• Aucun résultat trouvé

SECTION I. Les liens nécessaires entre droit des procédures collectives et tribunal de commerce

A. L’institution du tribunal de commerce

29. Faisant l’objet de nombreuses critiques (1), le législateur est revenu sur une ancienne

pratique en instituant les tribunaux de commerce spécialisés (2).

1. Un tribunal de commerce contesté

30. Raison d’être des tribunaux de commerce et abandon des projets de réforme. Si

les tribunaux de commerce ont traversé le temps et notamment la Révolution française, c’est sans doute que leur organisation était conforme au nouvel idéal démocratique. Leur existence a été justifiée par le fait qu’il existe des usages de commerce qu’un magistrat professionnel ne peut connaître aussi bien qu’un commerçant149. Cette justification théorique bien que très insuffisante, reflète parfaitement une froide réalité budgétaire : la France ne peut créer le nombre de postes de magistrats de carrière nécessaires pour remplacer les trois mille deux cents juges consulaires bénévoles. A plusieurs reprises, des projets de réforme ont été dessinés, mais tous ont été abandonnés. Un rapport d’information n°1006 dit Untermaier, déposé à l’Assemblée nationale le 24 avril 2013150, a fait de nombreuses propositions bien souvent non suivies d’effet, tout au plus le législateur s’est-il contenté de rapatrier l’ensemble des textes concernant l’organisation judiciaire commerciale dans le seul code de commerce151, faisant preuve de simplification.

31. Règles d’institution du tribunal de commerce. Défini par l’article L.721-1 alinéa 1er

du code de commerce, le tribunal de commerce est une juridiction du premier degré composée de juges élus et d’un greffier. Leur nombre et le siège de ces tribunaux est fixé par décret en Conseil d’État, conformément aux dispositions des articles R.721-1 et R.721-2 du même code. Il est dénombré aujourd’hui environ trois mille deux cents juges consulaires. Le ressort du tribunal de commerce est assez variable en raison des besoins locaux et ne correspond pas toujours à une circonscription administrative. Il comprend assez classiquement et comme toute juridiction, un Président, un vice-Président, des Présidents de chambre et des juges. Les magistrats sont assistés

149 Aucun changement notable n’est intervenu depuis la réforme judiciaire de l’ordonnance n°58-1270 du 2 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

150 Rapport d’information n°1006 du 24 avril 2013 déposé par la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et

de l’administration générale de la République, en conclusion des travaux d’une mission d’information sur le rôle de la justice en matière commerciale, et présenté par Mme C. UNTERMAIER et M. M. BONNOT, députés.

38

par un greffier, officier ministériel. Les fonctions de juge consulaire étant bénévoles152, cet intérêt budgétaire non négligeable pour l’État a permis d’annihiler toute tentative de les supprimer. En dépit de l’importance du régime décrit, il existe un certain nombre de situations pour lesquelles le règlement des litiges commerciaux est soumis à des dispositions particulières. S’il n’existe pas de tribunal de commerce dans la circonscription, c’est le tribunal de grande instance qui sera compétent pour l’ensemble du contentieux commercial153. Il existe à titre dérogatoire un régime spécial existe concernant les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Dans ces départements, la tradition a été conservée après la guerre de 1914 – 1918 de maintenir le régime d’échevinage préexistant. Les affaires sont portées devant la chambre commerciale du tribunal de grande instance, présidée par un magistrat de ce tribunal siégeant avec deux assesseurs élus. Il existait en 2016 sept tribunaux fonctionnant selon ce système154, ainsi que le jugement des affaires commerciales dans les départements d’Outre-Mer ou DROM155, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie, et environ une dizaine de tribunaux mixtes de commerce composés chacun d’un magistrat du tribunal de grande instance, président, et de trois juges élus ou désignés dans les conditions fixées par l’article L.732-7 du code de commerce.

32. Création d’un organe consultatif en 2005 : le conseil national des tribunaux de commerce156. Présidé par le garde des Sceaux, cet organisme a pour mission de s’exprimer sur les besoins et les modalités de la formation des juges consulaires en liaison avec l’École Nationale de la Magistrature, de participer à la définition d’un ensemble de principes éthiques et déontologiques avec la diffuions d’un guide pratique et de veiller à l’efficacité du fonctionnement des tribunaux de commerce157. Il peut à la demande des chefs de Cour d’appel ou avec leur accord, procéder à des visites d’information dans les tribunaux de commerce. Il rend compte de son activité au garde des Sceaux par un rapport annuel. Il se compose de vingt membres titulaires et suppléants, soit de droit, soit nommés suite à candidature. La moitié de ces membres est composée de juges consulaires.

152 Article L.722-16 du code de commerce.

153 Article L.721-1 du code de commerce.

154 Quatre pour la Cour d’appel de Colmar et trois pour celle de Metz.

155 A savoir : la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion.

156 Suivant décret n°2005-1201 du 23 septembre 2005.

39

2. Le retour aux tribunaux de commerce spécialisés

33. La « compétence de classe »158. La loi n°85-98 du 25 janvier 1985 avait institué une

« compétence de classe » pour réserver les procédures de redressement et liquidation judiciaires des affaires les plus importantes à certains tribunaux. Fondée sur la taille de l’entreprise, cette compétence originale alimentait un abondant contentieux en raison de l’ambiguïté des critères retenus. L’article 2 alinéa 3 de la loi de 1985 fixait les seuils cumulatifs suivants : cinquante salariés au plus ainsi qu’un chiffre d’affaires hors taxe de l’entreprise inférieur à vingt millions de francs159. Cette sélection opérée par le décret n°85-1387 du 27 décembre 1985 est destinée à réserver le traitement des entreprises importantes à certaines juridictions, le législateur a pris le parti d’établir une corrélation entre le type de procédure et la compétence160. La compétence de classe a présenté la particularité de répartir au sein même du contentieux, les affaires entre deux catégories de tribunaux. Certains auteurs161 ont qualifié la compétence de classe de règle de compétence d’attribution. Cependant, la compétence de classe a élargi la compétence territoriale des grands tribunaux de commerce au détriment de ceux de « seconde classe » ne pouvant pas connaître des procédures collectives des entreprises dépassant les seuils fixés par décret et ce, malgré le fait qu’elles auraient dû relever de leur ressort. D’autres auteurs162 y ont vu une nouvelle règle de compétence territoriale. M. O. Staes163 a répliqué que, fondée sur la taille de l’entreprise, elle constitue une règle de compétence d’attribution particulière qui, une fois la nature de la juridiction déterminée, sélectionne par la taille de l’entreprise la catégorie de juridiction compétente. Cette compétence spécifique des procédures collectives s’éloigne de la compétence territoriale et s’apparente à une « compétence mixte » dépassant les clivages de compétence du droit judiciaire privé. Cette compétence a dissocié les tribunaux de « première classe », habilités à connaître de la procédure générale et simplifiée, et ceux de « seconde classe » qui ne peuvent appliquer que la

158 Le législateur de 1985 n’a pas souhaité que la terminologie de « compétence de classe » ait une connotation péjorative, ne traduisant aucune hiérarchie juridictionnelle entre tribunaux, qui sont tous des juridictions de premier degré. V. CHAPUT (Y.) Droit du redressement et de la liquidation judiciaires des entreprises, n°58, p. 65.

159 Seuils fixés par le décret du n°85-1387 du 27 décembre 1985 dans son article 1er.

160 Il convient de préciser que l’article 7 alinéa 2 de la loi du 25 juillet 1985 réserve à certains tribunaux déterminés par décret en Conseil d’État la connaissance des procédures de redressements judiciaires applicables aux personnes autres que celles mentionnées à l’article 2 alinéa 3. De plus, la liste des tribunaux compétents pour connaître de la procédure générale, fixée par le décret n°85-1387 du 27 décembre 1985 et complétée par les décrets n°86-256 du 12 février 1986 et n°86-859 du 17 juillet 1986, a été étendue par le décret n°87-614 du 3 août 1987.

161 V. par exemple HÉRON (J.), Droit judiciaire privé, 1991, Montchrestien, n°810, p. 596 – SOINNE (B.), op.

cit, n°253, p. 194.

162 V. par exemple GUYON (Y.), op. cit, n°1141, p. 169 – PÉROCHON (F.), Entreprises en difficulté – Instruments

de crédit et de paiement, LGDJ, 1992, n°125, p. 75 – MARTIN-SERF (A.), « Redressement et liquidation judiciaires des

entreprises », J.-Cl. Sociétés, Fasc. 41-C, n°76.

40

procédure simplifiée, sauf à faire application de l’article 138 de la loi de 1985 une fois le redressement judiciaire prononcé164. Mais ces dispositions ont été vidées de leur portée suite au décret du 30 juillet 1999 qui a conduit le nombre de ces tribunaux à cent quatre-vingt-deux sur les cent quatre-vingt-onze tribunaux de commerce de l’époque165.

34. La spécialisation des tribunaux de commerce issue de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 dite « Loi Macron ». La loi n°2015-990 du 6 août 2015 a organisé la spécialisation d’un petit

nombre de tribunaux de commerce, leur conférant une compétence exclusive pour connaître des procédures collectives concernant les grandes entreprises. Le décret n°2016-217 du 16 février 2016, entré en vigueur le 1er mars 2016, a quant à lui fixé la liste des tribunaux de commerce spécialisés ainsi que leur ressort. Il a pu être considéré que le législateur a remis au goût du jour la « compétence de classe », abandonnée en 1999. Les seuils relatifs à l’entreprise sont désormais : l’entreprise doit comprendre un nombre de salarié égal ou supérieur à deux cent cinquante et le montant net du chiffre d’affaires doit être d’au moins de vingt millions d’euros ou le montant net du chiffre d’affaires de l’entreprise doit être d’au moins quarante millions d’euros et ce, indépendamment de son nombre de salariés. Si une société détient ou en contrôle une autre, au sens des articles L.233-1 et L.233-3 du code de commerce, les seuils indiqués sont appréciés au niveau du groupe. Le législateur s’est justifié d’un tel recours à un tribunal de commerce spécialisé en affirmant qu’une telle mesure « permettra de trouver plus rapidement et dans un plus grand nombre de cas des solutions pérennes pour la sauvegarde de l’emploi dans les entreprises concernées », concevant ainsi une approche plus « musclée » de la justice consulaire. Indirectement, c’est la compétence au premier sens du terme, voire l’impartialité, des petits tribunaux qui est remis en cause. Il s’agit de garantir l’indépendance et la neutralité des juges, dont la critique majoritaire retient qu’ils seraient trop souvent amenés à ouvrir et à traiter des procédures collectives à l’encontre de leurs concurrents, de leurs adversaires ou encore de leurs partenaires commerciaux, malgré les possibilités de récusation. Un certain éloignement entre les justiciables et les juges contribuerait selon le législateur à améliorer l’image d’impartialité de la justice des tribunaux de commerce. Cet éloignement est antinomique avec la fonction même de juge-commissaire basée sur la proximité entre le juge et les justiciables, lui permettant une célérité évidente dans la prise de décisions

164 Il est à préciser que seule fut discutée la compétence des tribunaux de seconde classe lorsqu’une entreprise ne dépassait qu’un seul des seuils fixés par le décret. Dans l’esprit du législateur, dès qu’une entreprise dépassait l’un des deux seuils, elle ne pouvait plus bénéficier de la procédure simplifiée réservée aux entreprises dépendant de l’article 2 alinéa 2 de la loi de 1985, relevant ainsi de la compétence des tribunaux de première classe.

165 Selon le décret du 27 décembre 1985, 96 tribunaux de commerce étaient compétents pour connaître des procédures collectives les plus importantes, le décret du 17 juillet 1986 a porté ce nombre à 103, le décret du 3 août 1987 à 186 (sur 227 tribunaux de commerce à l’époque).

41

déterminantes. La réforme appelle également une certaine professionnalisation des tribunaux de commerce. Le traitement des groupes de société a montré que les juges ne sont pas toujours en mesure d’aborder efficacement l’articulation des créances dans les montages financiers, le recours à des sûretés comme la fiducie, le traitement des dettes intra-groupes, ou encore la recherche de solutions globales. La configuration nouvelle des plans de cession ou de reprise interne et le traitement coordonné des mesures imposent une compétence et une réactivité que les « petits » tribunaux ne seraient pas en mesure d’offrir166. L’inconvénient majeur est ici qu’une telle réforme a mis en place un risque certain d’une justice à deux vitesses. Face à ce constat, force est de constater qu’une évolution de l’institution même du tribunal de commerce est nécessaire.

B. Plaidoyer pour la création d’un tribunal du contentieux économique 35. Afin de faire évoluer l’institution même du tribunal de commerce, il conviendra de

revenir dans un premier temps sur une évolution potentielle de sa compétence territoriale (1) avant d’envisager dans un second temps l’évolution matérielle dudit tribunal (2).

1. Pour une évolution de la compétence territoriale du tribunal de commerce

36. La compétence territoriale du tribunal de commerce. En principe, la compétence

territoriale définie par les articles 42 à 48 du code de procédure civile, reste celle du tribunal du lieu où demeure le défendeur. Le siège social de l’entreprise est le chef unique de compétence167. En cas de transfert du siège social en cours de procédure, il convient de se placer au jour de la saisine du tribunal pour apprécier la compétence territoriale.

37. Le « privilège de juridiction » ou l’article 47 du code de procédure civile.

L’application de la règle posée par l’article 47 du code de procédure civile168 est générale. Le « privilège de juridiction » permet à une partie de choisir une juridiction qui n'est pas normalement territorialement compétente. Il s'agit d'éviter que l'adversaire d'un professionnel familier d'une juridiction, ait le sentiment que celle-ci ne sera pas objective, et que le

166 VALLENS (J.-L.), « Vers une nouvelle réforme des tribunaux de commerce ? », D. 2014, 1264.

167 STAES (O.), Procédures collectives et Droit Judiciaire Privé, op. cit, n°48, p. 43.

168 Article 47 du code de procédure civile : « Lorsqu'un magistrat ou un auxiliaire de justice est partie à un litige qui relève de la compétence d'une juridiction dans le ressort de laquelle celui-ci exerce ses fonctions, le demandeur peut saisir une juridiction située dans un ressort limitrophe ».

42

professionnel subisse l'exposé de griefs personnels devant la juridiction devant laquelle il exerce169. Ainsi, soit le demandeur prend l'initiative de saisir directement une juridiction géographiquement limitrophe, soit devant la juridiction normalement compétente est demandé le renvoi devant une juridiction désignée par le demandeur au renvoi, également géographiquement limitrophe. L’article 47 du code de procédure civile a posé difficulté quant à sa juxtaposition avec l’élan doctrinal qui a érigé le juge-commissaire au rang de tribunal. En 2010170, la chambre commerciale de la Cour de cassation a repris une décision de principe du 28 octobre 2008171 où elle est venue affirmer qu’un auxiliaire de justice, en l’espèce un avocat, débiteur à la procédure, a la possibilité de demander le renvoi d’une demande devant une autre juridiction dans le cadre d’un contentieux de vérification du passif soumis au juge-commissaire. Les textes réglementaires ont consacré cette autonomie en posant le principe d’une compétence générale du tribunal de commerce, sauf s’agissant des « pouvoirs attribués en premier ressort au juge-commissaire »172 en soumettant la plupart des décisions de celui-ci soit à un recours devant le tribunal lui-même173, soit à un recours direct devant la Cour d’appel174, et en prescrivant au juge-commissaire de respecter lui-même des principes généraux du procès civil tel que le principe du contradictoire175. Dans un arrêt récent du 12 avril 2018176, la Cour de cassation a précisé que l’article 47 du code de procédure civile doit être invoqué dès que la cause du renvoi est connue, considérant que si en première instance il a été demandé le renvoi devant une juridiction limitrophe relevant de la même Cour d’appel, la partie a délibérément accepté en cause d’appel la compétence de ladite Cour et ne peut donc pas demander un second renvoi.

38. Mais des difficultés pratiques sont apparues dans le cadre de la délocalisation de la

procédure en cause. Le juge-commissaire saisi d’une telle contestation s’est retrouvé face à la question de savoir s’il devait renvoyer l’affaire devant un autre juge-commissaire d’un autre tribunal. En réalité, il a bien une compétence d’attribution mais n’a pas à proprement parler une compétence territoriale. Si l’on considère que le juge-commissaire est une juridiction autonome, cela permet de

169 CHAINAIS (C.), FERRAND (F.) et GUINCHARD (S.), Procédure civile, Précis Dalloz, 33e éd., 2016, n°1539, p. 1060 – BEIGNIER (B.), « L’article 47 du code de procédure civile : une option ou un privilège ? », D. 2012, 825.

170 Cass. com, 12 octobre 2010, n°09-16743 ; D. 2010, 2510, obs. Lienhard ; RTD com 2011, p. 180, obs. Martin-Serf ; JCP G 2010, p. 2058, note Roussel-Galle.

171 Cass. com, 28 octobre 2008, n°07-20801, Bull. civ. IV, n°177; D. 2008, 2791, obs. Lienhard ; RTD civ. 2009, 360, obs. Théry.

172 Article R.662-3 du code de commerce.

173 Article R.621-21 du code de commerce.

174 Article R.642-37-1 du code de commerce, en matière de vente des biens.

175 Cass. com, 6 juin 1995, n°93-11782 ; Cass. com, 22 octobre 1996, n°94-19732.

43

penser qu’une instance est introduite devant lui chaque fois qu’on le saisit. Mais il n’en demeure pas moins qu’une fois que le tribunal de commerce saisi a ouvert la procédure et qu’aucune demande de renvoi n’a été formée, il est abusif de contester ensuite la compétence d’un de ses juges. La procédure de contestation de créances devant le juge-commissaire dans le cadre d’une procédure collective ouverte au bénéfice d’un avocat, autorise le jeu de l’article 47 du code de procédure civile qui lui permet de décliner la compétence territoriale de la juridiction prescrite par l’article R.600-1 du code de commerce177. Par cet arrêt178, la Cour a étendu à la juridiction du juge-commissaire sa jurisprudence selon laquelle les règles de compétence édictées par l’article R.600-1 du code de commerce ne dérogent pas à l’application des dispositions de l’article 47 du code de procédure civile, en reprenant le même raisonnement qu’en 2008 mais cette fois s’agissant du contentieux des contestations de créances. Contrairement à ce que l’on pouvait penser, la compétence du tribunal n’emporte pas dans cette hypothèse la compétence du juge-commissaire. Cette solution heurte un des principes du droit de la faillite édicté par l’article R.662-3 du code de commerce, qui attribue au tribunal de la procédure collective une compétence étendue pour connaître de tout ce qui concerne la procédure.

Par un arrêt du 31 janvier 2012179, la chambre commerciale de la Cour de cassation est allée plus loin dans son raisonnement en ne s’arrêtant pas à évincer les règles de compétence territoriale édictées par l’article R.600-1 du code de commerce au profit du tribunal de la procédure et du juge-commissaire, c’est-à-dire une règle destinée à centraliser devant la même juridiction tous les contentieux liés à une procédure collective. Il convient de procéder à la désignation d’un nouveau juge-commissaire, mais ce juge ne pouvant être nommé que par le tribunal de la procédure collective, il semble qu’il soit nécessaire de délocaliser la procédure en son entier. Certains avocats y ont vu de « belles » stratégies pour faire « durer » la procédure en son entier et la doctrine s’est largement interrogée sur l’opportunité d’un tel texte et sur sa nécessaire modification.

Or, l’ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014 et son décret d’application sont venus rationaliser le dispositif en prévoyant que l’article 47 du code de procédure civile ne peut plus être évoqué devant le juge-commissaire180.

177 Cass. com, 12 octobre 2010, n°09-16743 : JurisData n°2010-018408 ; L’Essentiel, Droit des entreprises en

difficulté, Décembre 2010, n°11, p. 4, obs. Berthelot ; JCP G 2010, 1086, zoom par Roussel-Galle.

178 Cass. com, 28 octobre 2008, n°07-20801 : JurisData n°2008-045587.

179 Cass. com, 31 janvier 2012, n°10-25693 ; Revue des Sociétés Mars 2012, Chronique de droit des entreprises en difficulté, p. 191, obs. Roussel-Galle ; JCP E 2012, Chronique, 1227, obs. Pétel.

44

2. Pour une évolution de la compétence matérielle du tribunal de commerce

39. Compétence matérielle actuelle du tribunal de commerce. L’autonomie du droit

commercial a provoqué la création des tribunaux de commerce. Ainsi, la nature des litiges délimite la compétence du tribunal de commerce181. Le droit français ayant semble-t-il adopté une