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L’analyse de la passion adultérine

2. Parler d’amours

La copia et la varietas constituent deux moyens d’expression indispensables à la pratique de la poésie et de la prose au XVIème siècle car elles permettent d’orner et d’enrichir le discours. Quintilien associe au mot copia le terme d’« abondance ». Il estime qu’un bon orateur doit assimiler les préceptes de son art et se servir des ressources pour pouvoir utiliser les mots et les idées à bon escient (copia rerum ac verborum). Selon Cicéron, la copia relève principalement de l’éloquence « sublime », la plus haute dans la hiérarchie des trois styles (bas, moyen, sublime). Elle produit un effet de grandeur par le déploiement de toutes les ressources de la langue : syntaxique, lexicale et stylistique. Quant à Érasme, il associe au terme copia les substantifs : « abondance », « puissance » et « virtualité ». Il estime que l’orateur « peut à son choix, l’actualiser ou non […] user d’un  528 Les Angoysses, p.137. 529 Le Songe,.p.64. 530 Ibid,. 531 Les Angoysses, p.125. 532

style copieux au sens cicéronien, ou adopter la sobriété »533. Qu’il choisisse la concision ou l’abondance, l’orateur doit, en ce sens, convaincre son auditoire par le choix des mots appropriés (verborum brevitatem) afin d’atteindre la concision ou par le développement et l’enrichissement de ses idées (cognitum ac meditatum) et la maîtrise du sujet traité (causa).

Copia et brevitas sont ainsi liées.

Érasme distingue la copia verborum qui relève de l’art de la phrase et la copia

rerum qui repose sur le développement du paragraphe et du discours534. La première consiste à varier l’expression en la remplaçant par une autre, la deuxième prend la forme d’une expansion qui sert à enrichir le sens d’un paragraphe ou d’une pensée. Les procédés, préconisés par Érasme, se répartissent en trois catégories : le lexique, les figures de styles et la syntaxe. Le lexique permet de varier le texte par le recours aux synonymes, qui pourraient avoir une valeur stylistique différente : « certains mots sont plus nobles, plus élevés, plus éclatants, plus agréables, plus véhéments, plus sonores, plus euphoniques que d’autres »535

. L’orateur enrichit son lexique par l’emploi des figures de styles (l’énallage, l’antonomase, la métaphore, la périphrase, la comparaison, l’adage, la synecdoque, l’allégorie, l’amplification, la catachrèse, la métalepse, la métonymie, l’atténuation…) et par la variation de ses phrases.

Les angoysses douloureuses qui procedent d’amours sont bâtis sur l’analyse et la

description de l’appétit sensuel et sur ses effets sur le personnage féminin. La narratrice a précisé, au premier récit, que les tentatives de l’héroïne de résister à sa passion libidineuse n’ont pas abouti. L’écriture hélisennienne relève à la fois de la copia et de la varietas. Elle recourt à l’emphase pathétique afin de peindre son état psychologique. Le discours plaintif est concrétisé par l’emploi d’un « style piteux ». Autrement dit, la complainte d’Hélisenne de Crenne est exprimée à l’aide des figures et des mots ou de groupes de mots différents. La narratrice accumule les jeux de synonymie. Les expressions d’angoisse et de détresse sont servies par de nombreux adverbes d’intensité, qui traduisent la durée et la constance. La diversité du lexique relève du principe de la variation : variété des auteurs-autorité, du style, de la longueur du développement et de l’argumentation.

Érasme cherche la variété dans la transmission du savoir. En tant qu’orateur, il enseigne, à travers la variation, la richesse et la malléabilité du langage. L’objectif ne se 

533 Jacques Chomarat, op.cit.,p.711.

534 Ibid., p.719.

535

manifeste pas dans le gisement des mots et des expressions (car un lexique, même très vaste demeure limité) ; mais dans l’association des mots et des idées qui, permettent le développement de l’imagination créatrice et l’instauration d’une communication persuasive :

Ainsi s’établiront des rapports entre « enseignant » et « enseigné », orateur et auditeur, qui rappellent la maïeutique de Socrate, ce maître incontesté de toute cette génération d’humanistes, quand il interroge l’esclave de Ménon et fait émerger à sa conscience unevérité qui ne lui avait kamais été enseignée, mais qu’il a « redécouverte » dans le tréfonds de son esprit, grâce à ces « semences », de vérité qui y ont été déposées depuis toujours (voire de toute étérnité), et que le maître a simplement fait éclore par un travail d’accoucheur intellectuel536

.

Les exercices de style permettent de réaliser, selon Érasme, des variations sur un thème unique sans modifier le sens. L’amplificatio est en ce sens fondée sur l’abondance verbale, ce que Longin537 nomme le plethos. L’écriture amplificatrice d’Hélisenne de Crenne relève-t-elle alors de la pléthore ou repose-t-elle sur une stratégie discursive rigoureuse et bien élaborée ?

Olivier Reboul considère que l’amplification « n’est ni un argument, ni une figure : elle est l’âme de la rhétorique ».538

Elle constitue en effet un puissant outil de persuasion dans l’entreprise rhétorique. Elle n’est pas un argument, mais elle se veut un appui efficace à l’argumentation. Aristote estime que l’amplification relève de la dispositio car elle repose sur une dynamique discursive, fondée sur la confirmation ou la réfutation. Il affirme que l’amplification est « une argumentation passionnée ; l’argumentation instruit, l’amplification émeut ».539

Autrement dit, l’objet de l’amplification ne consiste pas seulement à convaincre l’esprit et à lui montrer la grandeur de la chose représentée, mais elle suscite encore chez le lecteur des passions variées, telles l’amour, la haine, la crainte et la pitié. Pour cette raison, elle apparaît dans les trois discours oratoires (judiciaire, délibératif, épidictique). Elle se manifeste principalement dans l’exorde et la péroraison. 

536Jean- Claude Margolin, « La poétique de la variété chez Érasme : l’apogée de la rhétorique humaniste 1500-1536 », Histoire de la rhétorique dans l’Europe moderne 1450-1950, dirct, Marc Fumaroli, France , ed. Puf, 1999, p.223.

537 Goyet, F. (1992). Le pseudo-sublime de Longin. Études littéraires, 24, (3), 105–120. https://doi.org/10.7202/500988ar

538 O. Reboul, La Rhétorique, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1984, p. 25.

539 Divisions de l’art oratoire (Partitiones oratoriae), § 27, traduction H. Bornecque, Paris, Les Belles Lettres, 2002 [1924] : « Sed amplificatio quamquam habet proprium locum, sæpe etiam primum, postremum quidem fere semper, tamen relicuo in cursu orationis adhibenda est, maximeque cum aliquid aut confirmatum est aut reprensum. Itaque ad fidem quoque vel primum valet. Est enim amplificatio vehemens quædam argumentatio, ut illa docendi causa, hæc commovendi. »

Mais elle s’emploie au cœur du discours pour l’appuyer.

Quintilien estime que l’amplification relève plutôt de l’elocutio. Au chapitre VIII de l’Institution oratoire, il distingue l’hyperbole, reléguée au statut de trope, et l’amplification. Il conclut que celle-ci est caractérisée par son aspect englobant. Plus tard, Georges Molinié la considère comme une figure macrostructurale générique car :

Elle a cet avantage particulier qu’elle peut entrer par tout, et employer toutes les figures de la Rhétorique. Les autres sont des prisonnieres, qui ne sortent jamais hors d’elles-mêmes, mais celle-cy a la liberté de se promener par toutes les autres540.

La théorie de l’amplification a donc connu une évolution définitionnelle remarquable d’un point de vue historique : elle est rattachée initialement à l’invention. Ensuite, elle est définie sous l’angle de la disposition pour basculer enfin du côté de l’élocution et de la théorie des figures. En outre, Olivier Millet541

distingue deux types d'amplification : l'amplification de l'expression et l'amplification de l'idée : la première est une amplification horizontale car elle dilate la phrase et l'amplifie par le recours à un matériau verbal divers et abondant ; la seconde est une amplification verticale car elle renforce et accentue le sens de l'idée ou de l'expression par le recours à des figures telles l'emphase ou l'hyperbole.

L’émoi intérieur de l’héroïne est illustré par la mise en place des adjectifs appartenant à deux champs lexicaux opposés : la vertu et la volupté. Le désir sensuel d’Hélisenne s’intensifie de plus en plus et entraîne l’affaiblissement progressif de son corps. Les adjectifs qualificatifs, renvoyant à la dégradation et à la maladie corporelle, scandent la première partie des Angoysses. Tourmentée par sa passion, Hélisenne tend vers la folie et aspire à la mort. La narratrice utilise des adjectifs traduisant son trouble et son égarement. Le personnage féminin est alors représenté dans tous ses états. D’un point de vue thématique, nous pourrions classer les adjectifs qualificatifs en trois catégories : les adjectifs exprimant le déchirement entre continence et concupiscence, les adjectifs qui renvoient au dépérissement progressif du corps et ceux qui traduisent la folie et l’aspiration à la mort.

540 Joseph Leven de Templery, L’Eloquence du temps, enseignée à une dame de qualité [1699], Bruxelles, Jean Leonard, 1707, p. 239.

541 Millet Olivier, Calvin et dynamisme de la parole- Etude rhétorique réformée, Paris, Honoré Champion, 1992.

Au vu de ce constat, Hélisenne de Crenne utilise un discours plaintif pour exprimer l’impétuosité de sa douleur. Le recours fréquent aux adjectifs qualificatifs et à l’amplification (représentative d’un discours logique, éthique et pathétique) relèvent d’une certaine expressivité discursive et servent à déterminer l’état psychique des personnages et l’intention de l’auteur.

Notre étude consistera donc à mettre l’accent sur la spécificité du discours « piteux » et sur les mécanismes de l’amplification, qui sera analysée dans son double sens quantitatif et qualitatif dans la mesure où elle relève, à la fois, de l’expansion ou du développement et de l’agrandissement.

2.1. « Le style piteux »

Les angoysses douloureuses qui procedent d’amours se donnent à lire comme une

complainte. Les trois récits sont caractérisés par l’emploi d’« un style piteux »542

, comme l’a déjà souligné Christine de Buzon. Désespérée, l’héroïne se lamente continuellement sur son sort et elle multiplie les interjections plaintives. En témoigne l’anaphore qui suit :

O pauvre Helisenne, miserable plus que nulle vivante, voyant le comble de telz malheurs : A juste cause doibs tu mauldire l’heure detestable que tu nacquis : prodigieuse fut l’incarnation tres malheureuse la nativité, horrible la vie, et execrable sera la fin. O Lyons orguilleux, O cruelz tigres, O loups ravissants, O bestes feroces et tous cruelz animaulx, lacerez et devorez ce triste corps, O ciel, O la terre, O corps superieurs. O vagues esperitz, O ames irreposées, conspirez ma mort, et imposez fin à ma miserable vie.543

Au discours élégiaque d’Hélisenne, au premier récit, s’ensuivent les pleurs et les cris de détresse de Guenelic qui a choisi de se donner la mort et de rejoindre sa bien-aimée, aux Champs Elysées. En témoigne son oraison conclusive :

O dolente et anxieuse mutation : O temps cruel :O jour plein de misere : O mauldicte fortune, cruelle, furieuse, detestable, execrable et abhominable : à quelle occasion me veulx tu exterminer ? N’avois je assez pené et travaillé ? Et si ton yre n’est encores rassasiée, pourquoy ne l’execute tu en aultre sorte sans me vouloir priver de celle : laquelle avecq tant de fatigues je pensoys avoir acquis ? O aveuglée, depiteuse et ennuyeuse, regarde à quelle extremité et calamité ton ingratitude m’a

542

Christine de BUZON, « Roman et style piteux : les angoysses douloureuses qui procedent d’amours (1538) », Mezi radky Jirimu Pecharovi k 70. narozeninam Entre les lignes, éd. H. Hanreich, M. Sedlackova, P. Stehlikova, Filosofia, Prague, 2019, p. 267-302 ; repris en ligne sur [www.rhr16.fr].

542 Catherine Kerbrat-Orecchioni, L’implicite, Armand Colin, Paris, 1986.

543

conduicte.544

Les deux supplications sont marquées par l’omniprésence des apostrophes et des exclamations véhémentes, ponctuées par l’interjection vocative « O » et par l’omniprésence des adjectifs qualificatifs, traduisant l’impétuosité de la douleur ressentie. Ce qui relève du pathos oratoire et renvoie à l’une des caractéristiques du « style piteux ».

Force est de noter que la tonalité élégiaque et pathétique de l’œuvre est soulignée d’emblée à travers le titre lui-même. Le groupe nominal étendu « Les angoysses

douleureuses » apparaît de manière fréquente dans les trois récits. Il est repris treize fois

pour traduire l’impétuosité de la souffrance physique et mentale aussi bien pour Hélisenne que pour Guenelic.

Douleurs physiques Douleurs psychologiques « mon corps angoisseux et debile »

(p.p140/169)

« L’angoysseuse douleur que nous souffrions de noz playes » (p.251)

« tres angoysseuse douleur » (p.112) « d’angoisseuses douleurs » (p.137) « de l’angoisseuse douleur »

(p.p142/245/274)

« mon angoisseuse douleur » (p.158) « mon angoisseuse rage et extreme

douleur » (p.171)

« l’angoisseuse peine et douleur » (p.211) « par angoisseuse rage et extrême douleur »

(p.213)

« Les angoysses et douleurs souffertes » (p.231)

« angoisseuse douleur» (p.p 241/ 251) « angoisseuses douleurs » (p.464) « tant d’angoysses » (474)

La redondance de l’adjectif antéposé « angoisseux » et du substantif « douleur » rappelle la tonalité mélancolique qu’exprime le titre du livre liminaire d’Hélisenne de Crenne. De même, le recours aux expansions nominales et adjectivales et au pluriel renforce l’aspect pathétique de l’œuvre et l’extrême douleur que subissent les amants. En outre, la protagoniste du Songe, attristée par l’attitude indécise et craintive de son Amant, multiplie les adjectifs traduisant sa douleur et son amertume545 : « mes longues et calamiteuses peines », « mes angustueuses douleurs », « trop excedans travaulx » et l’ « inveterée amour ». Il est à noter que l’expansion nominale « mes angustueuses douleurs », qui relève d’une association rare voire inusitée, rappelle celle du titre liminaire 

544 Les Angoysses, p.465-466.

545

Les angoysses douloureuses. Les classes grammaticales sont ainsi inversées pour accentuer

la souffrance de la Dame amoureuse et confirmer l’érudition de Dame Hélisenne.

Le premier récit des Angoysses est marqué par la récurrence des adjectifs qualificatifs qui dépeignent l’état psychologique de l’héroïne et déterminent l’entreprise de l’auteur. Hélisenne de Crenne veut en effet « provoque[r] quelques larmes piteuses » afin d’avoir « quelque refrigeration medicamente »546. L’emploi de l’adjectif piteux est connotatif. Christine de Buzon estime que les larmes piteuses sont des larmes de compassion547. L’adjectif « piteux » vient du mot latin pietosus et il signifie « qui éprouve de la pitié» ou « qui suscite la pitié »548. Le récit d’Hélisenne de Crenne se donne à lire comme une plainte. La narratrice répète fréquemment les substantifs « plainte », « complainte » et l’adjectif « piteux ». Elle cherche à susciter la pitié et la compassion de ses lectrices pour se réconforter. Elle use d’un discours plaintif et pitoyable pour les mettre en garde contre « toute vaine et impudicque amour ».549 Or, les épithètes « vaine » et « impudicque » employées, dans l’épître liminaire, pour conseiller et avertir les Dames contre le fol amour, sont réutilisées, par la suite, pour décrire les perpétuelles tentatives de l’héroïne pour s’emparer de son objet de désir : « Je me prins à regarder sans avoir honte, ne vergogne, et ne me soucioye d’ung sien compaignon, qui evidemment povoit apercevoir mes regardz impudicques et artificielz »550.

De surcroît, l’éloignement de l’amant incite Hélisenne à former un discours pathétique exprimant à la fois la souffrance et le regret : « […] et en voix lamentable formoys griefves et piteuses complainctes, en regrettant mon amy : lequel je ne pouvoys plus veoir… »551. La violence de l’époux intensifie sa douleur et l’incite à pousser des cris de détresse et de désespoir : « […] Je faisoye plusieurs crys, et de mon triste estomach jectoye vociferations tres haultes et piteuses, en continuant tousjours mes miserables regretz »552. Hélisenne aspire ainsi à la mort et apostrophe sans arrêt Atropos « laquelle est l’unicque refuge des desolez »553

. Enfermée dans le château de Cabasus, elle continue ses « plainctes et exclamations entremeslées de plusieurs sanglots [voulant exprimer ses]

546 Les Angoysses, p.96.

547Id., p.509 (annotation).

548Psautier de Cambridge, Paris, éd. F. Michel, 1876, p.42, 1 : http://txm.bfm-corpus.org/

549 Les Angoysses, p.96. 550 Id., p.115. 551 Id., p.158. 552 Id., p.171. 553 Ibid,.

regrets et souspirs ».554

Il importe de noter qu’Hélisenne de Crenne répète volontairement le substantif complainte, précédés des adjectifs exprimant son extrême souffrance « griefves et piteuses complainctes » et « en continuant telle douloureuse complaincte ». De même, la répétition du verbe « continuer » : « je continuai mes pleurs, accompaignez de dolentz soupirs »555, « je continuay mes plainctes et exclamations entremeslées de plusieurs sanglotz »556 traduit l’ampleur de son amertume et l’impétuosité de son désespoir. En outre, l’emploi fréquent des substantifs : « exclamations, lamentations, plainctes, complainctes, regretz » suivis des épithètes « piteux, lamentables, adoloré, angustié », et la juxtaposition répétitive des substantifs « lachrimes, pleurs et gemissements »557 relèvent aussi de ce que Christine de Buzon a appelé le « style piteux » d’Hélisenne de Crenne.

La complainte amoureuse se dévoile à travers les multiples imprécations contre

Fortune. En témoigne, ce véhément réquisitoire proféré par Hélisenne :

O fortune plus inhumaine que l’hydre, plus violente que l’oustre, plus acerbe qu’aspicz, plus incertaine que l’onde, A ceste heure cognois tes dolz et tes frauldes, puis qu’à nul aultre tu n’es si adverse et rigoureuse : car mes maulx et inconveniens se sont intersuyviz en telle sorte et manière, que les premiers ont esté messagers des subsequens, denoncians et declarans aultres maulx et tourmenz infinis : qui incessamment m’ont augustiée et laissée : et pour l’extreme et tres cruel travail cruellement j’ai souffert et seuffre continuellement sans avoir aulcune relasche, je suis si debile et faillie, qu’il est impossible de plus.558

L’héroïne apostrophe Fortune, dont la puissance est à la fois redoutable et inéluctable, pour l’injurier et la rendre responsable de tout son malheur. Pour ce faire, elle utilise les adjectifs dépréciatifs «inhumaine, violente, acerbe, incertaine, adverse, rigoureuse» et les substantifs «dolz et frauldes». Les adverbes de temps «continuellement» et de manière «incessamment» et «cruellement», les intensificateurs «si» et «extreme», les négatives « sans avoir aucune relasche » et « qu’il est impossible de plus » et les participes passés à valeur adjectivale « angustiée, laissée, souffert, faillie » traduisant son épuisement physique et mental et son impuissance devant son adversaire. Il convient de noter que cette complainte, formulée en une seule phrase, dissimule la volonté de la narratrice d’accentuer  554 Ibid,. 555 Id., 211. 556 Id., 213. 557 Id., p.470/474. 558 Id., p.210.