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Transfert des approches de l’innovation technique à l’innovation des compétences

quelques notions employées par la suite

Chapitre 4 Enquête sur l’offre d’expertise 1 innovante

4.1 Application des sciences humaines et des sciences des organisations à l’analyse de l’innovation

4.1.2 Transfert des approches de l’innovation technique à l’innovation des compétences

Le concept de cadre de référence sociotechnique permet d’explorer parallèlement le cadre d’usage –la demande d’expertise (chapitres 2 et 3)- et le cadre de fonctionnement – l’offre d’expertise à laquelle nous avons consacré l’essentiel de cette recherche. L’application du concept pour observer les mutations de l’expertise nécessite de poser l’hypothèse du changement de délimitation du cadre et de justifier l’analogie entre l’innovation technique et l’innovation des compétences d’expertise.

L’hypothèse du changement de cadre de référence socio-technique : de la planification des transports à la gestion durable de la mobilité

Dans les deux précédents chapitres, nous avons mis en évidence le lien entre les objectifs des politiques de transport/mobilité et les orientations. En particulier, nous avons souligné la cohérence et la complémentarité des dispositifs de fonctionnement mis en place par le ministère de l’Equipement afin de développer l’offre de transport motorisée. A la façon de monsieur Jourdain, nous avons appliqué le cadre de pensée décrit par P. Flichy. Le schéma suivant l’illustre de façon synthétique. Il correspond approximativement à la période 1960- 2000 sachant que les imaginaires techniques et sociaux précèdent de façon souterraine8 les

cadres de fonctionnement et d’usage.

Figure 4-1 Cadre de référence sociotechnique de la Planification des transports

Debizet 2004 Thèse : De la planification des transports à la gestion durable de la mobilité Mutations d’une expertise

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Le chapitre 2 illustre cette idée de mouvements souterrains, qui de la préservation de l’environnement à la cohésion sociale prépare le concept de mobilité durable ; le basculement de l’opinion des grenoblois vis à vis de la restriction du stationnement (chapitre 2) montre l’interaction entre un imaginaire technique – précisément le tramway à plancher bas- et les imaginaires sociaux.

Nous avons fait l’hypothèse d’un changement du cadre de référence sociotechnique9 pour

l’expertise : la gestion durable de la mobilité.

Le nouveau cadre de référence est esquissé dans les chapitres précédents. Le chapitre 2 consacre les imaginaires sociaux tels que la préservation de l’environnement, la cohésion urbaine et la compétition économique à laquelle se livrent les villes. Ces imaginaires constituent le socle d’une vision des usages des infrastructures et services de mobilité. Le chapitre 3 précise les imaginaires techniques dont certains découlent directement d’un imaginaire social (de la planète au quartier) ainsi que le volet institutionnel du cadre de fonctionnement (montée en puissance des agglomérations-AOTU et de la Région, Schémas territoriaux de services de transport et de mobilité, …).

Figure 4-2 Cadre de référence sociotechnique de la Gestion durable de la mobilité

Debizet 2004 Thèse : De la planification des transports à la gestion durable de la mobilité Mutations d’une expertise

Dans le cadre de référence de la Gestion durable de la mobilité ci-dessus, les points d’interrogation appliqués aux ressources conceptuelles relatent des thématiques qui sont au coaur de cette recherche : quelle nouvelle expertise ? Quelle organisation pour cette expertise ? Autrement dit : qu’est-ce qui se substitue aux « Modèles de déplacements »10 et à

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A la lumière des analyses développées précédemment, le « cadre de référence sociotechnique », laisse entendre une diversité de composantes nouvelles, alors que le « paradigme » correspondrait à une nouvelle théorie englobant la précédente (la théorie de la relativité par rapport à celle de Newton [Kuhn 1972]).

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Résumer l’expertise en planification des transports à la modélisation des déplacements est excessivement réducteur mais la schématisation impose de ne sélectionner que ce qui symbolise l’expertise. Nous avons expliqué (chapitre 3) que la précision et le respect uniforme de la réglementation et de la doctrine technique routière limite la marge de manoeuvre de la conception et tend à réduire la mission du planificateur à la détermination de la

l’« Ingénierie publique d’Etat » qui constituaient des éléments essentiels du cadre de fonctionnement de la Planification des transport ? On peut se demander aussi si le concept de services de mobilité introduit par la loi sur l’aménagement et le développement durable du territoire correspond bien à une réalité.

Remarquons que si nous avions limité notre observation aux années 60 à 90, il est possible que nous aurions fait l’hypothèse que la maîtrise de l’automobile et le développement des

modes alternatifs constituent le nouveau cadre de référence pour l’expertise. Cela pose la

question du périmètre spatio-temporel de l’observation et plus globalement celle des méthodes de l’analyse scientifique.

L’hypothèse de l’existence d’un système français d’expertise en transport et mobilité

L’expertise, au sens d’un ensemble de savoirs et de savoir-faire, à laquelle nous nous intéressons, est celle détenue par un ensemble de personnes ou d’organisations dont l’activité professionnelle consiste à apporter des éléments d’aide à la décision aux acteurs décisionnels et éventuellement à concevoir, sous l’autorité des décideurs, des services ou des équipements contribuant à la mobilité des personnes. Il s’agit d’une expertise professionnelle par distinction de l’expertise décisionnelle ou de celle des acteurs/usagers11.

Nous désignons aussi l’ensemble de ces personnes et organisations par le même terme : expertise. Schématiquement12, l’expertise se décompose en quatre catégories :

• Expertise interne aux collectivités locales et à leur regroupement. Cette expertise cumule des fonctions de maîtrise d’ouvrage et de maîtrise d’œuvre voire d’exploitation. Elle publie peu à son nom, ses productions s’insèrent dans des documents argumentaires validés politiquement par les élus et qui s’adressent avant tout aux acteurs décisionnels locaux ou au grand public.

• Expertise intégrée des services de l’Etat. Avant la décentralisation, cette expertise cumulait les fonctions de maîtrise d’ouvrage et de maîtrise d’œuvre. Les Cete interviennent en appui des DDE sur des missions d’études (maîtrise d’œuvre) et d’assistant maître d’ouvrage. Le Certu capitalise le savoir-faire et publie abondamment des documents de conceptualisation ou de méthodologies pour le réseau scientifique et technique de l’Equipement et les maîtres d’ouvrage (cf chapitre 3).

catégorie et du nombre de voies des infrastructures, ce à quoi la modélisation s’applique. D’autres compétences existent, mais le contexte de fonctionnement réduit leurs possibilités d’utilisation.

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Les acteurs décisionnels ainsi que chacun des usagers/acteurs disposent de savoirs liés à l’usage des services de mobilité et des infrastructures de transports. [Trepos 2002] [Petit 2002]

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• Expertise plus ou moins intégrée aux exploitants, équipementiers et aménageurs. Cette expertise est fortement intégrée au sein des exploitants qui bénéficie d’un monopole (RATP et Sncf). Elle est constituée d’entités plus autonomes au sein (ou auprès) des grands groupes de transports de voyageurs (Connex, Transdev+EGIS, Kéolis, .. ) concessionnaires des services de transports publics en province [Certu Dossiers 1999]. Dans une moindre mesure, les équipementiers et les aménageurs, notamment les entreprises de BTP, ont aussi développé une expertise.

• L’ingénierie-conseil indépendante exclusivement positionnée sur le marché concurrentiel des études et conseils. Elle s’adresse à une clientèle peu étoffée mais fonctionnant en réseaux de connivence professionnelle13. Sa préoccupation majeure

consiste à se développer dans les périodes fastes et subsister dans les périodes creuses. Ces sociétés d’ingénierie-conseil publient peu14 et privilégient le maintien ou le

développement de leurs positions commerciales en France par le bouche-à-oreille des clients.

Figure 4-3 Périmètre de l’expertise en planification des transports et gestion de la mobilité

Debizet 2004 Thèse : De la planification des transports à la gestion durable de la mobilité Mutations d’une expertise

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En effet, les élus et techniciens des collectivités urbaines susceptibles de passer commande à l’ingénierie-conseil constituent ensemble un milieu étroit au sein duquel les communications interpersonnelles dominent que ce soit à une échelle interne à l’agglomération (élus des différentes communes, techniciens des différentes maîtrises d’ouvrages locales) ou à une échelle nationale. Citons : le GART, le club des villes cyclables, l’association des maires des grandes villes, des villes moyennes, des villes de banlieue, … pour les élus. L’AITF, l’ATEC, Ponts Formations, pour les techniciens. Nous présenterons plus loin les plus importants d’entre eux.

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Les plaquettes de présentation sont peu étoffées et les listes des études de références peu explicites sur les compétences mises en œuvre. Dans le meilleur des cas, elles présentent les résultats finaux.

Le schéma ci-dessus nécessite quelques commentaires. Il concerne l’expertise exerçant en milieu urbain. La fonction de maître d’ouvrage n’implique pas forcément une expertise professionnelle, celle-ci réside dans les éventuels services de planification, d’organisation ou d’exploitation. Les communes sont les seules collectivités locales à exploiter leur voirie ; elles l’entretiennent et en assurent la régulation à travers la gestion des carrefours à feux et autres signalisations. Dans la division du travail au sein du ministère de l’Equipement, la fonction de conception combine l’élaboration de la réglementation qui relève de l’autorité régalienne15 et

l’application de cette réglementation qu’exerce l’ingénierie publique d’Etat. L’ingénierie publique de l’Etat dispose en son sein d’une expertise vouée à l’assistance et au conseil auprès des collectivités locales et aux maîtres d’ouvrages. Nous avons volontairement atténué le cadre des institutions Sncf et RATP, car ces deux institutions ne jouent un rôle dans les transports urbains de province qu’à travers leur filiale d’études et de conseil (Mti Conseil, Systra, MVA). Les deux dernières catégories d’institutions combinent assez généralement les fonctions de conception (maîtrise d’œuvre) et d’assistance et conseil (Assistance à la Maîtrise d’Ouvrage).

L’expertise définie par le périmètre ci-dessus constitue-t-elle un système au sens donné par l’analyse des systèmes ? Rappelons les trois critères d’un système définis par Lapierre : le niveau d’interaction entre les éléments qui le composent, le degré d’autonomie par rapport à l’extérieur du système et la capacité d’autorégulation qui fait référence à une mémoire interne. Nous pourrons répondre à cette question après avoir observé une partie du système. A ce stade contentons-nous de justifier le statut d’hypothèse à cette assertion par quelques remarques qui seront étayées ultérieurement :

• Plusieurs bureaux d’études dont les effectifs sont pourtant importants ne publient quasiment jamais et interviennent peu dans des congrès ou des formations.

• Une lecture rapide des publications des consultants des seuls bureaux d’études dans les revues professionnelles (qu’ils soient indépendants ou liés à des exploitants ou aménageurs) laisse apparaître des creux importants alors qu’ils disposent des compétences correspondantes16.

• Les experts du Certu et ceux des Cete sont les plus nombreux parmi les auteurs des publications ou les conférenciers de colloque ou journées techniques professionnelles. • La quasi totalité des ouvrages sur les méthodes de planification est éditée par le Certu.

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L’ingénierie publique de l’Etat, et en particulier les services techniques centraux, intervient comme conseil de l’autorité régalienne pour définir la réglementation technique routière.

16 Les méthodes de dimensionnement des parcs relais en sont une illustration. Dans l’ouvrage du Certu sur les parcs-relais, F. Margail cite les méthodologies de dimensionnement développées par différents BE, la plupart d’entre eux n’avaient jamais publié sur ce sujet. [Annexe C Intermodalité]

Le Certu capitaliserait des connaissances et savoir-faire de l’expertise. L’importance des écarts entre experts quant aux publications et conférences laisse supposer une complémentarité et des interactions entre les composantes de cette expertise. L’émergence de nouveaux commanditaires de l’expertise17 relatée dans les chapitres précédents accrédite la

croissance du degré d’autonomie de l’expertise. Nous pouvons supposer que les quatre expertises professionnelles citées ci-dessus « font système » et forment ensemble ce que nous appellerons dorénavant le « système français d’expertise ». Il s’agit de l’expertise en planification des transports et gestion de la mobilité.

La compétence d’expert par analogie avec l’innovation technique

L’expertise est donc constituée d’un ensemble d’organismes plus ou moins indépendants d’institutions territoriales ou d’entreprises. Au sein de chacun de ces organismes, dont une des fonctions consiste à produire de l’expertise, des personnes remplissent pour tout ou partie cette fonction. A ce titre nous les considérons comme des experts. Ces experts développent des compétences par un processus permanent d’apprentissage en interaction avec leur environnement extérieur.

Dans son environnement professionnel, nous identifions trois sphères d’acteurs avec lesquelles l’expert interagit : les commanditaires, les fournisseurs et les confrères (c’est à dire d’autres experts qui se situent aussi bien à l’intérieur du même organisme qu’à l’extérieur).

Figure 4-4 L’expert au centre de trois sphères d’acteurs

Debizet 2004 Thèse : De la planification des transports à la gestion durable de la mobilité Mutations d’une expertise

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Nous avons expliqué que l’autonomie de l’expertise par rapport aux commanditaires en faisait son attrait. L’équilibre entre autonomie et dépendance des bureaux d’études face à leur maison-mère est un facteur essentiel qui conditionne le type d’innovation. Les développements du chapitre 4 sur le parcours de l’innovation le mettent en exergue.

Dans l’interaction avec un commanditaire, l’expert est saisi d’une question et/ou identifie un besoin. Il utilisera ou mettra au point une méthodologie pour y répondre en mobilisant des connaissances, c’est ensuite dans l’expérimentation et en fonction des données et observations apportées par d’autres qu’il validera un concept ou une méthodologie. Il accumulera progressivement suffisamment de savoir-faire (au pluriel) pour se prévaloir d’une compétence sur un domaine. Telle qu’il est utilisé ici, le commanditaire symbolise l’ensemble des destinataires de l’expertise : au commanditaire financier il faut ajouter les usagers, les services d’autres collectivités et d’autres acteurs, parties impliquées du projet.

L’expert entretient des relations avec des fournisseurs afin d’acquérir des données ou des outils pour les traiter. La facilité à recueillir ou traiter tel ou tel type d’informations influe sur la manière dont une étude peut être menée. L’informatisation croissante élargit les possibilités d’investigation et d’analyse. Les fournisseurs d’informations participent à l’évolution des compétences de l’expert18.

L’expert fait partie d’un milieu professionnel19 ; il interagit avec des confrères. De façon assez

générale, ses expertises et donc ses compétences sont soumises à l’observation de ses pairs ou partenaires. Ensemble, ils partagent plus ou moins des règles communes et un corpus. Ce dernier évolue en fonction des « progrès » de la connaissance scientifique et des « besoins » de la société.

Remarques :

• Sur ce schéma nous pourrions remplacer le terme « expert » par celui de « groupe de personnes qui peuvent ensemble délivrer une expertise». Un groupe d’experts peut être un cabinet regroupant plusieurs experts, un département au sein d’une société d’ingénierie-conseil ou encore un service de planification ou d’études au sein d’une administration.

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Dans le secteur des services comme dans l’industrie, les fournisseurs d’informations prennent une place de plus en plus importante. « … la sur-information (expansion du potentiel informationnel) augmente la nécessité (contrainte de compétitivité) et le coût de l’information efficace » [Planque 1999 p300].

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Le terme « milieu » est volontairement utilisé pour signifier un contour flou. Il peut englober les diverses composantes de l’expertise en planification des transports (ingénierie-conseil, formation, recherche, techniciens de collectivités ou d’exploitants, …) ainsi que des expertises connexes tel que l’urbanisme, l’environnement ou l’ingénierie, mais aussi les organismes ou réseaux de formation.

• La limite entre expertise, conseil ou étude est relativement ténue. La plupart des personnes rencontrées au cours de l’enquête réfutent une classification de leur activité : la réalisation d’une étude nécessite de l’expertise et une expertise comprend une phase d’étude. Dans plusieurs organismes, le terme « expert » est réservé aux personnes qui ont accumulé une longue expérience et ne sont pas en situation de management ; elles sont devenues des personnes ressources au sein de l’organisme. Les termes « consultant » ou « chargé d’étude » sont beaucoup plus souvent utilisés. Le terme « consultant » est appliqué indifféremment aux plus jeunes (« consultants junior »), aux plus âgés (« consultants expérimentés ») et à ceux entre deux âges (« consultant senior » ou « senior »). De fait, l’emploi du terme « expert » se trouve réservé aux consultants disposant d’un panel de compétences et d’une expérience suffisantes pour traiter seul une mission confiée par un commanditaire. Ces personnes sont minoritaires au sein des services d’études ou des sociétés d’ingénierie-conseil.

• La distinction entre « expert » et « consultant » a du sens dans l’organisation interne. Cependant, nous nous intéressons à la fonction d’expertise assurée par ces organismes. Elle est autant assurée par les « consultants » que par les « experts ». Par la suite, nous utiliserons indifféremment les deux expressions. Elles désignent une personne qui est en relation directe avec le commanditaire et assure l’essentiel de la mission qui lui est confiée. Le consultant (ou l’expert) conseille, mène des études et des expertises avec l’aide d’autres consultants (ou experts) de son organisme.

Revenons aux sphères des acteurs qui interagissent avec la personne ou le groupe qui assure une mission d’expertise et remplaçons ces acteurs par ce qu’ils apportent. Ce schéma représente synthétiquement les apports en fonction desquels, le consultant mettra en œuvre une compétence pour réaliser des études ou des expertises ou conseiller un commanditaire20.

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En maintenant des doubles flèches, nous avons supposé que les flux d’informations peuvent s’effectuent dans les deux sens. Par exemple, l’amélioration des logiciels de modélisation tient compte de l’expression des besoins des consultants qui les utilisent. Les développeurs du progiciel EMME2 ont mis en place et animent un forum internet des utilisateurs de ce logiciel ; il permet de mutualiser les savoir-faire entre utilisateurs et d’apporter des informations aux concepteurs de ce progiciel afin de l’améliorer.

Figure 4-5 Les intrants d’une compétence d’expert

Debizet 2004 Thèse : De la planification des transports à la gestion durable de la mobilité Mutations d’une expertise

Ceci dit, nous nous intéressons particulièrement aux innovations portant sur les compétences. Une nouvelle connaissance, une nouvelle façon de poser une problématique ou bien une nouvelle version d’un logiciel contribue à faire évoluer une compétence voire inciter l’expert ou l’organisme à acquérir une nouvelle compétence21. Il nous faut analyser de façon plus

détaillée la construction d’une compétence en fonction des différentes catégories d’acteurs avec lesquels les « développeurs » de la compétence interagissent.

La décomposition d’une compétence

Affirmer qu’un organisme ou un consultant dispose d’une compétence, revient à lui attribuer une capacité permanente à faire. Il recèle donc en mémoire une partie des apports considérés jusqu’à maintenant comme extérieurs :

• il maîtrise les outils correspondant à la compétence (logiciels, base de données, ..), • il connaît les savoirs et les règles correspondant à la compétence,

• il maîtrise les méthodologies permettant de répondre au même type de problématiques.

21 G. Bateson identifie quatre niveaux d’apprentissage par interaction (niveau 1 : transmettre, niveau 2 : savoir ce que l’on transmet, …) [Bateson (1977)]. L’apprentissage résulte d’une stratégie de réduction des erreurs [Bateson 1969 (1980)]

La « mémoire » d’un organisme est plus grande et diversifiée que celle d’une personne du fait qu’elle est constituée de plusieurs mémoires individuelles et d’une bibliothèque de documents et d’informations stockées dans des bases de données.

Dans le schéma suivant, la compétence est symbolisée par un triangle dont le contour est poreux, c’est à dire, doté à la fois d’une capacité d’absorption, de rétention et d’adsorption. Une compétence combine des savoirs, des méthodologies et des outils.

Figure 4-6 Les constituants d’une compétence

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Les méthodologies sont spécifiques au bureau d’études, elles sont mises au point progressivement dans l’échange avec les clients en mobilisant le corpus et des outils. Les BE font l’essentiel de leur bénéfice22 grâce à des méthodologies bien rôdées appliquées à des

projets similaires.

Lorsqu’une méthodologie mise au point au sein d’un BE se standardise et devient accessible à l’ensemble du milieu professionnel, nous la considérons comme un « outil ». Le modèle stratégique développé par la Semaly et le LET se situe actuellement à mi-chemin entre la méthodologie et l’outil. Les enquêtes ménages développées par les CETE avec l’appui du ministère sont devenues des outils (base de données synthétique et finalisée) que les BE utilisent.

Certaines méthodologies peuvent devenir une règle. Par exemple, la méthode de calcul économique des infrastructures routières en rase campagne mise au point par les CETE et la direction des routes a fait l’objet d’une circulaire du ministère de l’équipement à l’intention des DDE ; de fait, les rares BE privés travaillant dans ce secteur considèrent cette

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