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2,L.5,2 l-teffet de perception différentielle de I'inversion

Les travaux de

Yin

ç1969; I97O) sont parmi les plus cités sur la question de l'éventuelle spécificité des processus de reconnaissance des visages. Dans ce but,

Yin mit

au point une série d'expérien-ces comparant les performand'expérien-ces de reconnaissance d'objets mono-orientés (avions, maisons, etc.)

à celles des visages. Les visages furent les objets les mieux reconnus.

Yin

supposa que nous étions plus familiarisés à reconnaître des visages que les autres objets présentés. Suite à cela,

il

ajouta

Puge 33

2.1 Contributions de la psychologie

une seconde condition à son protocole d'expérience: les

stimuli

seraient présentés à I'envers et à

l'endroit,

durant les phases d'apprentissage et de reconnaissance. Cette fois

ci,

les visages furent les objets les plus

difficiles

à reconnaître. D'autres travaux livrèrent des résultats similaires (Yar-mey, et

al.,

1970: Yarmey, 1971;

Phillips

et Rawles, 1979), suggérant que la reconnaissance des visages

impliquerait

des processus différents de ceux utilisés par d'autres classes

d'objets (Yin,

1978)" Toujours selon Yin, les visages seraient une classe particulière de stimuli dont la reconnais-sance nécessiterait une stratégie d'extraction de nature holistique (ou configurale), opposée à une stratégie

d'extraction

d'éléments discrets (ou isolés) de

I'objet.

Lorsque cette stratégie ne serait pas en mesure de fonctionner, comme dans le cas des inversions, la reconnaissance des visages serait désavantagée par rapport à celles des autres classes d'objets (qui utiliseraient une stratégie d'extraction des éléments discrets dans les deux situations).

Figure 2-3 : Illustlation de I'effet de perception différentielle lors de I'inversion de I'image. Le visage au centre est plus rapidement identifiable parmi le groupe de visages de gauche (correcternents orientés) que de droite (inversés).

* i&rF4.v

II. Reconnaissance et Perception des Visages

Il

est reconnu que I'inversion perturbe les processus de reconnaissance des visages, mais la nature de ce phénomène, ainsi que son éventuelle spécificité relative aux visages, sont encore controver-sés.

Ellis

(1939)

fait

remarquer

qu'il n'y

a pas de preuves tangibles que la perception des visages soit issue d'une stratégie différente de celle des autres classes d'objets. De plus,

il

est raisonnable de penser qu'a

priorl la

perception

d'un

objet, quelle que soit sa nature,

implique

à

la fois

des stratégies d'extraction

d'information

sur la configuration et sur les éléments isolés. Le fait que des

stimuli

semblables, composés d'éléments identiques, peuvent être sujets à des modes différents de perception suivant leurs orientations suggère

qu'il

ne suffit pas de posséder des propriétés confi-gurales pour être perçu à travers elles (Sergent, 1984) Les différences de performances observées entre des visages à

I'endroit

et à I'envers peuvent également être la conséquence du manque de

familiarité

ou d'expertise avec I'inversion.

Il

a été observé que lorsque des sujets sont entrainés à percevoir une classe de

stimuli

dans une orientation inhabituelle, leurs performances de recon-naissance correspondent à celles obtenues avec des

stimuli

bien orientés (Bradshaw et Wallace,

I97l;Takane

et Sergent, 1983). Les travaux de Diamond et Carey (1986) suggèrent que

I'effet

de perception

différentielle lié

à

I'inversion

n'est pas spécifique aux visages, mais à I'expertise de perception d'une classe d'objets homogènes. Ils reproduirent les expériences de Yin en choisissant comme

stimuli

des photographies de chiens de course. Lors de I'inversion des images de chiens,

ils

observèrent

le

même

effet

de perception

différentielle

chez les dresseurs, experts en chiens, mais en revanche, pas chez les novices.

L'inversion

perturbe le traitement configural du

stimulus

(pour une revue sur le sujet, voir

Valen-tine,

1988). Les expressions sont plus

difficiles

à extraire

d'un

visage inversé.

La

fameuse "That-cher

lllusion"

de Peter Thompson (1980)

I'illustre

admirablement bien. Les

yeux et la

bouche sont inversés, produisant un effet 'grotesque'lorsque I'image est bien orientée. Par contre, lorsque I'image est inversée,

I'effet

'grotesque'est beaucoup moins perceptible

(voir

Figure 2-4).

Les

difficultés

de perception des visages inversés semblent être liées au

fait

que nous percevons

mal, voire

pas

du tout,

les relations spatiales

qui

existent entre éléments

de

visage lorsque le visage est inversé, et perdons I'accès à

I'information

qu'elles transportent. Young et aI. (1987)

ont

montré que les performances de reconnaissance de visages composites augmentent lorsque les visages sont présentés à I'envers. Chaque visage était composé d'une

moitié

supérieure et d'une

moitié

inférieure appartenant à des visages connus. Présenté à

I'endroit,

un nouveau visage sem-ble émerger du composite, et

I'identification

des originaux est plus

difficile. A

I'envers, en revan-che, les performances

d'identifications

étaient meilleures.

Si

les relations entre les éléments de visages sont mal perçues (image inversée),

il

devient plus aisé de se concentrer sur une des moi-tiés pour en extraire

I'information

pertinente et

I'identifier.

' 'i:.

Page 35

2.1 Contributions de la psychologie

Figure 2'4

:

Illustration de l'illusion "Margaret Thatcher" de Thompson (1980). Le visage inversé présenté ici semble raisonnablement normal, bien qu'on remarque qu'il a été manipulé. En revanche, I'image présentée à l'endroit produit un effet très différent (retournez la page).

Remarquons que Margaret Thatcher n'est pas

du

tout indispensable

à

I'illustration du phénomène.

Un

autre indicateur d'expertise est

I'effet

de caricature (Carey, 1992; Stevenage, 1995).

Il s'agit

de la situation où une caricature du stimulus est reconnue plus rapidement que le stimulus

original

(Rhodes, Brennan et Carey, 1987; Benson et

Pemett,Iggla;

Benson et Perrett, 1994). Les visages

plus 'distincts'

(différents de la moyenne) seraient reconnus plus rapidement que les visages plus

'typiques'

(proches de

la

moyenne). Cet

effet

n'est observé que

pour

les visages

familiers,

les résultats des travaux sur les visages non-familiers ne sont pas concluants (Hagen et Perkins, 1983;

Rhodes, et a1.,1987; Stevenage, 1995)5.

Une explication élégante de

I'effet

de caricature est apportée par

le

modèle d'espace de visage ("face space") de

Tim

Valentine. L'auteur

fait

I'hypothèse que la projection des visages dans un espace multidimensionnel modélise la représentation des visages en mémoire (Valentine,

199lb;

Valentine, I99La). Les dimensions de I'espace représentent les caractéristiques physionomiques utilisées pour encoder et représenter les visages en mémoire.

L

hypothèse de base est que le nom-bre de dimensions est suffisant pour représenter tous les aspects

d'un

visage pouvant servir à

dis-5.

L'avantage des visages 'distincts'disparait lorsque la consigne n'est plus de reconnaitre (identifier), mais de catégoriser un visage comme visage (parmi des représentations de visages dont les traits sont cham-bardés, p.ex.). Les visages familiers et non-familiers 'typiques' sont plus rapidement classés (Bruce, et al., t986).

II. Reconnaissance et Perceptiott des Visages

tinguer les

visages

les uns

des autres, quelque

soit la population de

visages considérée. Les visages

jugés 'tyiques'

seraient localisés près

de I'origine de

I'espace

multidimensionnel

qui représenterait le visage moyen de I'ensemble des visages encodés dans cet espace.

A

I'inverse, les visages

jugés 'distincts'

s'éloigneraient de

I'origine

selon au moins une dimension. Ce modèle présume que

(1) la

densité de visages selon toutes les dimensions est distribuée normalement autour de

I'origine;

(2) I'expérience individuelle acquise au cours de la vie contribue à la distribu-tion des visages dans cet espace; (3) les dimensions de cet espace sont affinées au cours du temps, par des processus d'apprentissage perceptuel, afin

d'offrir

une reconnaissance optimale des visa-ges

de la population de

visages encodées.

La

Figure

2-5 illustre une

représentation

en

deux dimensions de cet espace.

a

ooo a at a'

aa

a

otoa o aa

aa

Figure 2-5 : Représentation de la distribution de visages 'typiques' et 'distincts' encodés dans I'espace de visages. Les visagesjugés 'typiques' auront tendance à se trouver près de I'origine, alors que les visages jugés 'distincts' s'en éloigneront (illustration selon Valentine et Endo, 1992).

La reconnaissance

d'un

visage implique le calcul de sa localisation dans I'espace multidimention-nel, et la vérification du status de cette localisation.

A

savoir, si elle est déjà occupée par un visage

connu. Les conditions

d'encodage (inversion,

angle,

éclaftage,

etc.) vont contribuer au

taux

d'erreurs de

reconnaissance.

Le

processus de comparaison sera dépendant

de I'importance

de I'erreur d'encodage et de la proximité de visages voisins dans I'espace. Ces facteurs influenceront la probabilité qu'un nouveau visage soit encodé à la localité d'un visage connu, et génère un

faux-positif

(une peu comme une

eneur

de première espèce), ainsi que

la probabilité qu'un

visage connu soit encodé à

la localité d'un

visage mémorisé, mais

qui

n'est pas suffisamment

familier

pour être reconnu, ou ne corresponde à aucun visage encodé, générant un faux-négatif (erreur de deuxième espèce). Dans les deux cas, I'augmentation d'erreurs d'encodage

et la proximité

de

aa

o

Page 3V

2.1 Contributions de la psychologie

vlsage voisins,

vont

accroitre

la probabilité

de réponses erronées,

et le

temps de réaction des réponses correctes"

Selon ce modèle, les visages 'typiques'sont regroupés près de

I'origine

de I'espace, et se trouvent dans un région à forte densité de visages. Lorsqu'un stimulus

'typique'est

encodé, I'expérience individuelle passée d'exposition à des visages de ce type, rendrait la tâche de reconnaissance plus

difficile

de par le nombre élévé de visages proche du visage-cible. En revanche, la reconnaissance de visages

'distincts'serait,

elle, moins perturbée par des effets de proximité du fait de leur

décen-tralisation. Si la

tâche consiste

non plus à

reconnaitre

le

stimulus,

mais à le

classer comme

'visage',

les visages

'typiques'

seront rapidement catégorisés grâce à

la

densité plus élevée de visages voisins, alors qu'un visage 'distinct'recevra moins de support immédiat, et plus de temps sera nécessaire pour atteindre une décision positive.

L

effet de caricature de visages peut s'expliquer selon ce modèle. L'exagération des caractéristi-ques idiosyncratiques du visage

d'un individu

le rendrait

plus 'distinct',

et

l'éloignerait

ainsi de

I'origine

de I'espace multidimensionnel, diminuant du même coup la probabilité de confusion de ce visage avec

un

autre. Susan Brennan (1985) proposa

la

première technique de génération de caricature par ordinateur, reprise ensuite par d'autre auteurs (Rhodes, et

al.,

1987; Benson, et al.,

I99Ia;

Benson et Perrett, 199lb; Benson,

Perett

et

David,

I9g2). Elle définit un ensemble de 186 points de repère

qui

permettent de détourer un visage et ses éléments et qui une

fois

reliés entre eux, produisent une représentation au trait d'un visage6. Un visage moyen est calculé à partir

d'un

échantillon de visages centrés et réduits autours des pupilles. La caricature est obtenue par

multi-plication

de

la

distance de chaque

point

à son

point

'homologue' de

la

configuration moyenne.

L

exagération résulte de I'augmentation

plus

importante des distances des points déviants à la moyenne par rapport à celles des autres. Cette technique

fut

ensuite développée pour produire la technique de

"morphing"

qui permet de générer une séquence de transitions continue entre une image

de

départ

et

une image d'amivée, par

le biais

de leurs points homologues (Rowland et Perett, 1995).

2.1.5.3 Etude

des lésions cérébrales: le cas de la prosopagnosie

L

activité asymétrique des hémisphères cérébraux dans les processus de perception des visages a été mise en évidence dans les travaux sur des patients cérébrolésés (Benton, 1980;

Bruyer,

1983;

de Renzi, Bonacini et

Faglioni, 1989;Young,

1992) et des patients normaux (Sergent et Bindra, 1981;

Bruyer,

1983;

Ellis,

1983; Rhodes, 1985; Sergent, 1986a;7. Dans

la plupart

des travaux, I'hémisphère droit

joue

un rôle important dans la perception des visages, ce

qui

a laissé certains

6. Il

ne s'agit pas de points de repères homologues au sens strictement morphométrique du terme. Les points choisis se répartissent sur I'ensemble de la forme et des courbes (la définition du point de repère homologue se trouve au point 2.3.5).

II. Reconnaissance et Perception des Visages

auteurs supposer que ce dernier était peut-être le siège

d'un

mécanisme spécifique à la reconnais-sance des visages. Les travaux de

Yin

(1969) furent reproduit avec des sujets porteurs de lésions cérébrales uni- et bilatérales

(Yin,

1970). Les performances des sujets porteurs d'une lésion

posté-rieurs

de I'hémisphère

droit

étaient nettement inférieures

à

celles

du

groupe

contrôle (ou

des sujets souffrant de lésions de l'hémisphère gauche) en ce

qui

concernait les visages présentés à

I'endroit.

Les résultats de la reconnaissance des visages inversés sont différents: les performances

du

groupe porteurs de lésions postérieurs de I'hémisphère

droit

étaient équivalentes à celles du groupe contrôle,

et

même, elles étaient significativement supérieures à celles de tous les autres groupes. Sur la base de ces résultats, les auteurs proposèrent I'hypothèse d'une double dissocia-tion de la perception des visages à I'endroit et à I'envers. En effet, les différences de performances des porteurs de lésions postérieurs de I'hémisphère

droit

pour la reconnaissance de visages cor-rectement orientés

et

inversés, suggéraient que les visages présentés

à I'endroit

formaient une classe de

stimuli

particuliers, possédant des caractéristiques absentes des autres classe de stimuli.

Ces résultats furent utilisés pour affirmer I'existence de mécanismes (et de structures corticales) spécifiques

à la

perception des visages, ainsi que

leur

problable localisation dans I'hémisphère

droit

(Tzavaras, 1972;

Yin,

1978). Cependant, des travaux

plus

récents semblent

indiquer

que l'hémisphère gauche n'est pas dépourvu de fonctions dans la perception des visages, et

qu'il

serait important pour atteindre des performances optimales. De plus, la non-reconnaissance complète de visages

familiers

(prosopagnosie) résulte en général de lésions cérébrales bilatérales (Damasio, Damasio et Tranel, 1986b;

Ettlin,

et a1.,1992).

L'agnosie pour les

visages,

libellée

'prosopagnosie'

par

Bodamer

(1947) (article

partiellement

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