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CHAPITRE 3 : Cadre méthodologique

3.6 Portée et limites méthodologiques de la thèse

D’emblée, la principale force de l’étude de cas réside dans cette possibilité qu’elle offre de traiter un matériau empirique varié (Albarello, 2011). Un des apports de la présente étude qualitative repose ainsi sur la confrontation du point de vue de trois types de participant-e-s au contenu des documents institutionnels quant à la question de la progression aux études doctorales en SHS, ce qui nous a permis de l’appréhender dans toute sa complexité.

Dans une perspective de transférabilité (Drapeau, 2004), les résultats d’une étude de cas sont par ailleurs en quelque sorte « généralisables »31 à l’ensemble des cas analogues, porteurs de

projets ou d’activités semblables avec des acteurs de même type. En d’autres mots, bien que chaque cas soit relativement unique, les constats qu’on en tire viennent « augmenter le catalogue des situations ou [des] phénomènes que l’on peut s’attendre à rencontrer au sein de [projets, programmes, organisations] analogues, sous certaines conditions de contexte » (David, 2005, p. 12). La thèse a ainsi été l’occasion d’étudier un contexte particulier de formation doctorale en SHS à partir duquel il a été possible de formuler des observations

30 Skakni, I. (2016, juin). La formation doctorale en sciences de l’humain et du social: entre enjeux individuels et

obstacles structurels. Communication présentée au 29e Congrès de l’Association Internationale de Pédagogie

Universitaire (AIPU). Lausanne, Suisse: Université de Lausanne.

Skakni, I. (2016, mai). Les études doctorales en sciences de l’humain et du social: formation à la recherche ou épreuve initiatique? Communication présentée au colloque La formation doctorale. Pratiques d’encadrement et postures de

recherche des encadrants, dans le cadre du 84e congrès de l’Association francophone pour le savoir. Montréal:

Université du Québec à Montréal.

31 Albarello (2011) parle de « généralisation analytique », laquelle se distingue de la généralisation statistique et fait

référence « à la force d’une analyse systématique et approfondie qui va permettre de discuter de propositions théoriques, non pas sur la base d’observations qui se répètent suffisamment, mais en fonction de la qualité des observations et de la valeur des interprétations proposées, potentiellement significatives pour interpréter d’autres cas particuliers » (p. 9).

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généralisables – dans une perspective analytique (Albarello, 2011) – à d’autres contextes de formation doctorale en SHS. Néanmoins, certains de nos choix méthodologiques confèrent des limites à la thèse.

D’une part, le recours à la participation de volontaires ne permet pas de circonscrire ce qui distingue les doctorant-e-s ayant accepté de participer à la recherche de ceux et celles qui n’y ont pas trouvé d’intérêt. Il est ainsi possible que les constats tirés des entretiens soient surtout représentatifs d’un profil de doctorant-e-s en particulier ou d’un type d’expérience de formation doctorale spécifique. En effet, la plupart des participant-e-s ont obtenu un soutien financier important en cours de processus (bourse d’excellence ou bourse de recherche), ce qui permet de penser qu’il s’agit d’étudiant-e-s plus performants que la moyenne ou du moins bénéficiant de plus de soutien que la moyenne. De même, la majorité d’entre eux réalisent une thèse « empirique » qui implique une période d’observation sur le « terrain » ou encore le recrutement d’un certain nombre de participant-e-s. Les doctorant-e-s issus de domaines où les thèses théoriques sont privilégiées ont été beaucoup plus difficiles à recruter. Plus de témoignages de leur part auraient probablement offert un portrait plus nuancé des caractéristiques du processus de formation doctorale en SHS.

En outre, les directeurs et directrices de thèse n’ont pas de liens particuliers (pédagogique ou départemental) avec les doctorant-e-s recrutés, ce qui aurait permis une comparaison plus fine de leur perception respective des aspects facilitants et contraignants de la formation. Par ailleurs, à l’égard de la conduite des entretiens en général, et de manière à rendre compte de ce que Fassinger et Morrow (2013) nomment « la subjectivité et la réflexivité » du chercheur, il importe de mettre au jour certains de nos présupposés, en tant que chercheure, de même que les effets possibles du statut de doctorante dans le cadre d’entretiens menés auprès de pairs doctorant-e-s, de directeurs et directrices de thèse et d’administrateurs universitaires. D’emblée, notre statut de doctorante nous confère une sensibilité et une empathie plus grandes pour le vécu des doctorant-e-s rencontrés aux fins de la thèse, ce qui a facilité les échanges, et par le fait même, permis d’obtenir des témoignages riches et approfondis. En revanche, dans le cas des directeurs et directrices de thèse ainsi que des administrateurs, ces échanges ont parfois été moins fructueux. Si, en général, ces participant- e-s ont fait preuve d’une grande générosité et de franchise tout au long des entretiens, certains

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ont toutefois adopté une posture d’autorité qui, par moments, nous rendue plus réticente à demander des précisions, à recadrer un échange s’éloignant trop des objectifs de l’entretien ou même à poser l’ensemble des questions du guide d’entretien. Il est aussi possible que notre statut de doctorante ait incité certains directeurs et directrice ou administrateurs à éviter de partager des points de vue plus négatifs sur les doctorant-e-s ou encore sur des sujets plus délicats concernant les aspects administratifs de la formation doctorale. Ultimement, notre « positionnement social », au sein du cas à l’étude, a probablement aussi eu une influence sur la façon d’analyser les données générée au cours des entretiens, notamment en portant davantage d’intérêt au point de vue des doctorant-e-s qu’à celui des directeurs et directrices ou des administrateurs.

D’autre part, dans la mesure où une des visées fondamentales de la thèse est de comprendre les particularités du processus de formation doctorale en SHS et non l’expérience individuelle des doctorant-e-s, l’analyse des données a été réalisée en considérant le point de vue global des trois types de participant-e-s. Bien qu’ils aient été corroborés par quatre personnes, il est possible que les résultats rejoignent à un degré variable l’expérience et l’opinion de chacun des participant-e-s de l’échantillon.

Enfin, l’exigence éthique, consistant à ne jamais divulguer d’information concernant le lieu où la recherche a été menée a été plutôt contraignant au regard de la description de l’organisation formelle de la formation doctorale en SHS dans le cas étudié. En outre, le choix de s’appuyer principalement sur les informations et les documents institutionnels accessibles sur le site web de l’établissement d’enseignement à l’étude – bien que pertinent et justifié – peut avoir pour effet de laisser dans l’ombre certains pans de cette organisation formelle.