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II – Les différences entre retraités

1. L’évolution des inégalités et de la pauvreté

parmi les retraités

Les moyennes ne rendent pas compte des inégalités importantes entre retraités : en 2007, 10 % des retraités ont un niveau de vie inférieur à 913 € par mois et par unité de consommation, tandis que 10 % ont un niveau de vie supérieur à 2 885 €, soit un rapport interdécile égal à 3,2. L’importance de ces écarts est notamment liée à la concentration du patrimoine.

Les inégalités entre retraités se sont toutefois considéra- blement réduites durant les décennies passées avec l’ar-

rivée à maturité du système de retraite. Elles ont encore diminué au cours de la dernière décennie, car le niveau de vie en deçà duquel se situent les 10 % des retraités les plus modestes a progressé un peu plus rapidement que le niveau de vie médian : respectivement + 1,5 % et + 1,1 % par an entre 1996 et 2007. Dans ce contexte, le nombre d’al- locataires du minimum vieillesse a continué de décroître, passant de 0,9 à 0,6 million entre 1996 et 2006 (contre 2,2 millions d’allocataires en 1970).

Même si les données récentes ne traduisent pas une détérioration de la situation relative des retraités les plus modestes, des interrogations s’expriment quant aux effets possibles sur la pauvreté des retraités de l’arrivée à la retraite des premières générations touchées par le chô- mage, des réformes récentes des retraites ou de l’évolution du barème du minimum vieillesse. Sur ce dernier point, alors que le minimum vieillesse est revalorisé comme les prix (règle qui a quasiment prévalu entre 1984 et 2008), les seuils de pauvreté qui sont définis relativement au niveau de vie médian (le seuil habituellement retenu correspond à 60 % du niveau de vie médian) évoluent par construction comme le niveau de vie médian de la population, c’est-à-dire plus vite que les prix ; avant la revalorisation de 25 % prévue entre 2007 et 2012 du

barème pour les personnes seules 80, on pouvait alors craindre que le

barème du minimum vieillesse se situe de plus en plus bas sous le seuil

80 Le montant du minimum vieillesse pour les couples représentait avant 2007 1,8 fois celui des personnes seules, alors qu’un couple compte pour 1,5 unité de consommation. Ainsi le montant du minimum vieillesse par unité de consommation était plus élevé pour les couples que pour les personnes seules.

Même si elles se sont considérablement réduites durant les décennies passées, les inégalités entre retraités sont importantes, en raison notamment de la concentration du patrimoine.

de pauvreté. La simple comparaison du barème du minimum vieillesse et du seuil de pauvreté n’est cependant pas suffisante pour apprécier

pleinement la situation des bénéficiaires en termes de pauvreté 81.

En tous les cas, les données disponibles ne mettent pas en évidence une remontée récente de la pauvreté des personnes âgées. Le taux de pauvreté des personnes de 60 ans et plus, après avoir fortement baissé (il dépassait 30 % en 1970), se maintient entre 1996 et 2007 aux alen- tours de 10 %, soit un niveau inférieur à celui de l’en- semble de la population, et il ne tend pas à s’accroître. Les petites variations à la hausse ou à la baisse obser- vées au cours de la dernière décennie reflètent les évo- lutions conjoncturelles du seuil de pauvreté, défini par rapport au niveau de vie médian, plutôt que celles de la situation des personnes âgées.

Taux de pauvreté des personnes âgées comparé à l’ensemble de la population (en %)

Sources : INSEE-DGI, enquêtes Revenus fiscaux (de 1996 à 2005) ; INSEE-DGFiP-CNAF-CNAV-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux (de 2005 à 2007).

Note : Le seuil de pauvreté correspond à 60 % du niveau de vie médian. Les revenus du patrimoine sont inclus dans la mesure du revenu (mais pas les loyers imputés), mais ils sont fortement sous-estimés jusqu’en 2005.

La France figure parmi les pays de l’OCDE où les personnes âgées sont les moins touchées par la pauvreté (avec un taux de pauvreté de 9 %

81 Voir la fiche no 5 du 5e rapport du COR (2007), Retraites : 20 fiches d’actualisation pour

le rendez-vous de 2008. Le taux de pauvreté des 60 ans et plus, aux alentours de 10 %, est inférieur à celui de l’ensemble de la population et plus faible que celui observé en moyenne dans l’OCDE.

0 2 4 6 8 10 12 14 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 ensemble de la population personnes âgées de 60 ans ou plus

contre 13 % en moyenne dans les pays de l’OCDE 82). Dans la majo-

rité des pays, le taux de pauvreté des personnes âgées est supérieur à celui de la population, contrairement à ce qui est observé en France.

2. La retraite des salariés du secteur privé,

des indépendants et des fonctionnaires

Le niveau des retraites présente toutefois des écarts importants selon le statut d’activité antérieur : en 2004, les salariés du secteur privé affi- liés au régime général percevaient en moyenne une retraite totale égale à 1 065 € par mois, soit moins que les fonctionnaires et assurés des

régimes spéciaux (1 689 €), mais plus que les non-salariés (671 €) 83.

Ces écarts reflètent d’abord des niveaux de diplôme ou de qualifica- tion différents ; en outre, à diplôme ou qualification identique, le statut a un impact sur la carrière (niveau de revenu d’activité, durée cotisée, périodes de chômage…) ; enfin, à carrière identique, les règles des dif- férents régimes conduisent à des niveaux de pension différents. Une simple comparaison des règles des différents régimes,

comme le calcul de taux de remplacement à carrière iden- tique, ne permet pas à elle seule de juger de l’égalité de traitement entre assurés ayant des statuts d’activité dif- férents, car la question se pose de savoir ce qu’aurait été la carrière d’une personne et ses conditions de travail si elle avait relevé d’un autre statut.

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La réforme de 2003 rapproche sensiblement les règles des régimes de la fonction publique et des régimes du

secteur privé, mais cette convergence n’est que partielle 84

et s’applique à des populations dont les conditions d’em- ploi et de rémunération sont différentes.

Les travaux publiés qui tentent de comparer la situation res- pective des salariés des secteurs privé et public se situent

avant la réforme de 2003 85. Ils adoptent des démarches

diverses, de sorte qu’il est délicat d’en tirer des conclu- sions définitives sur le caractère plus ou moins avantageux

82 Taux de pauvreté des personnes de plus de 65 ans, calculé ici avec un seuil égal à 50 % de la médiane. Source OCDE, « panorama des pensions », 2009.

83 Montant de la retraite de droit propre, avantage principal hors majorations familiales. Champ : retraités de droit propre nés en France âgés de 60 ans ou plus. Les polypension- nés sont classés dans le régime dans lequel ils ont été affiliés pendant plus de la moitié de leur carrière. Source : DREES, EIR 2004.

84 Voir le chapitre 3 de la présente partie.

85 Voir « Situation des assurés au regard de la retraite : éléments de comparaison entre sala- riés des secteurs public et privé », note du Secrétariat général du COR, document no 5 de la

réunion du Conseil du 10 juin 2009.

La comparaison des règles des différents régimes ne permet pas de juger de l’égalité de traitement entre assurés ayant des statuts d’activité différents. Des différences de situation entre salariés du privé et fonctionnaires peuvent apparaître à l’avantage de ces derniers, en raison principalement des écarts de durée d’activité et de durée de retraite.

d’un régime sur l’autre. Il en ressort néanmoins que, si des différences de situation existent, elles peuvent apparaître à l’avantage des fonction- naires. Ces travaux suggèrent en outre que ces différences ne résulte- raient pas principalement d’un niveau élevé des pensions relativement aux salaires dans la fonction publique, mais plutôt d’écarts d’âge d’en- trée dans la vie active, d’âge de liquidation et d’espérance de vie. En complément de ces travaux, le modèle de microsimulation de l’INSEE a été utilisé pour simuler ce qu’aurait été le montant des pensions des fonctionnaires (hors catégories actives) liquidant leur pension entre 2003 et 2013 si on leur avait appliqué les règles de calcul des retraites

du secteur privé 86. L’exercice porte ainsi sur une période au cours de

laquelle le mouvement de convergence opéré par la réforme de 2003 ne produit pas encore tous ses effets ; il suppose en outre que la car- rière de chaque fonctionnaire aurait été la même s’il avait été dans le secteur privé ; il compare uniquement les droits à retraite sans pouvoir les mettre en regard des efforts contributifs. Selon les hypothèses tech-

niques retenues pour cet exercice 87, le changement de règle condui-

rait à diminuer la retraite de l’ordre de 10 % ou 20 % en moyenne. Celle-ci augmenterait néanmoins, selon les hypothèses, pour environ 12 % ou 25 % de la population analysée (fonctionnaires ayant un taux élevé de primes).

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Les différences entre salariés et non-salariés s’expliquent surtout par une différence d’effort contributif. La consti- tution d’un capital professionnel et sa valorisation à la retraite (revente du fonds de commerce, de l’exploita- tion agricole, de la clientèle…) ont notamment conduit les non-salariés à opter, au moins dans un premier temps, pour des régimes de retraite établis sur des bases minimales.

Effectivement, les non-salariés disposent généralement de revenus du patrimoine importants au moment de leur retraite, à la fois grâce à la liquidation de leur patrimoine professionnel et grâce à une épargne financière et immobilière plus importante. Dès lors la question se pose de savoir dans quelle mesure les revenus du patri- moine permettent de compenser la relative faiblesse de leur retraite.

86 Beffy M. et Blanchet D. (2009), « Règles de calcul des droits à retraite des secteurs public et privé : éléments de comparaison », INSEE, note pour le COR, document no 8 de la réu-

nion du Conseil du 21 octobre 2009.

87 Deux hypothèses ad hoc ont été retenues pour préciser ce qu’aurait été une carrière iden- tique (même salaire brut ou même salaire net tout au long de la carrière). Il a également été fait deux hypothèses de comportement de départ à la retraite : le fonctionnaire ajuste- rait son âge de liquidation si on lui appliquait les règles du privé pour le calcul de sa pen- sion, ou il conserverait le même âge de liquidation.

Les régimes des non- salariés ont été établis sur des bases minimales, avec de faibles taux de cotisation, mais les non-salariés ont davantage de revenus du patrimoine à la retraite.

Selon des calculs réalisés par l’INSEE 88, un non-salarié perçoit, à niveau

de diplôme identique, une retraite inférieure de 10 % à 20 % à celle d’un salarié, mais il perçoit trois à cinq fois plus de revenus du patri- moine (21 % de son revenu disponible) et dispose au final d’un niveau de vie plus élevé de 0 % à 15 %. Cet écart est à mettre en regard de revenus d’activité plus élevés pour les non-salariés que pour les sala- riés à niveau de diplôme identique, en lien avec des conditions de tra- vail différentes.

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