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le principe de proportionnalité :

Deuxième partie : Appréciation de la distribution sélective

Paragraphe 02 : les critères tenant aux distributeurs

A) la sélection qualitative

1- le principe de proportionnalité :

Compte tenu de la nature spécifique des produits, la finalité d’un système de distribution sélective doit être « de garantir une vente dans de bonnes conditions au consommateur »393. On conçoit que, pour répondre à cette exigence, les critères puissent être très divers. Ils tiennent à la qualification professionnelle du distributeur et de son personnel394, mais aussi à

390CJCE, 25 oct. 1977. Metro l, Rec. CJCE 1977. p. 1875, cité par Ferrier

391Cass-crim : arrêts dits « duo » (aff lanvin, Nina Richi, Rocho) 3Nov 1982, Gaz. Pal. 1982, 2, 658.

392C.J.C.E, 11décembre 1980, affaire 31-80(l’oréal), rev.CJCE, 1981, p.3775, cité par Ferrier.

la qualité de ses installations395, à ses références bancaires ou sa solvabilité396, à ses heurs d’ouvertures397et à son standing et la présentation valorisante des produits398.

Les critères de sélection fixés par le fournisseur et liés à la compétence ou à l’aptitude du distributeur ou de son personnel ont été considérés comme non restrictifs de concurrence. En effet, le TPICE estime que les critères relatifs à la qualification professionnelle du distributeur et de son personnel est une exigence légitime pour la vente de cosmétiques de luxe399. En revanche, le tribunal a jugé disproportionné le critère de pharmacien d’officine car il entrainait une limitation quantitative des points de vente400.

Pour que la distribution sélective et plus particulièrement dans le domaine des cosmétiques de luxe, soit efficace la présence dans le point de vente d’une personne capable de donner au consommateur des conseils ou des renseignements appropriés constitue en principe une exigence légitime pour la vente des dits produits, qui fait partie intégrante d’une bonne présentation de ceux-ci401.

Ayant pour but essentiel la protection et la sécurité des consommateurs que la bonne commercialisation des produits, le législateur algérien n’a pas totalement négligé les conditions relatives à la formation du personnel sensé servir les clients. En effet, le décret exécutif n° 97-37 relatif aux produits cosmétiques et d’hygiène corporelle402fait obligation au fabricant, au conditionneur et à l’importateur d’avoir la qualification professionnelle pour

394Déc. N° 85/616/CEE de la Commission, 16 déc. 1985, Villeroy et Bosch, JOCE, 31 déc. 1985,11° L376.

395Déc. N° 85/404/CEE de la Commission, 10 juill. 1985. système de distribution Grundig, JOCE, 30 août 1985, n°L233.

396Déc. N° 841233/CEE de la Commission. 18 avr. 1984, IBM, JOCE, 4 mai 1984, n° L.233.

397CJCE, 11 oct. 1983, aff.210/81, Société Demo-Studio Schmidt.Rec. CJCE, p.3045.

398Déc. N° 85/6 16/CEE de la Commission, 16 déc. 1985, préc.

400TPICE., 27 fev. 1992, Vichy c. Commission, T-19/91, Rec. p. II-415, note L. Vogel

401Jean-Pierre Pamoukdjian, Le Droit du Parfum, 1982, LGDJ, p. 26.

402Décret exécutif n° 97-37 du 5 Ramadhan 1417 correspondant au 14 janvier 1997 définissant les conditions et les modalités de fabrication, de conditionnement, d'importation, et de commercialisation sur le marché national des produits cosmétiques et d'hygiène corporelle. p.13( N° JORA : 004 du 15-01-1997 ).

l’exercice de cette activité commerciale. Une lecture attentive de ce texte démontre que le législateur a manqué d’imposer cette qualification aux distributeurs des produits cosmétiques et d’hygiène corporelle qui, selon le même texte, concernent aussi le parfum, l’eau de toilette et l’eau de cologne.

La qualification professionnelle prévue par le législateur est attestée par l’un des titres suivants :

-tous diplômes permettant l’exercice de la profession de médecin de vétérinaire ou de pharmacien,

-tous diplômes d’ingénieurs orientés vers la chimie ou la biologie, -tous diplômes d’études supérieures orientés vers la chimie.

Encore plus soucieux de l’intérêt et la sécurité des consommateurs, le législateur algérien exige des conditions précises pour la commercialisation des produits techniques. Ainsi, l’activité de concessionnaire de véhicules automobiles neufs est ouverte aux agents économiques constitués sous la forme de sociétés commerciales et tenu de disposer d’un personnel ayant les qualifications requises et/ou une expérience suffisante dans le domaine403. De manière analogue, le législateur algérien impose au postulant à l’activité de concessionnaire de disposer d’infrastructures appropriées de stockage et de service après-vente dont la superficie globale doit être égale ou supérieure à 5000 mètres carrés. En effet, l’utilisation du mot « postulant » à, l’article 18 du décret, démontre que le législateur fait du critère d’infrastructures appropriées une condition préalable à l’obtention de l’agrément de concessionnaire de véhicules automobiles neufs.

Par ailleurs, ces infrastructures doivent être dotées de moyens de sécurité et de protection des véhicules et être éventuellement couvertes. Comme condition préalable, le législateur impose également au postulant à l’activité de concessionnaire de disposer lui même ou par le biais de distributeur agréés, d’enceintes d’exposition et de vente dont la superficie de chacune doit être égale ou supérieure à 200 mètres carrés.

403Art. 18 du décret exécutif n° 07-390 du 12 décembre 2007 fixant les conditions et les modalités d'exercice de l'activité de commercialisation de véhicules automobiles neufs. (J.O.R.A. n° 78 du 12 décembre 2007).

Si la sélection qualitative est admise, le conseil de la concurrence français exige que les critères soient déterminés de façon objective. Cette condition est remplie lorsque le contrat comporte une clause imposant un diplôme de pharmacien, un diplôme universitaire équivalent ou un diplôme scientifique ou professionnel pour le distributeur de produits de cosmétiques de luxe404. Certains auteurs voient dans l’admission des critères du fournisseur relatifs à la qualification professionnelle et qui ont pour objectif la bonne commercialisation des produits, une application de la règle de raison405.

Le juge communautaire se montre, en revanche, plus circonspect lors de l’appréciation des critères concernant la localisation et l’aspect externe du point de vente. Le critère qualitatif d’environnement et de localisation du point de vente a pour finalité d’assurer que des produits de luxe ou de haute technicité ne sont pas vendus dans des lieux totalement inadaptés.

Le TPICE a par ailleurs estimé « qu’il appartient aux juridictions ou aux autorités nationales de veiller à ce que les critères concernant l’aspect extérieur du point de vente, y compris ceux concernant les vitrines, ne sont pas appliqués d’une manière disproportionnée406. »

Quant au juge français, il considère que la localisation du point de vente est généralement un critère déterminant dans l’investiture, qui est parfaitement licite407, mais à condition que soit rapportée la preuve par le fournisseur que la localisation du point de vente est inadaptée à la nature et à la qualité du produit408.

Concernant l’interdiction de vendre d’autres produits de nature à déprécier l’image de marque des produits de luxe, le TPICE admet qu’on puisse, compte tenu de leur aura et prestige, exiger que les parfums et cosmétiques de luxe, ne soient pas vendus à proximité de certains

404Cons. conc., déc. n° 96-D-57, 1eroct. 1996, Produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, BOCCRF, 11 fév. 1997, p. 42.

405D. FERRIER, Le Droit de La distribution, Lexis Nexis SA, 2006, p. 265.

406TPICE, 12 déc. 1996.aff. T-19/92 et T-88/92, précité.

407Cass. Com., 1erjuill. 2003, Sté Anaisc/ Sté Marie Jeanne Godard : Cah. Dr. Entr. 2003, n° 5. p. 42, obs. D. Mainguy.

408Cass. Com., 16 mai 2000, Sté Pronovias c/ Sté Galeries Tomy : Cah. Dr. Entr. 2001, n° 4, p. 32, obs. D. Mainguy.

autres produits tels que les produits d’alimentation et d’entretien, ou qu’il y ait une séparation adéquate entre les produits de luxe et ceux véhiculant une image de qualité inférieure409. Pour la jurisprudence française les critères de l’environnement du magasin sélectionnables s’étendent aux autres marques représentées dans le point de vente : elles doivent appartenir à la même catégorie, une cohérence est nécessaire dans la présentation à la clientèle de façon qu’une marque prestigieuse ne souffre d’un voisinage d’un produit quelconque410.

La commission de la concurrence a reconnu explicitement à son tour, dans un avis du 1er décembre 1983, les critères qualitatifs relatifs à la qualification et à la localisation et l’environnement du point de vente en admettant l’existence d’une demande spécifique des consommateurs de produits de luxe, se distinguant de la demande d’autres produits « pour lesquels l’image et les conditions d’environnement de la vente sont des considérations soit inexistantes soit accessoires dans la décision d’achat. »411 Elle reconnaît que la distribution sélective est une adaptation de l’offre à une demande spécifique des consommateurs.

De surcroit, le TPICE juge que « constitue en principe une exigence légitime le critère veillant à ce que l’enseigne du distributeur ne soit pas de nature à dévaloriser l’image de luxe des produits de luxe412».