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2.I.6.1 Perception des propriétés globales (configurale) ou des éléments faciaux ?

Le manque de données sur les modes de représentation des visages en mémoire, comment

ils

sont stockés, puis comparés, dans des processus de reconnaissance, amena de nombreux auteurs à étu-dier la question

d'un

point de vue théorique: la perception des visages se base-t-elle sur un traite-ment des éléments faciaux séparés, ou

plutôt

sur

la

configuration globale

du

visage,

ou

sur les deux ? La plupart de ces travaux utilisent des épreuves de comparaison (simultanées ou différées), pour mesurer des ressemblances (subjectives) entre visages modifiés. Les éléments faciaux sont réarrangés, ou substitués, indépendamment les uns des autres, sans aucune mesure de variabilité entre visages,

ou

de leurs configurations spatiales. Les résultats inférés à

partir

des caractéristi-ques des modes de comparaison refléteraient les processus de correspondance entre la représenta-tion visuelle perçue et stockée.

La

correspondance pourrait s'effectuer par comparaison à un modèle,

impliquant

qu'une corres-pondance parfaite entre

le

stimulus visuel et la représentation stockée en mémoire est nécessaire pour la reconnaissance. Cette hypothèse implique la mémorisation d'autant de modèles

qu'il y

a

d'instances de

I'objet

à reconnaître; c'est-à-dire

qu'il

faut enregistrer

le

stimulus non seulement de points de vues différents, dans des conditions

d'illuminations

changeantes, mais également ses changements d'apparence concernant les cheveux, la barbe ou les expressions. Les capacités céré-brales requises pour de tels opérations sont bien au-delà des performances supposées du cerveau humain. Smith et Nielsen (1970) ont soutenu cette hypothèse en présentant des résultats qui

sem-blaient confirmer un tel

mode

de

correspondance,

mais

des problèmes

de protocole

d'expé-riencel

I n'ont

pas permis de tirer des conclusions sur le mode de traitement des éléments faciaux.

Une stratégie alternative de correspondance, serait la comparaison un à un des éléments faciaux

Puge 43

2.1 Contributions de la psychologie

jusqu'à la détection d'une différence. Les travaux sur les temps de décision (RT = Reaction

Time, en

anglais)

montrent que le

temps nécessaire

pour

décider que

deux

visages

sont

différents, décroit en fonction de I'accroissement du nombre de différencesl2

1s-ith,

et

a\.,I97\;Bradshaw,

et

al., I97I).

La stratégie employée

ici

par les sujets semble être bien adaptée à la tâche qu'on leur avait assignée, et

il

est

difficile

d'en tirer des conclusions générales quant au mode de traitement des visages en soi. Ceci

illustre

un problème général, rencontré dans de nombreuses expériences de ce type: les sujets risquent de répondre aux demandes d'une tâche particulière par des straté-gies spécifiques qui risquent d'être bien différentes de leur modes de traitement habituels.

Ces deux type de stratégies, correspondance à un modèle et comparaison analytique, ne prennent pas en considération les relations spatiales et les interactions existantes entre traits faciaux;

il

est pourtant

clair,

comme nous

le

verrons plus bas, que

la

perception des expressions faciales, par exemple, est liée à la perception des interactions entre plusieurs éléments. Différentes régions du visage interagissent pour exprimer une émotion particulière

(McKelvie,Igl3;Ekman,

1979). Ser-gent

(1982;

1985; 1989) montre que

l'identification d'un

visage donr les dérails onr été filtrés

(voir

les images de la FigureT-4 de la page 224) reste pourtant possible par des

individus qui lui

sont proches. Seule

la

configuration globale, c'est-à-dire les basses fréquences spatiales,

et

les relations entre éléments sont visibles. Aucune région de ces photographies ne dispose de suffisam-ment

d'information

à elle seule pour permettre une identification spécifique.

2.1.6.2

Analyse des fréquences spatiales

d'un stimulus

visuel

Les fréquences spatiales d'une image peuvent être comparées par analogie aux fréquences harmo-niques sonores.

Un

son peut-être décomposé en une fréquence fondamentale et des harmoniques

ll.

SmithetNielsen(1970)utilisèrentdesdessinsschématiquesdevisagespossédant5élémentsvariables (sourcils, yeux, nez, bouche et oreilles) qui pouvaient prendre 3 états (épaisseur du trait: 'fin', 'moyen'et 'large'). Ils mesurèrent les jugements de ressemblance entre paires de visages présentés à des intervalles différents (1,4 et l0 secondes). Les paramètres étaient le nombre d'éléments variables et le nombre de différences par paire. Ils trouvèrent que pour I'intervalle le plus court, un processus de comparaison en série devait être employé, car plus le nombre de différences était grand, plus le temps de décision était rapide, sans que le nombre effectif d'éléments variables n'influence les performances. Cela n'était pas le cas pour I'intervalle de dix secondes, pour lequel le temps de décision variait selon le nombre d'éléments variables' Bien que leurs résultats aient confirmé en partie ceux de Bradshaw et Wallace (lg7I),les résul-tats obtenus pour I'intervalle d'une seconde, suggéraient un mode de traitement plus configural (compa-raison de modèles). Mais comme le fait remarquer Sergent (1984),

le

nombre effectif d'éléments variables était toujours confondu avec le nombre d'éléments non-variables (les visages avaient toujours 5 éléments), ne permettant pas de tirer de conclusions à propos du mode de traitement des éléments.

l2'

Bradshaw et Wallace (1971) furent parmi les premiers à essayer d'apporter un élément de réponse à cette question en étudiant les temps de réponse (de latence) de sujets à des tâches de reconnaissance. Deux visages construits à I'aide de I'Identikit était présentés simultanément au sujet. Ce dernier devait décider si les visages était différents ou pas. Les différences portaient sur un ou plusieurs des éléments à partir desquels ils étaient construits (sept au maximum). Les auteurs mirent en évidence une correspondance entre le temps de réponse et I'application d'un processus de comparaison sérielle des éléments. En d'autres termes, les sujets comparaient les éléments un à un jusqu'à ce qu'ils trouvent une différence.

IL Reconnaissatrce et Perception des Visages

de fréquences

plus

élevées; de même, on peut chercher les fréquences

qui

sont fondamentales dans

un

stimulus visuel, en remplaçant

le

paramètre temporel par

la

composante spatiale (en 2 dimensions).

Un stimulus visuel

peut donc être

décrit

comme une

distribution

d'intensités de lumière en deux dimension, et décomposé en un ensembles d'ondes sinusoïdales de fréquences, d'orientations et d'amplitudes différentesl3 1Hall, 1979;Watt, 1988; Humphreys et Bruce, 1991).

L'analyse des fréquences spatiales permet la description du contenu en information

d'un

stimulus

visuel; c'est un outil

important pour

l'étude

de

la

sensibilité

du

système visuel, chez l'homme comme chez

I'animal. Il

semblerait que notre système visuel canalise

l'information qu'il

reçoit en fréquences basses, intermédiaires

et

hautes,

qui

sont ensuite traitées séparément (Campbell et

Robson,

1968; Graham

et

Nachmias,

I97I Wilson et Bergen,

1979).

Les

propriétés globales (configurales) du visage sont associées aux basse fréquences spatiales, et les éléments faciaux aux hautes fréquences.

Si

les hautes fréquences sont soustraites de

la distribution

des fréquences de

l'image d'un

visage, cette dernière apparaît floue, et les fréquences restantes nous permettent de décrire

la

configuration globale

du

visage,

bien

que les détails nous échappent. Les hautes fré-quences sont nécessaires pour une description détaillée de I'image

d'un

visage (Figure

Al). Cer-tains

auteurs considèrent que seules les basses fréquences sont nécessaire

pour I'identification d'un

visage (Harmon, 1973; Ginsburg, 1978; Tieger

et

gantz,1979; Fiorentini,

Maffei

et Sandini,

1983), alors que les

fréquences élevées

ne fournissent qu'une

redondance

d'information.

D'autres, par contre, prétendent que les fréquences élevées jouent un rôle essentiel dans la percep-tion des visages (Fiorentini , et a1.,1983). Les conclusions de ces travaux sur I'importance des

dif-férents spectres de fréquences spatiales dépendent des épreuves qui étaient assignées aux sujets.

Ginsburg (Ginsburg, 1978) utilisa une épreuve de comparaison, et trouva que des images de visa-ges basses fréquences ("low-pass

fiItef'1étaient

comparées avec succès à des images non filtrées, concluant que les hautes fréquences ne contenaient que de

I'information

redondante à cette tâche.

Fiorentini

et

at.

(1983) utilisèrent une épreuve

d'identification,

dans laquelle les sujets devaient apprendre a

priori

le nom de plusieurs visages, puis ensuite essayer

d'identifier

des images filtrées

("Iow

and high pass"). Ils trouvèrent un taux d'identification supérieur avec les images hautes fré-quences et conclurent sur I'importance de ces dernières dans la reconnaissance des visages. Plu-sieurs remarques s'imposent: premièrement, une épreuve de comparaison réussit en n'employant que de

I'information

basses fréquences, alors qu'une épreuve

d'identification

implique un niveau supérieur de perception (distinction, discrimination) qui requière les composantes hautes fréquen-ces. Deuxièmement, mesurer seulement les performances de comparaison ou

d'identification

est une approximation relativement grossière. Les sujets peuvent réussir ces épreuves

d'identification

de visages modifiés en utilisant des stratégies

d'élimination

ou de comparaison

qui

sont chrono-phages et probablement inutiles si tous les composants du spectre sont présents.

L

enregistrement

13. L annexe sur I'imagerie numérique (point7.2.2, page222) défini de manière plus rigoureuse les notions abordées ici, et les illustre par des exemples.

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2.1 Contributions de la psychologie

des temps de latence de réponse auraient certainement apporté plus

d'information. Il

est important de considérer la nature de

I'information

disponible (présentée) en fonction des tâches (épreuves) demandées aux sujets. Différents éléments d'information peuvent être plus ou moins utiles à telle

ou telle

tâche de perception des visages, et ces éléments ne sont pas toujours contenus dans le même spectre de fréquences spatiales (Bruce, et

aL,1986;

Sergent, 1986b;

Bruce,

198g; Sergent, 1989).

Le

rôle des fréquences spatiales dans la reconnaissance ou

l'identification

des visages ne peut pas être déterminé de manière indépendante des multiples autres facteurs qui influencent leur extraction,

leur

traitement et leur importance fonctionnelle dans les opérations à exécuter, ou la résolution requise par ces mêmes opérations. Un visage possède une distribution étendue de fré-quences spatiales, et les performances sont généralement optimales lorsque

le

spectre entier est présent, comme

il

I'est

in

vivo.

Au

lieu de considérer cela comme une redondance

d'information,

ce

point

de vue suggère une complémentarité de descriptions polymorphes

du

visage,

bien

que certaines de ces descriptions puissent prendre plus d'importance que les autres sous des condi-tions particulières (Sergent, 1989).

Le

système visuel

fournit

au système

cognitif

sous-jacent une redondance

d'information

sur des scènes

et

des objets sous

la forme

de représentations multiples. Celles-ci mettent en évidence divers attributs

du

stimulus correspondant à des bandes de fréquences spatiales différentes. Ces représentations contiennent des informations structurelles spécifiques sur les objets en question.

L

importance de ces informations dépendra des opérations à effectuer.

La

diversité de ces repré-sentations contribue probablement à l'efficacité des traitements de perception, de catégorisation et de reconnaissance des visages.

Il

est généralement reconnu qu'un large spectre de fréquences spa-tiales génère les meilleures performances (Sergent, 1985).

Il

est possible que différentes bandes de fréquences soient utilisées pour différentes opérations exécutées en parallèle, augmentant ainsi

I'efficacité

du traitement.

Ces travaux montrent que les propriétés globales (configurales) du visage et

I'information

sur les éléments qui le compose, sont importantes pour la perception et la reconnaissance. Les

outils

de construction de visages employés

(Identikit,

Photofit) posent

un

certain nombre de problèmes quant aux hypothèses de base de leur

utilisation

(le protocole) et leur réalisme (image

-

visage).

Les techniques de traitement d'image par ordinateur offrent des potentialités plus vastes. Les

sti-muli

visuels auxquels nous avons affaire

ici

sont multidimensionnels, et par là même, possèdent à

la fois

des propriétés globales et locales (éléments). Comme Garner (1978)

le

suggère, les pro-priétés

d'une configuration

globale sont exprimées

à

travers les relations (interactions)

de

ses composants. Pomerantz (1981) souligne que

la

configuration (globale) est une propriété émer-geante du stimulus, et

qu'elle

n'est pas le

fruit

de ses composantes, mais bien de leur interaction.

D'où

la

difficulté d'identifier

les paramètres significatifs dans une expérience sur les composants

II. Reconnaissance et Perception des Visages

faciaux. Puisque les propriétés d'une configuration résultent des interactions de ses composants, et comme ces derniers sont directement manipulés, eux seuls sont considérés comme des varia-bles dans

l'analyse

des résultats et des performances. Pourtant, changer

un

composant entraîne forcément

un

changement dans les relations entre composants,

et

donc des propriétés globales (configurales) du visage. Comment ensuite décider lequel du composant ou de la configuration est traité par

le

processus de reconnaissance ? Force est de constater que les résultats d'expériences sur les temps de latence (RT) d'épreuves de reconnaissance ou de comparaison de visages ne per-mettent pas d'interprétations univoques à cet égard. La coexistence de propriétés configurales et élémentaires au sein

du

stimulus

'visage',

suggère

qu'il doit

exister plusieurs modes de traite-ments de

I'information

disponible, dépendant de facteurs comme les conditions

d'illumination,

I'angle de vue, la

familiarité

du sujet avec le visage-cible, etc. (Sergent et Takane, 1987; Sergent,

1e89)

2.1.7 Attributs sociaux liés auvisage humain (traitement sémantique)

Les attributs sociaux liés au visage humain sont de deux types distincts: (1) les attributs de

catégo-ries

sociales

(comme l'âge, le

sexe

ou I'origine

ethnique)

et

(2)

les attributs de

personnalité

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