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La place des ONG dans les référentiels normatifs et légaux

THÉORIQUES : LA CONSTRUCTION DU

Chapitre 2 : La caractérisation des acteurs du sujet : Définition des notions de

C) La place des ONG dans les référentiels normatifs et légaux

Après avoir analysé la place des ONG dans les principaux référentiels normatifs et légaux,

nous remarquons que la notion d’ONG n’est pas définie dans les textes.

Cependant, malgré une absence de définition l’acteur est régulièrement mentionné dans les référentiels réglementaires et légaux.

- En effet, les ONG apparaissent dans les Principes de l’OCDE à l’intention des

entreprises multinationales (1976, révisés en 2011) où l’OCDE souligne que

« les entreprises coopèrent avec les ONG et les organisations intergouvernementales

à la mise au point de normes de publication d’informations grâce auxquelles elles

seront mieux à même de rendre compte de l’influence de leurs activités dans les

domaines qui se rapportent au développement durable » ;

- De même, le rapport Brundtland (1987) cite également les ONG « qui apparaissent de plus en plus comme des partenaires dont la contribution à la protection et à la mise en

valeur de l’environnement, sur le plan local et national, est particulièrement

importante et intéressante sous le rapport coût-efficacité, en même temps qu’elle permet d’élaborer et d’appliquer des stratégies nationales de conservation » ;

- Dans l’Agenda 21 qui a été adopté par 173 chefs d'État lors du sommet de la Terre à

Rio de Janeiro en 1992, les ONG sont citées comme des acteurs qui « jouent un rôle vital pour ce qui est de modeler et d'appliquer la démocratie participatoire ». Elles possèdent également « une expérience, une compétence et des capacités solides et diverses dans des domaines qui présentent un grand intérêt pour l'application et le suivi de programmes de développement durable écologiquement rationnels et socialement responsables ».

- Dans son Livre Vert de 2001 la Commission européenne invite les ONG « à exprimer leur opinion sur la manière de bâtir un partenariat destiné à ériger un nouveau cadre favorisant la responsabilité sociale des entreprises, en tenant compte des intérêts à la fois des entreprises et des diverses parties prenantes ».

De plus, nous notons une absence de mention directe du terme ONG dans l’article 225 du Grenelle II, où elles ne sont pas explicitement citées. Néanmoins, l’article 225 souligne la notion de dialogue avec les parties prenantes qui dans une conception large peut englober la sphère non gouvernementale puisque la loi nomme « les associations d'insertion […] les

associations de défense de l'environnement, les associations de consommateurs et les populations riveraines ». Le constat est le même dans la loi relative aux « nouvelles régulations économiques » de 2001. Par ailleurs, parmi les principaux référentiels normatifs (GRI, ISO 26000, Norme EMAS, Norme SD 21000) les ONG ne sont pas mentionnées directement. En effet, à part pour la norme SD 21000, les référentiels explicitent l’importance et la nécessité du dialogue avec les parties prenantes, mais ne nomment pas les ONG. Néanmoins, la norme SD 21000 mentionne dans ses directives les ONG et précise que

l’entreprise « devra s’intéresser à de nouveaux acteurs de la société civile, comme les ONGs,

qui cherchent à établir un dialogue constructif et des partenariats avec les entreprises ». Cette clarification générale des notions de parties prenantes et d’ONG nous a permis de spécifier les acteurs de notre recherche. En effet, la responsabilisation et l’ouverture de la

gouvernance des firmes mettent en lumière les parties prenantes de l’entreprise qui détiennent

un potentiel d’optimisation. Il apparaît également que les ONG sont les portes-paroles des

intérêts et des attentes de la société civile et qu’elles constituent ainsi une partie prenante pour

l’entreprise. De plus, nous notons à travers l’ensemble des travaux que nous avons cités

précédemment que les ONG sont des acteurs institutionnels pertinents qui de par leur présence sur le terrain, leur expertise et leur capital réputationnel constituent des interlocuteurs privilégiés pour les entreprises. Condomines et al., (2016) parlant des ONG soulignent leur caractère « relativement homogène », leur « statut social juridiquement établi » c’est en ce sens qu’il est plus simple de les « appréhender comme des acteurs collectifs ». Pour Dupuis (2008), ces acteurs collectifs qui « représentent des intérêts de la société civile » (Dupuis, 2008) sont l’origine de l’émergence du dialogue civil qui s’est matérialisé aux côtés du dialogue social.

2.3 Synthèse des concepts mobilisés sur les parties prenantes et les ONG

Comme nous l’expliquions antérieurement, nous retenons une vision de la RSE qui se matérialise par la prise en compte des firmes des intérêts et des besoins de l’ensemble de ses parties prenantes. Nous mobilisons ainsi le concept de parties prenantes au sens de Freeman

(1984) qui est un individu ou un groupe d’individus qui trouvent un intérêt à agir dans le

cadre de l’entreprise. Nous mobilisons également en ce sens la théorie des parties prenantes (Freeman, 1984) qui est donc la capacité des sociétés à satisfaire les attentes des parties prenantes.

Au sein de ces parties prenantes, nous positionnons les ONG, que nous considérons comme

des parties prenantes de l’entreprise, car elles représentent les intérêts de la société civile

(Ryfman, 2014).

Nous estimons que les ONG sont des parties prenantes intéressantes de par la place qu’elles occupent dans la société civile et les compétences qu’elles sont à même de partager avec les firmes. De plus, comme l’expose le tableau ci-dessous, les ONG présentent des caractéristiques fondamentales et/ou exclusives.

Tableau chap.2.3 : Synthèse des caractéristiques fondamentales et/ou exclusives Caractéristique issue des

typologies Fondamentale Exclusive Humaine (Wheeler, Sillanpäa,

1997) OUI OUI

Externe (Carroll, Näsi, 1997) OUI OUI Ethique (Pelle-Culpin, 1998) OUI NON

Issue de la communauté

(Henriques, Adorsky, 1999) OUI NON

Par ailleurs, au regard des typologies que nous avons exposées nous pensons qu’elles présentent des caractéristiques accessoires qui offrent la possibilité aux ONG d’évoluer dans les catégorisations présentées, mais aussi des caractéristiques inclusives qui se superposent entre elles. En effet, au premier abord, les ONG sont une partie prenante « éthique » (Pelle-Culpin, 1998), « issue de la communauté » (Henriques, Adorsky, 1999), et « motivée par une logique autre » qu’économique (Handelman, Arnold, 1999). Elles sont également une partie prenante « secondaire » (Carroll, 1995), « involontaire » (Clarkson, 1995), « diffuse » (Pesqueux, 2002), « affectée » par les activités de l’entreprise (Ulrich, 1983) et dont la

relation avec la firme est originellement « non compatible » et « contingente » (Friedman, Miles, 2002) dans une posture a priori « militante » (Sobzcak, Girard, 2006).

Pourtant, ces caractéristiques peuvent évoluer voire se superposer selon les relations entretenues avec l’entreprise, comme un partenariat. Ainsi dès lors qu’elles formalisent une relation avec une entreprise, leur importance en tant que partie prenante varie et elles peuvent devenir une partie prenante « économique » (Pelle-Culpin, 1998), « organisationnelle » (Henriques, Adorsky, 1999), « répondant une logique économique » (Handelman, Arnold, 1999), mais aussi « primaires » (Carroll, 1995), « volontaire » (Clarkson, 1995), « contractuelles » (Pesqueux, 2002) et ainsi devenir des acteurs stratégiques décisifs pour

l’entreprise en étant « impliquée » (Ulrich, 1993) avec « des intérêts compatibles » (Friedman,

Miles, 2002) et dans une posture « engagée » (Sobzcak, Girard, 2006).

Nous allons à présent nous intéresser au cœur de notre sujet, à savoir les rapports entre les ONG et les entreprises.

Chapitre 3 : Présentation de l’épicentre du sujet : Les relations entre les ONG et

les entreprises

Nous avons précédemment caractérisé les limites de notre sujet en abordant à travers notre état de l’art les notions de RSE et de gouvernance d’entreprise. Effectivement, nous avons souligné les efforts au niveau de la responsabilité sociale des firmes qui se concrétisent par une ouverture de leur gouvernance aux parties prenantes. C’est ainsi que nous avons placé le concept de parties prenantes dans la littérature afin de comprendre la notion. Puis nous avons affiné notre travail de revue en nous intéressant plus particulièrement aux ONG, car elles sont les acteurs de notre sujet. En effet, nos travaux s’intéressent à la contribution des ONG à la performance globale des entreprises. C’est pourquoi il est important de nous intéresser désormais aux collaborations qui existent entre les deux acteurs. Nous exposerons dans un premier temps la nature des relations entre les ONG et les entreprises (3.1) puis nous détaillerons dans un second temps la matérialisation des rapports collaboratifs entre les deux entités en présentant leurs différentes formes de collaboration (3.2). Enfin, nous retiendrons les théories mobilisées afin d’élaborer notre cadre conceptuel (3.3).

3.1 Comprendre la nature des relations entre les ONG et les entreprises

Les entreprises manifestent actuellement leur intérêt sur les enjeux de la RSE et du développement durable, tentant de diluer cette image de recherche du profit qui leur est allouée naturellement en démontrant leur contribution sociale, environnementale et sociétale. Les ONG revêtent alors un rôle fondamental, car elles influencent l’opinion publique par des campagnes de pression tout en ayant un rôle décisif en aval puisqu’elles réalisent des partenariats avec certaines entreprises. Instrument de crédibilité, ces organisations seraient alors le moyen de justifier la bonne foi des entreprises.

Bien que longtemps qualifiées de « partie auxiliaire et mineure », la littérature (Delalieux, 2013) signale à présent un renforcement du champ d’action des ONG au motif que ces

dernières tirent profit de l’intérêt qu’accordent les entreprises à la RSE. L‘étude menée en

2006 par NOVETHIC et l’agence Manifeste sur le « Panorama des relations ONG/Entreprises : Quelles évolutions pour quelles influences ? », appuyait cette position en remarquant que la confiance accordée à ces organisations était élevée. On peut lire dans

l’étude qu’au début du XXIème siècle, 60% des français avaient une image positive des ONG

et 70% jugeaient leurs actions légitimes. En l’espèce, elles exercent un contre-pouvoir conséquent qu’il est important d’insérer dans la dimension stratégique des organisations.

Initialement, les relations qu’entretenaient ONG et Entreprises, étaient conflictuelles. En effet, dans les années 1990, ces relations ont été cadencées par d’importantes campagnes de dénonciation qui signalaient la part considérable de responsabilité des entreprises dans la

dégradation de l’environnement et des conditions de travail. Depuis, les relations se sont

développées, puisqu’outre des rapports antagoniques, certaines ONG et entreprises tentent désormais de collaborer.

Deux points de vue se manifestent intelligiblement. En premier lieu, certaines ONG, comme certaines entreprises refusent catégoriquement tout partenariat, leur mission fondamentale étant d’interpeller les entreprises. Le rapport peut être dans ce cas conflictuel. Ce premier comportement est illustré, à travers les interventions du collectif « Ethique sur l’étiquette », qui ne s’inscrit pas dans une logique de partenariat, préférant sensibiliser et agir en amont. Néanmoins, en second lieu, les faits démontrent que la collaboration ONG-entreprise peut être

fructueuse. L’étude de NOVETHIC et de l’agence Manifeste (2006) note plus de 340

partenariats entre les ONG et les entreprises en France. C’est l’exemple du partenariat entre le

groupe Total et l’ONG Pro-Natura ou encore entre Carrefour et la Fédération Internationale

des Droits de l’Homme (FIDH). Il est ainsi important de nuancer le propos en précisant

qu’au-delà du possible partenariat, qu’il soit conflictuel ou bien coopératif, le dialogue existe

et c’est en ce sens qu’il est important de le caractériser.

Nous présenterons tout d’abord une approche longitudinale des rapports entre les ONG et les

entreprises (3.1.1), puis nous soulignerons les motivations des entreprises et des ONG dans la collaboration (3.1.2), pour ensuite expliquer les conséquences et les retombées stratégiques des collaborations entre les entreprises et les ONG (3.1.3). Enfin, nous verrons que l’antagonisme entre les deux acteurs est encore marqué et présent (3.1.4).

3.1.1 Approche longitudinale des rapports entre les ONG et les entreprises

Nous nous intéresserons premièrement aux origines de la relation (A) pour ensuite expliquer l’évolution des rapports entre les deux entités (B).