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Les relations de dépendance

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I NTRODUCTION DE LA DEUXIEME PARTIE

L A MOBILITE RESIDENTIELLE AU MOMENT DU CHANGEMENT FAMILIAL

2. U NE MOBILITE RESIDENTIELLE « REGRESSIVE »

2.1. La mobilité résidentielle, pour qui ?

2.1.1. Les relations de dépendance

L’analyse des relations de dépendance entre la mobilité résidentielle au moment du changement familial et le profil social des individus révèle une pluralité de comportements

résidentiels. Un test de khi-deux41 montre que les relations de dépendance à la mobilité résidentielle sont très significatives pour l’origine de la monoparentalité, le lieu de vie et le statut d’occupation antérieur à la situation monoparentale, et, significatives pour l’âge des mères alors qu’elles ne le sont pas ou peu pour l’âge des enfants, le type de garde parentale ou la PCS des mères (tableau 24).

Tableau 24 – Les relations de dépendance à la mobilité résidentielle

La mobilité résidentielle Test du Khi-deux Mode de formation de la famille +++

Lieu de vie antérieur +++

Statut d’occupation antérieur +++

Age des mères ++

Type de garde parentale +

Age des enfants -

CSP -

Note 1 : le test du khi-deux détermine si les réponses à deux questions fermées sont « statistiquement significatives » (indépendantes) selon le calcul suivant : Chi² calculé = somme (Effectif Théorique - Effectif Réel)² / Effectif Théorique. La relation est ensuite validée ou non selon la valeur de référence de chaque table du Chi-deux.

Note 2 : ++=la dépendance est très significative, ++=la dépendance est significative, +=la dépendance est peu significative, -=la dépendance n’est pas significative.

Source : Enquête (2009) – Réalisation : F. Leray, CNRS UMR ESO 6590, 2009

L’effet mécanique de la désunion sur la mobilité

Puisque les mères divorcées et séparées ont résidé avec leur conjoint, la désunion induit une décohabitation et une obligation de changement de logement pour la mère, l’ancien conjoint ou les deux parents. C’est pourquoi les mères les plus susceptibles de changer de logement sont celles qui ont connu une désunion (près des trois-quarts des mères divorcées et séparées ont changé de logement) (tableau 25). Pour 31% des mères séparées et divorcées, le changement de logement est considéré comme « subi ». Seule 10% des mères n’ayant jamais vécu en couple et 11% des veuves l’apprécient de cette manière (Enquête, 2009).

41 Il s’agit de calculer la somme des différences entre effectifs réels et effectifs théoriques dans l’hypothèse où les variables sont qualitatives. Plus les différences sont importantes, plus la relation est forte entre les deux variables. Plus les différences sont faibles, plus la relation entre les deux variables est nulle.

Tableau 25 – La mobilité résidentielle des mères isolées selon l’origine de la monoparentalité Origine de la monoparentalité

Comportement résidentiel

au moment du changement familial Naissance Séparation Divorce Décès Total Un changement de logement 62,6% 72,4% 72,9% 29,3% 67,1%

Aucun changement de logement 37,4% 27,6% 27,1% 70,7% 32,9%

Total 100% 100% 100% 100% 100%

Source : Enquête (2009) – Réalisation : F. Leray, CNRS UMR ESO 6590, 2009

Le cas des mères n’ayant jamais vécu en couple est particulier. La proportion de celles qui ont changé de logement est inférieure à celles des mères divorcées et séparées mais elle reste conséquente (62,6%). L’arrivée d’un premier enfant incite souvent à la recherche d’un premier logement de la part des jeunes mères hébergées par leurs parents.

La part des veuves qui changent de logement est largement inférieure à celle des mères ayant connu un autre évènement responsable de la situation monoparentale (29,3%). De fait, il n’est pas étonnant de constater l’existence d’un lien de dépendance significatif entre le changement de logement et l’âge des mères. Alors que les trois quart des mères âgées de moins de 25 ans au moment de l’entrée en situation monoparentale ont changé de logement, cela n’a concerné que 55,7% des mères de 45 ans et plus (tableau 26).

Tableau 26 – La mobilité résidentielle des mères isolées selon l’âge des mères au moment du changement familial

Ages des mères Comportement résidentiel

au moment du changement familial Moins de

25 ans 25 à 34 ans 35 à 44 ans 45 ans

et plus Total

Un changement de logement 75% 76,3% 62% 55,7% 67,1%

Aucun changement de logement 25% 23,7% 38% 44,3% 32,9%

Total 100% 100% 100% 100% 100%

Source : Enquête (2009) – Réalisation : F. Leray, CNRS UMR ESO 6590, 2009

Les principales raisons expliquant la relative stabilité résidentielle des veuves sont de trois ordres : social, économique et affectif. Pour les veuves, l’entrée en monoparentalité survient plus tard dans le cycle de vie que pour les mères divorcées, séparées ou n’ayant jamais vécu en couple. Les veuves sont plus âgées et sont souvent propriétaires au moment du changement familial. Plus avancées dans le cycle de vie, elles peuvent bénéficier d’une expérience professionnelle conséquente et donc être plus aptes à gérer en solo la responsabilité financière de leur famille. Enfin, l’apport financier de la pension de réversion

permet souvent de continuer à résider dans le logement familial. Si les veuves sont moins concernées par un changement de logement que les autres statuts matrimoniaux, le décès du conjoint reste un facteur important de déménagement : pour trois veuves sur dix, l’entrée en situation monoparentale reste responsable d’une mobilité résidentielle. Une récente étude à l’échelle nationale de l’Ined montre que le veuvage récent débouche sur un taux de mobilité deux fois plus élevé que celui des couples stables en 2002, respectivement 13,3% contre 6,2%

(Bonnet, Gobillon, Laferrère, 2007). Il serait donc inapproprié de sous-estimer la relation de dépendance entre le décès du conjoint et la mobilité résidentielle.

La mobilité résidentielle associée au statut d’occupation

La propension à déménager varie également selon le statut du logement précédent. Celui-ci exerce une influence notable sur le comportement résidentiel des mères isolées.

Naturellement, les mères hébergées, qui sont essentiellement des mères n’ayant jamais vécu en couple, déménagent massivement au moment du changement familial (81,8%) d’entre elles) (tableau 27). A l’inverse, résider dans un logement social incite moins souvent à la mobilité résidentielle (55,6% des mères résidant en logement social quittent leur logement au moment du changement familial). Son faible coût, le taux de rotation extrêmement bas dans le parc HLM et la difficulté actuelle à obtenir un tel logement incitent les mères à ne pas déménager ou à tout faire pour le garder. Les mères qui résidaient dans le parc locatif privé ont un comportement totalement différent (80,7% d’entre elles ont changé de logement). Le montant d’un loyer non modéré à payer en solo en est la principale explication.

Tableau 27 – La mobilité résidentielle des mères isolées selon leur statut d’occupation antérieur Statut d’occupation

Comportement résidentiel

au moment du changement familial Propriétaire Locataire privé

Note : statut « autre » : logement de fonction, logement communal, logement militaire Source : Enquête (2009) – Réalisation : F. Leray, CNRS UMR ESO 6590, 2009

En ce qui concerne celles qui étaient propriétaires, le passage à la monoparentalité a des conséquences variables selon les positions sociales. Les mères de catégories relativement aisées peuvent garder leur logement, éventuellement en rachetant la part de leur ancien

conjoint. Cela explique pourquoi six fois sur dix les propriétaires ne quittent pas leur logement au moment de l’entrée en monoparentalité. La lourdeur des charges fiscales (taxes foncières) limite la volonté de déménager au moment du changement familial. En effet, l’opération de vente du logement occupé et d’achat d’un nouveau logement génère des coûts trop importants, même des risques en cas de difficultés de vente. Il existe également une réticence à quitter un logement qui était perçu lors de son acquisition comme une résidence définitive.

En revanche, lorsque la situation financière et familiale ne le permet pas, et souvent du fait de l’exigence de l’ancien conjoint, la vente du logement des mères divorcées ou séparées est inévitable. C’est dans ce cas que les mères isolées doivent faire face à une situation inédite, perturbante car elles sont confrontées seules à l’ensemble des contraintes (administratives, temporelles, financières) du déménagement et à la recherche d’un nouveau lieu de résidence.

Au moment du changement familial, il existe une réelle crainte de perdre le logement familial. C’est pourquoi certaines mères isolées tentent de conserver leur logement malgré les obstacles financiers, les conflits juridiques et parfois relationnels qu’une telle démarche suppose (dans le cas notamment d’un refus de l’ancien conjoint de quitter le domicile).

La mobilité selon le type de commune de résidence

Le lieu de résidence semble enfin avoir une influence notable sur la mobilité résidentielle des mères isolées. Celles qui résident dans une commune rurale ont davantage tendance à changer de logement que les autres : cela concerne 77,9% d’entre elles contre 63% des femmes vivant dans une commune du périurbain éloigné (tableau 28). Les mères isolées résident davantage dans les pôles urbains. L’offre de logements sociaux est plus importante qu’en périphérie. A ce moment de l’analyse, nous faisons l’hypothèse que si les communes rurales sont attractives pour les couples avec enfants(s) (qualité de vie, retour aux sources), il est plus difficile pour les femmes qui entament un nouveau cycle de vie d’y rester.

Tableau 28 – La mobilité résidentielle des mères isolées selon leur lieu de vie antérieur Type de commune de résidence

Source : Enquête (2009) – Réalisation : F. Leray, CNRS UMR ESO 6590, 2009

Les relations de dépendance à la mobilité résidentielle sont fortes pour le mode de formation de la famille, le lieu de vie et le statut d’occupation antérieur. En revanche, elles ne sont pas du tout significatives pour la PCS des mères. La mobilité résidentielle touche dans des proportions équivalentes aussi bien les salariées que les non salariées, les cadres que les ouvrières (entre 60% et les deux-tiers d’entre elles dans tous les cas). Cela prouve que l’entrée en monoparentalité et les contraintes inhérentes à l’obligation de faire face seule peuvent générer des changements résidentiels importants quel que soit le niveau de vie des mères isolées. Toutefois, nous verrons que la différenciation se matérialise lors du choix du logement. Les mères appartenant à une classe aisée sont plus aptes à choisir un logement qui correspond à leur attente et à celle de leur(s) enfant(s). La sociologue Claudine Pirus l’expliquait ainsi à partir de l’enquête « Biographies et Entourage » de l’INED : « la situation familiale est d’autant plus déterminante que le contexte social est défavorable » (Pirus, 2005).

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