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Section I. L’évaluation du fonctionnement du système judiciaire

KPI 1 – Speed of service

B. Les caractéristiques des critères d’évaluation

95. En Angleterre et au Pays de Galles, l’évaluation du fonctionnement du système judiciaire a pour objectif de considérer l’efficacité, l’effectivité et les aspects économiques du système dans une perspective managériale.

Selon Richard Crowley (CPS en chef du comté de Cambridge), en ce qui concerne le

CPS, l’objectif est d’assurer que les membres du public obtiennent un bon rapport qualité-

prix dans le domaine des plaidoiries, du rendu des décisions et de l’obtention de justes résultats. C’est le HMCPSI – Her Majesty’s Crown Prosecution Service Inspectorate – qui est un corps indépendant d’inspecteurs du CPS qui assure cette fonction et qui, d’après Richard Crowley, serait le premier corps indépendant au monde à assurer la qualité d’une autorité de poursuite. Son objectif est d’améliorer la qualité de la justice par le biais d’inspections indépendantes et de l’évaluation des services de poursuite afin, de ce fait, d’améliorer leur efficacité et leur efficience.

La question de l’intégration des coûts au sein des critères d’évaluation du système a par ailleurs été abordée avec nos interlocuteurs. Il ressort des entretiens menés que les coûts commencent à peine à être intégrés dans la gestion du système judiciaire et il ne semble pas possible de dire à l’heure actuelle qu’ils font partie du processus d’évaluation.

Concernant les cours, l’entretien mené au HMCS a permis de dégager quelques tendances en termes de budget annuel des juridictions : le budget est établi depuis peu (a

priori 2009) sur le coût par cas, auquel s’ajoutent le nombre d’heures estimées par affaire et

le nombre de personnes mobilisées. Cette équation doit permettre d’établir aujourd’hui le budget des tribunaux anglais (au moins ceux dépendants du HMCS : county courts, crown

courts et magistrates’ courts). Le but de ce système est de rationaliser le temps et l’argent

dépensé pour chaque cas (passer moins de temps par cas) et de prévoir le budget annuel des juridictions, ce à quoi s’ajoute une pression en vue d’une plus grande efficacité.

Concrètement, le budget alloué aux procédures, est octroyé de manière centrale et repose largement sur l’utilisation d’une formule de coût fondé sur l’activité, qui prend en compte la charge de travail de la période de trente-six mois en cours. Le budget alloué reflète donc l’historique de l’activité récente. On notera toutefois que la question des personnes chargées des estimations n’a pas trouvé de réponse claire. Des fluctuations à

76 Sur les agences d’exécution, V. Alasdair S. Roberts, « Performance-Based Organizations: Assessing the

court terme dans la charge de travail peuvent donc signifier une baisse ou une hausse dans le budget, tempérée par l’utilisation d’un modèle opérant sur la période de trente-six mois en cours. Ce tableau est complété par des allocations discrétionnaires et des allocations spécifiques pour des initiatives ou des projets particuliers (Funding for New Initiative) qui se formalise par une rallonge d’argent distribué à tous les CPS du pays pour des projets particuliers. Cela revient à rajouter une ligne budgétaire pour un délai limité à la durée du projet pour laquelle la somme varie en fonction du projet.

Il semble cependant, comme nous l’a expliqué John Stacey du Ministry of Justice, que le calcul consistant à considérer les dépenses de l’année passée et à calculer la charge de travail à venir afin de déterminer le budget nécessaire pour chaque service soit encore du domaine de l’idéal. En réalité, il existe une enveloppe globale qui provient du haut de la hiérarchie et c’est localement que l’on demande aux cours d’accomplir la même mission que par le passé avec moins d’argent. Il nous a également précisé que les juges ne sont jamais impliqués dans les questions budgétaires.

Le Code for Crown Prosecutors est silencieux sur le point de savoir si les dépenses engagées sur la preuve pourraient être un facteur d’engagement des poursuites. Selon le procureur général du comté de Cambridge, le bon sens impose à un procureur de ne pas investir des sommes importantes dans la poursuite d’infractions communes mais, à l’inverse, une infraction sérieuse ne devrait pas être négligée en raison d’un manque de moyens.

Nos entretiens ont révélé que le respect ou non des prévisions budgétaires n’est pas susceptible d’entraîner de réelles conséquences, si ce n’est une réorganisation des postes budgétaires en fonction des besoins. En théorie, si la dépense est moindre au budget prévu, l’argent doit être rendu par les cours, mais c’est une hypothèse d’école, l’argent étant toujours dépensé. S’il y a dépassement, ce qui semble également être rare, il semble que la rallonge soit faite et qu’il y ait ensuite une réévaluation des besoins pour l’année à venir. Il faudra cependant considérer les prochains exercices afin d’examiner ce qu’il en est avec le système prévisionnel par cas. De plus, un processus est prévu en cas de demande de fonds supplémentaires en cours d’année, même si le gestionnaire demandeur doit justifier sa requête et négocier la rallonge qu’il demande. Dans ce cas, John Stacey nous a expliqué lors de notre entretien que les cours disposent de peu de marge car de nombreuses lignes budgétaires sont fixes. C’est le « area director » qui a le pouvoir de décision. Il dispose d’un budget à l’année, mais également d’une réserve budgétaire qu’il peut distribuer en cas de besoin. Il existe dans ce domaine une grande fongibilité puisque le « area director » peut couper dans le budget d’une cour pour donner des fonds à une autre.

Ministry of Justice (Secretary of State for Justice, Lord Chancellor) Principal Private Secretary (plus haut fonctionnaire du pays)

Directeur Général Acces Justice/Accès à la justice DG DG DG DG

Legal Aid/Aide juridictionnelle Chief Court Executive

HMCS

Court Service Board

Chief court executive Tribunal Service

Chief court executive

Parlement Trésor

DG

Prison

Chacun produit des plans de développement et prend des décisions financières en fonction des besoins des échelons inférieurs

Sept directeurs régionaux (Regional Directors)

Area Director (2 à 4 par région)

Court Manager

C. Manager n’a pas de contrôle sur le budget. Les

décisions viennent de l’Area Director. C’est lui qui demande l’argent à son directeur régional et négocie (négociation sur le nombre de jours par juge à temps plein).

Chaque directeur régional négocie avec le Chief Court Executive un budget.

Chacun des trois Chief Court

Executive

négocie ensuite le budget avec le Directeur général. Négociation du budget

Attribution des fonds à chaque DG

Le Board est composé de trois juges qui ne prennent de décision que sur le fonctionnement des cours. Aucune décision politique. C’est le plus haut niveau de responsabilité des juges.

Discussion avec le Lord Chief Justice concernant l’attribution des moyens au système judiciaire (Art. 7(2)b du Constitutional Reform Act de 2005)

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Police et budget :

La police est aujourd’hui amenée à faire des choix quant aux dépenses qu’elle engage en matière de preuve. Selon Rob Needle (Superintendent, Cambridge), elle ne devrait pas, mais – de manière réaliste – elle le fait. Plus précisément, ils observent le budget : le traitement de la preuve dépend du moment de l’année (sachant que les budgets vont d’avril à avril). Autre exemple de choix pouvant être fait : en matière d’ADN, le budget va dépendre de la gravité de l’affaire. S’ils ont un suspect en garde à vue, ils utilisent la voie rapide (12 à 24 heures). Sinon, la voie lente est privilégiée (3 semaines).

En termes de preuves, les questions très techniques peuvent être externalisées. Pour les questions de routine (empreintes digitales, vidéosurveillance, etc.) le traitement se fait en interne. Dans l’avenir, l’un des projets est de regrouper les laboratoires pour rationaliser les coûts.

Ces choix sont opérés sur le fondement d’instructions nationales du Home Office pour les Commissariats. Une fois par mois, un compte rendu sur le budget a lieu, fait par le superintendent au Chief constable. Ces questions incluent également le business manager.

La décision sur les budgets :

- le budget est décidé en fonction du budget de l’année précédente. On le pondère par les nouveaux postes budgétaires et par une inflation de 6% par an sur les 4 ans à venir.

- Le budget est ventilé selon les priorités gouvernementales mais il y a une marge de manœuvre laissée au Chief

constable et au Chief executive board.

Les méthodes de rationalisation :

- on a tendance à réduire le nombre de policiers en utilisant ces derniers uniquement autour des tâches de police judiciaire (externalisation de la partie administrative, du gardiennage des cellules de garde à vue)

- on utilise une ligne téléphonique hotline dédiée à l’interprétariat (depuis le commissariat ou depuis la rue) plutôt que de faire venir un interprète. De même, recours à des fascicules pré traduits.

96. Au niveau du Tribunals Service, la négociation du budget se fait avec la Direction Générale Access to Justice, comme le HMCS. Ensuite la répartition est régionale puisqu’il y a des centres de gestion déléguée du TS. La déconcentration administrative n’est pas parallèle à la présence des tribunaux sur le terrain. En effet, le système à deux degrés institué depuis 2007 ne signifie pas qu’il y a au niveau local un First-tier et un Upper tribunal par région, ni que cela corresponde au découpage administratif. Il y a des Offices de telle ou telle chambre qui dépendent d’un Administrative support center situé à un échelon local plus large.

Tribunals Service Chief executive / Operations Director for England and Wales

Area Managers (Regional Directors)

Managers (par Administrative Support Centers)

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II. La mise en œuvre des critères d’évaluation A. La mise en œuvre générale

97. En Angleterre et au Pays de Galles, la mise en œuvre des critères d’évaluation semble dépendre des juridictions, mais la question de l’évaluation du système suscitant toujours une réticence dans les cours qui mettent en avant leur indépendance, il est difficile d’avoir une vision limpide du système.

En pratique, pour l’évaluation des magistrates’ courts, il semble que ce soit le HMCS qui détienne le pouvoir. Au contraire, les Crown Courts dont l’activité représente 5% des affaires criminelles, ont leur propre système et sont très attachés à leur indépendance, même s’ils dépendent du HMCS. Le pouvoir du Resident Judge est donc très important pour les programmes d’efficacité qui sont souvent locaux. Pour ce qui est des County Courts, aucune information n’a pu être trouvée, mais étant donné leur fonctionnement très similaire à celui des

Crown Courts, il est imaginable que le pouvoir du Resident Judge est également très important.

De même que pour la fixation des critères, il est impossible d’avoir une vision globale de la mise en œuvre de critères d’évaluation des tribunals par l’ensemble des ministères. L’analyse ne concerne ici que la mise en œuvre de critères d’évaluation au niveau des tribunaux relevant du Tribunals Service (TS).

Dans le rapport annuel 2009-2010 du TS, il est indiqué que le rapport a été présenté au Parlement comme le lui impose la Section 39(3) du Tribunals, Courts and Enforcement Act de 2007 et que les « comptes » ont été rendus à la Chambre des Communes ainsi que l’impose la Section 7 du Government Resources and Accounts Act 2000.

Pour ce qui est de l’évaluation du Tribunals Service :

En 2009-2010, les plaintes reçues par le TS étaient au nombre de 800 000, soit 25% de plus qu’en 2008-2009. L’agence a augmenté le rendement de 15% et la productivité d’environ 10%77. L’objectif de rendre les décisions dans le délai fixé par l’indicateur n’a néanmoins pas été respecté au regard du nombre de plaintes observé. En revanche, la qualité du service rendu ne s’est pas détériorée et l’objectif de réduire les coûts a été rempli78.

En effet, dans la section 4 du rapport annuel 2009-2010 intitulée « Nos ressources et infrastructures », est présentée en 1er lieu l’évaluation de l’efficience (le TS explique comment il est parvenu à faire des économies notamment en matière immobilière), en 2d lieu, est affirmé le nécessaire développement des IT afin de faire des économies dans l’avenir. Le TS est en train d’essayer d’uniformiser les applications utilisées afin de sécuriser et de simplifier les échanges au sein de son système juridictionnel. En 3e lieu, le rapport fait état de l’action du

Tribunals Service en matière de domaine immobilier et précise notamment la collaboration

importante à ce niveau entre le HMCS et le TS (les deux agences s’entraident afin d’occuper intelligemment leurs biens immobiliers). En 4e lieu, le rapport analyse le rôle du personnel. Une augmentation de 7% du personnel a été réalisée, ce qui a soutenu l’activité du TS. Est également calculée et précisée la moyenne des jours d’absence par personne dans l’année. Elle est comparée avec l’objectif fixé pour l’année (7,5 jours)79. Les managers à tout niveau sont responsables pour gérer le taux de présence et ont un objectif de réduction du niveau d’absence dans leurs équipes, tout en développant une culture qui encourage les personnes à être au

77 Rapport annuel 2009-2010 du Tribunals Service, p. 3. 78 Idem.

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travail80. Ils sont soutenus par le réseau « Champions Présence et Bien-être ». Enfin, est évoqué le fait que, en accord avec le Senior President et l’AJTC, les frais de justice ont augmenté pour la première fois en 2009 et qu’à l’automne 2010, la possibilité d’une autre augmentation sera évaluée81.

Pour ce qui est de l’évaluation effectuée par le Tribunals Service :

Le TS évalue le fonctionnement des tribunaux globalement à l’occasion du rapport rendu annuellement au Lord Chancellor.