853 + 11,4 // // // Frange V. /Command 3040 + 1,8 // // // Mairie – P.Langevin 4968 + 30,1 // // // Isère 1169491 + 0,8 + 1 66,6 69,3

219 Source : INSEE, RGP 1990, RGP 1999, Populations légales 2006 (entrées en vigueur au 1er janvier 2009), RP

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Carte 3.4.

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2. Portrait socioéconomique des populations à l’échelle des communes et des

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