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1.2. Réformes scolaires et formation des enseignants : une synchronisation introuvable

1.2.2. Mémoire des réformes éducatives globales

1.2.2.3. Politiques éducatives du début du vingt-et-unième siècle

En ce début de vingt-et-unième siècle, la Réforme des années 1990 doit se montrer à la hauteur et donner des réponses aux exigences de la société chilienne face à l’éducation.

En 1994, la Commission Brunner, convoquée par le Président de la République, composée de personnalités des différents partis politiques, d’acteurs du système éducatif et du Collège des Professeurs, a émis un avis favorable à l’orientation de la Réforme Éducative. (…) Ce fut un changement réellement mis en valeur et même désiré par la société. (J.G. Annexe n°4 : 267).

Cette modalité de consultation semble s’éloigner d’une figure de réforme à la logique descendante. Cette Réforme en chemin prétend s’étendre à toutes les dimensions du système, tel un foyer de diffusion lente. En effet, elle a connu un temps de préparation, avant d’être dessinée formellement en 1994-1995. Elle a construit aussi un pont entre deux siècles et, de ce fait, ses résultats et ses effets seront certainement plus appréciés par les générations futures :

C’est une entreprise historique (…) un projet de tous, une tâche de l’État et pas seulement d’un gouvernement. (…) D’un autre côté, elle est flexible pour s’adapter aux changements accélérés et profonds de la société. (Rojas, 2002).

L’avancée de la Réforme dépend aussi des conditions d’environnement et des capacités des acteurs en présence à l’intégrer. Cependant, pour que les enseignants se l’approprient de l’intérieur, cela prendra du temps car ils sont nostalgiques de la centralisation à laquelle ils étaient habitués. Pour la plupart des professeurs de français interviewés lors de nos entretiens, la Réforme Éducative a été « imposée par le MINEDUC». Ils n’ont pas été consultés lors de sa mise en place, mais seulement après, donc ils n’en ont aucune idée précise. Elle n’offre pas de réponses à leurs difficultés d’enseigner dans des établissements où

(…) les conditions sont de plus en plus pénibles. Elle est en inadéquation avec le contexte socio-éducatif chilien et a tout décentralisé, pour donner l’opportunité de débattre au niveau local. Elle exige des enseignants beaucoup d’efforts et l’actualisation de leurs compétences.

Ces réactions du terrain confirmeraient le postulat de Mauricio Rojas :

(…) les problèmes de la mise en œuvre de cette Réforme ne sont pas dus essentiellement à l’incompréhension des professeurs, mais à une dissonance évidente dans le dessin de celle-ci. Elle contient un discours humaniste, et, par ailleurs, elle se fonde sur un objectif politique de caractère néo-libéral : affaiblir le rôle de l’État dans l’éducation et former des jeunes pour l’économie de marché. (Rojas, 2002).

Il est, néanmoins, intéressant de croiser les regards nationaux sur cette Réforme avec la vision internationale de l’OCDE.

30 Patricio Casanueva Sáez, Política educativa y reforma educacional: § Hacia una definición de Política Educativa.

Disponible sur: http://www.monografias.com/trabajos14/politicaeduc/politicaeduc.shtml TM

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En général, la politique curriculaire mise en œuvre au Chili, est de qualité, (…) raison pour laquelle, l’équipe de l’OCDE suggère de la patience pour voir les fruits de sa réalisation totale, puisque la Réforme serait seulement à une étape de transition. (…) Le pays a essayé d’améliorer systématiquement l’accès et la qualité de l’éducation pour ses enfants et ses jeunes. (…) Cependant, le système éducatif présente les caractéristiques d’un système de marché inéquitable, surtout au niveau socio éducatif, car la segmentation sociale s’est approfondie. (OCDE, 2004).

Une décentralisation du système éducatif est nécessaire pour un développement efficace, mais elle doit être accompagnée d’une démarche d’assurance qualité, alliée à l’équité, sinon, elle génère une contradiction et légitime, de ce fait, des propos comme celui de cet enseignant de Santiago :

La Réforme nous demande de prendre en compte la diversité dans la salle de classe, mais elle évalue tous les établissements scolaires de la même façon.

Là, se situe l’enjeu de toute réforme : se montrer plus équitable sans rien perdre en efficacité. Le mouvement des étudiants secondaires en 2006 et son effet direct, la mise en place d’un Conseil d’Audit Présidentiel pour la Qualité de l’Éducation sont les fondements depuis lesquels le Gouvernement de Michelle Bachelet a été chargé de transformer toutes les conclusions de ces instances civiles en propositions législatives et réglementaires.

La LGE, promulguée au forceps le 17 août 2009 par la Présidente Michelle Bachelet, a finalement substitué la LOCE, pour devenir le nouveau réceptacle législatif dont la lame de fond repose sur l’institution du droit fondamental à une éducation gratuite et de qualité. Pour que ce droit soit garanti, il est prévu de créer une Agence Publique d’Assurance de la Qualité ou une Super- Intendance.

À l’intérieur de la LGE, le Conseil d’Audit Présidentiel pour la Qualité de l’Éducation a recommandé la création d’une Carrière Professionnelle Enseignante capable d’attirer des étudiants talentueux et de maintenir dans les salles de cours des enseignants compétents.

Cette filière serait soumise à une régulation nationale, elle reconnaîtrait les compétences des professeurs en fonction de la qualité et de l’équité éducatives, elle intégrerait un dynamisme faisant réellement défaut, afin de donner aux enseignants une impulsion à progresser et, pour ce faire, elle aurait comme mission de renforcer les formations initiale et continue.

En conséquence, un examen d’habilitation Inicia, exigeant des standards disciplinaires et pédagogiques précis pour exercer comme enseignant dans le système scolaire, est également prévu, au terme de la formation initiale. Il a été réalisé pour la première fois en 2008, de façon expérimentale et volontaire. Cette habilitation devrait prendre un tournant déontique à partir de 2012. Les étudiants qui réussiront Inicia pourront intégrer le système éducatif en tant que professionnels de l’éducation, les autres en seront exclus.

Néanmoins, la construction d’accords en éducation reste complexe, elle exige de la part des différents groupes politiques parcimonie et ouverture à des concessions. Or, le corps professoral se sent en marge de tout ce processus. Olimpia Riveros, Vice-Présidente du Collège des Professeurs se fait le porte-parole d’une certaine frustration :

(…) aujourd’hui, nous sommes dans un espace démocratique, où en général, les professionnels de l’éducation, comme ils sont appelés maintenant, nous préférons parler des travailleurs de l’éducation (…), n’ont pas été consultés pour les grandes transformations réalisées en matière curriculaire par exemple.

Et, en ce qui concerne l’administration et le financement de l’éducation, la démocratie actuelle a tout fait dans le cadre de l’institution, laissée par la Dictature Militaire.

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C’est pour cela que se produisent des contradictions de façon permanente, la rébellion des étudiants en 2006 par exemple.

La LGE est un maquillage, un aggiornamiento, une simulation de changements, et c’est plus grave encore, le projet de loi maintient le même dispositif d’administration, les piliers du système avec le supposé bon prétexte de fiscaliser, donc, il s’agit d’un schéma de normalisation pour garantir le gain. (…)

Ce projet de loi recueille toutes les positions de la Droite qui s’est installée dans ce pays comme une caste d’entrepreneurs, propriétaires de l’éducation. Le système est le financement, c’est notre clé d’interprétation et le projet de loi ratifie cela. (O.R. Annexe n°4 : 276).

Les agencements politiques, en ce qui concerne les besoins éducatifs, fleurissent lorsqu’ils sont nourris de l’engrais d’une compréhension et d’une vision solides entre tous les acteurs essentiels. L’enjeu crucial pour les années à venir est la projection de l’éducation dans le champ de profondeur qu’elle mérite,

(…) celui de la construction de la communauté que nous voulons être, ou rien de moins que notre identité comme nation. (Cox, 2007 : 199).

1.2.3. Mémoire des réformes restreintes à l‘enseignement des langues :