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Chapitre 3 : CADRE CONCEPTUEL

3.2 Le cadre d’analyse des proximités de Paquelin (2011)

spatiale et a-spatiale de Paquelin (2011). Ce cadre est construit autour du concept de proximité et s’applique aux dispositifs hybrides. En opposition au concept de distance, ce cadre d’analyse et le concept de proximité qu’il mobilise visent à réduire les écarts ou distances qualitatives que fait naitre la distance physique et temporelle qui caractérise la FAD (Jacquinot, 1993; Paquelin, 2011).

Le concept de proximité veut concrétiser l’idée d’une « présence à l’autre » ou d’une « présence dans la distance », pour réduire les distances, redonner à l’apprenant les moyens de diriger sa trajectoire de formation et favoriser son engagement et sa persévérance (Paquelin, 2011, p. 567). Cela passe par un processus de construction de connaissances et de réalisation du projet de formation ancré dans des mises en liens ou « reliance » et des interactions avec autrui, en référence à la zone proximale de développement (Bouba-Olga & Grossetti, 2008). La « reliance » désigne la capacité de l’organisation éducative à rapprocher ses membres et à les faire interagir, selon les logiques d’appartenance et de similitude (Bouba-Olga & Grossetti, 2008; Paquelin, 2011). Ainsi, la proximité, en tant que mise en liens, concerne tous les acteurs du dispositif, selon les capacités de chacun : apprenants, formateurs, savoir, personnel administratif ou technique, dispositif technique, etc. C’est ainsi que se produit la réduction des distances, qui s’opère par une rupture avec les connotations négatives véhiculées par la distance, grâce à la « bonne distance », qui est la « distance proximale » (Paquelin, 2011, pp. 566-567) ou encore la « zone proximale d’acceptabilité » (Paquelin, 2009, p. 105).

Le cadre d’analyse de Paquelin (2011) mène plus clairement à une exploration de la proximité objective ou passive. De ce point de vue d’objectivation de la proximité, l’analyse porterait sur les prescriptions ou les intentions qui caractérisent la phase de conception des dispositifs. Autrement dit, dans une perspective objective, la proximité – tout comme la distance – doit marquer la vision et l’action du concepteur de cours, par l’aménagement d’espaces-temps sociaux de collaboration, par le recours à des outils de partage et de présence à l’autre, par la planification et la mise en cohérence des activités, des espaces et des contenus de formation, etc. (Paquelin, 2011). Le modèle d’analyse invite à concevoir le dispositif pédagogique, de sorte à proposer à l’étudiant un service le plus conforme possible à ses attentes, selon ses caractéristiques et les réalités de son environnement (Paquelin, 2016). La conception d’un dispositif selon les principes de la proximité relève au moins de « l’intentionnalité d’usage » (Paquelin, 2011, p. 570), contenue dans « l’état prescrit » du système de formation, « tel qu’il est conçu » et traduisant des prescriptions (Paquelin, 2009, p. 176). De ce point de vue, la

proximité exprime la volonté de l’organisation de formation de porter son action sur l’expérience de l’apprenant (Le Boulch, 2001). C’est cette intégration d’éléments susceptibles de rapprocher les étudiants de leur dispositif de formation qui est dite proximité objective, correspondant à une forme de « montée des services » (Le Boulch, 2001, p. 9).

Dans la perspective de l’apprenant, le cadre d’analyse de Paquelin est moins expressif; ce que nous cherchons à combler avec l’outil que nous proposons dans cette thèse de doctorat. Mais la vision de l’auteur est que la proximité passe naturellement par l’action de l’étudiant et son vécu expérientiel teintés de sa subjectivité. C’est réellement à travers cette appropriation, au sens de processus de construction de sens et d’«utilisation effective » du dispositif (Paquelin, 2009, p. 16) que se mesure son efficience. Par son implication dans les activités de formation et ses interactions, l’apprenant œuvre non seulement pour la réalisation de son projet de formation, mais évalue le dispositif qui passe désormais de l’état prescrit à un état vécu « réellement utilisé » et « forme (vraiment) appropriée » (Paquelin, 2009, p. 176). La proximité via la réduction des distances opère grâce à un effet de connexion réussie entre le dispositif pédagogique et l’étudiant et une satisfaction de ce dernier à l’endroit de son système de formation. Cet effet de reliance portée par la proximité vécue ou subjective se mesure par des perceptions et sentiments (de confiance, de sécurité, d’affiliation à l’institution, …) et d’engagement et de persévérance dans la réalisation du projet de formation (Paquelin, 2011).

C’est au regard de tous ces éléments que nous définissons le concept de proximité comme un processus abouti de mise en relation des acteurs d’un dispositif pédagogique, depuis sa conception, sa mise en œuvre et son efficience, mesurée à travers l’expérience de l’étudiant (Paquelin, 2011). Autrement dit, la proximité c’est la conception et la mise en œuvre d’un dispositif pédagogique sur des modalités capables de compenser la distance physique et de susciter chez l’apprenant des sentiments de confiance, de sécurité et d’affiliation à son institution (Paquelin, 2011). Le cadre d’analyse qui traduit une telle vision de la proximité s’inspire du domaine de la sociologie économique (Bouba-Olga & Grossetti, 2008). Il repose sur deux grandes dimensions spatiale et a-spatiale liées à la configuration du dispositif de formation (voir Figure 13 suivante).

Figure 13 : Les différentes dimensions de la proximité

D’après Paquelin (2011)

3.2.1 Proximité spatiale

La proximité spatiale ou géographique, dans une approche topologique, analyse les facteurs facilitant la réalisation du projet de formation de l’étudiant et liés à son rapprochement du dispositif par les périmètres physique et numérique dans lesquels se tiennent les activités d’enseignement/apprentissage (Paquelin, 2011). Il s’agit, concernant l’espace physique, de l’existence de sites physiques de rencontres de l’étudiant avec les autres acteurs de la formation, de ses modalités de déplacement vers les sites physiques et de sa disponibilité à apprendre (Bouba-Olga & Grossetti, 2008; Paquelin, 2011; Tendeng & Paquelin, 2019). L’espace physique assure ainsi une fonction d’accompagnement en cela qu’il contient l’action et favorise la socialisation et le sentiment d’appartenance des apprenants.

Concernant l’espace numérique, la proximité spatiale renvoie à ce que Kawachi (2011) appelle la présence imaginative, « conscious proximity imaginatively » (p. 592). Cette proximité spatiale numérique se traduirait par des facteurs tels que la disponibilité de l’équipement informatique, les dispositions navigationnelles et socio- affectives de l’étudiant à travers l’environnement numérique d’apprentissage et ses sentiments de proximité (Paquelin, 2011; Tendeng & Paquelin, 2019).

Cette première dimension spatiale de la proximité réitère ainsi l’importance de l’hybridation des dispositifs de formation. Elle repose sur la proximité physique et la proximité numérique, qui assurent une diversification et un renforcement de l’expérience d’apprentissage.

3.2.2 Proximité a-spatiale

Quant à la proximité a-spatiale (Paquelin, 2011), elle est également dite organisée ou organisationnelle (Torre, 2010). Comme l’indique le qualificatif (a-spatial), cette dimension de la proximité s’intéresse à tout ce qui n’est pas lié aux espaces, même s’il existe une certaine interdépendance entre les deux dimensions (Paquelin, 2011). C’est surtout avec cette dimension a-spatiale de la proximité que se mesure la « reliance » ou la capacité de l’institution à rapprocher ses différents acteurs. Comme sur la Figure 13 précédente, la proximité organisationnelle se décline en proximité des ressources et en proximité de coordination.

La proximité de ressources est tout d’abord d’essence cognitive, intégrant les valeurs immatérielles émanant autant de l’institution comme de l’environnement de l’étudiant, et qui font que les acteurs se ressemblent ou se complètent dans leurs activités (Bouba-Olga & Grossetti, 2008). Mais il y a aussi la proximité de ressources de nature matérielle, établie sur des ressources physiques comme les équipements et les documents mis à la disposition de l’étudiant, afin de faciliter son apprentissage (Paquelin, 2011).

La seconde composante de la proximité a-spatiale – la proximité de coordination - s’intéresse aux éléments qui facilitent la rencontre et la collaboration des individus (Bouba-Olga & Grossetti, 2008). Ainsi, la proximité de coordination relationnelle se mesure à la qualité des relations entre les acteurs, fondée sur la confiance et les valeurs partagées grâce à la coordination mise en place (Clément et al., 2009; Villardier & Do, 2008). La proximité de coordination par la médiation supporte l’accompagnement humain et renvoie à la capacité du dispositif à apporter des réponses satisfaisantes aux besoins des étudiants (Paquelin, 2011).