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La mobilité résidentielle dépendante du cycle de vie

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 87-90)

I NTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE

1. D ES RAPPORTS A L ’ ESPACE DE LA FAMILLE CONTEMPORAINE

1.1. Les facteurs de la mobilité résidentielle

1.1.1. La mobilité résidentielle dépendante du cycle de vie

Le cycle de vie familiale est la raison la plus fréquemment invoquée dans les différentes études sur la mobilité résidentielle : « les événements familiaux sont des facteurs de mobilité résidentielle plus déterminants que ceux liés à l’emploi » selon les économistes Thierry Debrand et Claude Taffin (Debrand, Taffin, 2005). La mobilité résidentielle intervient plus particulièrement à des moments clefs du parcours de vie, telle la désunion brutale ou la séparation à l’amiable. Les parcours résidentiels sont rythmés par de plus en plus d’événements familiaux.

Les études sur les relations entre mobilité résidentielle et évènements familiaux ne sont pas récentes. Dans les années 1950, Peter H. Rossi déterminait déjà la mobilité résidentielle selon une succession d’évènements démographiques susceptibles d’engendrer de nouveaux besoins en matière de logement : « the major function of mobility to be the process by which families adjust their housing needs that are generated by the shifts in family composition » (Rossi, 1980, p.35). Dans ces travaux, la mobilité résidentielle est abordée comme relevant

d’un choix personnel. Se référant à modèle un cycle de vie propre à la famille nucléaire, le sociologue démontre qu’une famille a davantage de chance de changer de logement lorsque celle-ci est nombreuse et que le chef de famille est jeune (Rossi, 1980). De la même manière, à la fin des années 1970, James W. Simmons démontre que les événements qui marquent les étapes du cycle de vie (la formation de nouveaux ménages familiaux, l’arrivée d’enfants) constituent des facteurs importants dans le déclenchement d’un changement de résidence (Simmons, 1968). Le tableau 10 réalisé par R.J. Johnston témoigne du modèle de la famille américaine à la fin des années 1960, et de son évolution au cours du cycle de vie. Six évènements majeurs modifient les besoins de logement et provoquent un déménagement.

Tableau 10 – Cycle familial et résidence

Source: Johnston, R.J, « Some tests of a model of intra-urban population mobility », Urban Studies, n° 6, 1969, p.36 in Cliche, Pierre (1980)

Aujourd’hui, la transformation des formes de la famille complexifie fortement les relations entre événement démographique et changement de logement. Si la corrélation établie entre la taille de la famille et la mobilité résidentielle semble pertinente, les travaux de Peter Rossi et R.J. Johnston se heurtent à une nouvelle réalité sociale depuis une trentaine d’années : les mutations familiales et la montée du nombre de désunions dans les pays industrialisés.

L’entrée en situation monoparentale intervient comme une rupture vis-à-vis du « familisme » de P. Rossi, lequel se caractérisait par une vie familiale centrée sur l’enfant suite à un mariage et à une naissance précoce. La répartition du travail a également beaucoup changé. La montée du travail féminin, l’évolution du nombre de membres d’une même famille qui travaillent ont désormais une incidence sur la localisation résidentielle.

Les enquêtes biographiques récentes apportent de nouvelles connaissances sur la mobilité individuelle au cours du cycle de vie (Lelièvre, 1988 ; Bonvalet, 1988). Le lien entre parcours

résidentiel et trajectoire de vie est la plupart du temps examiné de manière singulière, selon la série d’évènements liée à l’histoire familiale : le mariage, la naissance des enfants, leur arrivée à l’âge d’étude, le départ des enfants, la séparation ou le divorce, le veuvage, l’entrée dans le troisième âge. Les étapes d’un itinéraire résidentiel sont rythmées par les grands événements de la vie familiale.

La mobilité résidentielle au moment de l’arrivée des enfants est étudiée selon l’inscription des couples dans un projet de vie familial (Kersuzan, 2009 ; Faure, 2009). Les études européennes sur la mobilité des couples au moment de la naissance démontrent que les chances de changer de logement augmentent avec l’arrivée du premier enfant (Baccaini, 1994). L’arrivée d’un enfant oblige souvent le ménage à déménager pour s’agrandir. Plusieurs travaux évoquent également la distance du déménagement à la naissance du premier enfant. Les mobilités résidentielles seraient des mobilités à courte distance (Baccaini, Courgeau, 1996).

La mobilité résidentielle au moment du départ de l’enfant est plus limitée. Les recherches portant sur les comportements résidentiels des ménages dans la période post-parentale révèlent que le départ d’un grand enfant, contrairement à l’arrivée d’un enfant, ne modifie pas les ressources du ménage et améliore la qualité du logement ressentie par l’occupant (Pirus, 2005 ; Debrand, Taffin, 2005). La mobilité des enfants est également mise en perspective.

Emmanuelle Maunaye démontre notamment que les enfants qui quittent le domicile familial maintiennent une proximité affective mais consentie avec leur parenté malgré l’individualisation des relations intergénérationnelles (Maunaye, 2001).

La mobilité résidentielle au mariage est observée selon deux temporalités différentes. Le mariage est considéré d’une part, comme un facteur important de mobilité à court terme (celui-ci entraîne très souvent un déménagement) (Bonvalet, Lelièvre, 1991) et d’autre part, comme un facteur de stabilité à moyen terme (une fois le changement de logement réalisé (Courgeau, 1985). Des enquêtes rétrospectives permettent de rendre compte de la proportion des ménages ayant déménagé au moment de leur mariage mais aussi de la distance effective entre le lieu de mariage et le lieu de résidence du couple. Il s’agit d’un autre indicateur intéressant de mobilité résidentielle (Rouxel, 1998).

L’étude de la mobilité résidentielle à la retraite s’intéresse enfin à l’ajustement du logement à des besoins nouveaux (financiers, psychologiques, spatiaux – Bonnet, Gobillon, Lafferere, 2007).

L’étude de la mobilité résidentielle des retraités interroge les migrations des couples

(Bésingrand, Soumagne, 2006) mais aussi les inégalités sociales de santé provoquées par une modification du rythme et des habitudes de vie dans les lieux de fin de vie (Cardon, 2009).

La mobilité résidentielle est un phénomène social hétérogène au sens où sa cause n'est pas la même selon l'échelle territoriale prise en compte (échelle d'agglomération ou échelle interrégionale par exemple). De manière générale, la mobilité résidentielle liée aux événements familiaux ne se traduit pas de la même manière que la mobilité résidentielle liée à l’emploi : « les raisons de la mobilité de courte distance seraient principalement d’ordre familial ou concerneraient le choix de l’habitation, alors que la mobilité de plus longue distance serait surtout imputable à des raisons d’ordre professionnel » (Debrand, Taffin, 2005). Enfin, signalons que ce n’est pas le statut matrimonial ou le fait d’ « être » une famille recomposée, monoparentale ou un jeune couple qui engendre la mobilité résidentielle. C’est bien l’évènement à l’origine de la famille (désunion, décès, naissance) qui a un impact fort sur la mobilité. De fait, une étude sur la spatialité des mères seules avec enfant(s) à l’échelle des espaces de vie permettra de rendre compte de mobilités résidentielles courtes en lien avec un évènement familial dont l’influence sur la mobilité est la plus forte (Debrand, Taffin, 2005) : l’entrée en situation monoparentale.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 87-90)