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Chapitre 3 : CADRE CONCEPTUEL

3.1 Le cadre d’analyse de Hy-Sup

3.1.1 Dimensions et composantes du cadre de Hy-Sup

l’utilisation de modalités d’articulation de phases présentielles et distancielles de formation, l’accompagnement humain, des formes de médiatisation, des formes de médiation liées à l’utilisation d’un environnement technopédagogique et, enfin, le degré d’ouverture du dispositif » (Peraya et al., 2014, p. 19).

Tableau 3 : Dimensions et composantes de dispositif hybride mobilisées dans la recherche Hy-Sup

Comp2 : vous proposez des activités de groupe lors des phases d’enseignement à distance (en dehors des salles de cours).

D2 : Médiatisation

Comp3 : vous proposez aux étudiants un ou plusieurs outils de soutien à l’apprentissage (espaces ou moyens pour travailler, pour réfléchir à leur manière d’apprendre, ou pour construire leur identité numérique. Comp4 : vous proposez aux étudiants un ou plusieurs outils de

communication, d’organisation, et de collaboration (calendrier, échéancier, forum, etc.).

Comp5 : dans les ressources numériques que vous proposez, vous intégrez des images, photos, schémas, cartes, vidéos, etc.

Comp6 : dans leurs travaux, les étudiants intègrent des images, photos, schémas, cartes, vidéos, etc.

Comp7 : vous utilisez des outils de communication et de collaboration synchrones (chat, visioconférence, partage de documents et d’écran, etc.). Comp8 : les étudiants peuvent commenter/modifier les

ressources/documents mis à leur disposition et/ou travaux de leurs pairs. D3 : Médiation Comp9 : votre cours vise des objectifs de type communiquer, collaborer,

mieux se connaitre.

D4 :

Accompagnement

Comp10 : vous stimulez l’entraide et le soutien des étudiants entre eux (répondre aux questions des autres, fournir des ressources d’apprentissage aux autres, …).

Comp11 : vous sollicitez une réflexion des étudiants sur leur savoir et leur processus d’apprentissage.

Comp12 : les étudiants fournissent des ressources à leurs pairs et/ou répondent aux questions de leurs pairs.

D5 : Ouverture

Comp13 : votre cours laisse aux étudiants des possibilités de choix au niveau des activités d’apprentissage, des médias et outils à utiliser, des méthodes, etc.

Comp14 : vous faites intervenir dans votre cours des experts extérieurs à l’université ou des ressources extérieures au monde académique

(M. Lebrun, Peltier, Peraya, Burton, & Mancuso, 2014, p. 60)

Ces dimensions et composantes sont largement explicitées dans les ressources et études réalisées dans le cadre de la recherche Hy-Sup (Burton et al., 2011; Deschryver & Charlier, 2012; M. Lebrun et al., 2014; Peraya et al., 2012) et dans d’autres productions scientifiques. Voici comment elles se déclinent.

3.1.1.1 La dimension de l’articulation d’activités distancielles et présentielles (D1)

L’articulation de phases distancielles et présentielles de formation constitue les premiers pas de l’hybridation, surtout pour les systèmes présentiels de formation. Elle repose sur deux composantes relatives à la proposition d’activités collaboratives en présence (comp1) et à la proposition d’activités collaboratives à distance (comp2). Cette première dimension consiste en la programmation d’activités présentielles et distancielles, selon des

modalités bien réfléchies par l’enseignant-concepteur de cours. « (Elle) est caractérisée par le temps accordé à l’un et l’autre mode, à leur répartition ainsi qu’au type d’activités prévues et scénarisées par l’enseignant dans chacune des phases » (Burton et al., 2011, p. 73). Les choix de l’enseignant, concernant particulièrement cette dimension, sont souvent assez révélateurs du statut qu’il accorde aux connaissances, du rôle qu’il accorde aux apprenants et aux tuteurs (Ibid.). Selon ces mêmes auteurs, la spatialisation des activités (présentielles et distancielles) de formation et leur hybridation révèlent surtout la vision que le concepteur de cours a d’un apprentissage efficace.

3.1.1.2 La dimension de médiatisation (D2)

La médiatisation concerne essentiellement les outils technologiques choisis et aménagés par l’enseignant dans l’environnement technopédagogique, ainsi que les usages qui en sont faits (Burton et al., 2011; M. Lebrun et al., 2014). C’est la dimension qui compte le plus de composantes (six sur les quatorze qui constituent le cadre d’analyse). Ce qui traduit l’importance accordée par ces chercheurs de Hy-Sup à la préparation des phases de formation, particulièrement celles distancielles, et de leur scénarisation.

L’avènement de la quatrième génération de FAD, enclenchée au milieu des années 1990 et marquée par l’internet, a particulièrement contribué au développement de programmes d’apprentissage délivrés de manière électronique (B. Charlier et al., 2006; Julien, 2015; Power, 2002). À travers cette forme particulière de FAD désignée de l’expression enseignement en ligne ou e-learning (Moore & Kearsley, 2012, p. 307), la médiatisation du processus d’enseignement acquiert un niveau de perfectionnement sans cesse renouvelé grâce à des technologies de plus en plus perfectionnées, qui permettent une forte articulation de la distance et de la présence (Jacquinot-Delaunay, 2010; Moore & Kearsley, 2012; Waks, 2016). L’impact d’internet en FAD se mesure surtout par la généralisation des environnements numériques d’apprentissage (ENA), qui sont des dispositifs ou plateformes techniques et pédagogiques (Albero, 2010; Audet, 2012; Ernst, 2008; Julien, 2015; Linard, 1990; Waks, 2016). Grâce à ces dispositifs comme WebCT, BlackBoard, Lotus LearningSpace, DesireToLearn, ThéoriX, etc. (Power, 2002), apparaissent de nouvelles modalités d’enseignement/apprentissage et d’encadrement des étudiants.

On parle ainsi de formation synchrone, quand les moyens de communication utilisés permettent une formation et un encadrement en temps réel (Glikman, 2002; Moore & Kearsley, 2012; Waks, 2016). Le cours prend la forme de classe virtuelle où, en dépit de la distance, enseignants et étudiants peuvent se voir et échanger (Moore & Kearsley, 2012; Power, 2002; Waks, 2016). Les médias les plus couramment utilisés sont l’imprimé, l’audiovisuel ou l’informatique (avec le plus souvent des présentations assistées par ordinateur, un tutoriel ou un didacticiel en Flash ou en Director (Power, 2002). Cette modalité synchrone, qui imite la classe traditionnelle,

souvent pratiquée dans des universités bimodales qui optent pour la présence dans la distance entre enseignants et étudiants (Peraya, 2014a; Power, 2002). À l’inverse, par la communication asynchrone, l’enseignement en ligne met les ressources didactiques à la disposition de l’étudiant, avec une grande flexibilité dans ses apprentissages (Laferrière & Breuleux, 2002; Moore & Kearsley, 2012; Waks, 2016). Ces auteurs attribuent différentes commodités aux technologies de communication asynchrone dont le forum de discussion, qui permet d’amples interactions au cours des apprentissages.

En même temps qu’ils sont investis dans les activités présentielles de formation (Julien & Gosselin, 2016), les technologies de la communication et l’internet ont accéléré l’avènement des formations hybrides (revoir plus haut), permettant ainsi de repenser profondément la gestion du temps en classe et de diversifier les modalités d’enseignement et d’apprentissage. À côté de la formule hybride classique, celle comodale, encore dite hybride flexible (HyFlex) est de plus en plus émergente, en raison des options de participation plus flexible permises par la technologie, dépendamment de la disponibilité et des préférences hebdomadaires de l’apprenant (Beatty, 2007; Gobeil-Proulx, 2019). Sa mise en œuvre à l’Université Laval se résume ainsi : « Système de formation où coexistent de façon simultanée les modes de formation en présentiel et à distance, ce qui permet à l’étudiant de choisir sur une base hebdomadaire le mode de diffusion qui lui convient, en fonction de ses besoins ou de ses préférences » (2016b).

3.1.1.3 La dimension de médiation (D3)

La médiation de la relation pédagogique, s’intéresse à la transformation que le dispositif produit sur l’étudiant. Elle se mesure par la rencontre des effets escomptés des usages des outils technologiques avec les effets effectivement observés chez les étudiants ou ressentis par eux (Peraya et al., 2012). Cette troisième dimension de la médiation repose sur une composante unique (comp 9), qui mesure jusqu’à quel niveau le dispositif de formation vise à faire collaborer les apprenants, à communiquer et à mieux se connaitre. Véhiculée par les outils technologiques, particulièrement ceux de communication, cette troisième dimension traduit jusqu’à quel niveau le dispositif réussit ou non à atténuer l’absence des formateurs (enseignant et tuteur), en tant que médiateurs du savoir, mais surtout l’absence physique et sociale des autres apprenants et celle de l’organisation éducative responsable de la formation (Jacquinot, 1993; Linard, 1998).

La médiatisation et le type de communication mis au service de la médiation illustrent aussi l’orientation pédagogique incarnée par le dispositif (Garrison & Shale, 1987). Une pratique d’enseignement médiatrice privilégie le paradigme de l’apprentissage (Dupont-Plamondon & Portelance, 2015), qui accorde particulièrement l’attention à l’apprenant, désormais entièrement impliqué dans la construction et l’évaluation de son savoir (Brossard, 2005). Mieux que le cognitivisme et le constructivisme, la médiation vise le socio- constructivisme qui s’appuie sur des principes de construction collective des connaissances (Barth, 2013;

Legendre, 2007; Lenoir, 2009), un peu comme le connectivisme dont le but est d'amener les gens à échanger des idées et à créer une communauté d'apprentissage connectée (Waks, 2016). Adapté à des apprenants disposant d’outils cognitifs très avancés, indispensables pour l’apprentissage en profondeur et la déconstruction/reconstruction du savoir (Barth, 2013), le dispositif de cours d’un enseignant médiateur est conçu selon les méthodes de la pédagogie de la découverte (Lenoir, 2009). C’est ainsi grâce à une planification rigoureuse, comparable à de l’intervention éducative (Dupont-Plamondon & Portelance, 2015), fondée sur les meilleures stratégies psychopédagogiques et didactiques susceptibles de susciter la collaboration entre les étudiants, que ces derniers construisent leurs savoirs verbalement (par le discours) et socialement (par l’interaction) (Tardif & Lessard, 1999).

3.1.1.4 La dimension de l’accompagnement (D4)

Selon le cadre de Hy-Sup, l’accompagnement humain (D4) fourni par le dispositif mesure trois fonctions formulées en trois composantes : développer les compétences cognitives et méthodologiques de l’étudiant pour la construction des connaissances (comp10) ; développer ses compétences métacognitives par lesquelles il adoptera une démarche réflexive sur ses apprentissages (comp11) ; soutenir son engagement affectif par la présence sociale et le soutien entre pairs (comp12) (Deschryver & Charlier, 2012). Aussi appelée encadrement, cette quatrième dimension du cadre de Hy-Sup englobe, d’une certaine manière, les principales modalités favorables à une bonne expérience d’apprentissage à distance comme la présence, la proximité, le soutien, l’aide, etc. fournis par l’institution de formation à son étudiant par le biais d’un personnel dédié (Gérin-Lajoie, 2019). C’est en raison de ses effets directs sur l’étudiant que l’accompagnement ou l’encadrement est jugé « incontournable » dans les systèmes de FAD et d’enseignement en ligne (Gérin-Lajoie, 2019).

Montrant que cette dimension des dispositifs de FAD peut s’étendre à différents niveaux du système de FAD (institutionnel, programme de formation, ou cours), ce dernier auteur fait une intéressante synthèse des fonctions qui sont généralement attribuées à l’accompagnement offert dans le cadre du cours, qu’il nomme « encadrement pédagogique (Gérin-Lajoie, 2019). Il distingue d’abord l’encadrement cognitif de l’encadrement méthodologique, contrairement à Hy-Sup qui les associe : le premier concerne le traitement des informations liées au contenu de cours et à l’atteinte des objectifs d’apprentissage, tandis que le second fournit à l’étudiant des méthodes performantes de travail et de réalisation de ses tâches, en termes de communication, de gestion du temps, de rédaction, synthèse de connaissances, etc. L’encadrement métacognitif, quant à lui, concernant « les méta connaissances ou la gestion consciente des tâches cognitives », permet à l’étudiant de porter régulièrement une réflexion sur ses stratégies et mécanismes de construction du savoir, afin de les renforcer ou réajuster. L’encadrement motivationnel est celui par lequel l’accompagnateur encourage l’apprenant à persévérer et à réaliser son projet de formation. L’encadrement socio-affectif, enfin, est celui qui permet à

l’accompagnateur de porter son attention aux émotions, sentiments et relations des apprenants, et d’intervenir dans ce sens.

Différents termes sont aussi utilisés dans la littérature pour désigner le personnel spécifique assigné aux fonctions d’accompagnement de l’étudiant à distance : il est tuteur, animateur, instructeur, intermédiaire, conseiller, mentor, télécatalyste, facilitateur, modérateur, accompagnateur, coach, télé-tuteur, évaluateur (Docq et al., 2010; Glikman, 2011; Henri & Kaye, 1985b; Rodet, 2016). Pour Viviane Glikman en particulier, les tâches du tuteur dépassent largement le cadre pédagogique :

Pivots des dispositifs de FAD, dont ils incarnent la dimension humaine et relationnelle, les tuteurs à distance (…) ont pour mission de gérer les interactions entre les apprenants et les savoirs, l’institution, les enseignants concepteurs des cours et de provoquer des échanges entre apprenants. Ils sont des médiateurs, des intermédiaires, des « passeurs », qui doivent être proches des apprenants tout en conservant la dissymétrie nécessaire à la relation pédagogique (Glikman, 2011, pp. 4-5).

Ainsi, dépendamment de la modalité de diffusion (asynchrone, synchrone, hybride, comodale) mise en place dans le dispositif, le tutorat peut prendre différentes formes. Bellier (2001) distingue à ce propos cinq modalités d’enseignement/apprentissage en ligne : le tout à distance sans intervention tutorale ; le tout à distance tutoré ; le mixte distance/présentiel avec autoformation à distance ; le mixte distance/présentiel avec compléments à distance ; et le travail collaboratif à distance. Mais quels que soient les niveaux de médiatisation et de médiation choisis par le dispositif, l’encadrement humain permet d’accroitre les possibilités d’interaction et les dimensions sociales de la relation pédagogique (Ernst, 2008; Paquelin, 2009), ainsi que la persévérance et le sentiment d’auto-efficacité de l’apprenant (Poellhuber et al., 2011).

3.1.1.5 La dimension de l’ouverture (D5)

Inspirée des travaux de Jézégou (2005, 2008, 2009), cette cinquième et dernière dimension du cadre de Hy- Sup se décline en deux composantes (les 13e et 14e) interrogeant respectivement le degré de liberté accordée

à l’apprenant et le recours à des ressources humaines et/ou matérielles externes (Peraya et al., 2012). « L’ouverture en formation renvoie à un ensemble de dispositifs flexibles et autonomisants dont la principale propriété est d’ouvrir à l’apprenant des libertés de choix, afin qu’il puisse exercer un contrôle sur sa formation et sur ses apprentissages » (Jézégou, 2005, p. 103). C’est en cela que l’ouverture des dispositifs est associée à un ensemble d’attitudes et de comportements étudiants (le contrôle et l’autodétermination) propices à un apprentissage en profondeur (Jézégou, 2008). Mais selon cette auteure, les libertés de choix de ses modalités d’apprentissage, voire d’évaluation, doivent être assez ancrées dans la configuration du dispositif pour que l’étudiant puisse les exercer, en mettant en œuvre son contrôle sur ses activités et son autodétermination (Jézégou, 2005, 2008).

Plus largement, les notions d’ouverture et de liberté sont souvent utilisées comme des synonymes. Se référant souvent à la Formation ouverte et à distance (FOAD), elle traduisent toujours l’accessibilité des formations autant en termes de conditions administratives et de flexibilité dans le choix de l’itinéraire, qu’en termes de liberté de choix des ressources éducatives selon ses propres intérêts (Glikman, 2002). Ces deux notions incluent aussi des libertés de choix de la durée, du lieu, du rythme de la formation, … comme pour le « flexible learning » qui est défini par Van Den Brande : « Flexible learning is enabling learners to learn when they want (…), how they want (…), and what they want (…). In such courses the learners can choose where they want to learn (…) »24 (Keegan, 1997, p. 27).

Ainsi donc, le niveau d’ouverture d’un dispositif est assez révélateur d’un ensemble de principes caractéristiques du type de dispositif :

 le type d’enseignement à distance mis en place, par l’association, ou non, de modalités distancielle et présentielle ;

 l’orientation pédagogique basée sur l’apprenant ou sur le contenu, grâce à l’autoformation individuelle, l’apprentissage coopératif, l’apprentissage organisationnel, le tutorat, etc., par exemples ;

 l’utilisation de technologies diverses de communication à distance et d’internet pour véhiculer la formation (Collectif de Chasseneuil, 2000; D'Halluin & Loonis, 1999; Glikman, 2002).