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À propos de l’acceptabilité

Dans le document en fr (Page 30-33)

– Source : base de donnée Corinte (www.prim.net).

– Un événement départemental correspond à l’ensemble des communes d’un même département touchées par un événement aux caractéristiques identiques (date de début, date de fin, date d’arrêté).

– Le délai correspond à la durée en journée entre la date de fin d’événement et la date de l’arrêté.

TAB. 1.3:Ampleur moyenne des événements départementaux couverts par le système d’indemnisation

Communes touchées Événements %

– Source : base de donnée Corinte (www.prim.net).

– Dans chacun des deux tableaux, la colonne«Événements»est la sortie. Elle indique le nombre d’événements départementaux pour lesquelles le nombre de communes concernées (respectivement la population additionnée des communes concernées) est compris dans la plage de la colonne«Communes touchées»(respectivement«Population totale»).

– La colonne«Communes touchées»indique une plage de nombre de communes concernées pour un même événement départemental.

– La colonne«Population totale»indique une plage de la population additionnée de toutes les communes concernées par un même événement départemental. C’est un indicateur très pauvre du nombre de personnes effectivement concernées par un événement, tant il est évident qu’il est impossible d’estimer à quelle hauteur une commune est touchée par un événement pour lequel elle participe à une demande d’indemnisation.

TAB. 1.4:Répartition des événements départementaux en fonction du nombre de communes concernées et de la population additionnée des communes concernées

mageables pour entraîner une indemnisation dite de catastrophes naturelles sont finalement relativement fréquentes et touchent un nombre élevé de communes.

2. les données disponibles pour mesurer quantitativement l’importance de l’exposition au risque d’inondation de notre pays sont à ce jour extrêmement lacunaires.

Ce dernier point a une importance particulière pour le travail de thèse entrepris ici. Il présume d’une opacité« a priori»de l’estimation des conséquences des inondations, d’une difficulté à ex-ploiter les outils classiques d’évaluation économique et donc de discuter sainement (et sereinement) des politiques ou mesures de gestion des inondations.

1.2 À propos de l’acceptabilité

La section précédente tend à montrer que, d’une façon ou d’une autre, la société française vit au quotidien avec les inondations. Une interprétation possible est que ce danger naturel serait dans une large mesure accepté. En effet, comment concilier autrement les différents constats suivants :

– les inondations constituent un danger reconnu pour les vies et les activités des résidents installés en zone exposée ;

– dans ces zones exposées, ce danger est impossible à supprimer complètement ; – il est pourtant possible de l’éviter en s’installant hors des zones inondables ;

– la société française est telle que de nombreuses communes subissent chaque année les consé-quences d’inondations dommageables.

La question de l’acceptabilité est une question récurrente dans la gestion des risques. Elle fait no-tamment l’objet d’études plutôt sociologiques ou psychologiques [90, 120], que nous n’aborderons pas spécialement dans ce travail de thèse. La question qui nous intéresse est plus en relation avec la phase d’évaluationa priori des politiques de gestion des inondations. Lorsque certains projets visent à protéger la population contre les inondations, puisque cette population semble dans un certaine mesure accepter l’occurrence des inondations, ne faut-il pas s’interroger sur le degré de protection à offrir à cette popula-tion ? Ne peut-on pas arriver à une situapopula-tion ou l’on protégerait« pas assez»ou« trop»une population par rapport à ce qu’elle attend ?

Dans cette section, nous proposons justement de faire un point sur la notion d’acceptabilité du risque, ce qui sera pour nous l’occasion de faire le point sur une méthode d’aide à la décision développée dans notre laboratoire d’accueil, l’unité de recherche HHLY au Cemagref de Lyon, d’une part parce que cette méthode repose explicitement sur la notion d’acceptabilité, d’autre part pour préciser clairement au lecteur le degré d’indépendance entre cette méthode et le travail présenté ici.

1.2.1 Notion d’acceptabilité dans« Inondabilité»

L’unité de rechercheHHLY, au Cemagrefa engagé depuis plus d’une décennie des réflexions sur l’aide à la décision pour les aménagements de prévention des inondations. Ces réflexions ont conduit à l’élaboration d’une méthode d’aide à la décision, dite« Inondabilité», dont certaines caractéristiques décrivent bien l’optique opérationnelle de l’action de l’unité de recherche. La méthode« Inondabilité» s’adresse en effet à des décideurs, investis de la décision à l’échelle d’un bassin versant ou d’une por-tion de bassin versant, censés gérer le risque d’inondapor-tion dans une optique « positive», c’est-à-dire comme une contrainte imposée à un territoire sur lequel il s’agit de vivre avant tout. Dans la méthode, le risque d’inondation considéré procède exclusivement des possibilités de débordement d’un cours d’eau traversant les différents territoires de responsabilité des décideurs intéressés.

Ca cahier des charges étant posé, il n’est pas étonnant de constater que la notion de risque accep-table est fondamentale dans cette méthode. Elle repose formellement sur le principe de l’affichage du différentiel entre deux caractéristiques du territoire visant à mettre en lumière cette acceptabilité.

1. La première caractéristique est censée correspondre à une expression objective de l’exposition d’un territoire aux inondations. Elle vise à résumer la propension de ce territoire à être inondé, indépendamment des conséquences de ces inondations. Elle est appelé la composante aléa dans la méthode.

2. La seconde caractéristique est censée correspondre à l’exposition dite acceptable de ce territoire.

Elle dépend de l’occupation constatée du territoire, et vise à donner, en fonction de la la fragilité de l’occupation du sol aux submersions, l’exposition maximale que devrait supporter ce territoire.

Elle correspond à la composante vulnérabilité dans la méthode.

Il n’entre pas dans l’objet de cette introduction de présenter de façon approfondie une méthode qui a fait l’objet de plusieurs publications, techniques [97] ou plus pratiques [99], auxquelles le lecteur intéressé pourra se reporter.

L’important pour notre propos est de noter que dans la méthode« Inondabilité», l’acceptabilité est perçue comme étant une propriété intrinsèque de l’occupation du sol : des normes guides ont été

éta-1.2. À propos de l’acceptabilité 9 blies qui associent à des occupations du sol génériques une vulnérabilité donnée. La construction des normes guides à ce jour disponibles s’est faite sur des critères essentiellement techniques, voire biblio-graphiques [82]. Cette approche était supposée suffisante, parce que les périodes de retour d’objectif de protection sont supposées pouvoir être révisées par les acteurs destinataires de la méthode [98], sans que toutefois les moyens d’y parvenir soient clairement évoqués1.

1.2.2 Acceptabilité et Arbitrage

Bien que central dans la méthode « Inondabilité», le concept d’acceptabilité des risques comme levier d’évaluation ne trouve pas un large écho dans la littérature. Il paraît clair pour la plupart des auteurs que l’acceptabilité d’une situation d’exposition aux inondations ne peut exister dans l’absolu.

Elle dépend certes du degré de cette exposition, mais également des ressources disponibles pour y faire face. En ce sens, comme le notent Mathot et Mariani, l’acceptabilité ne peut être dissociée d’une situation d’arbitrage entre des objectifs contradictoires :

« Le pouvoir politique se trouve dans la situation difficile de devoir définir un niveau de risque acceptable sur la base de critères économico-financiers.

Ce délicat arbitrage a été fort bien explicité par M. Paul-Henri Bourrelier, président de l’ins-tance d’évaluation de la politique publique de prévention des risques naturels au ministère de l’Industrie :« Tout le problème, c’est de minimiser la dépense, peut-être en faisant un peu plus de prévention pour dépenser un peu moins en réparations.» »(Mathot et Mariani [156]) page 53)

Comme semblent le suggérer Decrop et Charlier [78], il est fort probable que l’acceptabilité n’ait un sens que comme une interprétationa posterioride décisions d’arbitrage :

« C’est le niveau d’acceptation des coûts par une collectivité qui va fixer, par déduction, la limite entre risque acceptable et risque inacceptable. Pour le dire autrement, le risque inacceptable, c’est celui pour lequel la collectivité est prête à payer un coût de prévention élevée.»(Decrop et Charlier [78] page 79)

Le lien fort exprimé par Decrop et Charlier entre l’acceptabilité et ce qu’une collectivité est prête à payer pour se prévenir d’un risque semble appeler un traitement économique du concept.

Ce qu’expriment Decrop et Charlier est d’ailleurs très proche de la notion de consentement à payer, chère aux sciences économiques, qui visent justement à mesurer la valeur qu’accordent les individus à une modification de leur situation en fonction de ce à quoi ils sont prêt à renoncer en terme d’opportunité monétarisée. Ce traitement diffère sensiblement d’une approche de la mé-thode« Inondabilité», qui lui vaut la critique qu’elle n’appuie pas formellement sa définition de l’acceptabilité sur des critères de choix sociaux, mais plutôt sur des critères techniques issus des sciences hydrologiques et hydrauliques. Ce parti-pris n’a pas été suivi dans le présent travail. Il a été au contraire décidé de relâcher l’emprise de l’hydrologie ou de l’hydraulique dans le traitement du risque, de la vulnérabilité, de l’acceptabilité et d’asseoir plus spécifiquement l’approche sur une prise en compte de l’avis des populations affectées par les projets de gestion des inondations.

Dans une optique finale d’évaluation des projets de gestion des inondations, ceci nous mène plus généralement à nous poser des questions sur les points suivants :

1. peut-on prendre en compte l’avis des personnes affectées par la gestion des inondations et comment les intégrer dans une phase d’évaluation ?

2. avant d’interroger les individus sur ce qu’ils sont prêts à accepter, peut-on faire l’économie d’une compréhension fine des inondations et de leur impact sur la société ?

1Pour une critique plus détaillées, nous conseillons au lecteur de lire l’annexeC, page277.

3. et de la même manière, peut-on faire l’économie d’une compréhension fine du contexte déci-sionnel de la gestion de inondations ?

4. l’acceptabilité des risques est-elle un levier pertinent pour prendre des décisions collectives de gestion des inondations ?

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