• Aucun résultat trouvé

2. Les origines de l’Emblematum liber et les principales

2.1. La genèse de l’Emblematum liber et l’édition

Dans une lettre adressée à son ami Francesco Calvo en 1531, André Alciat se plaint de l’audace de son ancien élève et ami, le juriste bâlois Boniface Amerbach, qui, lors de son séjour à Avignon, aurait copié un certain nombre de ses traductions de l’Anthologie grecque,40 des exercices de jeunesse,41 pour les confier à l’imprimeur bâlois Johannes Bebel,42 sans même l’avoir consulté.43 Il prétend craindre que certaines de ses œuvres, composées alors qu’il était encore « enfant », puissent nuire à sa réputation :

quo tempore operam mihi Bonifacius Amorbacchius Avenione dabat – agitur, opinor, octavus annus – excerpserat ex autographis meis illa omnia, quae deinde ut Bebellii officinam adiuvaret, ei imprimenda communicavit idque me inconsulto. tuli id non satis aequo animo ; quod pleraque in eis erant a me tum puero edita, quae famae nocere potuissent […]44

Ces poèmes désignent probablement ceux qui furent intégrés dans la collection de Janus Cornarius, publiée par J. Bebel en 1529, à Bâle.45 E. Klecker jette une lumière nouvelle sur cette 40 Selon hutton, Greek Anthology, p. 196 note 2, B. Amerbach aurait copié ses épigrammes à partir d’un manuscrit d’Alciat, conservé dans la bibliothèque des marquis Visconti à Milan et intitulé Epigrammatum

libri V.

41 alCiatus, Le lettere, n° 47,22-23 nempe pleraque ab adolescente

com-posita, cum sub ferula adhuc eram.

42 Sur sa vie, voir bietenholz P. G., « Johann Bebel » dans

Contempora-ries of Erasmus 1, pp. 112-113.

43 hutton, Greek Anthology, p. 197. 44 alCiatus, Le lettere, n° 58,9-14. 45 Voir introduction pp. 16 et 57.

lettre.46 Compte tenu de l’intense échange épistolaire avec Bo-niface Amerbach, Alciat était parfaitement informé et semble même avoir suivi de près la publication de ses épigrammes au-près de J. Bebel.47 Ainsi, lorsqu’il affirme que les épigrammes ont été imprimées me inconsulto, il aurait déformé la réalité, volontairement instauré une distanciation, afin de convaincre son correspondant F. Calvo de produire une nouvelle édition améliorée de ses épigrammes traduites de l’Anthologie grecque. Celles-ci constitueraient le noyau originel des Emblemata, puisque plusieurs de ces épigrammes ont été ultérieurement transformées en emblèmes.

À l’instar de cette lettre, plusieurs témoignages épistolaires pour-raient permettre de reconstituer la genèse du nouveau genre lit-téraire de l’emblème. Leur interprétation soulève toutefois des questions controversées, du fait même de la subjectivité de leur auteur. Comme l’a bien démontré E. Klecker, il est essentiel de tenir compte de ces lettres, sans toutefois leur accorder un crédit démesuré, car elles témoignent des tentatives d’André Alciat de contrôler la réception de ses œuvres.48 Plusieurs spécialistes de l’emblème se sont plongés dans la correspondance d’Alciat, afin d’y glaner des indices sur les origines du Livre d’emblèmes.49

Dans une lettre du 10 mai 1523, adressée à Boniface Amer-bach, Alciat affirme lui avoir envoyé un échantillon de deux pages d’emblemata :

46 kleCker, « Des signes muets aux emblèmes chanteurs », pp. 26-27. 47 Voir par exemple alCiatus, Le lettere, n° 47,6-34 où il confie à

B. Amerbach le soin de l’édition de ses épigrammes et lui fournit une liste de corrections. De même aussi, alCiatus, Le lettere, n° 48,28-30 et n° 49,51-61. Plus tard, dans une lettre du 3 août 1530 (alCiatus,

Le lettere, n° 61), après la publication des Selecta epigrammata, il fait

parvenir à son correspondant bâlois, une liste d’errata, en vue d’une nouvelle édition, pour laquelle il a déjà préparé des additions.

48 kleCker, « Des signes muets aux emblèmes chanteurs », pp. 24-29, en particulier p. 27.

49 sCholz, « The 1531 Augsburg Edition », pp. 213-254 présente un bilan des précédentes recherches fondées sur les différentes « pièces à convic-tion », lettres, préfaces des édiconvic-tions, etc.

eduntur apud nos et Emblemata, quorum duo folia ad te mitto gustus causa ; carminis auctor est Albutius, inventionis Ambrosius Vicecomes ex primariis patritiis. eius argumenti et ipse libellum carmine compo-sui, sed res meas cum alienis miscere nolui : divulgabitur inter caetera nostra epigrammata.50

Ces quelques lignes suscitent de nombreuses interrogations et donnent lieu à diverses interprétations. Alciat semble y évoquer non seulement ses propres œuvres (libellum carmine composui), mais parle aussi de deux autres « pères » ou créateurs des em-blèmes : Ambrogio Visconti, un patricien milanais,51 déjà cité dans une lettre du 9 janvier 1523 à Francesco Calvo52 comme le dédicataire du recueil d’épigrammes intitulé Emblemata et Aurelio Albuzio, ce dernier étant connu comme le pseudonyme littéraire d’André Alciat.53 La formule eduntur apud nos et

Em-blemata et d’autres indices ont conduit H. Homann à affirmer

qu’Alciat avait déjà remis à H. Steyner son manuscrit d’em-blèmes dans les années 1520 et qu’il n’aurait finalement été im-primé qu’une dizaine d’années plus tard, en 1531. Un retard si important n’est certes pas inhabituel à cette époque et pourrait s’expliquer par diverses raisons, peut-être le temps de l’exécu-tion des gravures par l’artiste ou par la situal’exécu-tion personnelle et

50 alCiatus, Le lettere, n° 32,14-18 « Les Emblèmes dont je t’envoie, comme avant-goût, deux feuillets sont connus du public chez nous ; l’auteur des poèmes est Albuzio et l’invention revient au patricien Am-brogio Visconti. J’ai moi-même composé un petit livre de poèmes sur ce sujet, mais je n’ai pas voulu le mêler aux productions d’autrui : il sera publié parmi mes autres épigrammes. »

51 Barni (alCiatus, Le lettere, n° 24 note 3, p. 46) dénombre au moins sept Ambrogio Visconti à Milan durant cette période. Il estime cependant qu’il pourrait s’agir d’un certain Giovanni Ambrogio Visconti di An-tonio, notaire et collègue de travail d’André Alciat, actif à Milan entre 1503 et 1524. Voir aussi à ce propos, homann, Studien, pp. 32-33. 52 alCiatus, Le lettere, n° 24,28-30 his saturnalibus, ut illustri Ambrosio

Vicecomiti morem gererem, libellum composui epigrammaton, cui ti-tulum feci Emblemata […]. Voir aussi ci-dessous note 77.

financière de l’imprimeur H. Steyner.54 Quand Alciat dit apud

nos, il pense sans doute à Milan, mais le verbe eduntur, qui a

conduit un H. Green à supposer l’existence d’une toute première édition milanaise en 1522,55 ne renvoie pas forcément à une édi-tion imprimée, mais peut simplement indiquer que ces premiers emblèmes étaient connus du public, sous quelque forme que ce soit. Alciat affirme que le recueil de poèmes serait l’œuvre d’Albuzio, tandis que l’inventio, c’est-à-dire dans le sens rhéto-rique l’« idée », émanerait d’Ambrogio Visconti. Alciat prétend avoir envoyé à Boniface Amerbach un échantillon des œuvres56

d’Albuzio et non des siennes. Son propre libellus s’inspirerait cependant des créations de ses deux amis (eius argumenti). Il réserve ses propres poèmes « qu’il n’a pas voulu mêler aux pro-ductions d’autrui », pour une publication ultérieure, en même temps que « d’autres épigrammes » de sa composition. Là en-core surgissent de nouvelles difficultés. Le libellum désigne-t-il déjà la collection d’emblèmes confiée à l’éditeur augsbourgeois H. Steyner ? Les Emblemata étaient-ils déjà accompagnés de

picturae ? Alciat n’en fait pourtant aucune mention explicite et

dans sa réponse, Boniface Amerbach confirme qu’il s’agissait

54 homann, Studien, pp. 32-35 et 37-38 ; SCholz, « The 1531 Augsburg Edition », p. 235. saCk, Glauben im Zeitalter, pp. 126-149 suggère que H. Steyner, qui commença son activité en 1522, aurait racheté, après la faillite, le matériel de l’éditeur Grimm et que, parmi les manuscrits en attente, se trouvait peut-être celui d’Alciat. Voir de même bässler, Die

Umkehrung der Ekphrasis, p. 16. La reconstitution de l’histoire du

ma-nuscrit des Emblemata reste toutefois une hypothèse reposant sur une analogie, voir le point de vue critique de sCholz, « The 1531 Augsburg Edition », pp. 243-249.

55 En dépit des recherches de Green, Andrea Alciati, p. 115, nulle biblio-thèque n’a encore livré au jour une édition milanaise de 1522. Celui-ci présumait l’existence de cette édition antérieure à 1531, en se fondant sur la lettre d’Alciat à F. Calvo du 9 janvier 1523, évoquant au temps du passé un petit livre d’épigrammes de sa composition, intitulé

Emblema-ta. Voir aussi sCholz, « The 1531 Augsburg Edition », pp. 220-221.

56 Précisément duo folia, mais combien d’emblèmes contenaient-elles, un,

uniquement de poèmes.57 Quel est le sujet de divulgabitur ? Est-ce le libellum carmine d’Alciat lui-même ou les Emblemata d’Al-butius ?58 Ou bien faut-il supposer qu’Albuzio et Alciat ne font qu’un et qu’Amberbach « trouve évident qu’Alciat se désigne lui-même sous le pseudonyme d’Albutius. »59 En tout cas, sous le nom de eius argumenti libellum carmine composui, il devait songer à ses propres emblèmes,60 qu’il s’agisse déjà de la collec-tion imprimée par H. Steyner ou seulement d’un prototype en-core incomplet. Lorsqu’il se propose de diffuser ces Emblemata « parmi toutes ses autres épigrammes », il ne distingue pas les

Emblemata de ses autres épigrammes et souhaite les éditer dans

un livre, qui ne semble pas être accompagné d’illustrations.61

Ainsi, au-delà des difficultés d’interprétation, il ressort de cette lettre que l’idée de composer les Emblèmes avait déjà germé dans l’esprit d’Alciat au début des années 1520, sans doute stimulé par deux de ses amis, A. Visconti et A. Albuzio. En 1523, il en avait 57 Die Amerbachkorrespondenz II, n° 925,46-48 pro Emblematis habeo

gratiam. carmina sunt, etiam si ab inventionis acumine discesseris, eruditum illud Albutii ingenium ad assem expriementia. À propos de

la lettre voir bässler, Die Umkehrung der Ekphrasis, p. 13.

58 bässler, Die Umkehrung der Ekphrasis, p. 14 rend attentif à ce pro-blème d’interprétation.

59 kleCker, « Des signes muets aux emblèmes chanteurs », p. 24 note 8 ; Woods Callahan, « Andreas Alciatus and Boniface Amerbach », p. 197. De fait, la formulation d’Amerbach dans la lettre où il accuse réception des Emblemata (voir ci-dessus note 57), laisse supposer qu’ il sait fort bien que les Emblemata sont l’œuvre d’Alciat lui-même, puisqu’ils tra-hissent, de façon évidente, son talent et son érudition. Il conclut cette allusion aux Emblèmes, en disant, toujours sur le même ton ironique, et en adressant un sourire de connivence à son ami : commendare me

homini multis nominibus non gravabere. Voir aussi ci-dessus, le cas de

la Defensio, publiée par les soins de B. Amerbach, sous le nom d’Albuzio (introduction pp. 7-8 et notes 27 et 28).

60 Dans un passage du traité De verborum significatione (p. 177), Alciat confirme, sans équivoque, l’équivalence entre ce libellum carmine et les Emblemata : nos carmine libellum composuimus, cui titulus est,

Emblemata.

61 Voir les conclusions de kleCker, « Des signes muets aux emblèmes chanteurs », p. 25.

déjà réuni un certain nombre dans un petit livret qui n’a toutefois pas pu être édité immédiatement. Son projet ne se concrétisera sous la forme d’un livre imprimé qu’en 1531. Une bonne par-tie des poèmes contenus dans l’Emblematum liber de 1531 se trouvent déjà imprimés en 1529, mais sous une forme différente. En effet, les « premières » éditions des Emblèmes d’Alciat, la col-lection de Johannes Soter de 1528,62 puis les Selecta

epigramma-ta de Janus Cornarius, en 1529,63 ne portent pas encore ce titre et les épigrammes n’y sont accompagnées ni des inscriptiones, ni des picturae. Elles servent d’ébauche, pour ainsi dire, à ce qui deviendra l’Emblematum liber, publié pour la première fois à Augsbourg,64 en 1531, par Heinrich Steyner, en deux éditions, l’une datant du 28 février, l’autre du 6 avril.65

Les éditions augsbourgeoises contiennent 104 emblèmes, dont seuls 97 sont illustrés par des gravures, attribuées à Jörg Breu, selon les modèles du peintre Hans Schäufelein, élève d’Albrecht Dürer. Ces images revêtent un caractère entièrement original et se distinguent nettement de celles des éditions postérieures, par la facture quelque peu grossière et le traitement très simple des sujets. Il semble que l’éditeur lui-même ait pris l’initiative d’ajouter ces illustrations afin de faciliter la compréhension des

62 Epigrammata græca veterum elegantissima eademque latina, Cologne, J. Soter, 1528.

63 Selecta epigrammata graeca latine versa ex septem epigrammatum

graecorum libris, Bâle, J. Cornarius chez J. Bebel, 1529.

64 köhler, « Warum erschien der Emblematum liber », pp. 19-33, expose les motifs qui auraient pu conduire à la publication des Emblèmes à Augsbourg, plutôt qu’à Bâle, notamment l’arrivée de la Réforme dans la cité rhénane et des inimitiés entre C. Peutinger, le dédicataire des

Emblemata, et le réformateur Oecolampade. Or, ces arguments ne sont

pertinents que si l’on admet qu’Alciat a gardé en sa possession le ma-nuscrit des Emblemata jusqu’à la fin de l’année 1530, voir le point de vue critique de sCholz, « The 1531 Augsburg Edition », pp. 240-243. 65 Ces deux éditions sont suivies par une troisième édition en 1534, la

même année que la première publication des Emblemata chez Chrétien Wechel à Paris.

épigrammes.66 Ce point de vue est toutefois contesté, car cer-tains spécialistes de l’emblème estiment qu’Alciat aurait fourni un manuscrit illustré, du moins partiellement, ou contenant des indications en vue de réaliser des gravures correspondantes.67

La fréquence des erreurs dans les picturae de cette première édition pourrait aisément étayer l’hypothèse qu’Alciat n’a pas participé au choix des illustrations, si toutefois les gravures de la première édition « autorisée », celle de Paris de 1534, ne ren-fermaient pas autant d’erreurs, sinon plus, que la précédente.68

Le texte de ces éditions contient de nombreuses erreurs, dues peut-être à une mauvaise lecture du manuscrit, et la liste des 13 errata, ajoutée à la première édition de février 1531, est bien loin de suffire à corriger toutes les bévues. La ponctuation est discontinue et, souvent, les points d’interrogation sont omis. L’éditeur d’Augsbourg ne se soucie guère de réunir sur une même page les trois parties de l’emblème, comme s’il n’avait pas encore pris conscience du lien entre texte et image. De même que dans les anthologies d’épigrammes, les emblèmes se suc-cèdent sans respecter un quelconque classement. Comme ces éditions sont dédiées au juriste et humaniste allemand Conrad Peutinger, il est possible que celui-ci ait poussé Steyner à pu-blier les Emblemata, même sans l’assentiment d’Alciat.69 Et de fait, si depuis les deux lettres de 1523, Alciat n’évoque plus ses 66 miedema, « The Term Emblema », pp. 243-244 ; balaVoine, « Sens et

contresens », p. 52.

67 homann, Studien, pp. 35-37.

68 tunG, « Seeing is Bealiving », pp. 379-404 répertorie toutes les incohé-rences et les erreurs des picturae par rapport aux subscriptiones, dans les différentes séries de gravures, en particulier pp. 383-384 pour le décompte. Or, l’édition de 1531 n’est pas la plus fautive au point de vue des picturae et observe en certaines occasions une plus grande fidélité au texte que les gravures ultérieures (pp. 386-387). Voir aussi kleCker, « Des signes muets aux emblèmes chanteurs », pp. 34-35, qui cite en exemple les Embl. 20 Maturandum et 144 Princeps subditorum

inco-lumitatem procurans (commentaire pp. 173-174 et 572).

69 Voir le point de vue récent de kleCker, « des signes muets aux em-blèmes chanteurs », pp. 27-29 qui remet en doute cette affirmation, en s’appuyant sur une relecture de la correspondance d’Alciat.

Emblèmes jusqu’en 1532, lorsqu’il les mentionne à nouveau,

c’est pour témoigner de sa déception devant l’édition de 1531, en raison de corruptions du texte et des erreurs des picturae. En effet, dans une lettre à Viglius van Zwichum, il rapporte avoir fait parvenir à l’éditeur augsbourgeois une liste d’errata, par l’entremise de Francesco Rupilio et de Claudius Peutinger, le fils de Conrad. Il exprime son insatisfaction, avec un certain humour :

ut postquam Promethei esse non potuimus, Epimethei saltem fieremus et sapere denique videremur.70

Cette remarque suggère qu’il aurait été contraint de corriger après coup. Or, devant les défauts criants de cette édition augs-bourgeoise, il aurait parfaitement été à propos de mentionner ici le fait qu’elle était parue sans son consentement, ce qu’il ne fait pas. Bien plus, quelques mois auparavant, le 24 mars 1532,71 dans une lettre à l’éminent juriste Emilio Ferretti, il défend son Emblematum liber contre les critiques des envieux, qui ne visent pas l’édition de H. Steyner, mais l’idée même des poèmes. Il admet la « sottise des images » et « le texte cor-rompu des poèmes »,72 qui rendent nécessaire une révision. Or, malgré toutes ces imperfections, Alciat estime avoir atteint, grâce à ce livre, la gloire du poète et gagné l’estime des lettrés. E. Klecker se demande donc à juste titre, si un auteur « au dé-triment duquel on a mal imprimé et sans l’avertir, une œuvre de jeunesse égarée »73 aurait réagi ainsi ? Après l’édition pa-risienne de C. Wechel en 1534, une autre lettre du 25 février 1535, adressée à l’illustre humaniste Pietro Bembo, dénote en-core son mécontentement précédent, lorsqu’il parle d’une édi-tion d’Augsbourg corrompue « au point qu’il n’eût pas voulu 70 alCiatus, Le lettere, n° 80,24-30, ici 27-28.

71 drysdall, « The Emblems in Two Unnoticed items », pp. 383-384 cite cette lettre.

72 drysdall, « The Emblems in Two Unnoticed items », pp. 383 […] sive

ineptias picturarum, sive corruptiones carminum inspiciamus, cogor manum operi admovere […].

la reconnaître comme son enfant ».74 Il la présente comme une œuvre de jeunesse qui aurait échappé à son contrôle et été pu-bliée par hasard à Augsbourg, avec quantité de fautes.75 Face à tous ces témoignages épistolaires, il convient d’observer une certaine prudence, puisqu’Alciat s’exprime différemment selon le statut de ses correspondants. Après avoir présenté sous le regard du lecteur les différentes pièces à conviction, nous lais-serons en suspens les questions qui font débat depuis longue date et dont dépend l’existence du nouveau genre de l’emblème. L’édition de H. Steyner est-elle parue avec ou sans le consente-ment de l’auteur ? Alciat a-t-il prévu ou non l’accompagneconsente-ment de ses poèmes par des images ?