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3.4 Résultats des deux premières années d’Auger

4.1.2 Sources astrophysiques possibles

♠ Cette liste est basée uniquement sur des considérations théoriques. Nous rappelons en effet (voir chapitre précédent) qu’aucune source ou classe de source n’a de bonnes raisons d’être observationnellement privilégiée à l’heure actuelle. Une revue plus exhaustive des sources possibles d’UHECRs peut être trouvé dans [58].

Les restes de supernovae (SNRs)

Les explosions de supernovae génèrent une coquille de plasma en expansion, et des zones de choc propices au mécanisme de Fermi du premier ordre se forment à la frontière avec l’ISM. Les SNRs sont le site favorisé pour l’accélération des rayons cosmiques galactiques jusqu’à des énergies de l’ordre du PeV ou au-delà. Il y a actuellement plusieurs raisons pour cela :

– D’un point de vue théorique, la physique des SNRs est relativement bien comprise. Les énergies maxi- males atteignables calculées sont typiquement de l’ordre du PeV pour des protons, ce qui correspond en ordre de grandeur au genou dans le spectre des rayons cosmiques.

– L’observation directe de sources de rayons cosmiques d’énergieE . 1 PeV est clairement impossible à cause des déflections dans le champ ~B galactique, mais il est prédit que les particules chargées accélé- rées au niveau des chocs doivent rayonner des photons, par bremsstrahlung pour les électrons, ou par la chaîne hadroniquepCR+ pISM dense → π0 → γ (que nous retrouverons à plus haute énergie). L’obser-

vation récente par HESS d’une émission multi-TeV provenant de la coquille, et non du coeur, de la SNR RXJ1713.7-3946 [59], est la preuve la plus directe et la plus remarquable à ce jour que des particules chargées (protons ou électrons) sont accélérées jusqu’à∼ 100 TeV au moins dans des chocs de SNRs. – Les estimations théoriques de l’énergie fournie aux rayons cosmiques par les SNRs de notre galaxie sont

de rayons cosmiques diffusant dans notre galaxie, et dont le temps de résidence y estt(E), il faut en effet une luminosité totale deLCR ∼R dEdV Ej(E)/t(E). Les mesures d’abondances des rayons cosmiques

à basse énergie permettent, en comparant les fractions de « primaires » et « secondaires » issus des interactions de spallation dans l’ISM, d’estimert(E) via la densité de colonne moyenne traversée dans l’ISM à différentes énergies. On trouve en particuliert(E)∼ E−0.6 : le temps de confinement diminue

avec l’énergie, ce qui est attendu pour un comportement diffusif. Connaissant les dimensions de notre galaxie, on peut ainsi estimerLCR ∼ 1041erg/s. Cela correspond à environ10% de la puissance totale

associée à l’éjection de matériel par les supernovae de notre galaxie.

FIG. 4.4 : Le reste de supernova RXJ1713.7-3946 vue en VHEγ par HESS, avec les contours en rayons X (ASCA). Carte mise à jour à l’ICRC 2005.

Les chocs à l’échelle galactique

A l’échelle d’une galaxie, des vents de plasma importants peuvent être générés par divers mécanismes : ex- plosions de supernovae mais aussi vents stellaires créés par des étoiles massives de type Wolf-Rayet, souvent regroupées en associations OB. Une association OB est un groupe lâche de quelques dizaines ou centaines d’étoiles très brillantes éparpillées sur plusieurs centaines d’années lumière. On les trouve en général dans les bras spiraux des galaxies. Certaines galaxies, dites starburst, caractérisées par une émission infrarouge importante et un taux de formation d’étoiles élevé, ont probablement des vents galactiques particulièrement importants. Ces vents génèrent des chocs à grande échelle, en particulier aux extrêmités des galaxies (chocs terminaux). Les galaxies lumineuses en infrarouge (LIGs), que l’on pense issues de collisions galactiques, ainsi que les galaxies en collision proprement dites sont aussi des sites propices au développement de chocs étendus. Il a été émis comme hypothèse que les rayons cosmiques accélérés jusqu’au PeV par des objets comme les supernovae dans l’ISM peuvent ensuite être réaccélérés au niveau de ces chocs d’échelle galactique. L’énergie maximale accessible pourrait dépasser1020eV dans les galaxies en collision et les starbursts.

Les étoiles à neutrons

Les étoiles à neutrons de notre galaxie qui commencent leur vie sont caractérisées par : 1) une vitesse de rotation importante (Ω ∼ 3000 rad s−1) ; 2) un champ magnétique extrême à leur surfaceB

s ∼ 1013 G. Le

même de notre propre galaxie. Les deux difficultés liées à ce modèle sont d’une part le temps d’accélération, qui doit être faible car la vitesse de rotation de l’étoile diminue vite au cours du temps, et d’autre part les pertes d’énergie des UHECRs au voisinage de l’étoile à neutrons.

De façon remarquable, les modèles d’accélération dans les étoiles à neutrons, ou les magnétars (qui sont des étoiles à neutron possédant un champBsparticulièrement élevées), prédisent un spectre d’injectionj(E)∼

E−1, assez différent du cas de l’accélération stochastique.

Les AGNs

Les AGNs sont des galaxies présentant une activité en radio, optique et/ou X/γ particulièrement élevée (voir encadré). Deux régions des AGNs peuvent accélérer des UHECRs : le coeur même des AGNs, ainsi que les lobes radio associés aux jets. Ce second candidat est privilégié à l’heure actuelle, car il conjugue une extension spatiale dépassant parfois le Mpc avec une densité suffisamment faible pour éviter des pertes énergétiques trop importantes. Par ailleurs, des chocs extrêmement obliques peuvent se développer le long des jets, permettant potentiellement l’accélération d’UHECRs jusqu’au ZeV.

Les sursauts gamma

Les sursauts gamma, ou GRBs, sont des événements extrêmement violents, rares et brefs (typiquement∼ 1052 erg sont émis en moins d’une seconde). Des progrès importants ont été faits récemment et continuent d’être faits sur ces objets, tant observationnels (BATSE, HETE et maintenant HETE 2 et Swift) que théoriques [62] : il y a maintenant un modèle de « boule de feu », permettant d’interpréter les observations des GRBs et de leurs émissions rémanentes. Les GRBs semblent être associés à certaines explosions de supernovae. Quelle que soit son origine, une explosion permet le développement d’une boule de feu constituée d’un plasma de photons, électrons et positrons. Ce plasma étant initialement optiquement épais (à cause de la grande densité de photons que l’on déduit de la petite taille de l’objet), sa pression génère une expansion ultrarelativiste. À l’extrêmité de la boule de feu (chocs externes), mais aussi en son sein (chocs internes), se développent des chocs magnétisés et ultrarelativistes, qui sont donc des candidats possibles pour accélérer des UHECRs. Les pertes d’énergie dominantes des particules accélérées sont alors dues au refroidissement synchrotron.

Néanmoins, le débat reste ouvert sur le réel potentiel des GRBs pour accélérer des rayons cosmiques jusqu’à 1020eV. Il est tout-à-fait possible que l’accélération aux ultra-hautes énergies soit impossible par un mécanisme de Fermi standard, que ce soit aux chocs externe ou internes, à cause de la trop rapide expansion de ces chocs. Par contre, une diffusion multiple sur plusieurs chocs internes pourrait permettre à une fraction suffisante des rayons cosmiques d’être accélérée aux ultra-hautes énergies [63].

Par ailleurs, un scénario a été proposé [64] dans lequel les rayons cosmiques à E . 1 EeV auraient été générés par un petit nombre de GRBs galactiques récents, le taux de GRBs dans la galaxie pouvant être de un par million d’années. Cela aurait pu expliquer le « signal » AGASA – Sugar [65]. Le spectre au-delà de quelques EeV serait dû à des GRBs extragalactiques, ce qui donne un aspect élégamment holistique au modèle.

Les chocs à grande échelle dans l’Univers

Au cours de la formation des grandes structures de l’Univers (LSS), l’effondrement gravitationnel du milieu intergalactique (IGM) dans les puits de potentiel créés par la matière noire est susceptible de générer des chocs à très grande échelle, autour des grands amas de galaxies et peut-être aussi le long des filaments. La possibilité que ces chocs soient fortement magnétisés (avec des champsB ∼ 0.1 µG ou plus) sera discutée dans la section

L’unification des noyaux actifs de galaxie (AGNs)

L’étude détaillée des galaxies actives a permis l’émergence d’un paradigme [61] décrivant les divers types d’AGNs, dont les ingrédients fondamentaux sont :

– un trou noir supermassif (M ∼ 106−10M ) ;

– un disque d’accrétion chauffé par des processus magnétiques ou visqueux ;

– du gaz à grande vitesse appelé broad-line region (BLR), les grandes vitesses élargissant considérablement les raies d’émission de ce gaz ;

– du gaz à plus faible vitesse : la narrow-line region ;

– un tore de gaz et de poussière cachant la BLR dans le plan du disque ;

– un jet relativiste s’étendant jusqu’à des dizaines de kpc, voire jusqu’à 1 Mpc dans certains cas.

Figure : Exemple de jet à l’échelle du kpc observé en X (Chandra) et associé aux contours radio du VLA.

L’émission X serait due à l’effet Compton inverse des photons du CMB sur les électrons relativistes du jet, qui émettent en même temps un rayonnement synchrotron radio.

L’essentiel des différences observationnelles entre classes d’AGNs peut s’expliquer dans ce cadre. Ainsi, les AGNs de type 1 (qui ont à la fois des lignes d’émission larges et étroites) se différencient des AGNs de type 2 (présence uniquement de raies étroites) par l’orientation de la ligne de visée par rapport au disque obscurcissant de poussière. L’appellation « quasars » semble de nos jours désigner tous les AGNs de luminositéMV <−23,

ce qui est une coupure relativement arbitraire. Les blazars sont des AGNs pour lesquels la ligne de visée est relativement proche de l’axe du jet ; ils sont caractérisés par une intense émission de la radio aux hautes énergies (jusqu’au TeV). Quant aux Bl Lacs, ce sont des blazars caractérisés par l’absence de lignes d’émission et d’absorption fortes dans leur spectre.

Parmi les nombreuses questions ouvertes en physique des AGNs, il reste à savoir si les AGNs représentent une phase relativement courante dans l’évolution des galaxies.

sur les champs magnétiques. Dans cette hypothèse, on peut envisager l’accélération de rayons cosmiques à partir de l’IGM, jusqu’à des énergies trans-GZK pour des noyaux de fer.

♠ Nous avons présenté une liste non exhaustive de « candidats » à l’accélération des UHECRs. L’énergie maximale et la puissance que peuvent fournir chacun de ces objets sont en général relativement controversées au sein des communautés de spécialistes de chacun de ces objets, si bien qu’il est difficile à l’heure actuelle d’avoir un candidat favori.

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