• Aucun résultat trouvé

Le contrat de distribution sélective Etude comparée

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Le contrat de distribution sélective Etude comparée"

Copied!
264
0
0

Texte intégral

(1)

Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique

UNIVERSITE D’ORAN

FACULTE DE DROIT

Mémoire présenté pour l’obtention du diplômede

magistère en droit comparé des affaires

sous la direction de :

Pr. Dalila ZENNAKI

Présenté et soutenu publiquement par : Mustapha HOCINI

Membres du jury :

Président :Mustapha MenouerProfesseur

Encadreur :Dalila Zennaki

Professeur

Examinateur : Fatiha ZanounMessabihi Maitre de conférence (A)

Année universitaire : 2011/2012

Le contrat de distribution sélective

Etude comparée

(2)

Je tiens à remercier sincèrement Madame le Professeur Dalila Zennaki, pour ses précieux conseils et le temps qu’elle m’a accordé tout au long de la préparation de ce mémoire.

(3)

PRINCIPALES ABREVIATIONS

- al. : alinéa - als. : alinéas - art. : article - arts. : articles

- Bull. : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation. (chambre civile) - C.A. : Cour d'appel

- Cass. com., : Cour de cassation. (chambre commerciale) - Cass. crim., :Cour de cassation. (chambre criminelle) - C. alg. com. : Code algérien de commerce

- C.civ. : Code civil

- C.civ.alg : Code civil algérien

- C. civ. fr : Code civil français

- C. com. : Code de commerce

- C. fr. com. : Code français de commerce

- ch. : chambre

-Coll. : Collection

- comp. : comparer

- Cons. conc. : Conseil de la concurrence

- C.J.C.E. : Cour de Justice des Communautés européennes - comm. : commenté.

(4)

- D. : Recueil Dalloz -doctr. : Doctrine - Dr. : Droit - éd. : édition

- ÉDIK. : Édition et diffusion Ibn Khaldoun - Fasc. : Fascicule

- Gaz. Pal. : Gazette du Palais - ibid. : au même endroit

-INC. : Institut national de commerce -inf. : Infra

- J.C.P. : Jurisclasseur périodique (Semaine juridique) -jur. : Jurisprudence

- J.O.C.E. : Journal officiel des Communautés Européennes - J.O.R.A. : Journal officiel de la République algérienne - L.G.D.J. : Librairie générale de droit et de jurisprudence - Litec. : Librairie technique

- obs. : observations - op. cit. : Option citée

-ord. : Ordonnance

-ord. Fr. : Ordonnance française

- p. : page - pp. pages

(5)

- préc. : précité

- PUF. : Presses Universitaires de France

-Règ : Règlement.

- Rec. : Recueil des arrêts de la Cour de Justice C.E.E -Rev. Jur. Com. : Revue de jurisprudence commerciale - R.J.D.A. : Revue de jurisprudence de droit des affaires -R.I.D.C. : Revue internationale de droit comparé - R.T.D.Civ. : Revue trimestrielle de droit civile

- R.T.D.Com. : Revue trimestrielle de droit commerciale -R.T.D. Eur. : Revue trimestrielle de droit européen -

s.

: suivant

- somm. : sommaire

- Trib. com. : Jugement du tribunal de commerce -Trib. Corr : Jugement du tribunal correctionnel -T.G.I. : Jugement du tribunal de grande instance -t.: tome

-V. : voir -vol.: volume

(6)

Introduction

Dans une société de consommation caractérisée par la production de masse, où l’objectif essentiel des entreprises n’est plus de produire mais de vendre, la distribution se révèle comme une fonction déterminante dans l’acheminement des produits du fabricant à l’utilisateur ou consommateur final1.

Elément fondamental de la politique commerciale des fabricants, la distribution, qui permet de mettre à la disposition du consommateur final les biens et services, consiste à sélectionner et à gérer un ensemble de moyens pour que les produits soient disponibles au bon endroit, dans les quantités voulues et dans les conditions les plus propices à susciter l’acte d’achat2. La sélection est pratiquée plus particulièrement lorsqu’il s’agit de commercialiser des produits de luxe ou de haute technicité dont la nature requiert un distributeur spécialisé disposant d’un personnel qualifié et d’un point de vente approprié.

En effet, à ce type de produits sont associés une grande qualité, une réputation, un savoir faire, une histoire, un prix distinctif et une communication haut de gamme qui, à peine de n’avoir aucun sens, reposent nécessairement sur la technique de la distribution sélective. Cette méthode de commercialisation apparue dans les années soixante-dix, permet aux fabricants de produits de qualité de défendre leur image en s’assurant que leurs produits seront distribués dans de bonnes conditions3.

Parallèlement à cet objet principal, l’objet secondaire du contrat de distribution sélective est d’organiser une collaboration entre les parties dans le but commun d’accroître et de fidéliser la clientèle. Afin d’instaurer la loyauté et l’équilibre des relations commerciales, les pouvoirs publics gardent un œil sur cette collaboration et insistent sur la liberté du distributeur

1D. LEGEAIS, Droit commercial, Sirey, 1998, 12ème édition, p. 330.

2A. DAYAN, Manuel de la distribution, Ed. d'Organisation, Paris, 1981, p. 03.

3J. J. BURST et R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence », RTD com,

(7)

notamment en matière de fixation du prix de revente, mais attribuent néanmoins un droit de contrôle au fabricant propriétaire de la marque et promoteur du réseau4.

Suite à un long combat mené devant les tribunaux et les autorités de concurrence en France, les entreprises de luxe ou de haute technicité ont désormais le droit de mener à bien la stratégie commerciale qui leur convient aussi bien que le droit de choisir les détaillants qui répondent à leurs critères d’exigence et seront capable de contribuer par leur action au développement de l’image de marque. Le choix des distributeurs aptes à revendre les produits du fabricant se succèdera par la conclusion des contrats cadres mettant à la charge des parties un ensemble d’obligations qui, aussi diverses soient-elles, peuvent être identifiées aux effets réels du contrat.

Ainsi, le contrat de distribution sélective est celui par lequel « un fournisseur s’engage à approvisionner dans un secteur déterminé un ou plusieurs commerçants qu’il choisit en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif, sans discrimination et limitation quantitative injustifiées et par lequel le distributeur est autorisé à vendre d’autres produits concurrents »5.

Cet accord consiste donc pour un fabricant à choisir des distributeurs afin de maintenir le bon renom de sa marque. En outre, le contrat de distribution sélective concerne essentiellement les produits de luxe, de prestige ou de marque, comme les parfums, ou encore les produits de haute technicité ou ceux qui présentent une originalité.

De nature spéciale, ce contrat est une création de la pratique contractuelle du monde des affaires. La distribution sélective se situe au carrefour de plusieurs disciplines juridiques. Il s'agit d'un contrat assujetti non seulement aux règles du droit des obligations telles que définies par le Code civil, mais également à des dispositions particulières issues de divers textes6. La principale limite à la liberté des parties est constituée par le droit de la concurrence7.

4MARIE-LAURE ALLAIN. CLAIRE CAMBOLLE, « Les relations entre producteurs et distributeurs : bilan et limites

de trente ans de régulation ».http://ceco.polytechnique.fr/.

5La définition est tirée de l’arrêt de principe Ninna Ricci (crim. 3 Nov. 1982, Bull. crim., n° 258, Inf. rap. Gavalda

et Lucas de Leyssac, Gaz. Pal., 1982.2.658, note Marchi).

6Loi n°89-02 du 7 février 1989, modifiée et complétée, relative aux règles générales de protection du

(8)

Les contrats de distribution sélective sont en effet des contrats organisant des réseaux. Or, tout réseau constitue une entente verticale susceptible de porter atteinte aux règles du droit de la concurrence8. En d’autres termes, si le fabricant est libre, en vertu du principe de la liberté contractuelle, de choisir le mode de commercialisation de ses produits, la limitation du nombre des revendeurs par la sélection est de nature à porter atteinte au principe de la libre concurrence entre les agents économiques9.

Face à ce paradoxe, il convient de se demander si un fabricant de produits de luxe ou de haute technicité peut librement recourir au système de la distribution sélective ?

Le droit communautaire et le droit français ont posé comme principe, la condamnation générale de l’élimination de concurrents sur le marché10. Néanmoins, pour ne pas entraver la liberté du fabricant de choisir le circuit qui convient à ses produits, les contrats de distribution sélective ont été soumis à l’examen des autorités compétentes pour appliquer le droit de la concurrence. Sur ce point, la question essentielle sera de savoir si ces contrats sont compatibles avec les exigences du droit de la concurrence.

Le droit de la concurrence français, depuis l’ordonnance de 1986, inspirée par le droit communautaire, jusqu’aux textes les plus récents, a eu une influence immense et durable sur le développement du droit de la concurrence algérien.

définissant les conditions et modalités de fabrication, de conditionnement, d’importation et de commercialisation sur le marché national de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle ( JO N° 04 / 1997 ) ; Ordonnance n°03-03 du 19 juillet 2003, modifiée et complétée, relative à la concurrence J.O.R.A. du 20 juillet 2003, n°43, p.21 ; Loi n°04-02 du 23 juin 2004, modifiée et complétée, fixant les règles applicables aux pratiques commerciales, J.O.R.A. du 27 juin 2004, n°41, p.3 ; Décret exécutif n°07-390 du 12 déc. 2007 fixant les conditions et modalités d’exercice de l’activité de commercialisation de véhicules automobiles neufs, J.O.R.A. du 12 décembre 2007, n°78.

7J. M. HENRIOT-BELLARGENT, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de marque

aux plans économique et juridique : Gaz. Pal. 1985, 2, doctr. p. 406.

8PH. MALAURIE ET L. AYNES, Droit civil, Les contrats spéciaux, Defrénois, 3éme éd., 2007, p. 256. 9Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 1993, p. 12.

10Article 81§1 du traité de Rome pour le droit européen et articles 7, 8 et 36-2 de l’ordonnance du 1er

(9)

En effet, le législateur algérien s’est inspiré de son homologue français pour concevoir un cadre juridique efficace en matière de concurrence et des dispositions sensées assurer le passage du système d'organisation centralisée en place à celui d'une économie de marché. L’ouverture de l’économie algérienne sur son environnement régional et international, par la future adhésion à l‘OMC et la mise en œuvre des accords d’association avec l’Union Européenne et de libre-échange avec d’autres pays, avait imposé une harmonisation de la réglementation relative à la concurrence11.

S’il est indispensable d’être attentif au droit français puisqu’il constitue la source d’inspiration du droit national, il s’agira également de mesurer la portée des textes algériens face à cette problématique de la validité de la distribution sélective.

La distribution sélective repose sur un processus de sélection des points de vente par le fabricant selon des critères objectifs. L’ensemble des points de vente sélectionnés constituera un réseau permettant d’acheminer le produit au consommateur final. La sélection, pour être efficace, doit être complétée par des mesures visant à maintenir l’étanchéité du réseau, c'est-à-dire à assurer que seuls des revendeurs agréés mettent sur le marché les produits en empêchant les revendeurs non agréés de se procurer les produits contractuels. Certains distributeurs extérieurs au réseau n'hésitent en effet pas à s'affranchir des contraintes d'un réseau fermé pour revendre indument des produits sans l'autorisation du responsable du réseau12.

On peut se demander, face à cette situation, si les législateurs français et algériens ont prévu des dispositions pour lutter contre ces pratiques parfois désastreuses pour l’image de marque, et si les textes en vigueur permettent de protéger efficacement le contrat de distribution sélective.

Toutefois, il s’agira plus exactementde vérifier si l’appréciation de cette variante des contrats de distribution se fait de la même manière, selon les mêmes critères, qu’il s’agisse du droit

11BERNARD CUBERTAFOND, Professeur des universités à Paris 8, « L’Algérie face aux modèles administratifs et

politiques concurrents » In La responsabilité du gestionnaire public local, Actes du colloque franco-algérien organisé à Rennes les 25 et 26 octobre 2007 par la Chambre régionale des comptes de Bretagne et la Chambre territoriale des comptes d’Oran, sous la direction de Michel Rasera, Presses universitaires de Rennes, collection « L’Univers des normes », 2008, 284 p., p.19 à 30. www.forcesdudroit.wordpress.com

(10)

français ou du droit national. Une comparaison entre la méthode adoptée par les autorités de contrôle françaises et celle adoptée par les autorités algériennes est alors très intéressante, elle nous permettra d’étudier de manière approfondie les critères communs utilisés par les deux systèmes, mais aussi de déceler les différences d’appréciation s’il en existe, il sera alors possible de dire si l’objectif de développement et d’harmonisation du droit algérien et de son application a été atteint ou non.

En effet, l’étude présentée ici est une étude comparée, néanmoins son enjeu principal consistera à examiner beaucoup plus les textes algériens.

L’analyse de la réglementation sera accompagnée tant par l’illustration de la jurisprudence communautaire et française, que par quelques arrêts de la jurisprudence algérienne qui, sans être abondante en matière de contrats de distribution, détient des positions qu’il convient de citer.

En effet, tout à l’inverse du système français, le fait que la législation sur la concurrence soit récente dans le système juridique et économique algérien ne permet pas d’avoir, pour l’instant, une abondance de jurisprudence ou de doctrine surtout dans le cadre d’un contrat de distribution sélective et l’appréciation dans la pratique de ce contrat des situations de positions dominantes ou l’existence d'ententes ou de concentrations dans la sphère économique algérienne13.

Quoi qu’il en soit, la distribution sélective semble avoir la cote dans les pays développés en ce qu’elle permet de valoriser les produits et d’améliorer le service rendu aux consommateurs. Cependant, cette pratique n’est pas toujours possible et lorsqu’elle est envisageable, elle implique des contraintes et le respect de certaines règles qui prohibent les accords ayant pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.

Le principe d’un réseau de distribution sélective consiste pour un fabricant à choisir, sur la base de critères définis, les distributeurs qui seront les seuls agréés à distribuer ses produits. Aux termes du contrat, le fabricant s’engage à ne vendre les produits qu’aux distributeurs agréés et ces derniers ont obligation de n’approvisionner que d’autres distributeurs agréés ou les consommateurs finals.

13R. POESY, le rôle du conseil de la concurrence et du juge judiciaire en Algérie et en France en droit des

pratiques anticoncurrentielles, aspects procéduraux, in L’Algérie en mutation, les instruments juridiques de

(11)

Or, des distributeurs clandestins parviennent fréquemment à se procurer les produits contractuels en vue de la revente dans des conditions qui échappent au contrôle du fabricant. Toutefois, ce dernier peut agir en justice contre le distributeur agréé responsable de la « fuite » et contre le distributeur hors réseau responsable d’une revente illicite de produits couverts par un réseau sélectif.

C’est pourquoi l’étude de la distribution sélective débouche sur deux aspects indissociables. Elle couvrira dans un premier temps la caractérisation de ce mode de distribution, c’est à dire de la déterminer puis d’en exposer les étapes ; en second lieu l’appréciation de la distribution sélective, c’est à dire vérifier sa validité au regard du droit de la concurrence puis constater son efficacité à travers les avantages qu’elle présente et l’étanchéité du réseau grâce à des mesures de protection prévues par la loi.

A cet effet, seront consacrées deux parties :

La première relative à la caractérisation de la distribution sélective et la seconde aura trait à l’appréciation de ce contrat de distribution.

(12)

Première partie : Caractérisation de la distribution sélective

Voilà plus de trente ans que la pratique de la distribution sélective a été reconnue par les autorités de la concurrence14 et pourtant elle ne dispose toujours pas d'une détermination générique susceptible de s'imposer15. Cependant une telle détermination s'avère indispensable si l'on veut bien comprendre la spécificité de la figure et mesurer combien elle est seule à être adaptée à la vente de produits de luxe ou de haute technicité.

La distribution sélective suscite encore plus d'intérêt quand il s'agit d’analyser le fonctionnement des relations contractuelles des parties, en raison de l'importance des investissements et des enjeux économiques en question. Dans ce cas, le contrat qui encadre les relations d'affaires entre le producteur et le distributeur devra se soumettre à certaines règles quant à sa formation, ses effets et son extinction. Dans tous les cas, la distribution sélective représente un système organisé d'engagements réciproques, particulièrement adapté à des relations d'affaires complexes destinées à réaliser certains objectifs économiques.

Compte tenu de ce qui précède, il conviendra donc, dans un premier temps, de déterminer la distribution sélective en démontrant que ce type de contrat, relativement nouveau, tire sa légitimité de caractéristiques juridiques et économiques, pour ensuite analyser les conséquences de la sélection des distributeurs. Dans un deuxième temps, il apparaît indispensable de se référer aux étapes de ce contrat, pour être à même de démonter les règles applicables aux relations établies entre le fournisseur et le distributeur.

14Arrêts de la CJCE du 11 décembre 1980, L'Oréal, affaire 31/80, Rec. p. 3775, point 16, interprété à la lumière

de l'arrêt du 25 octobre 1977, Metro I, affaire 26/76, Rec. p.1875, points 20 et 21 et de l'arrêt du Tribunal du 27 février 1992, Vichy/ Commission, affaire T-19/91, Rec. p. II-415, points 69 à 71 cité par Ferrier.

15J. M. HENRIOT-BELLARGENT, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de marque

(13)

Chapitre 1 : Détermination de la distribution sélective

La distribution sélective découle du souci des producteurs d’assurer une commercialisation optimale de leurs produits par un réseau fermé de distributeurs spécialisés. Cette commercialisation se fait sous l’égide d’un contrat cadre par lequel les partenaires économiques font choix de leur stratégie commerciale et fixent le contenu de leurs engagements pendant toute la durée de leurs relations et au jour de la dissolution.

Pour bien déterminer ce contrat, il faut retrouver, à travers une analyse générale, les caractères propres à l’identification de la distribution sélective (Section 01). Mais cela ne suffit pas en raison de la nature spéciale de ce contrat qui de mande une étude du fonctionnement de la distribution sélective (Section 02).

Section 01 : l’identification de la distribution sélective

Il est intéressant de constater que la distribution sélective était inconnue du vocabulaire juridique il y a peu, et que c’est sous l’influence du droit européen que s’est développée la notion de ce système de distribution.

Ainsi, pour bien cerner la notion de la distribution sélective, on cherchera d’abord à l’analyser sous différentes approches (§1), avant de mettre l’accent sur son particularisme en indiquant ce qui la distingue des autres contrats de distribution (§2).

(14)

Paragraphe 01 : l’analyse de la distribution sélective

Pour rendre compte de la complexité de la distribution sélective, ce contrat a été apprécié sous l’angle juridique(A) puis économique(B). Ces différentes approches ont permis d’éclairer d’un jour nouveau cette pratique et de lui donner une certaine légitimité.

A) L’approchejuridique

Les nécessités des affaires, l’imagination des praticiens et le principe de la liberté contractuelle sont à l’origine de la création et du foisonnement des contrats de distribution16. Pendant longtemps le commerce était essentiellement conçu comme l’activité du fabricant lui-même qui se limite à la production des biens et à la vente directe à une clientèle avec laquelle, il entretenait un dialogue constant et des relations cordiales17.

Cependant, avec l’accroissement et la diversification de la production s’est imposée la nécessité d’une intermédiation dans le domaine des produits et services, c’est à dire une fonction de commercialisation de la production ou de la création d’un fournisseur vers le destinataire final qu’est le consommateur.18

16P. PIGASSOU : "La distribution intégrée" , RTD com 1980, p. 476.

17J. B. BLAISE, Droit des affaires, 2e éd., coll. « manuels », Paris, LGDJ, 2000, p. 475. 18D. FERRIER, op. cit, p. 3.

(15)

Il est apparu alors, la fonction de la distribution sous forme de contrats variés suscitant un encadrement juridique qui, fondé au départ sur le seul principe de la liberté contractuelle, a subi des limitations progressives dans l’intérêt général et dans l’intérêt de certaines catégories de cocontractants.19

Compte tenu de l’importance de cette fonction et du dépassement des relations entre un fournisseur et un seul distributeur, il est apparu également la technique d’organisation d’un réseau regroupant tout un ensemble de distributeurs autour d’un fournisseur20. Ce dernier va choisir le type de réseau qu’il souhaite créer et ce, en fonction des nécessités de la distribution de ses produits. S’agissant des produits de luxe ou de haute technicité, il pourra se tourner vers un réseau de distribution sélective. Le principe de ce type de réseau consiste pour un fabricant de produits d’une certaine nature à sélectionner, sur la base de critères définis, les distributeurs qui seront les seuls habilités à faire partie de son réseau21.

Cette technique de commercialisation engendre de multiples problèmes juridiques. Elle se matérialise effectivement par la mise en place d’un réseau qui repose pratiquement sur un contrat cadre. Ce contrat cadre consacre l’engagement du fabricant et ceux de ses revendeurs sélectionnés sur la base de critères non discriminatoires et préalablement définis22. De ce fait, les accords de la distribution sélective requièrent, pour leur validité, l’application du droit des contrats. Naturellement, le contrat de distribution sélective doit être conforme aux règles de l’ordre public et en particulier au droit de la concurrence.

Par ailleurs, la distribution sélective suppose l’exclusion de commerçants qui ne bénéficient pas de l’agrément du fabricant. Ce dispositif suscite alors deux types de problèmes juridiques. En premier lieu, le propriétaire du réseau sélectif se trouve confronté au principe de la liberté du commerce et de l’industrie et des règles de l’interdiction des ententes anticoncurrentielles et pratiques discriminatoires. Son système sera, en principe, également mis en cause par la

19C. THIBIERGE- GUELFUCCI, Libres propos sur les transformations du droit des contrats, RTD civ. 1997, p. 353. 20A. SAYAG, Le contrat-cadre. 2. La distribution, Etudes du CREDA, Paris, Litec, 1995. p. 76.

21JEAN -PIERRE CHAMOUX ET HENRI LEPAGE, Distribution sélective et droit de la concurrence : critique d’une

vision néoclassique, Journal des Economistes et des Etudes Humaines, vol.7 numéro 4, décembre 1996.

22F. COLLART- F. DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, Dalloz 2006, 5ème éd,

(16)

réglementation du refus de vente, désormais abolie en droit français23. En second lieu, l’écoulement des produits par voie sélective soulève un conflit lorsque les points de vente non agréé parviennent néanmoins à se procurer les articles réservés au réseau sélectif pour les revendre aux consommateurs.

D’un coté, le comportement de ces revendeurs parallèles semble juridiquement fondé puisqu’en vertu du principe de la relativité des conventions, le contrat de distribution sélective ne leur est pas opposé. De l’autre, la revente clandestine des produits cause un préjudice certain au fabricant dont l’organisation du réseau est mise à mal et dont l’image de marque des produits peut indubitablement souffrir24. De plus, le circuit de distribution sélective des produits et/ou services de haute renommée se limite rarement au territoire national et dépasse les frontières du pays d’origine du fabricant, les conflits qui en résultent prennent souvent une dimension internationale25.

En droit français et algérien, la distribution sélective est une activité commerciale qui consiste en l’achat de produits ou services en vue de les revendre. En effet, le législateur algérien qualifie l’activité de la distribution, en raison de son objet, d’un acte de commerce. Or, le Code de commerce ne définit pas l’acte de commerce ; il se borne à donner respectivement dans ses articles 2, 3 et 4 une énumération des actes de commerce par leur objet, par leur forme et par leur accessoire26.

Force est de constater que tous les actes de commerce prévus par ces articles ont un but lucratif, intéressé. Par déduction, l’acte de commerce doit nécessairement être un acte spéculatif. Mais, le critère de la spéculation ne semble pas à lui seul suffisant, puisque de nombreuses entreprises de nature civile ont un but lucratif, comme les professions libérales

23O. GAST ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50, 14/12/2000,

pp. 36-46.

24A. THALMANN, La protection des réseaux de distribution contre le commerce parallèle. Etude comparée des

droits européen, français, anglais, allemand et suisse, Libraire Droz, Genève 2001, p. 136.

25G. VIRASSAMY et M. BEHAR-TOUCHAIS, Les contrats de la distribution, LGDJ, 1999, p. 342.

26F. ZERAOUI-SALAH, Traité de droit commercial algérien : les actes de commerce, le commerçant et l’artisan,

(17)

(avocats, médecins, architectes, experts comptables..), ou encore des sociétés civiles ou agricoles27.

Etant par excellence un acte d’entremiseeffectué dans un but de profit, la distribution sélective est déclarée à juste titre, au sens de l’article 02 du code de commerce, un acte de commerce. Corrélativement, toute personne exerçant la distribution sélective de manière habituelle et professionnelle acquiert la qualité de commerçant. Est sensé également avoir cette qualité, le fabricant des produits objet du contrat de distribution sélective28.

Prévue à l’article premier du code de commerce algérien, la qualité de commerçant est attribuée à toute personne physique ou morale qui exerce des actes de commerce et en fait sa profession habituelle, sauf si la loi en dispose autrement. Il convient de rappeler que le législateur a, par la réforme survenue en 199629, ajouter plus de précision à l’article premier en indiquant que le commerçant peut être personne physique ou morale30. La société commerciale en est la figure essentielle du commerçant personne morale. Toutefois, la société ne peut bénéficier de la personnalité morale qu’à compter du jour de son immatriculation au registre du commerce31.

Aux termes de l’article 01 bis du code de commerce algérien, le contrat établissant le rapport entre le fournisseur et son distributeur agréé est régis par des règles qui sont soit issues du code commerce, soit issues du code civil, soit, le cas échéant, issues des usages de la profession commerciale32.

27Pour atténuer la distinction qui existe entre la société civile et la société commerciale et en se basant sur

l’article 215 du code de commerce, un auteur algérien écrit : « la société civile est néanmoins soumise, en tant que personne morale de droit privé, à la procédure de règlement judiciaire et de faillite dès la cessation de paiement ». M. SALAH, Les sociétés commerciales, t. 1, Les règles communes- La société en nom collectif- La

société en commandite simple, éd. Edik, 2004, p. 13.

28Le législateur algérien considère la fabrication comme une opération de production. (art. 03 de la loi n°09-12

relative à la protection du consommateur et la répression des fraudes.)

29Ord. N° 95-06 relative à la concurrence du 25 janvier 1995, J. O. R. A. du 22 février 1995, n°09, p.13.

30Avant la réforme de 1996, l’article premier du code de commerce disposait comme suit : « sont commerçants

ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ».

31Art. 549 du code algérien de commerce

(18)

Les premières font, essentiellement, fonction de règles spéciales déterminantes pour la profession et la protection du commerçant, les secondes commandent la validité du contrat quant à ses conditions générales de fond et de forme, les dernières, lorsqu’elles sont suffisamment anciennes, constantes et régulières, s’appliquent obligatoirement en cas de silence du contrat33.

Par ailleurs, le contrat de distribution sélective est soumis à une législation spéciale qui, en raison des engagements régionaux et internationaux de l’Algérie, aspire par son contenu vers une harmonisation avec le droit des pays économiquement avancés. Cette législation repose sur un ensemble constitué pour l’essentiel de trois textes fondamentaux :

La loi n° 89-02 du 7 février 198934 relative aux règles générales de protection du consommateur abrogée récemment par la loi n° 09-0335 relative à la protection du consommateur et de la répression des fraudes. Ainsi, ce dernier texte se veut rigoureux quant aux principes qu’il fixe et dissuasive dans son application par référence aux préoccupations de l’Etat algérien liées à la protection de la santé et de la sécurité du consommateur. L’ordonnance n° 03-03 du 19 juillet 2003 relative à la concurrence modifiée et complétée par le législateur en 200836 pour s’appliquer aux activités de production, de distribution et de service y compris l'importation et celles qui sont le fait de personnes morales publiques, d'associations et de corporation professionnelles quels que soient leur statut, leur forme ou leur objet. Les principales mesures de cette nouvelle loi ont porté également sur l’élargissement des membres du conseil de la concurrence et son placement

et usage ont peu d’importance car la législation écrite est très développée. Au contraire, l’usage tient une grande place en droit commercial, surtout au plan international (droit du commerce international avec les Incoterms notamment).

33F. ZERAOUI-SALAH, op. cit, p. 39.

34Loi n° 89-02 du 7 février 1989 relative aux règles générales de protection du consommateur J.O.R.A. du 08

février 1989, n° 06, p. 114.

35La loi n° 09-03 du 25 février 2009 relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes

J.O.R.A. N° 15 du 8 mars 2009.

36La loi n° 08-12 du 25juin 2008 modifiant et complétant l'Ordonnance n° 03-03 du 19 juillet 2003 relative à la

(19)

auprès du ministre du Commerce alors qu’il était sous l’empire de l’ancien textesous l'autorité du Chef du gouvernement37.

Aussi, l’arsenal juridique algérien en matière de régulation des activités commerciales s’est enrichis récemment par l’élaboration de la loi n° 04-02 du 23 juin 2004 fixant les règles applicables aux pratiques commerciales. Dans un but d’efficacité, le législateur algérien a doté tous ces textes de dispositions pénales prévoyant des sanctions (généralement de fortes amendes) qui frappent les contrevenants, lesquels engagent également leur responsabilité civile selon les règles du droit commun de la responsabilité (existence d’une faute, survenance d’un dommage et lien de causalité entre la faute et le dommage), pour la réparation civile du préjudice subi par un concurrent.

Du reste, la distribution sélective est un secteur utilisant des moyens humains, matériels et intellectuels pour faire passer ses produits de nature spéciale, de leur état de production à leur état de consommation38. Afin de bien comprendre ce processus, l’analyse se ferra ci-après sous l’angle économique.

B) L’approche économique

La distribution sélective s’analyse comme une technique choisie par un producteur et selon laquelle ses produits et/ou services sont diffusés uniquement par des revendeurs sélectionnés sur la base de critères objectifs et clairement définis. Ce mode de distribution constitue alors au plan de l’analyse économique une pratique verticale restrictive de concurrence mais qui demeure néanmoins agréée par les autorités de la concurrence lorsqu’elle permet d’obtenir certains avantages économiques39.

37D. ZENNAKI, Droit de la concurrence, cours de magistère, Faculté de droit, Université d’Oran, 2010/2011. 38Le processus de mise à la consommation regroupe l’ensemble des étapes de production, d’importation, de

stockage, de transport et de distribution aux stades de gros et de détail. (art. 03 de la loi n° 09-03 relative à la protection du consommateur et la répression des fraudes.)

39J. –M. HENRIOT-BELLARGENT, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de marque

(20)

Toutefois, si la distribution sélective limite directement le nombre des revendeurs et rend le produit juridiquement indisponible, comment expliquer que l’analyse économique qui, généralement, privilégie la concurrence loyale par rapport à toute autre fonctionnement des marchés, ait pu ainsi admettre une telle pratique verticale restrictive ?

Il est en effet admis que les règles du droit de la concurrence ont pour but de concilier l’intérêt général et la liberté des agents économiques40. Dans le cas de la distribution sélective, les offreurs des produits de luxe peuvent accéder librement aux marchés et les consommateurs peuvent rechercher les biens qui leur procurent la plus grande satisfaction pour un budget donné41.

De ce fait, la distribution sélective a pu obtenir la reconnaissance du droit de la concurrence en présentant des avantages pour le fabricant et ses revendeurs ainsi que pour les consommateurs. En effet, le distributeur admis dans un réseau de distribution sélective trouve de nombreux avantages en signant le contrat. Le plus évident est d’avoir dès l’ouverture de son point de vente un chiffre d’affaires appréciable dont l’importance augmentera en fonction de la notoriété du fabricant et l’aura de sa marque42.

D’autre part, la distribution sélective est une certitude de clientèle, c'est-à-dire dès son entrée dans le réseau, le distributeur agréé verra un courant de clientèle se porter chez lui attiré par l’enseigne et la marque du concédant. Il est des cas où le fabricant fournira immédiatement à chaque membre du réseau un portefeuille de clients non pas potentiels mais certains dans sa zone. L’avantage pour les revendeurs est alors manifeste. Autrement dit, la distribution sélective limite les risques pour les revendeurs43.

Au-delà de ces avantages, la distribution sélective permet au fabricant et aux membres de son réseau d’atteindre plusieurs types d’objectifs :

40Y. SERRA, Le droit français de la concurrence, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 1993, p. 4. 41N.CUSACQ, Le luxe et le droit, RTD com 2002, p.605.

42V. SELINSKY, la distribution sélective des produits de marque, Cah. Dr. entr, 1984/2, 17.

(21)

-offrir aux consommateurs des services de qualité après vente ou avant vente, notamment des le cas des produits complexes ou de luxe pour lesquels l’image de marque doit être défendue et préservée auprès des clients.

-s’assurer que le distributeur agréé fournira aux consommateurs un produit authentique et de qualité loin de toute forme de contrefaçon.

-réduire l’incertitude subie par le revendeur agréé pour faire établir un climat de confiance permettant à ce dernier de réaliser pleinement les objectifs du fabricant44.

Certainement, le distributeur agréé a été admis par le fabricant en raison de ses compétences ; il est soumis à des conditions préalables pour intégrer le réseau et à un contrôle rigoureux une fois faisant partie du réseau. Autant d’éléments dont vont bénéficier ses propres clients. En toute hypothèse, la compétence du distributeur agréé se traduira par des conseils plus pertinents et des services plus complets et mieux assurés que ceux des distributeurs ordinaires. En effet, il incombe au distributeur agréé sous l’égide du fabricant de conseiller de façon pertinente le client et pour ce faire, le cas échéant de l’interroger, de lui demander des explications supplémentaires sur ses besoins, notamment, dans les domaines complexes et nouveaux tel l’informatique où, d’une part il existe des composants multiples dont le choix dépend de l’usage auquel le matériel est destiné et où, d’autre part, certains clients potentiels sont inexpérimentés ; le rôle du distributeur agréé devient crucial45.

Au distributeur agréé revient également la tâche d’assurer le service après vente qui nécessite l’existence d’installations techniques disposées et entretenues selon les normes du fabricant et la constitution de stocks de pièces de rechange ainsi qu’un personnel formé à un niveau de compétence convenu capable d’intervenir d’une façon efficace et rapide auprès des consommateurs46.

44M. NESSEMBAUM, « l’analyse économique de la distribution sélective », RJDA,

Francis Lefebvre, 1995, n° 4, p. 316.

45J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD com,

1978, p. 475.

(22)

Pour ces raisons, l’analyse économique de la distribution sélective a été considérablement développée durant les quarante dernières années et différentes contraintes ont été levées pour mieux s’adapter au monde des affaires dans lequel les produits et/ou les services ne sont pas toujours homogènes.

En définitive, si l’analyse économique a pu, progressivement, admettre la distribution sélective, il faudrait encore que le fabricant fasse bénéficier ses revendeurs d’avantages tout en réduisant l’incertitude de leur environnement commercial, mais il faudrait également contrôler que ses directives seront bien mises en application47. De plus, cette pratique restrictive doit avoir pour effet d’apporter des avantages aux utilisateurs grâce à des conseils compétents à la clientèle et à des prestations de services améliorées48.

Il est à déduire des deux approches, juridique et économique que la distribution sélective répond à une logique particulière qui met en évidence sa spécificité.

Paragraphe 02 : la spécificité de la distribution sélective

Les contrats de distribution sont nés des efforts des producteurs pour proposer des techniques de diffusion de leur production via des professionnels de la vente.49Or, ces techniques ne sont pas toujours aisées à présenter tant elles empruntent des formes juridiques différentes et présentent des caractéristiques propres à chaque contrat de distribution.

47J.J. BURST ET R.KOVAR, op. cit, p. 475.

48Déc. Yves Saint Laurent, 16 déc 1991 Gaz. Pal. 1992 n° 136-137, p. 31. 49D. MAINGUY, Contrats spéciaux, Dalloz 2006, p. 223.

(23)

La spécificité du contrat de distribution sélective fut expressément reconnue en France dès 1982 par trois arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation.50

Afin de démontrer cette spécificité, Le contrat de distribution sélective doit être différencié d’une part, positivement, c'est-à-dire à la lumière de ses caractères et d’autre part, négativement, en recherchant ce qui le distingue d’autres contrats de distribution.

A) les caractéristiques de la distribution sélective

La distribution sélective constitue une forme de coopération durable entre un producteur et un distributeur dont la relation est régie par un contrat cadre. Il s’agit d’un mode de distribution libre permettant la commercialisation de produits de marques concurrentes.

1-Une distribution régie par un contrat cadre :

a) La nature du contrat cadre :

Destinée à faire face à la complexité croissante des relations d’affaires et utilisée d’abord et surtout dans les relations commerciales internationales, la technique du contrat cadre a bien trouvé sa place dans le domaine de la distribution.51Il s’agit dans ce domaine de structurer une collaboration durable entre les parties grâce à la combinaison d’un contrat de base et de contrats d’application.52

50Cass. crim., 3 nov. 1982, Lanvin, Nina Ricci et Rochas : Gaz. Pal. 1982, 2, jurispr. P. 658, note J. P. Marchi ; D.

1983, inf. rap. P. 211, obs. C. Gavalda et C. Lucas de Leyssac. – J. M. Henriot-Bellargent, Consécration de la distribution sélective des produits de parfumerie de marque aux plans économique et juridique : Gaz. Pal. 1985, 2, doctr. P. 406.

51PALLUSSEAU, Les contrats d’affaires : JCP éd. G 1987, Ι, 3275.

52PH. LE TOURNEAU, Quelques aspects de l’évolution des contrats, Mélanges Pierre Raynaud, p. 349, DALLOZ,

(24)

Ignoré par la législation tant française qu’algérienne et posant de réelles difficultés devant les tribunaux53, le contrat cadre reste jusqu’à présent un sujet à controverse dans la doctrine. Comment définir alors la notion du contrat cadre ? Et pourquoi préférer structurer la distribution sélective par la technique du contrat cadre ?

-La définition du contrat cadre :

Certains auteurs ont définit le contrat cadre comme « un accord qui porte engagement des parties à coopérer dans un domaine déterminé, qui précise les actions de coopération à entreprendre et qui renvois à des contrats d’application le soin de régler le régime de ses actions ».54

D’autres auteurs trouvent cette définition pas suffisamment large et précisent que le contrat cadre concerne un accord général de base fixant les objectifs prioritaire d’une situation complexe, sans nécessairement établir les moyens pour réaliser les objectifs. En règle générale, il suppose postérieurement la négociation et la signature de contrats d’application le plus souvent indépendants les uns des autres, pour atteindre les objectifs de l’accord initial. »55

Ces définitions montrent que l’on se trouve face à un contrat de nature originale dont la formule s’impose pour organiser et simplifier des relations d’affaires durables et complexes56. D’autant plus que le contrat cadre occupe un rang élevé et ne peut être assimilé à une simple promesse de contrat ou un pacte de préférence en ce qu’il est permanant et général et surtout contraignant pour les contrats d’application.57

53D'après M. BORE, l'étape décisive en France quant à la reconnaissance du contrat cadre se trouve dans les

arrêts de l'assemblée plénière de la Cour de cassation de 1995 relatifs à l'indétermination du prix,J. BORE, « Morte au champ d'honneur : la jurisprudence sur l'indétermination du prix dans les contrats cadre de longue durée », Mélanges CLAUDE CHAMPAUD , LGDJ, Paris, 1997, p.101.

54MERCADAL ET JANIN, « les contrats de coopération inter-entreprises », éd, Lefebvre 1974, n°45, p. 32. cité

par LAMETHE.

55D. LAMETHE, « L’accord cadre », Gaz. Pal. 1978, 2, doct., p. 366.

56F. POLLAUD-DULIAN ET A. RONZANO, Le contrat-cadre, par delà les paradoxes, RTD com. 1996, p. 180 à 210. 57PH. LE TOURNEAU, La concession commerciale exclusive, ECONOMICA, 1994, p. 35.

(25)

En effet, la promesse unilatérale de contrat est valable dès qu’une seule partie a donné son consentement au contrat projeté. Or, le contrat cadre est un contrat formé par le consentement des deux contractants. Même lorsqu’elle est synallagmatique, la promesse de contrat ne peut s’apparenter au contrat cadre car elle suppose un consentement réciproque définitif au contrat dont les parties subordonnent la formation à l’accomplissement d’une formalité qu’elles s’engagent à réaliser58. En revanche, dans le contrat cadre, le consentement doit être donné non seulement au contrat cadre, mais aussi à la formation de chacun des contrats d’application59.

Aussi et surtout, le contrat cadre suppose suite à sa conclusion la passation de contrats d’application, ce qui n’est pas tout à fait le cas de la promesse de contrat. En cela, le contrat cadre se distingue par un régime juridique particulier qui se traduit par la coexistence de deux contrats distincts pour la réalisation d’une même opération économique60.

Le contrat cadre se distingue ainsi nettement de la promesse unilatérale et synallagmatique de contrat, mais il se distingue aussi du pacte de préférence. Ce dernier est un contrat de réservation qui est utilisé essentiellement pour préparer une vente et surtout une vente d’immeuble. Une personne, le promettant, consent a réservé à son partenaire, le bénéficiaire, la priorité de l’offre d’une conclusion d’une vente future, pour le cas où il déciderait de la vente.61

Il y a donc dans le pacte de préférence, une sorte de second consentement nécessaire, comme celui déjà vu dans les contrats cadre. Mais, une analyse attentive des caractéristiques propres des deux types d’accords fait apparaître de réelles divergences. D’abord, le contrat cadre est un contrat principal régissant des relations de longue durée alors que le pacte de préférence n’est qu’un accessoire d’un contrat principal. En suite, le pacte de préférence a pour objet de

58Dans un arrêt relatif à une promesse de vente, la cour suprême algérienne avait statué, aux termes de

l’article 71 du code civil algérien, que les parties pouvaient fixer le délai pour conclure la vente projetée soit par une date prévue dans le contrat de promesse, soit par un accord implicite, soit par la survenance d’un fait. Arrêt n° 247607 du 23/05/2001. Revue de jurisprudence algérienne n°1/2001.

59F. POLLAUD-DULIAN ET A. RONZANO, préc.

60A. SAYAG, L'étude du CREDA, le contrat cadre, 1 : exploration comparative, Litec, Paris, 1994, p. 62.

61A. BENABENT,Droit civil, Les contrats spéciaux civils et commerciaux,.7ème édition, 2006, Montchrestien, p.

(26)

créer une obligation négative comme par exemple l’obligation de ne pas vendre un bien à un tiers sans respecter la préférence consenti au bénéficiaire.

L’obligation négative n’est pas de l’essence du contrat cadre. Ce dernier peut contenir des clauses d’exclusivité mais qui ne sont de la même intensité de l’obligation négative qui est caractéristique du pacte de préférence.

Enfin, le contrat cadre met à la charge des parties plusieurs obligations négatives et positives, alors que le pacte de préférence ne crée qu’une seule obligation négative62.

Le contrat successif se rapproche également du contrat cadre puisque ce dernier est un contrat préparant la conclusion d’une multitude de contrat à venir. Le contrat successif est un contrat unique, mais dont l’exécution des obligations des contractants est successive et suppose l’écoulement d’une certaine durée. La durée apparaît ainsi comme un point commun tant elle est un élément essentiel du contrat successif et du contrat cadre. En effet, le contrat cadre peut se présenter comme un contrat dont l’exécution est successive par la conclusion de plusieurs contrats d’application pendant toute la durée de la relation contractuelle63.

Toutefois, un auteur français fait remarquer que « le contrat cadre se distingue du classique contrat à exécution successive par un élément de complexité propre à la situation qu'il sert à régir. Cet élément de complexité empêche que l'on puisse ou que l'on veuille régler toutes les modalités d'exécution de l'opération au moment où les parties s'engagent sur un objet donné. »64

En conclusion, force est de constater que le rapprochement avec toutes ces notions voisines n’enlève rien au caractère spécifique du contrat cadre. Il s’agit d’un contrat original qui doit, pour son efficacité, être complété d’un ensemble de contrats d’application qui se matérialisent par de simples bons de commande et ordres de service.65

62J. SCHMIDT-SZALEWSKI, « La force obligatoire à l’épreuve des avant-contrats », RTD civ. 2000, p. 25. 63G. BRIERE DE L’ISLE, La notion de contrat successif, Rec. Dalloz, 1957, chronique, p. 26.

64A. SAYAG, préc, p. 66.

(27)

Bien qu’il ne délimite pas les éléments essentiels de l’accord des parties, le contrat cadre est en lui-même un contrat qui fait naître immédiatement des obligations indépendamment de toute conclusion ultérieure de contrats d’application. D’un point vue pratique, le contrat cadre facilite les relations d’affaires qui ont vocation à s’inscrire dans le temps en ce qu’il est souple et permet aux parties de gérer l’imprévision66.

Cela dit, il faut préciser qu’en matière de relations commerciales, le contrat cadre ne suffit pas à lui-même car Il ne contient aucune offre portant sur les termes précis de l’opération envisagée pas les parties. La fonction de l’accord cadre ne pourrait être pleinement réalisée que par la conclusion de contrats d’application qui ont un caractère complémentaire puisqu’ils concourent au même but que le contrat cadre67, mais ils sont également subordonnés en ce que les parties doivent respecter les lignes directrices prévues au contrat de base.68

En toute hypothèse, le contrat cadre se trouve le plus souvent utilisé pour tenter de mettre en œuvre une coopération durable entre partenaires économiques. Ce type de contrat est fréquent dans le secteur de la distribution, car les parties sont soucieuses de fixer par avance un cadre général de leurs relations d’affaires qui, une fois établies, sont sensées durer dans le temps.69 Dans la distribution sélective, le contrat cadre fait fonction d’un outil juridique efficace pour régir les relations entre les parties ; relations bilatérales entre le fournisseur et un distributeur agréé unis par la convention, et multilatérales par l’intermédiaire du fournisseur qui met en faisceau des accords prévus entre chaque autre distributeur agréé, de manière à monter une organisation de distribution de produits de luxe au niveau d’un marché donné70.

66J. GHESTIN, La notion de contrat-cadre et les enjeux théoriques et pratiques qui s’y attachent, JCP Cah. dr.

entr., 1997, supl. 3/ 4, p.7.

67« Contrat-cadre et contrats d’application sont étroitement unis tant juridiquement qu’économiquement. Ils

sont complémentaires » , PH. LE TOURNEAU, Quelques aspects de l’évolution des contrats, Mélanges Pierre Raynaud, op cit, p. 360.

68A. SAYAG, préc, p. 72.

69Le contrat cadre est également utilisé dans le secteur agro-industriel, dans la sous-traitance industrielle, mais

aussi dans la publicité, l’assurance ainsi que dans le secteur bancaire et financier.

(28)

La technique du contrat cadre permet donc de bien s’adapter à l’activité économique de la distribution et répond de ce fait aux besoins des parties. Ainsi, le réseau de distribution sélective est constitué par un ensemble de contrats cadres identiques qui favorisent l’intégration des distributeurs agréés dans le circuit du fournisseur et instaurent une coopération entre ce dernier et les revendeurs sélectionnés pour revendre ses produits. En tant qu’instrument d’intégration, le contrat cadre permet au fabricant de mettre en place son réseau dont la structure dépendra de son choix. Soit réseau simple formé, après sélection, par un certain nombre de distributeur agréé, soit réseau dualiste composé de grossistes et de détaillants sélectionnés71.

En tant que moyen de coopération, le contrat cadre permet aux parties à un accord de distribution sélective de délimiter les objectifs qu’ils sont convenues d’atteindre et les moyens à mettre en œuvre notamment pour une bonne commercialisation des produits contractuels auprès des consommateurs. En raison du caractère fermé du réseau sélectif, le contrat cadre permet aussi au fabricant, par le biais de certaines clauses, de contrôler et de sauvegarder l’étanchéité de son réseau72.

Enfin, le contrat cadre contient des clauses qui contribuent à la protection de la marque du fabricant en interdisant toute utilisation non conforme aux aspirations du propriétaire de la marque. Une telle utilisation, lors qu‘elle est dévalorisante, doit faire l’objet, au titre du contrat cadre, de sanctions qui peuvent aller jusqu’à la résiliation anticipée du contrat de distributeur agréé73.

71O. GAST ; GRILLAULT LAROCHE, HAYETTE, La distribution sélective et la franchise, JCP E, n° 50, 14/12/2000,

pp. 36-46.

72A. SAYAG, préc, p. 94.

(29)

2- la commercialisation de produits concurrents :

Par la distribution sélective, le producteur cherche à obtenir une commercialisation conforme à la nature de ses produits est une application uniforme de sa stratégie commerciale.74 Généralement utilisé pour la distribution des produits de luxe ou de haute technicité, ce contrat ne contient pas de clause d’approvisionnement exclusif.75 C’est ainsi que la distribution sélective apparaît comme une concession libre à la différence de la concession exclusive qui contient une exclusivité réciproque.76

De ce qui précède, il ressort que le fabricant peut approvisionner d’autres commerçants agréés, et le distributeur peut se fournir chez d’autres producteurs. A vrai dire, le distributeur agréé est même souvent incité à conclure d’autres contrats de distribution sélective avec d’autres fournisseurs afin d’organiser une confrontation avec les articles d’autres marques.77 La liberté de choix dont bénéficie le distributeur agréé est assurée par une clause insérée au contrat liant les parties. En effet, certains contrats de distribution de parfums de luxe précisent en général que « les distributeurs agréés peuvent s’approvisionner, sous contrat, en produits similaires aux produits contractuels auprès de producteurs concurrents ».78

Pour ce qui est des produits de haute technicité, la commission européenne de concurrence a enjoint les fabricants d’éliminer certaines clauses qui limitaient la liberté d’approvisionnement du distributeur en composants électroniques chez des fabricants concurrents79. De même pour les clauses qui prévoient pour le distributeur agréé de réaliser

74M. NESSEMBAUM, « l’analyse économique de la distribution sélective », RJDA, Francis Lefebvre, 1995, n° 4,

p. 316.

75« la clause par laquelle un distributeur indépendant s’engage à ne s’approvisionner en produits contractuels

qu’auprès de son fournisseur ou d’une entreprise indiquée par celui-ci », J. B. BLAISE, droit des affaires, L.G.D.J. 2000, p. 539.

76La circulaire Fontanet du 31 mars 1960 définit la concession comme « une convention liant le fournisseur à

un nombre limité de commerçants auxquels il réserve la vente d’un produit sous condition qu’ils satisfassent à certaines obligations. »

77M. ZOÏA, Concession libre : la distribution sélective, J-Cl. Concurrence-consommation, Fasc. 1020, n° 32. 78Yves Saint Laurent, et T-88/92, Givenchy, Rec. CJCE, Il, p. 1851 et s., Contrats, conc., consomm. 1997, n°1, p.

13, note L. Vogel

79J.J. BURST ET R.KOVAR, « la distribution sélective et le droit communautaire de la concurrence » RTD eur

(30)

une part minimale de ses achats auprès de son fournisseur et aboutissent ainsi à une exclusivité d’approvisionnement de fait sans contrepartie80.

La commercialisation des produits concurrents est donc une caractéristique inhérente au système de distribution sélective, qui au-delà d’être dans l’intérêt du distributeur, constitue un avantage pour le fournisseur et le consommateur. Libre de s’approvisionner ailleurs, le distributeur agréé proposera une présentation complète des marques concurrentes dont le succès dépendra du choix offert au client. En réalité, l’absence d’une présentation variée est parfois même invoquée comme un motif de refus d’agrément ou d’une résiliation anticipée du contrat.81

Cela dit, il ne faudrait pas que cette obligation soit imposée de manière stricte, car tout distributeur agréé qui ouvre un point de vente a besoin de temps pour se fournir en produits de différentes marques concurrentes.82Ménageant la chèvre et le chou, la jurisprudence française a estimé que l’obligation imposée par le fournisseur d’offrir à la vente au moins quatre marques de luxe concurrentes, que le distributeur agréé peut librement choisir, ne constituait pas une exigence excessive.83

De telles exigences, sans être exorbitantes, offrent au consommateur un choix libre et varié. En effet, la distribution sélective ne saurait être justifiée si elle ne va pas de l’intérêt du consommateur. De plus, il s’agit là d’une nécessité dans l’objectif est de maintenir intact, coûte que coûte, l’impact psychologique du produit auprès du consommateur. Dès lors, le distributeur agréé ne saurait vendre, par négligence, ou consciemment, des produits banals dont le voisinage pourrait déprécier l’image de marque des produits de luxe84.

80P. PIRIOU, La distribution sélective et les règles communautaires de la concurrence, RTD eur. 1978. p. 628. 81A. SAYAG, Le contrat-cadre. 2. La distribution, Etudes du CREDA, Paris, Litec, 1995. p. 80.

82Yves Saint Laurent, et T-88/92, Givenchy, préc ; en l’occurrence, le distributeur dispose de dix-huit mois pour

recevoir l’investiture de marques concurrentes, ce que la commission européenne de la concurrence a estimé être un délai suffisant.

83Ibid.

84S. POILLOT-PERUZETTO, « Exemption par catégorie des accords verticaux : la franchise », RTD. com 2001,

(31)

B) distinction des autres contrats de distribution :

Traiter la distribution sélective comme une forme d’un accord de distribution conduit à montrer son caractère unique. Car ce contrat ne peut être assimilée ni à la concession commerciale, ni à la franchise.

1- La distribution sélective et la concession commerciale :

La concession est accordée à une entreprise de commerce qui achète les produits pour les revendre à sa clientèle en son nom et pour son compte.85le terme concession est étranger au droit privé, il est en effet emprunté au droit administratif où il est employé pour désigner un mode d’exploitation des services publics.86

En droit algérien, la concession administrative est régie par les articles 119 du code de la Willaya et l’article 132 du code de la commune. En France, la seule définition officielle de la concession commerciale résulte de la circulaire Fontanet du 31 Mars 1960. Ce texte présente ce contrat comme « une convention liant le fournisseur à un nombre limité de commerçants auxquels il réserve la vente d’un produit sous condition qu’ils satisfassent à certaines obligations. »

En Algérie, aucune définition n’est apportée à la notion de concession commerciale. Toutefois, le législateur algérien a consacré tout un texte à la concession automobile. Ainsi, le décret exécutif 07-390 contient 41 articles tenant essentiellement aux conditions d’accès et d’exercice de l’activité de concessionnaire d’automobiles neufs. Quant au contrat de concession, le législateur n’apporte aucune précision de nature à conférer à ce contrat un statut spécial et des règles propres aux caractéristiques de cette pratique malgré son nette augmentation dans le commerce et l’économie nationale87.

85J.B. BUISSON, M LACGER ET X TANDEAU DE MARSAC, Etudes sur le contrat de concession exclusive, Sirey

1968, p. 11.

86PH. LE TOURNEAU, La concession commerciale exclusive, Economica 1994, p. 6.

87M. BENACHOUR, « implantation d’usines automobile en Algérie : La concurrence s’aiguise entre Renault et

(32)

En effet, le dispositif ignore totalement ce contrat, si ce n’est que l’article 02 qui met en évidence le caractère contractuel de la relation liant le concessionnaire au concédant et l’article 06 qui impose le respect des règlements en vigueur, notamment l’ordonnance relative à la concurrence et son article 10 qui prohibe tout contrat d’achat exclusif conférant à son titulaire un monopole de distribution sur le marché.

Pour bien distinguer la concession commerciale de la distribution sélective, il convient d’en donner une définition qui, ignorée par la législation française et algérienne, a était l’œuvre de la doctrine.

En 1963, Claude Champaud donnait une définition du contrat de concession comme suit : « un commerçant, appelé concessionnaire, met son entreprise de distribution au service d’un commerçant ou industriel appelé concédant pour assurer exclusivement, sur un territoire déterminé, pendant une période limitée, et sous la surveillance du concédant, la distribution des produits dont le monopole de revente lui est concédé. »88

Cette convention permet donc au concédant d’octroyer à des distributeurs géographiquement répartis, une exclusivité de distribution limitée à un territoire déterminé. Le concessionnaire, commerçant indépendant, est seul habilité à vendre, sur le territoire concédé et délimité par le contrat, les produits du fournisseur89.

Tout porte à croire que l’exclusivité territoriale accordée par le concédant au concessionnaire est ici le cœur du contrat, elle est l’élément essentiel du contrat de concession commerciale90. Aussi, comme dans le contrat de distribution sélective, le concessionnaire vend les produits du fournisseur en utilisant la marque de ce dernier pour se prévaloir de la qualité de distributeur privilégiés. Son activité commerciale fera, à l’instar de celle du distributeur agréé, l’objet d’un contrôle de la part du fournisseur propriétaire de la marque qui doit veiller à rester maître de son réseau91.

88C. CHAMPAUD, La concession commerciale ; RTD com 1963, p. 451 et s 89PH. LE TOURNEAU, préc, p. 15.

90B. BOULOC, Vente commerciale, Exclusivité, Concession exclusive de vente, Résiliation, délai de préavis. Abus

de droit, RTD com., 1994, p.347.

91PH. LE TOURNEAU, Concession exclusive.-conditions de validité au regard du droit des

(33)

Néanmoins, les deux contrats restent des techniques contractuelles permettant au distributeur de garder son indépendance juridique. Ainsi, comme le distributeur agréé, le concessionnaire est commerçant indépendant immatriculé au registre du commerce et des sociétés, sous sa propre dénomination sociale et non sous celle du concédant. En tant que tel, il accomplit de manière habituelle et répétitive, pour son propre compte et en son propre nom des actes de commerce, achète des marchandises à son concédant dont il est propriétaire puis, les revend, toujours en son nom et pour on compte.92

Malgré tous ces points communs, la distribution sélective se distingue nettement de la concession commerciale. Tandis que la première se définit en fonction de critères qualitatifs de compétence, la seconde repose sue un découpage du marché, attribuant à chaque concessionnaire une zone géographique limitée assortie d’une protection contre la concurrence active du fournisseur et des autres concessionnaires du réseau.93

Plus précisément, dans la concession commerciale, le concédant s’engage à vendre en exclusivité ses produits à un commerçant, le concessionnaire, pendant une période et sur un territoire déterminé à charge pour ce dernier de les commercialiser, de respecter les clauses du contrat, et surtout, de ne vendre aucun produit concurrent à ceux de son concédant. La distribution sélective quant à elle, n’entraine aucune exclusivité, ou du moins une exclusivité de fourniture comme le précisent certains auteurs.94

En effet, le fournisseur peut approvisionner d’autres concurrents agréés dans la même zone géographique et le distributeur agréé peut commercialiser des produits d’autres concurrents du fournisseur à condition de ne pas dévaloriser l’image de marque des produits contractuels. En d’autres termes, la concession commerciale vise à établir une exclusivité réciproque entre les partenaires alors que la distribution sélective ne fait que profiter un commerçant d’une image de marque en réservant une partie de son activité et de la surface de son magasin à la distribution des produits d’un fournisseur d’articles de marque.95

92C. CHAMPAUD, préc, p. 456.

93D. FERRIER, Droit de la distribution, Litec, 4eéd., 2006, p. 281.

94« Le contrat de distribution sélective emporte une exclusivité dans la mesure où le fournisseur s’engage à ne

vendre ses produits qu’aux distributeurs qui satisfont certains critères qualitatifs.», D. FERRIER, op. cit, p. 262.

(34)

Si les deux contrats limitent le nombre des distributeurs par une sélection objective, l’absence d’une clause d’exclusivité territoriale dans le contrat de distribution sélective à conduit certains auteurs à le qualifier de spécialisation fonctionnelle par opposition à la concession commerciale qui serait une spécialisation territoriale.96

La concession commerciale est donc un contrat de distribution présentant des caractéristiques propre à le distinguer nettement du contrat de distribution sélective. Qu’en est-il alors du contrat de franchise ?

2 - La distribution sélective et la franchise :

Né aux Etats-Unis sous le nom de franchising,97le contrat de franchise est une méthode de collaboration entre une entreprise franchiseur et une ou plusieurs entreprises franchisés. La doctrine française s’accorde de manière générale à définir ce contrat comme une convention par laquelle le franchiseur met à la disposition de son franchisé, en contrepartie du paiement d’un droit d’entrée et de redevances, une marque et des signes de ralliement de la clientèle, lui transmet un savoir faire substantiel et spécifique, exploité suivant des techniques, notamment commerciales, uniformes, préalablement expérimentées, régulièrement mises au point, contrôlées et transmises au franchisé sous forme d’une assistance continue.98

Par ailleurs la Cour de cassation française affirme que le contrat de franchise nécessite la réunion de trios éléments essentiels :

-la mise à disposition par le franchiseur au franchisé d’une marque et/ou d’une enseigne.

96J. B. BLAISE, Exemption par catégorie des accords d’exclusivité : RTD eur. 1985, p. 568 et s.

97Le terme « franchising » n’est pas utilisé en France puisque la loi du 31 décembre 1975 interdit l’emploi des

termes étrangers. Certains auteurs français comme Jean Beauchard parlent du mot « franchise », alors que d’autres, tel Phillipe Le Tourneau, se ralliant à la Cour de cassation française préfèrent employer le terme « franchisage ».

98PH. LE TOURNEAU, Les contrats de franchisage, Litec, 2003, p. 29 ; J.- M. LELOUP, La franchise, Droit et

pratique, Delmas, 3ème édition, 2000, p. 10 ; D. BASCHET, La franchise, Guide juridique-conseils pratique, Gualino éditeur, 2005, p. 19 ;J.BEAUCHARD, Droit de la distribution et de la consommation, PUF, coll. Thémis – Droit privé, 1996, p. 192 ; D. FERRIER, préc, p. 301.

Références

Documents relatifs

- Le sujet impose ainsi une double approche, de droit de la concurrence et de droit des contrats qui se traduit ici par des principes en quelque sorte inversés : alors qu'en droit des

un modèle dont le trait marquant réside dans une intégration toujours plus poussée, sur un axe vertical, du secteur de la distribution dans celui de la production » 163. Ainsi,

- Dès lors que le contrat est interrompu, il ne peut reprendre facilement : le réseau de distribution est rompu, le distributeur perd sa clientèle, ses efforts

Le contractant (ou chef de file dans le cas d’une offre conjointe) doit envoyer une facture par courrier électronique au pouvoir adjudicateur concerné pour demander le paiement

Le Fournisseur déclare qu’il se consacre à la fabrication et/ou commercialisation des produits figurant à l’Annexe 1 de ce Contrat (ci-après, "les Produits") et

(i) Facturation du Service de Mise en Relation : le Partenaire s'engage à verser à Haut Les Cours une rémunération égale au pourcentage indiqué aux Conditions Particulières (le «

désigne toute personne ayant acquis un droit quelconque, en relation avec la conception, la réalisation, la production et la distribution des oeuvres musicales incluses dans

Le Service européen pour l’action extérieure (ci-après dénommé «le SEAE»), représenté en vue de la signature du présent contrat par Mme Françoise Collet, Chef de