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Les objectifs de l’interprétation

Titre I La consécration constitutionnelle de l'identité

Paragraphe 1 L’immunisation constitutionnelle du texte contre tout conflit d’interprétation

C. Les objectifs de l’interprétation

La constitution ne formule pas les objectifs que l’interprétation doit poursuivre, elle trace un cadre institutionnel693 à l’exercice du pouvoir et à la fonction de juger : « les buts sont donc

implicites et demandent à être reconstruits. »694 Si le texte constitutionnel ne disparaît pas complètement derrière ses interprètes, les interprétations qui en sont faites devraient chercher à l’adapter aux évolutions politiques et sociales. Or, la reconstruction par les interprètes des buts de la constitution varie d’un interprète à l’autre. Tout comme le chef de l’Etat sous la Cinquième République en France, le président de la République en Tunisie est l’arbitre des institutions et le garant du respect de la Constitution. Il interprète le texte constitutionnel à l’aune des présupposés théoriques dont il est équipé et qui conditionnent sa lecture de la Constitution. A l’instar du Général de Gaulle en 1962, il est le seul à disposer, en vertu de l’article 72 de la Constitution, de la compétence de principe, en matière d’interprétation du texte constitutionnel.

Censée durer, la Constitution du 27 janvier 2014 prévoit aux articles 143 et 144, une procédure de révision spécifique. Cependant, par l’article 144 : « Toute initiative de révision

de la Constitution est soumise, par le Président de l’Assemblée des représentants du peuple, à la Cour constitutionnelle, pour dire que la révision ne concerne pas ce qui, d’après les termes

692 Avec 52 sièges sur 217 Ennahdha est arrivé en tête des élections législatives du 6 octobre 2019. Pour former une majorité stable à l’ARP, il aurait eu besoin de 109 sièges. Qalb Tounes, le parti de Nabil KAROUI n’obtient quant à lui que 38 sièges. Pour plus de précisions sur les résultats des élections législatives du 6 octobre 2019 cf. Jeune Afrique avec AFP, « Législatives en Tunisie : Ennahdha en tête avec 52 sièges, selon les résultats officiels », Jeune Afrique [en ligne], publié le dimanche 10 octobre 2019, [consulté le 11 décembre 2019], https://www.jeuneafrique.com/841028/politique/legislatives-en-tunisie-ennahdha-en-tete-avec-52-sieges-selon-les-resultats-officiels/.

693 Les notions à texture ouverte que contient la Constitution cherchent à répondre aux attentes de l’ensemble des forces politiques en présence. Pour plus de précisions sur ce point cf. H. L. A. HART, The Concept of

Law, 2e éd., Oxford, Oxford University Press, 1994, pp. 125-129.

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de la présente Constitution, ne peut faire l’objet de révision. »695

Dans l’attente de la mise en place de la Cour constitutionnelle, aucune révision ne peut être engagée696. Seules les autorités publiques sont donc aptes à adapter par leur interprétation, la Constitution aux évolutions politiques et sociales du pays. Le débat tunisien sur l’interprétation des dispositions constitutionnelles n’est pas sans rappeler celui que connaîssent les Etats-Unis : les constitutionnalistes sont divisés entre les « conservateurs » et les « libéraux ». Il est intéressant de relever que cette division ne recoupe pas nécessairement celle entre théocrates et démocrates. S’il est nécéssaire d’effectuer un parallèle entre la Tunisie et les Etats-Unis, il est important de commencer par préciser l’état du débat au Etats-Unis.

Les « conservateurs » américains prônent l’intention des constituants ou une interprétation au plus près du texte originel. « Ce courant interprétatif souligne que la constitution est avant

tout un document écrit dont les dispositions doivent être interprétées de manière restrictive. »697 Au lieu de promouvoir l’adaptation de la constitution aux évolutions politiques et sociales, la volonté constituante telle que fixée dans le marbre constitutionnel, constitue la limite à la transformation du texte par la pratique. « Cette conception fixiste de la

constitution commande de ne rien changer sous peine de dénaturation. En particulier, il s’agit de mettre certains droits à l’abri des atteintes que les générations futures pourraient leur faire subir. »698 Ce courant interprétatif cherche donc à empêcher l’émergence de nouvelles valeurs.

A ce courant de « conservateurs » s’oppose celui des « libéraux » ou « progressistes » qui conçoit la constitution comme un ensemble de principes à actualiser, en fonction de la réalité politique, économique et sociale du pays. Qualifiée de dynamique, cette approche de la constitution a pour objectif d’adapter le texte au contexte dans lequel vivent les citoyens. « Cette méthode insiste donc sur le fait que chacun des articles ou principes abstraits doit

être interprété et appliqué de façon à former un tout cohérent sur le plan des principes avec

695 Cf. Annexe 3 – Les Constitutions de la Tunisie indépendante – La Constitution du 27 janvier 2014, article 144, alinéa premier.

696 La volonté du constituant originaire s’exprime aux articles 1, 2, 49 et 75 de la Constitution. Ces articles ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle. La procédure de révision constitutionnelle est soucieuse de respecter la volonté du constituant originaire puisque la Cour constitutionnelle à venir devrait préserver ces articles de toute modification. Pour plus de précisions sur la procédure de révision constitutionnelle telle que prévue par le Chapitre VIII de la Constitution du 27 janvier 2014 cf. le B. du Paragraphe 1 de la Section 1 du Chapitre 2 du Titre I de la PARTIE II relatif à l’expression tunisienne du

constitutionnalisme transformateur, p. 382.

697

M.-C. PONTHOREAU, Droit(s) constitutionnel(s) comparé(s), op.cit., p. 301.

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les interprétations acceptées pour d’autres parties de la Constitution et avec les principes de morale politique qui apportent la meilleure justification fondamentale possible à l’ensemble de la structure constitutionnelle. »699 L’intégrité constitutionnelle doit certes être respectée mais les principes qui servent d’inspiration à l’interprétation, ne sont pas forcément écrits. C’est d’ailleurs ce que Béji CAÏD ESSEBSI avait choisi de faire dans l’objectif de se faire réélire en 2019 : il a livré une interprétation de la Constitution qui se basait exclusivement sur les dispositions de l’article 2 et les normes internationales. Son discours du 13 août 2017700

a exhorté le législateur tunisien à réfléchir aux réformes à introduire en matière de libertés individuelles et d’égalité homme / femme. C’est dans ce cadre qu’a été fixée par décret701

, la création d’une Commission chargée de penser ces réformes702

. « L’égalité hommes / femmes

dans les droits successoraux et la levée de l’interdiction de mariage d’une Tunisienne avec un non-musulman doivent être érigées en tête des avancées à accomplir pour faire entrer la Tunisie de plain-pied dans le XXIème siècle. »703 Tout en exhortant les membres de la

Commission des Libertés Individuelles et de l’Egalité (COLIBE), à se conformer aux

dispositions de la nouvelle Constitution et aux normes internationales relatives aux droits de l’Homme, il ouvre la voie à la modernisation du droit et à la reconnaissance par et dans la loi, de l’égalité homme / femme en Tunisie.

L’article premier de la Constitution est passé sous silence. L'énoncé de l’article premier qui fait de l’« Islam sa religion » n’est pas un obstacle à la modernisation du droit tunisien en matière d’égalité homme / femme. Ceci surprend dans la mesure où, l’introduction dans l’ordre juridique interne du droit international relatif aux droits des femmes est contredite par la Déclaration générale du gouvernement selon laquelle la Tunisie « n’adoptera en vertu de la

Convention, aucune décision administrative ou législative qui serait susceptible d’aller à

699 R. DWORKIN, « Controverse constitutionnelle », Pouvoirs, 1991, n° 59, p. 9.

700 La journée du 13 août est traditionnellement considérée comme la fête de la femme puisque le Code du

Statut Personnel, consacrant un certain nombre de droits aux Tunisiennes a été adopté le 13 août 1956.

701

Décret présidentiel n° 2017-111 du 13 août 2017, portant nomination des membres de la Commission des

Libertés Individuelles et de l'Egalité. JORT, n° 65 du 15 août 2017, p. 2594.

702 La Commission des Libertés Individuelles et de l’Egalité (COLIBE) est présidée par Madame Bochra BELHAJ HMIDA. Elle est composée de Mesdames Salwa HAMROUNI, Dora BOUCHOUCHA et Ikbel GHARBI et de Messieurs Abdelmajid CHARFI, Slim LAGHMANI, Salaheddine JOURCHI, Malek GHAZOUANI, et Karim BOUZOULTA.

703 « Comment Bochra Belhaj Hmida conduira les travaux de la Commission Egalité et libertés individuelles, missionnée par Caïd Essebsi », Leaders [en ligne], publié le jeudi 21 septembre 2017, [consulté le 27 août 2018], http://www.leaders.com.tn/article/23017-egalite-et-libertes-individuelles-le-grand-defi-de-la-commis sion-de-bce.

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l’encontre des dispositions de l’article premier de la Constitution ».704

En évoquant l’égalité dans l’héritage Béji CAÏD ESSEBSI a affirmé qu’ : « Il ne faut pas croire que ceci va à

l’encontre de la religion. Notre constitution est celle d’un Etat civil. Cette égalité n’est pas une affaire religieuse mais qui concerne les hommes. »705 Détachant l’Islam de la politique et du droit, il lit la Constitution tunisienne comme celle d’un Etat « civil ».

Ce premier discours basé exclusivement sur les dispositions de l’article 2 de la Constitution, est appuyé par celui prononcé le 13 août 2018. A la suite de la publication du rapport de la

COLIBE, le 12 juin 2018706, Béji CAÏD ESSEBSI a solennellement affirmé707 qu’il est chargé de veiller au respect de la Constitution, en application des dispositions de l’article 72. Il a d’ailleurs rappelé qu’en l’élisant, le peuple tunisien lui a fait confiance et qu’il se doit d’appliquer la Constitution, sans se soucier des référents théologiques, idéologiques ou politiques des Tunisiens, puisque ces derniers varient d’un individu à l’autre708. A l’appui de l’article 21, il affirme que la Constitution dispose clairement de l’égalité homme / femme. Il précise toutefois que même si l’Etat est « civil » en Tunisie, le peuple est musulman. Bien que cette donnée soit importante et qu’il ne faille pas porter atteinte à l'identité du Tunisien, il propose de modifier les dispositions du Code du Statut Personnel qui n’ont pour lui, aucun rapport avec la religion. A l’instar de tous les codes, ce dernier doit être basé sur un droit objectif. C’est la raison pour laquelle il insiste pour que l’égalité dans l’héritage soit formalisée par une loi. Même si la proposition soumise à l’Assemblée des Représentants du

Peuple (ARP) laisse – conformément aux propositions de la COLIBE – le choix au défunt

704 Voir sur cette question, « La levée des réserves à la Convention "CEDAW" et le maintien de la Déclaration générale » [en ligne], [consulté le 29 août 2018], https://lib.ohchr.org/HRBodies

/UPR/Documents/session13/TN/UNFPA_UPR_TUN_S13_2012_UNFPA_F.pdf.

705

A. KLAI, « Le discours du 13 août, véritable coup de tonnerre ou manœuvre politique ? », Espace Manager [en ligne], publié le vendredi 18 août 2017, [consulté le 27 août 2018],

https://www.espacemanager.com/le-discours-du-13-aout-veritable-coup-de-tonnerre-ou-manoeuvre-politique.html.

706

Pour suivre toutes les actualités de la Commission des Libertés Individuelles et de l’Egalité :

https://colibe.org/actualites/. Le rapport de la COLIBE devait être remis en mai au président de la République mais pour éviter que les débats sur les élections municipales du 6 mai 2018 ne prennent le pas sur le contenu du rapport de la COLIBE, il n’a été remis que le 8 juin 2018.

707

Voir l’intégralité de son intervention en arabe, publié par Présidence Tunisie, en fin d’article de S. H., « Béji Caïd Essebsi : L’égalité successorale sera soumise à l’ARP », Business News, [en ligne], publié le lundi 13 août 2018, [consulté le 27 août 2018], http://www.businessnews.com.tn/beji-caid-essebsi-legalite-successorale-sera-soumise-a-larp,520,81889,3.

708 Il précise également que sa seule référence est la Constitution tunisienne qui est l’expression même de la volonté du peuple. L’intégralité des propos cités de Béji CAÏD ESSEBSI au cours de son discours du 13 août 2018 sont traduits par nos soins à la suite de l’écoute du discours diffusé par Présidence Tunisie, en fin d’article de S. H., « Béji Caïd Essebsi : L’égalité successorale sera soumise à l’ARP », Business News, [en ligne], publié le lundi 13 août 2018, [consulté le 27 août 2018], http://www.businessnews.com.tn/beji-caid-essebsi--legalite-successorale-sera-soumise-a-larp,520,81889,3.

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d’appliquer à ses héritiers les principes constitutionnels ou les principes de la charia, Béji CAÏD ESSEBSI insiste sur son rôle de garant de la Constitution.

S’il précise qu’il faut appliquer les dispositions de la Constitution qui prévoient que l’Etat est « civil » et juge fausses les affirmations selon lesquelles, le référent de la Tunisie est islamique, il livre une lecture particulière de la Constitution. Malgré les réformes qu’il avance, certaines voix se sont élevées pour contester la modernisation tardive du droit et de la loi. Ces voix accusaient Béji CAÏD ESSEBSI de ne vouloir réformer la législation qu'en vue de sa réélection. Par ailleurs, bien que les « libéraux » soient favorables à une lecture dynamique de la Constitution, ils ne partageaient pas tous la lecture de Béji CAÏD ESSEBSI. Considéré comme la « constitution sociale »709 de la Tunisie, le Code du Statut Personnel est symbole de modernité710. Le remettre en cause reviendrait à porter atteinte à la modernité tunisienne telle qu’envisagée et imposée par Habib BOURGUIBA. S’il fait primer les dispositions de l’article 2 sur celles de l’article 1er, l’interprétation de Béji CAÏD ESSEBSI n’est qu’une manière de préserver l’esprit avec lequel la Constitution du 27 janvier 2014 a été élaborée. L’heure est venue de savoir si cet esprit est présevé par l’actuel président de la République.

Bien qu’il ne soit pas considéré comme étant un théocrate, Kaïs SAÏED a une lecture conservatrice du droit, de la Constitution et de l’Islam en Tunisie. S’il se réfère régulièrement aux articles de la Constitution711, il est nécessaire pour lui de préserver les valeurs de la société712. Professeur de droit constitutionnel et d’institutions politiques, il lit les dispositions

709 Intervention du Professeur Monia BEN JEMIA à Sciences Po Bordeaux, le jeudi 28 mars 2019, au séminaire du LAM (Les Afriques dans le Monde) au sujet des « Femmes et de la transition politique en Tunisie ».

710

Ce code participe à la qualification du constitutionnalisme tunisien de constitutionnalisme transformateur. Bien que ce constitutionnalisme fasse l’objet de développements ultérieurs il est important de souligner qu’il est caractérisé par la reconnaissance d’un catalogue étendu de droits. Tel est notamment le cas du

CSP. Pour plus de précisions sur ce point cf. R. VICIANO PASTOR, R. MARTINEZ DALMAU,

« Aspects généraux du nouveau constitutionnalisme latino-américain », in C.-M. HERRERA (dir.), Le

constitutionnalisme latino-américain aujourd’hui : entre renouveau juridique et essor démocratique ?, op.cit., pp. 31-32. Voir surtout la Section 1 du Chapitre 2 du Titre I de la PARTIE II de cette thèse relatif au constitutionnalisme transformateur en Tunisie, p. 374.

711 S’il insiste régulièrement sur la liberté religieuse, il ne parle que rarement de la liberté de conscience. Cette-dernière est pourtant consacrée à l’article 6 de la Constitution du 27 janvier 2014. Pour plus de précisions sur ce point cf. C. LAFRANCE, « Présidentielle en Tunisie : quatre questions sur le programme de Kaïs Saïed en matière de libertés », Jeune Afrique [en ligne], publié le mardi 8 octobre 2019, [consulté le 18 décembre 2019], https://www.jeuneafrique.com/834460/politique/presidentielle-en-tunisie-quatre-questions-sur-le-programme-de-kais-saied-en-matiere-de-libertes/.

712 Bien qu’il ne précise pas quelles sont ces valeurs, il est facile de penser qu’elles découlent de l’ « appartenance culturelle et civilisationnelle [de la Tunisie] à l’Ummah arabe et islamique » (cinquième paragraphe du préambule de la Constitution tunisienne du 27 janvier 2014).

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constitutionnelles de manière restrictive et, conservatrice. L’exemple le plus frappant dans ce domaine est sa conception des droits des femmes et de l’égalité dans l’héritage. Dans sa prestation de serment, sa conception fixiste de la Constitution se traduit notamment par sa volonté de mettre les droits des Tunisiennes à l’abri des atteintes que les générations futures pourraient leur faire subir. L’alinéa premier de l’article 46 de la Constitution précise en effet que « [l]’Etat s’engage à protéger les droits acquis713 de la femme et veille à les consolider et à les promouvoir. »714 Le 23 octobre 2019 alors qu’il prête serment devant l’Assemblée des

Représentants du Peuple (ARP), il affirme qu’ « il n’est pas question de toucher aux droits des femmes. »715 De quels droits s’agit-il ? Il est possible de penser qu’il fait référence aux « droits acquis de la femme » tels que consacrés à l’article 46 de la Constitution. Allusion à l’ensemble des droits reconnus à la Tunisienne par les dispositions du Code du Statut

Personnel (CSP) du 13 août 1956, les droits acquis renvoient essentiellement au divorce, au

libre et plein consentement au mariage et à la possibilité d’adopter716

. Est-ce à dire que dans la sphère privée la femme en Tunisie ne peut bénéficier d’autres droits ? Il poursuit son discours en évoquant la nécessité de renforcer, conformément à l’article 46 de la Constitution, les droits économiques et sociaux des femmes. Il passe donc sous silence les droits qui touchent à leur vie familiale.

Dit en d’autres termes, il ne cherche absolument pas à adapter le texte constitutionnel aux évolutions politiques et sociales de la Tunisie du XXIème siècle. Pis encore, il rappelle que dans le Coran, l’héritage est fondé non pas sur une égalité formelle mais sur l’idée de justice717. L’homme et la femme ne seraient pas égaux en droits successoraux puisque

713 Pour une définition explicite de l’expression « droits acquis de la femme » cf. le 2. du A. du Paragraphe 2 de la Section 1 du Chapitre 2 du Titre II de cette thèse, relatif à la signification de l’expression « droits acquis

de la femme », p. 278.

714 Cf. Annexe 3 – Les Constitutions de la Tunisie indépendante – La Constitution du 27 janvier 2014, article 46, alinéa premier.

715

AFP et Reuters, « Le nouveau président Kaïs Saïed appelle les Tunisiens à “s’unir contre le terrorisme” »,

France 24 [en ligne], publié le 23 octobre 2019, [consulté le 18 décembre 2019],

https://www.france24.com/fr/20191023-tunisie-direct-live-nouveau-president-kais-saied-prestation-serment?fbclid=IwAR0dL8sKPQrqUt5BGr4rcB-jwL1j-XJaUGef8DT3NLKtqFkerpPlOIeji_c&ref=fb.

716

La polygamie, la répudiation, le tuteur matrimonial et le droit de contrainte sont abolis en Tunisie depuis le 13 août 1956.

717 Voir l’interview accordée par Kaïs SAÏED à la Radio Express FM sur sa conception de la fonction présidentielle et sa vision de la Tunisie, [en ligne], [consulté le 18 décembre 2019],

https://www.youtube.com/watch?v=EJ2Gg_PK3Dg&feature=youtu.be (en arabe). Kaïs SAÏED maintient

ce discours le 13 août 2020 à l’occasion de l’anniversaire du CSP. Pour plus de précisions sur ce point voir L. BLAISE, « Tunisie : le discours du président contre l’égalité dans l’héritage irrite la société civile », RFI [en ligne], publié le lundi 17 août 2020, [consulté le 9 octobre 2020],

172 l’homme représente le chef de la famille718

. Même s’il ne s’oppose pas à ce que le défunt redistribue à sa convenance son héritage à ses descendants, il comprend la dignité, la liberté et la justice dans leur acception coranique719. Sa lecture du droit des femmes est donc fidèle aux débats constituants qui ont secoués l’ANC lors de l’élaboration de l’article 46 : il ne crée pas un nouveau domaine du possible en évoquant l’égalité en droits et dans la loi du Tunisien et de la Tunisienne720. Cet exemple-là est donc révélateur de sa lecture littérale ou conservatrice du texte constitutionnel721.

A cela s’ajoute sa volonté de rétablir la peine de mort. Le 28 septembre 2020, au cours du Conseil national de sécurité, le Chef de l’Etat a solennellement déclaré que « celui qui a

commis un meurtre doit être condamné à mort. »722 Bien qu’elle n’ait pas été abolie723, la peine de mort n’a, depuis 1991, plus été appliquée en Tunisie724. A la suite de son discours du 28 septembre 2020725, Amna GUELLALI, directrice régionale adjointe pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International a déclaré que « [l]a reprise des exécutions

serait un coup dur pour toutes les avancées en matière de droits humains que le pays a

718 Redevable de l’équilibre des dépenses pour les siens, il est naturel que l’homme hérite d’une plus grande part que la femme. Cette conception de la famille est basée sur l’interdépendance de ses membres. Elle rejoint d’ailleurs l’idée de complémentarité entre l’homme et la femme prônée par Ennahdha au moment de l’élaboration des articles 21 et 46 de la Constitution.

719 Voir AL BAWSALA, MAJLES MARSAD, Documents, Commission du préambule, des principes

fondamentaux et de révision de la Constitution, « Audition de Mr Kaïs SAÏED ainsi que des représentants

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