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CHAPITRE 1 : Progresser dans la formation doctorale — éléments de problématique

1.2 Recherches sur la progression dans la formation doctorale : état des lieux

1.2.2 Progresser ou non dans la formation doctorale : facteurs à considérer

1.2.2.3 Facteurs liés au milieu et au contexte d’études

Les facteurs liés au milieu et au contexte d’études font référence ici aux ressources, au soutien et aux conditions d’études dont bénéficie un doctorant ou une doctorante au sein de son département, de son centre de recherche ou de son programme d’études.

Les doctorant-e-s seraient plus susceptibles d’obtenir leur diplôme s’ils bénéficient d’un milieu d’études donnant accès à : un soutien financier et matériel (ex. bourses, espace de travail); des possibilités d’emploi (ex. assistanat, charge de cours); des occasions d’implication dans le milieu (ex. comité de programme, association étudiante); la possibilité d’être encadré par un directeur ou une directrice disponible et d’évoluer dans un climat positif entouré de pairs qui traversent les mêmes épreuves (Bair & Haworth, 2004; Di Pierro, 2007; Gemme & Gingras, 2006).

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Il est probable que de telles conditions offrent davantage d’occasions pour les doctorant-e-s de se familiariser avec le fonctionnement du département et les spécificités de leur discipline. Le fait de travailler et de s’impliquer dans le milieu d’études permet en effet de s’enquérir des valeurs, des normes et des règles qui y prévalent, ce qui faciliterait la progression dans la formation et permettrait de donner un sens aux différentes étapes à franchir (Lovitts, 2005). Comme Austin (2002) le souligne, les interactions entre pairs doctorants permettent une meilleure appropriation des exigences et des difficultés liées à la formation, notamment en ce qui concerne l’ambiguïté et le stress qui caractérisent l’étape de la rédaction de la thèse. Ces interactions favoriseraient la progression des doctorant-e-s dans la mesure où elles constituent une forme de soutien et d’encouragement (Boud & Lee, 2005; Martinsuo, 2007). Par ailleurs, une relation significative avec le directeur ou la directrice de recherche ou d’autres professeur-e-s du département offre à l’étudiant-e l’occasion de discuter de ses attentes et de ses appréhensions et ainsi d’être mieux orienté dans ses décisions, tout au long de son parcours doctoral (Austin, 2002).

En corollaire, selon Gemme et Gingras (2006), les étudiant-e-s qui vivent moins d’interactions au sein de leur département ou leur centre de recherche peuvent devenir plus insatisfaits à l’égard de leurs études, de leur directeur ou directrice de recherche, des autres professeur-e-s et de leurs pairs. Ils développeraient en outre un plus grand sentiment d’isolement et un plus faible sentiment d’appartenance envers leur milieu d’études. Le manque d’information et un certain désengagement envers les études peuvent rendre ces étudiant-e-s plus vulnérables aux perturbations extérieures telles que des difficultés financières ou familiales (Lovitts, 2005). Ultimement, les ressources et le soutien offerts aux doctorant-e-s dépendent beaucoup de la culture disciplinaire dans laquelle s’inscrit leur programme de doctorat.

Modes de socialisation

Comme nous l’avons évoqué précédemment, plusieurs chercheurs considèrent que la progression des doctorant-e-s est avant tout influencée par la façon dont ils sont socialisés dans leur milieu d’études. Dans le cadre de la formation doctorale, cette socialisation renvoie à la fois au rôle d’étudiant-e gradué et à la future profession de chercheur (Golde, 1998). Delamont, Atkinson et Parry (2000) ont identifié deux modes de socialisation qui

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caractérisent chacun des grands champs disciplinaires que sont les domaines des sciences, technologies, ingénierie et mathématiques (STIM) et les domaines des SHS.

Dans les disciplines des STIM, le mode de socialisation est dit « positionnel » (positional mode). Ce dernier suppose que les doctorant-e-s prennent habituellement part à un groupe de recherche structuré de manière hiérarchique – au sein duquel les rôles de chacun sont clairement définis. Le doctorant ou la doctorante s’y voit systématiquement attribuer le statut d’assistant et, puisque de façon générale son projet de thèse s’inscrit dans un projet plus large porté par le chercheur à la tête de l’équipe, il est d’emblée considéré comme un collègue junior. Nerad et Cerny (1993) ont montré que lorsque l’étudiant-e prend part à un grand projet de recherche, ce qui lui permet de travailler en collaboration avec plusieurs chercheurs –, la progression de la thèse est facilitée et le délai de diplomation raccourci.

En SHS, les doctorant-e-s bénéficient plutôt du mode de socialisation « personnel » (personal mode). Leurs apprentissages s’effectuent ainsi dans un cadre plus libre et le projet de thèse – plus personnalisé – est mené de manière indépendante. Ce mode de socialisation implique souvent des objectifs d’études moins bien définis et des rencontres plus aléatoires avec le directeur ou la directrice de thèse, ce qui, couplé à une grande liberté dans la définition du projet de recherche, mènerait plus facilement à un sentiment d’isolement (Frischer & Larsson, 2000).

En somme, si on a tôt fait de constater que les aptitudes intellectuelles ne peuvent à elles seules expliquer la facilité ou non à progresser dans la formation doctorale, les recherches menées à ce jour n’ont pas conduit à un réel consensus à l’égard des facteurs qui permettraient de prédire la diplomation ou l’abandon des étudiant-e-s au doctorat. Une majorité de chercheurs s’entend toutefois sur le fait que le contexte et les conditions dans lesquels s’inscrit le processus de formation doctorale ont une influence majeure sur la progression des étudiant-e-s.

Ultimement, l’évolution des angles d’analyse privilégiés à travers le temps pour comprendre les aléas de la progression au doctorat ainsi que l’ensemble des facteurs – facilitants ou contraignants – qui en découlent mettent en relief des enjeux épistémologiques et théoriques qu’il importe de considérer pour développer plus avant les connaissances sur la question.

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1.3 S’intéresser à la progression dans le processus de