• Aucun résultat trouvé

I – Un rapprochement des règles des régimes de base

Une certaine convergence des règles dans les différents régimes de base a déjà été engagée, comme cela a été rappelé au chapitre 3 de la première partie de ce rapport. Les règles de calcul des retraites des régimes de base se sont ainsi rapprochées (alignement des durées requises pour une retraite à taux plein, des taux de décote et surcote, existence de régimes alignés sur le régime général…), même si des dif- férences notables subsistent. De plus, les droits acquis dans l’ensemble des régimes de base sont de plus en plus souvent pris en compte pour l’attribution de prestations de retraite.

Ce rapprochement des règles entre les différents régimes de base a probablement vocation à se poursuivre, indépendamment du passage éventuel à un système en points ou en comptes notionnels. Dans son

premier rapport 20 en 2001, le Conseil faisait observer que la diversité

des régimes de retraite pose des problèmes pratiques aux assurés qui effectuent leur carrière dans plusieurs régimes et pose la question du traitement équitable des assurés relevant de régimes différents. Si la réforme de 2003 a permis une amélioration des droits des polypension- nés du régime général et des régimes alignés, la situation des polypen- sionnés continue de poser problème dans certains cas.

De fait, les parcours professionnels sont de plus en plus marqués par les changements de statut. Par exemple, près de la moitié des assu- rés de la génération 1962 avaient déjà, à l’âge de 41 ans, cotisé à plu- sieurs régimes de base. Or, l’objectif de lisibilité du système de retraite est d’autant plus difficile à atteindre que les assurés sont affiliés à dif- férents régimes aux règles diverses.

De plus, l’existence de règles différentes contribue à un sentiment, justifié ou non, d’inégalité de traitement voire d’absence d’équité, ce qui est préjudiciable à la confiance dans le système de retraite et à la capacité à accepter des réformes des droits à retraite. Il convient toutefois de rappeler que l’équité entre les assurés ne passe pas néces- sairement par l’identité des règles, et que des règles iden- tiques appliquées à des publics différents ne sont pas toujours une garantie d’équité.

20 COR (2001), Retraites : renouveler le contrat social entre les générations, orientations et débats, décembre.

L’existence de règles différentes rend moins lisible le système et contribue au sentiment, justifié ou non, d’inégalité de traitement voire d’absence d’équité.

En outre, l’existence de nombreux régimes rend néces- saires des transferts de compensation complexes cher- chant à prendre en compte au mieux les différences de situation démographique et de capacité contributive des différents régimes.

Finalement, compte tenu de la généralisation des régimes complémentaires dans le secteur privé, de l’alignement de certains régimes de base (MSA salariés, RSI) sur le régime général, et du nombre croissant de personnes changeant de secteur professionnel en cours de carrière, la question peut être posée de savoir s’il demeure justifié de distinguer les règles de calcul des retraites des régimes de base fondés sur des critères professionnels. La question de la convergence des règles entre les différents régimes de base, si elle se pose dans le cas du changement du mode de calcul des retraites, dépasse donc largement ce cadre. Cela signifie également que les choix en matière de convergence plus ou moins importante des régimes ne sont pas uniquement techniques.

1. Modalités de rapprochement des règles des régimes

de base

Différentes options existent pour rapprocher les règles des différents régimes de base, dans le cadre d’un passage à un calcul en points ou en comptes notionnels.

Une première option consisterait à maintenir l’architecture actuelle com- prenant une vingtaine de régimes de base et à faire converger simple- ment les règles de calcul des pensions dans les différents régimes de base (ou dans certains d’entre eux seulement). Une telle évolution se situerait dans le prolongement du mouvement d’alignement des règles de certains régimes de base sur le régime général.

Cette option, appliquée à tous les régimes, suppose de répondre à un certain nombre de questions.

– Que faire pour les régimes, notamment de fonctionnaires, pour les- quels il n’existe pas de distinction entre régime de base et régime com- plémentaire ? Est-il possible de dissocier deux niveaux dans le calcul des pensions des fonctionnaires : une pension de base, dont les règles de calcul seraient communes à tous les régimes de base, et une pension complémentaire, également versée par l’État, et dont le calcul serait à définir ? Pour cette pension complémentaire, plusieurs options sont imaginables : celle-ci peut avoir ses propres règles de calcul, être ali- gnée sur celles de l’AGIRC et de l’ARRCO, ou encore être calculée par différence de façon à ce que la pension totale (base et complémentaire) soit la même que la pension du régime actuel de la fonction publique. – Tous les paramètres du calcul des pensions doivent-ils être iden- tiques, dans le cas du passage en points de tous les régimes par

Cependant, l’équité ne passe pas nécessairement par l’identité des règles et des règles identiques appliquées à des publics différents ne sont pas toujours une garantie d’équité.

exemple, ou des différences peuvent-elles être justifiées ? En particu- lier, quel plafond retenir s’il doit s’appliquer à l’ensemble des régimes de base ? La réponse dépend notamment de la place que l’on souhaite donner aux régimes complémentaires. Différentes options peuvent être envisagées, par exemple le plafond actuel de la sécurité sociale, qui s’applique au régime général, deux à trois fois ce plafond comme

le proposent certains économistes 21, ou encore huit fois ce plafond

comme c’est le cas à l’AGIRC (dans une optique de suppression des régimes complémentaires).

Un tel rapprochement du mode de calcul des pensions pourrait en outre conduire à s’interroger sur l’harmoni- sation des modes de financement des régimes. Cette question ne va pas complètement de soi : ainsi, les régimes de retraite du RSI sont alignés sur le régime général, mais conservent un calcul des cotisations distinct (sur le revenu annuel moyen). Dans le cadre d’un rapprochement entre les régimes des salariés des secteurs public et privé, la question du plafond et de la définition de l’assiette de cotisation (inclusion ou non des primes notamment) se pose également.

En allant plus loin, une solution consistant à rassembler les régimes qui le souhaiteraient au sein d’un régime unifié permettrait d’accroître la mutualisation du risque et réduirait les transferts de compensa- tion. Une telle unification peut s’envisager au niveau des régimes de base (comme dans le cas du regroupement des régimes de base de la CNAVPL). Dans le cas de tels rapprochements, il subsisterait donc au niveau professionnel seulement des régimes complémentaires et supplémentaires.

2. Quelques questions posées par un alignement

des règles des régimes de base

De façon plus générale, le rapprochement des règles des régimes de base pose un certain nombre de questions :

– Les différents facteurs ayant conduit à une diversité des règles des régimes de retraite de base, notamment des conceptions différentes de la retraite et une construction historique sur une base plutôt pro- fessionnelle, sont-ils toujours importants aujourd’hui ?

– Pour les salariés et les non-salariés du secteur privé, compte tenu de la généralisation de régimes complémentaires obligatoires spécifiques

21 Bozio A. et Piketty T. (2008), op. cit. Les auteurs se placent dans le schéma d’un régime unique résultant d’un rapprochement à la fois des régimes de base et des régimes com- plémentaires. On notera que l’ARRCO retient un plafond égal à trois fois le plafond de la sécurité sociale.

La convergence des régimes de base pose la question des implications dans la fonction publique, du plafond à retenir pour la base et de l’harmonisation des modes de financement des régimes.

à différents groupes, la différenciation des règles de calcul des pen- sions entre les différents régimes de base du secteur privé est-elle encore justifiée ?

– Quelles conséquences un rapprochement des règles de tous les régimes de base du secteur privé (y compris ceux des non-salariés) aurait-il sur les régimes de la fonc- tion publique ? Une option consisterait à laisser inchan- gés les régimes de la fonction publique, dont la spécificité serait ainsi renforcée. Une autre possibilité consisterait à distinguer pour les régimes de la fonction publique comme pour les régimes du privé entre retraite de base et retraite complémentaire, et à rapprocher plus ou moins fortement le régime de base ainsi créé des régimes du privé. Il conviendrait alors d’examiner les conséquences statutaires d’une telle séparation.

– Comment concilier au mieux le souhait d’égalité de traitement et d’équité entre tous les assurés et la prise en compte des particulari- tés de différentes professions ? S’il est clair que l’équité entre les assu- rés ne passe pas par l’identité des règles, et que des règles identiques appliquées à des publics différents ne sont pas une garantie d’équité, comment s’assurer du respect d’une égalité de traitement ? À titre illus- tratif, serait-il inéquitable que les niveaux des minima de pension (type minimum contributif) soient très différents dans des régimes différents ? Les mécanismes de solidarité entre régimes (minimum vieillesse, qui bénéficie de la même façon à tous les assurés, transferts de l’État à cer- tains régimes, financements extérieurs de certains droits non contribu- tifs…) permettent-ils de résoudre cette difficulté ?

– Le passage à un système en points ou en comptes notionnels, qui a conduit à l’étranger à la mise en place d’un système unique pour l’ensemble des assurés, aurait- il un sens s’il se faisait de façon indépendante pour chaque régime de base ou pour certains régimes seule- ment ? Le passage de quelques régimes seulement à un système en comptes notionnels poserait de sérieux pro- blèmes de lisibilité et d’équité, et risquerait de réduire la portée des mécanismes d’autorégulation face aux évo- lutions démographiques et économiques qui sont propres aux comptes notionnels.

– D’un point de vue technique, est-ce que le calcul des pensions en points ou en comptes notionnels serait plus simple pour les personnes ayant effectué leur carrière dans plusieurs régimes dans l’hypothèse où différents régimes de base continueraient à coexister ?

– Si tous les régimes de base passaient en points ou en comptes notionnels, le calcul de la pension d’un polypensionné ne pose- rait a priori pas de difficultés techniques et devrait même être plus

Le rapprochement des régimes de base conduit à s’interroger sur ce qui a justifié l’existence de régimes de base distincts ou sur la manière de s’assurer du respect d’une égalité de traitement.

Le passage de quelques régimes seulement aux comptes notionnels poserait de sérieux problèmes de lisibilité et d’équité et risquerait de réduire la portée des mécanismes d’autorégulation.

simple puisqu’il consisterait, en première approche, à additionner des points ou du capital virtuel.

– Si certains régimes de base restaient en annuités, il serait nécessaire de disposer d’une durée d’assurance tous régimes et donc de calculer la durée d’assurance dans les régimes en points ou en comptes notion- nels, alors même que la durée d’assurance n’entre pas dans le calcul des pensions dans les régimes en points ou en comptes notionnels. – La coexistence de régimes de base en comptes notionnels ou en points non alignés est-elle envisageable ? L’existence de coefficients de conversion distincts selon les régimes, du fait d’espérances de vie

moyennes différentes au sein des régimes 22, ou l’instauration d’indices

de revalorisation des cotisations variant selon les régimes ne risquent- elles pas d’être source d’incompréhension ?

– Enfin, le passage d’un régime de base à un système en points ou en comptes notionnels oblige-t-il à revisiter son articulation avec le ou les régimes complémentaires qui lui sont associés ?

II – Un rapprochement entre régimes de base

Outline

Documents relatifs