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Les pr´edicats d’´etat en s´emantique (n´eo) davidsonienne

1.3. Les pr´edicats d’´etat ont-ils un argument davidsonien ?

1.5.2. Les relations de d´ependance

Si le vol et la migration des oiseaux constituent deux ´ev´enements diff´erents, ils sont en revanche reli´es d’une mani`ere tr`es intime. Pour la suite de ce travail, j’ai besoin de montrer en quoi la relation qui prend place entre les proc`es que d´ecrivent respectivement la premi`ere et la seconde phrase de (1.104) et (1.105) (repris ci-dessous) est(( plus riche )) que celle qui prend place entre les deux proc`es en (1.106) et (1.107) :

(1.104) Les oiseaux volaient vers le Sud. Ils migraient.

(1.105) Pierre a distribu´e des bonbons aux enfants. Il ´etait g´en´ereux. (1.106) Les oiseaux volaient vers le Sud. Ils chantaient.

(1.107) Pierre a distribu´e des bonbons aux enfants. Il ´etait saoul.

En deux mots, la migration, mais non le chant, (( d´epend du )) vol des oiseaux. Comment d´efinir la relation inter-´ev´enementielle qu’illustrent (1.104) et (1.105) ?

Clairement, il ne peut s’agir d’une relation causale entre deux proc`es, du moins au sens classique de la causation, car pour que vi cause vj, il faut que vi pr´ec`ede vj, ou du moins commence avant vj.

Au chapitre (8), nous retrouverons le mˆeme genre de relation non causale avec certains verbes d’ach`evement comme trouver :

(1.108) Marie a vid´e la machine `a laver. Elle a trouv´e les lunettes de Pierre. Le verbe trouver, en tant que verbe d’ach`evement, d´ecrit un proc`es instantan´e (cf. Vendler (1957), Mittwoch (1991)). Ce proc`es instantan´e vj peut se d´efinir comme la fronti`ere d’un proc`es v’j (Pi˜n´on (1997)), parfois appel´e la (( phase pr´epara-toire )) du proc`es instantan´e.24 Dans l’exemple choisi, ce proc`es pr´eparatoire v’j

ne peut correspondre au vidage de la machine `a laver vi, car Marie peut tr`es bien avoir trouv´e ses lunettes avant que la machine ne soit enti`erement vid´ee (et donc avant que vi n’ait atteint sa fronti`ere droite). A nouveau se pose la question de savoir, alors, comment d´efinir la relation de d´ependance entre vi (le vidage de la machine) et v’j (la phase pr´eparatoire du proc`es instantan´e retrouver ). A nouveau, il ne peut s’agir d’une relation causale.

Les relations de survenance (Kim/ Engelberg)

Le verbe aider instaure le mˆeme genre de relation de d´ependance qu’en (1.104)-(1.105). L’aide de Jamaal (( d´epend de )) l’action de faire la vaisselle comme la migration des oiseaux (( d´epend )) de leur vol :

(1.109) Jamaal a fait la vaisselle. Il a aid´e Rebecca.

Dans une ´etude portant sur ce verbe, Engelberg (2005) propose d’analyser ces rela-tions non classiquement causales entre proc`es comme une relation de survenance, telle que l’a d´efinie Kim.25 En philosophie de l’esprit et en philosophie morale, ce type de relation est convoqu´ee pour rendre compte de la mani`ere dont les proc`es moraux (ˆetre bon) ou mentaux (croire qu’il pleut) d´ependent des proc`es physiques

24Rappelons que les verbes d’ach`evement sont ´etudi´es en d´etails dans le chapitre 8.

(des actions accomplies par les gens ´eventuellement bons, ou de leurs ´etats neuro-logiques). L’id´ee centrale est que lorsqu’un proc`es moral ou mental vj survient sur ((( d´epend de ))) un proc`es physique vi, alors tout changement de vj est corr´el´e `a un changement de vi, l’inverse n’´etant pas vrai. Par exemple, si une de mes croyances change, alors il doit n´ecessairement y avoir un changement dans mes ´etats neurologiques. Mais si mes ´etats neurologiques changent, je ne change pas n´ecessairement de croyances.

Engelberg suppose alors qu’il y a relation de survenance entre le proc`es ei

(( faire la vaisselle )) et l’´etat sj (( aider Rebecca )) d´ecrits dans un ´enonc´e comme (1.109).26 Il d´efinit cette relation de la mani`ere suivante :

D´efinition 1 (Survenance lexicale (Engelberg)) Pour tout ´etat s et tout ´ev´enement e, s survient lexicalement sur e dans le monde actuel w0, i.e. lsv(s, e), ssi dans tout monde w1 minimalement diff´erent de w0, tel que s a des propri´et´es diff´erentes qu’en w0, e change aussi de propri´et´es en w1.

Par exemple, en (1.109), sj survient sur ei parce que si Jamaal n’avait pas (ou moins) aid´e Rebecca, alors il n’aurait pas fait la vaisselle (ou l’aurait fait autre-ment).

A priori, la survenance semble un bon moyen de d´efinir le type de relation qui s’instaure entre un ´etat et l’´ev´enement qui lui sert d’occasion dans des ´enonc´es comme (3.118). L’´etat de g´en´erosit´e de Pierre (( survient )) effectivement sur sa distribution de bonbons, car s’il n’avait pas ´et´e g´en´ereux (ou s’il l’avait ´et´e moins), il n’aurait pas donn´e de bonbons, ou aurait proc´ed´e autrement.

Le probl`eme est que la relation de survenance, ainsi d´efinie du moins, ne par-vient pas `a distinguer l’´enonc´e (1.104) et (1.105) de ceux o`u la relation de d´epen-dance pertinente n’est pas v´erifi´ee, comme ci-dessous :

(1.110) Pierre a fait une sieste. Il ´etait beau.

La beaut´e de Pierre ne (( d´epend pas )) de sa sieste dans le sens pertinent. Et pourtant, la relation entre l’´etat occurrentiel sj ((( ˆetre beau )) ) et l’´ev´enement ei

((( faire une sieste )) ) satisfait vraisemblablement la d´efinition 1. En effet, si Pierre n’´etait pas (ou moins) beau pendant qu’il dort, alors l’´ev´enement eichangerait sans doute de propri´et´es, puisque Pierre n’aurait pas le mˆeme aspect en dormant.27

Le second probl`eme est que la relation de survenance n’est pas toujours v´erifi´ee l`a o`u on voudrait qu’elle le soit. Par exemple, en (1.108), si Marie n’avait pas trouv´e les lunettes de Pierre, il n’est pas si clair qu’elle n’aurait pas vid´e la machine `a laver, ou qu’elle l’aurait vid´ee autrement.

De toutes fa¸cons, il serait utile de disposer de diagnostics linguistiques qui permettent d’identifier la relation de survenance ind´ependamment de l’intuition, surtout lorsque celle-ci n’est pas claire. Mais Engelberg ne fournit pas de tels diagnostics.

Les relations de g´en´eration (Goldman)

26

Engelberg pr´esente des arguments en faveur de l’id´ee que dans les ´enonc´es pertinents, aider d´enote un ´etat et non un ´ev´enement, mais comme ce point n’est pas important ici, je n’en discuterai pas.

27

Notons d’ailleurs que l’esth´etique philosophique recourt aussi aux relations de survenance, pr´ecis´ement pour traiter de pr´edicats comme beau. Voir p.e. Sibley (1959).

Bouger la main Bouger sa reine

D´ejouer son adversaire

Faire s’´etrangler son adversaire

Bouger la main Bouger sa reine

D´ejouer son adversaire

Faire s’´etrangler son adversaire

Fig. 1.1 – Diagramme de g´en´eration d’actions (Goldman)

Introduction. Goldman (1970) a ´etudi´e en d´etails la relation qui prend place entre les deux actions que d´ecrivent respectivement les premi`ere et seconde parties des ´enonc´es du type suivant :

(1.111) John moved his hand. He moved his queen to king-knight-seven. (1.112) John extended his arm out the car window. He signalled for a turn. (1.113) John turned the key. He unlocked the door.

Cette relation est tout `a fait similaire `a celle qui nous int´eresse ici.28

Goldman appelle (( g´en´eration de niveau )) (level generation) ou tout simple-ment (( g´en´eration )) la relation qui prend place entre des paires d’actions de ce genre. Goldman choisit le terme (( niveau )) parce que dans les diagrammes re-pr´esentant ces relations entre actes (repr´esent´es par un cercle), les actes g´en´e-r´es sont dessin´es au-dessus des actions g´en´erantes correspondantes (voir sch´ema (1.1)). Les actions basiques se trouvent `a la base de l’arbre d’actions, et les actions non basiques `a des niveaux sup´erieurs de l’arbre d’actions. Comme le sugg`ere le diagramme, la g´en´eration de niveau est une relation asym´etrique, irr´eflexive et transitive, points sur lesquels je reviens plus bas.

Le test de by/in. Goldman d´efinit plusieurs propri´et´es de cette relation. Premi`e-rement, lorsqu’une action a de x g´en`ere une action a’ de x, il est g´en´eralement possible, en anglais, de dire que by doing a, x was doing a’ et/ ou bien que in doing a, x was doing a’ :

(1.114) By extending his arm out the car window, John signalled for a turn. En1 passant le bras hors de la fenˆetre de la voiture, John a signal´e qu’il allait tourner.

(1.115) In flying, the birds were migrating. En1 volant, les oiseaux migraient.

En l’absence d’une telle relation entre les deux proc`es, aucune des pr´epositions by/ in n’est acceptable ; dans ces contextes, while s’impose :

(1.116) ? ?By/ ? ?in doing the dishes, I was smoking.

28Merci `a C. Pi˜n´on de m’avoir sugg´er´e que la relation qui m’int´eressait ´etait probablement celle qu’´etudie Goldman.

by/in+g´erondif g´erondif nu(non pr´ec´ed´e de en) tout en+g´erondif Simultan´eit´e sans g´en´eration ? ? ? ? OK

G´en´eration OK OK ? ?

Tab. 1.1 – Le test de by/in et sa traduction en fran¸cais

(1.117) While doing the dishes, I was smoking. En2 faisant la vaisselle, je fumais.

Le test de by/in n’a pas d’´equivalent strict en fran¸cais, car le en1 qui traduit les pr´epositions by et in est homophone avec le en2 qui traduit while. On observe tout de mˆeme que ces deux en n’ont pas tout `a fait les mˆemes propri´et´es syn-taxiques et s´emantiques. Premi`erement, comme l’observe C. Beyssade (c.p), seul en1 (´equivalant `a by/ in) peut ˆetre effac´e :

(1.118) Faisant la vaisselle, Marie aidait Pierre. (1.119) ? ?Faisant la vaisselle, je fumais.

Deuxi`emement, on observe que seul en2 (´equivalant `a while) peut ˆetre remplac´e par tout en :

(1.120) ? ?Tout en faisant la vaisselle, Marie aidait Pierre.29

(1.121) Tout en faisant la vaisselle, je fumais. Les donn´ees sont r´esum´ees dans le tableau (1.1).

Le test de parce que. Un autre test permet de diagnostiquer la pr´esence d’une g´en´eration entre deux proc`es.30 Syst´ematiquement, lorsque a g´en`ere a’, on peut justifier le fait que a’ a eu lieu en arguant du fait que a a eu lieu :

(1.122) En1 sortant le bras par la fenˆetre de la voiture, John a signal´e qu’il allait tourner.

≃ Il a signal´e qu’il allait tourner parce qu’il a sorti le bras de la fenˆetre de la voiture.

(1.123) En2 faisant la vaisselle, il fumait.

6≃ Il fumait parce qu’il a fait la vaisselle.

Vraisemblablement, s’il est naturel de justifier que a’ a eu lieu par l’occurrence de a, c’est parce que a’ d´epend ontologiquement de a.

Ce test montre qu’il existe une propri´et´e commune entre la g´en´eration et la causation : comme la causation, la g´en´eration sous-tend une relation explicative entre les propositions d´enotant respectivement une action a g´en´erante et une action a’ g´en´er´ee par cette action. Il arrive mˆeme fr´equemment que l’on pr´esente une action g´en´erante comme la cause d’une action g´en´er´ee :

(1.124) L’action de tourner l’interrupteur a caus´e l’action d’allumer.

29

Cet exemple est bien sˆur acceptable s’il n’y a aucun rapport entre le fait de faire la vaisselle et le fait de m’aider. Cela confirme encore que (( tout en )) implicite que les deux proc`es sont ind´ependants.

30

(1.125) L’action de sortir le bras hors de la fenˆetre a caus´e l’action de signaler qu’il allait tourner.

Et pourtant, a ne peut causer a’ au sens classique du terme, puisque a et a’ ont lieu exactement en mˆeme temps.

Pour se laisser la libert´e d’utiliser cette mani`ere naturelle de parler tout en ´evitant la confusion avec la relation Cause classique, je propose d’utiliser le terme Cause1 pour d´enoter une causation classique, et d’utiliser le terme Cause2 pour d´enoter une g´en´eration.

L’absence de successivit´e. La deuxi`eme propri´et´e que souligne Goldman est que si une action a g´en`ere une action a’, alors a’ ne peut commencer apr`es a ; cela a pour corollaire, sugg`ere Goldman, que l’on ne peut pas dire que x a fait a (( et puis )) a’ (and then/ and later did a’ ) :

(1.126) John flipped the switch. He turned on the light.

6= ?John flipped the switch and then/ and later he turned on the light.

(1.127) Jean a tourn´e l’interrupteur. Il a allum´e.

6= ?Jean a tourn´e l’interrupteur et puis/ et alors il a allum´e.

L’absence de successivit´e n’est cependant pas une condition suffisante pour que deux actions soient reli´es par g´en´eration. Un agent peut effectuer simultan´ement deux actions compl`etement ind´ependantes, telles qu’aucune des deux n’est faite (( by/ in )) faisant l’autre. Par exemple, je peux siffler en mangeant ; mais on ne dira pas, en anglais, By/in eating, I whistled. Goldman propose d’appeler ces paires d’actions ind´ependantes l’une de l’autre des actions co-temporelles. En an-glais, while also peut uniquement ˆetre utilis´e entre deux descriptions d’actes co-temporels, c’est-`a-dire ind´ependants :

(1.128) I ate while also whistling.

(1.129) # John flipped the switch while also turning on the light.

On vient de voir qu’en fran¸cais, (( tout en )), contrairement `a en, semble impliciter comme (( while also )) que les deux proc`es concomitants sont ind´ependants.

Irr´eflexivit´e, asym´etrie et transitivit´e. Comme on l’a dit plus haut, la g´en´eration est une relation irr´eflexive, asym´etrique et transitive. On peut le v´erifier `a partir du test de by/ in. Comme une action a ne peut se g´en´erer elle-mˆeme (la g´en´eration ´etant irr´eflexive), il n’est pas naturel de dire que x fait a (( by/in )) faisant a : (1.130) #By/in migrating, the birds were migrating.

La relation ´etant asym´etrique, si x fait a’ (( by/in )) faisant a, alors l’action g´en´er´ee a’ ne peut `a son tour g´en´erer l’action g´en´erante correspondante a :

(1.131) In flying, the birds were migrating. (1.132) #In migrating, the birds were flying.

(1.133) By moving his hand, he was checkmating his opponent. (1.134) #By checkmating his opponent, he was moving his hand.31

31

Action a Action a’ S tourne l’interrupteur −→ S allume S appuie sur la gachette −→ S tue Georges S bouge le bras −→ S ferme la porte

S ferme la porte −→ S empˆeche une mouche d’entrer

Tab. 1.2 – Exemples de g´en´erations causales

Enfin, la g´en´eration est une relation transitive. Si une action a g´en`ere une action a’, et que a’ g´en`ere une action a”, alors a g´en`ere a” :

(1.137) By moving his hand, John was moving his queen.

(1.138) By moving his queen, John was checkmating his opponent. (1.139) → By moving his hand, John was checkmating his opponent. G´en´eration causale. Goldman distingue quatre types de g´en´eration : (1) la g´en´e-ration causale, (2) la g´en´eg´en´e-ration conventionnelle, (3) la g´en´eg´en´e-ration simple et (4) la g´en´eration par augmentation.

La g´en´eration causale est sans doute la plus courante. Elle est illustr´ee par les quatre exemples dans le tableau (1.2). Dans tous ces exemples, l’action a de S a un certain effet e, en vertu de quoi on peut dire de S qu’il a fait a’. Par exemple, l’actionnement de la gˆachette par S provoque la mort de Georges. En vertu de cela, on peut dire de S qu’il a tu´e Georges. Plus g´en´eralement, Goldman propose de dire que l’action a d’un agent S g´en`ere causalement une action a’ de S si (1) a cause un effet e, et (2) l’action a’ consiste `a provoquer e.

Goldman prend soin de distinguer la g´en´eration causale de la causation. Ces relations sont mutuellement exclusives ; deux actes ne peuvent jamais ˆetre reli´es `a la fois par causation et par g´en´eration causale. En effet, la causation implique la successivit´e. Supposons, par exemple, que Marie tire sur la gachette (action a) et que Georges meurt sur le coup (effet e). Marie a d`es lors tu´e Georges (action a’ ). Ces trois proc`es sont reli´es comme suit :

• L’action de tirer sur la gachette a cause la mort e, mais ne g´en`ere pas cau-salement e (car a et e sont successifs).

• L’action de tuer a’ est causalement g´en´er´ee par l’action d’appuyer sur la gachette a, mais n’est pas caus´ee par a.

Suivant Goldman, la g´en´eration causale impose que l’acte g´en´erant et l’acte g´en´er´e correspondant aient les mˆemes fronti`eres temporelles. Mais cela ne peut ˆetre exact. Ainsi, l’action a de tirer sur la gachette ne peut avoir exactement les mˆemes fronti`eres temporelles que l’action a’ de tuer Georges, car a’, et non a, inclut temporellement la mort de Georges e.

(1.135) While eating, he was whistling. (1.136) ⇔ While whistling, he was eating.

Action a Action a’ S passe le bras hors de la

fe-nˆetre de la voiture

−→ S pr´evient qu’il va tourner S d´eplace sa reine −→ S mate son adversaire aux

´echecs S essaye de sauver la vie de

Jean

−→ S fait son devoir

S rompt sa promesse −→ S fait quelque chose qu’il ne devrait pas faire

Tab. 1.3 – Exemples de g´en´erations conventionnelles

Je propose donc d’amender la th´eorie de Goldman en disant que si un acte a’ est causalement g´en´er´e par un acte a ayant un effet e, alors τ (a’ )= τ (a)⊕τ(e).32

Notons que s’il est possible de rendre compte de la relation entre l’action a de tirer sur la gachette et l’action a’ de tuer Georges dans le cadre d´efini par Goldman, cela est nettement plus compliqu´e dans la th´eorie de Davidson. En effet, ce dernier identifie ces deux actions a et a’ ; cela est assez probl´ematique, puisque celles-ci n’ont pas les mˆemes fronti`eres temporelles.33

G´en´eration conventionnelle. La g´en´eration conventionnelle est le second type de g´en´eration. La g´en´eration conventionnelle est caract´eris´ee par l’existence de r`egles, de conventions ou de pratiques sociales en vertu desquelles on peut dire d’un agent S qu’il a effectu´e l’acte a’, ´etant donn´e qu’il a effectu´e un autre acte a. Quelques exemples de Goldman sont repris dans le tableau (1.3).

Pour chacun de ces exemples, il existe une r`egle R en vertu de laquelle le fait que S effectue a permet de dire de S qu’il a aussi effectu´e a’. Par exemple, si S rompt sa promesse, on peut dire de S qu’il a fait quelque chose qu’il n’aurait pas dˆu faire en vertu de la r`egle (( On doit tenir ses promesses )).

Dans la plupart des cas, il faut que l’acte a se d´eroule dans certaines cir-constances pour que l’on puisse dire de S qu’il a effectu´e a’ en effectuant a. Par exemple, si S passe le bras hors de la fenˆetre de sa voiture alors qu’il se trouve dans son garage, on ne pourra pas dire de lui qu’il a signal´e qu’il allait tourner.

Plus g´en´eralement, Goldman propose de dire que l’acte a d’un agent S g´en`ere conventionnellement un acte a’ si et seulement si le fait d’effectuer a dans les circonstances C (´eventuellement nulles) revient `a faire a’, ´etant donn´e une r`egle R qui garantit qu’une action du type A en C (( compte pour )) une action du type A’.

Goldman admet implicitement que la r`egle R qui sous-tend une g´en´eration conventionnelle est adopt´ee par la communaut´e enti`ere. C’est sans doute pour cette raison qu’il range l’exemple suivant dans une autre cat´egorie de g´en´eration (`a savoir la g´en´eration simple) :

32

Remarquons que cela ne contredit pas le fait que l’action g´en´er´ee a’ ne peut commencer apr`es l’action g´en´erante a : l’action de tuer commence en mˆeme temps que l’action de tirer sur la gachette, mˆeme si la seconde finit avant la premi`ere.

Action a Action a’ S r´ealise un saut de 3

m`etres

−→ S saute plus haut que son fr`ere

S dit que P −→ S ment

S joue au piano −→ S revoit ses gammes S dit que P −→ S se contredit

Tab. 1.4 – Exemples de g´en´erations simples

(1.140) By coming at home after 12.00, John broke his promise.

Mais pourquoi ne pas voir dans ce genre d’´enonc´es un exemple de g´en´eration conventionnelle ? En effet, somme toute, on ne brise sa promesse qu’en vertu d’une r`egle qui fait qu’un acte d’un certain type (rentrer apr`es 12.00 dans notre exemple) (( compte pour )) une rupture de promesse. Certes, cette r`egle est particuli`ere et non g´en´erale comme dans les exemples pr´ec´edents, dans la mesure o`u elle ne lie cette fois qu’une petite communaut´e qui ne peut compter que deux individus. J’ad-mettrai cependant qu’il peut y avoir g´en´eration conventionnelle mˆeme dans ce cas.

G´en´eration simple et par augmentation. La g´en´eration simple est un troisi`eme type de g´en´eration. Au contraire de la g´en´eration causale, elle n’implique pas que l’acte a