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L’imputation des risques professionnels

dans les missions de contrôle des représentants élus du personnel

B. L’imputation des risques professionnels

dans les formes complexes d’organisation du travail

173. Les deux formes d’externalisation du travail que sont le prêt de main-d’œuvre et la sous-trai-tance n’impliquent en principe aucun partage de la prévention des risques professionnels. Qu’il s’agisse de l’entreprise utilisatrice des travailleurs temporaires 549 ou de l’entreprise donneuse d’ordre et de l’entreprise sous-traitante 550, chacune n’est responsable que de la prévention des seuls risques professionnels créés par son activité. Autrement dit, chaque entreprise est responsable des risques professionnels causés aux travailleurs sous ses ordres et dont elle maîtrise les conditions d’exécution du travail.

Pourtant, ces formes complexes d’organisation du travail dévoilent parfois des situations concrètes plus équivoques, où les conditions d’exécution du travail d’un même travailleur sont partiellement définies et maîtrisées par plusieurs entreprises. Tel est le cas, par exemple, lorsque les travailleurs d’une entreprise sous-traitante exécutent une partie de leurs tâches sous la direction du personnel d’encadrement de l’entreprise donneuse d’ordre. À l’égard de la santé et de la sécurité des travailleurs, cette situation crée quelques difficultés particulières. Les risques professionnels sont

548. Marcel Fabre, Les accidents du travail et les maladies professionnelles. Analyse et prévention, Conseil économique et social, 1994, p. 100-105.

549. Le prêt de main-d’œuvre implique une mise à disposition des travailleurs de l’entreprise fournisseuse à l’entreprise utilisatrice, qui est responsable des « conditions d’exécution du travail ». C’est le cas en matière de travail temporaire (art. L. 1251-21 c. trav.). Les conditions d’exécution du travail comprennent limitativement : les dispositions relatives à la durée du travail, au travail de nuit, aux dispositions relatives au repos hebdomadaire et aux jours fériés, à la santé et la sécurité au travail et au travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs. L’entreprise utilisatrice a la charge de la plupart des obligations préventives directement liées aux conditions d’exécution du travail : formation (art. L. 4141-2 c. trav.) ; équipements de protection (art. L. 1251-23 c. trav.) ; suivi médical renforcé (art. L. 1251-22 c. trav.). L’entreprise fournisseuse de main-d’œuvre conserve certaines obligations, notamment le suivi médical simple (art. L. 1251-22 c. trav.). En matière d’accident du travail et maladies professionnelles, le code de la sécurité sociale organise également la répartition des charges entre entreprise fournisseuse de main-d’œuvre et entreprise de travail temporaire (art. L. 241-5-1 c. s. s.). Les dispositions relatives à d’autres formes de prêt de main-d’œuvre sont moins précises quant à la répartition des obligations en matière de santé et de sécurité. Toutefois, le travail temporaire semble servir de modèle.

550. La sous-traitance, même lorsqu’elle se présente sous la forme d’une coactivité, n’implique aucun transfert de ce genre. L’entreprise donneuse d’ordre est juridiquement indépendante des travailleurs de son sous-traitant dont elle ne maîtrise pas les conditions d’exécution du travail. En dehors de la coordination des entreprises pour les risques propres à la coactivité elle n’a à leur égard aucune obligation. Les risques professionnels créés par l’activité professionnelle des travailleurs de l’entreprise sous-traitante sont réputés n’être générés que par celle-ci.

générés indistinctement par deux entreprises, et ils pèsent sur des travailleurs dont elles partagent la maîtrise des conditions d’exécution du travail.

Parmi les voies d’imputation à une personne autre que l’employeur que connaît le droit du travail 551, il en émerge une propre au droit de la santé au travail : le travailleur placé sous l’autorité, à quelque titre que ce soit 552. Au-delà des apparences des relations sociétaires et contractuelles, elle permet de saisir le partage de la création des risques professionnels et de la maîtrise des conditions de travail entre deux entreprises, liées par des formes complexes d’organisation du travail.

L’autonomie de la figure du travailleur placé sous l’autorité à l’égard de la figure du travail-leur subordonné (1.) permet de saisir la spécificité de l’appréhension de l’organisation du travail en matière de santé et de sécurité (2.).

1. L’autonomie de la figure du travailleur placé sous l’autorité à l’égard de la figure du travailleur subordonné

174. Si la chambre sociale de la Cour de cassation avait déjà eu ponctuellement l’occasion d’étendre le bénéficie de certaines dispositions préventives aux travailleurs indépendants 553, elle n’avait jamais eu à interpréter les dispositions de l’article L. 4111-5 du code du travail relatives aux « travailleurs » auxquels il est fait référence dans la quatrième partie du code du travail portant sur la santé et à la sécurité. Ils y sont définis comme « les salariés, y compris temporaires, et les stagiaires, ainsi que toute personne placée à quelque titre que ce soit sous l’autorité de l’employeur ». L’arrêt Euriware du 7 décembre 2016 554, publié au Bulletin, constitue l’une des premières interprétations de cet article. Par-là, la chambre sociale de la Cour de cassation confère au travailleur placé sous l’autorité une autonomie à l’égard du travail subordonné, au sens de la qualification du contrat de travail. 175. L’affaire Euriware concerne une situation de sous-traitance en cascade. Une entreprise s’étant vu sous-traiter un marché, a elle-même recours à un sous-traitant pour la gestion d’un centre d’appel. La première sera qualifiée de donneuse d’ordre. Les travailleurs employés par l’entreprise sous-traitante travaillent au sein de la société donneuse d’ordre, et sont, en partie intégrés à son organisation.

Cette forme de sous-traitance impliquant la coactivité entre travailleurs de l’entreprise donneuse d’ordre et de l’entreprise sous-traitante n’est interrogée que sous l’angle de la coordi-nation des mesures de prévention entre les deux entreprises 555. Il y est question de la compétence du CHSCT implanté dans l’entreprise donneuse d’ordre à l’égard des travailleurs de l’entreprise

551. Elsa Peskine, « L’imputation en droit du travail », RDT, 2012, p. 347. 552. Art. L. 4111-5 c. trav.

553. La Cour de cassation avait déjà admis, pour l’application des règles de prévention relative au travail en milieu hyperbare que le « travailleur » auquel il était fait référence incluant les travailleurs physiques indépendants, c’est-à-dire non subordonnés à un quelconque employeur : Cass. Soc., 12 octobre 1999, no 96-20.361 ; Bull. civ., V, no 379 ; Droit social, 1999, p. 1121, Patrick Chaumette.

554. Cass. Soc., 7 décembre 2016, no 15-16.769, CHSCT Euriware c/ Euriware et Proservia ; Bull. civ., V, no 235 ; JCP S, 2017, 1044, obs. Jean-Baptiste Cottin ; JCP S, 2016, act. 463, obs. Lydie Dauxerre ; RDT, 2017, p. 429, note Anne-Laure Mazaud.

555. Cf. supra, n° 171, p. 108. En ce sens : A.-L. Mazaud, Note sous Cass. Soc., 7 décembre 2016, no 15-16.769, CHSCT Euriware c/ Euriware et Proservia, préc.

sous-traitante. Cette question naît à propos d’une difficulté d’interprétation sur le sens et la portée de l’article L. 4111-5 qui définit le « travailleur » visé par les dispositions de la quatrième partie du code du travail comme le travailleur placé sous l’autorité de l’employeur à quelque titre que ce soit. 176. Le CHSCT d’une société donneuse d’ordre avait fait valoir sa compétence en matière de conditions de travail des salariés d’une société sous-traitante, travaillant sur le site. La cour d’appel avait fait droit à sa demande. Le premier moyen du pourvoi 556 critique l’arrêt d’appel pour avoir retenu la compétence du CHSCT de l’entreprise donneuse d’ordre sans caractériser le lien de subordination qui unissait cette dernière aux salariés de l’entreprise sous-traitante. Ce faisant, le demandeur interprète l’article L. 4612-1 du code du travail relatif aux missions du CHSCT 557 à la lumière de l’article L. 4111-5 du même code. Le pourvoi fait ainsi valoir que le CHSCT de la société donneuse d’ordre ne saurait être compétent en matière de protection de la santé des salariés mis à disposition par le sous-traitant que pour autant qu’ils soient placés sous l’autorité de l’employeur de l’entreprise donneuse d’ordre, et « par conséquent » dans un état de subordination par rapport au donneur d’ordre. Autrement dit, la caractérisation de « l’autorité » au sens de l’article L. 4111-5 est assimilable selon le pourvoi à la caractérisation de l’état de subordination.

La Cour de cassation rejette le pourvoi en se fondant sur les articles L. 4111-5, L. 4612-1, R. 4511-1 et R. 4511-5 du code du travail, interprétés à la lumière de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, dont « il ressort que le CHSCT est compétent, pour exercer ses prérogatives, à l’égard de toute personne placée à quelque titre que ce soit sous l’autorité de l’employeur ». Elle ajoute que la cour d’appel n’a pas privé sa décision de base légale en ne caractérisant pas l’existence d’un lien de subordination entre la société donneuse d’ordre et les travailleurs placés sous l’autorité.

L’arrêt affirme donc la compétence des représentants élus du personnel à l’égard non seule-ment des salariés de l’entreprise où le CHSCT est implanté, mais égaleseule-ment des travailleurs salariés du sous-traitant exerçant sur ce site, dès lors qu’ils sont soumis à l’autorité de la société donneuse d’ordre 558.

177. Au-delà de la compétence du CHSCT et désormais du CSE, l’arrêt du 7 décembre 2016 a une portée plus large. Il apporte des éléments d’interprétation sur l’article L. 4111-5 du code du travail qui concerne le champ d’application de l’ensemble des dispositions de la quatrième partie du code du travail. La chambre sociale de la Cour de cassation affirme qu’un travailleur peut être placé sous l’autorité de l’employeur au sens de cet article sans pour autant être subordonné au sens de la qualification du contrat de travail 559. Autrement dit, la figure du travailleur placé sous l’autorité au

556. Sur l’analyse du second moyen, relatifs aux normes de productivité, cf. infra, n° 634, p. 336 et s.

557. Art. L. 4612-1 anc. c. trav. : Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission : 1° De contribuer à la prévention et à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l’établis-sement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure […] ».

558. Sur la déconnexion entre le périmètre d’implantation de l’instance et le périmètre de sa compétence : A.-L.

Mazaud, Note sous Cass. Soc., 7 décembre 2016, no 15-16.769, CHSCT Euriware c/ Euriware et Proservia, préc. Et

voir également : Elsa Peskine, Réseaux d’entreprises et droit du travail, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit social », Paris, 2008. no 546 et s. p. 296 et s.

559. Emmanuel Dockès, « Notion de contrat de travail », Droit social, 2011, p. 546 ; Antoine Jeammaud, « L’avenir sauvegardé de la qualification de contrat de travail. A propos de l’arrêt Labbane », Droit social, 2001, p. 227. Voir également : Emmanuel Dockès, Gilles Auzero et Dirk Baugard, Droit du travail, Dalloz, coll. « Précis », 32e éd., Paris, 2018, no 200, p. 266 et s. ; Elsa Peskine et Cyril Wolmark, Droit du travail, Dalloz, coll. « Hypercours », 13e

sens des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail est autonome par rapport à la figure du travailleur subordonné soumis à un contrat de travail. Ainsi, la chambre sociale de la Cour de cassation indique que la détermination de l’application des règles de santé et de sécurité au travail dans les formes complexes d’organisation du travail comme la sous-traitance est indépendante de la qualification de la nature des relations contractuelles entre le travailleur et celui qui maîtrise les conditions d’exécution de son travail.

178. La figure du travailleur placé sous l’autorité, une notion fonctionnelle pour l’appli-cation des règles relatives à la santé et à la sécurité au travail. L’arrêt Euriware du 7 décembre 2016 permet de saisir le sens et les fonctions de la figure du travailleur placé sous l’autorité pour l’application des règles de santé et de sécurité au travail.

179. Dans cet arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation ne semble pas élaborer une diffé-rence de nature entre l’autorité au sens des dispositions de la quatrième partie du code du travail et l’autorité au sens de la qualification du contrat de travail. Le pourvoi invoque un défaut de base légale de l’arrêt d’appel, et donc la Cour de cassation n’a pas à se prononcer que sur les motifs avancés par la cour d’appel 560. La Haute juridiction ne se prononce d’ailleurs pas sur la caractérisation de l’état de subordination et sur la qualification du contrat de travail, elle affirme seulement que l’autorité au sens de l’article L. 4111-5 du code du travail doit être appréciée par les juges sans détour par la caractérisation de l’état de subordination. Rien n’indique qu’au regard de faits similaires, et saisie d’une question relative à la qualification du contrat de travail, la chambre sociale n’aurait pas admis la caractérisation de l’état de subordination. Au demeurant, la Haute juridiction rappelle que la cour d’appel a caractérisé certaines des composantes de l’autorité au sens de la subordination juridique, comme la fixation d’objectifs ou le contrôle des travailleurs 561.

La différence entre l’autorité au sens des dispositions du code du travail relatives aux règles de santé et de sécurité et l’autorité au sens de la subordination juridique n’est pas une différence de nature, mais plutôt d’appréciation. Il faut d’abord et avant tout y entendre que la preuve de l’autorité, au sens de l’article L. 4411-5 du code du travail, est moins exigeante que celle de l’état de subordination qui sert à la qualification du contrat de travail. La Cour de cassation, en effet, admet que l’autorité soit caractérisée par la seule fixation des objectifs et d’une forme de contrôle, sans viser

éd., Paris, 2019.no 45, p. 33 et s.

560. Il est couramment admis que ce cas d’ouverture à cassation correspond à une insuffisance des motifs avancés par la cour d’appel. Le contrôle des motifs de la cour d’appel au soutien de son jugement n’a pas pour effet de faire entrer la Cour de cassation dans le domaine du fait et d’empiéter sur l’appréciation souveraine des juges du fond. Par ce contrôle, elle rentre dans le « processus d’investigation du fait » et détermine les constatations de fait nécessaires des arrêts, qui doivent entrer dans le processus de qualification juridique. Jean-Luc Aubert, « La distinction du fait et du droit dans le pourvoi en cassation en matière civile », D., 2005, p. 1115. Pour quelques règles d’interprétation des arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation : Philippe Waquet, « Les arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation », Droit social, 1998, p. 62.

561. Cass. Soc., 7 décembre 2016, no 15-16.769, CHSCT Euriware c/ Euriware et Proservia ; Bull. civ., V, no 235. « Qu’ayant constaté que les objectifs à atteindre au sein du centre d’appels avaient été définis par la société [donneuse d’ordre] et que les salariés de la société [sous-traitante] exerçaient largement sous le contrôle du personnel d’encadrement de la société [donneuse d’ordre] présent sur le site, la cour d’appel en a exactement déduit que, les salariés de la société [sous-traitante] étant placés sous l’autorité tant de la société [donneuse d’ordre] que de la société [sous-traitante], le CHSCT de l’établissement Ouest de la société [donneuse d’ordre] était recevable à agir à l’encontre de ces deux sociétés afin d’obtenir, au sein du site de Cherbourg relevant de son périmètre d’implantation, le respect de leurs obligations légales en matière de prévention des risques professionnels. »

d’autres indices, notamment le pouvoir de sanction, qui auraient été nécessaires à la caractérisation de l’état de subordination 562.

180. Ainsi, la figure du travailleur placé sous l’autorité ne recèle pas une conception des rapports de pouvoir substantiellement différente de celle reconnue en matière de subordination. En revanche, elle manifeste une appréciation différente du pouvoir dans les formes complexes d’organisation du travail. Cette appréciation différente, plus souple, est déterminée par la fonction de la figure du travailleur placé sous l’autorité visant à l’application des règles de santé et de sécurité et à l’impu-tation de la charge des mesures de prévention. Le travailleur placé sous l’autorité est une notion fonctionnelle qui fixe les périmètres de l’autorité et les critères utilisés pour la caractériser à raison de la spécificité des règles en cause 563.

L’arrêt Euriware du 7 décembre 2016 suggère que la détermination de l’application des règles de santé et de sécurité au travail et l’imputation des obligations préventives nécessitent une appréhension propre et spécifique des formes de l’activité de travail et de l’exercice du pouvoir dans l’entreprise à raison de leurs effets sur les risques professionnels. Indépendamment de la qualification des liens sociétaires et contractuels, la figure du travailleur placé sous l’autorité permet de saisir les multiples formes d’exercice du pouvoir et des risques professionnels qu’il génère 564.

181. La figure du travailleur placé sous l’autorité paraît ainsi constituer une voie propre au droit de la santé au travail pour appréhender les sources des risques professionnels au-delà des frontières de l’entreprise et dessine en filigrane la représentation de l’organisation du travail en matière de santé et de sécurité au travail.

2. La spécificité de l’appréhension de l’organisation du travail au regard de la santé et de la sécurité des travailleurs

182. La figure du travailleur placé sous l’autorité présente la variété des formes d’exercice du pouvoir dans les formes complexes d’organisation du travail, et particulièrement dans les relations de sous-traitance. Tels que dessinés par l’arrêt Euriware du 7 décembre 2016, les traits du travailleur placé sous l’autorité, offrent une appréhension spécifique de l’organisation du travail.

183. L’« exigence de réalisme » de la qualification du travailleur placé sous l’autorité. Tout d’abord, la chambre sociale de la Cour de cassation apparaît attachée à saisir les formes concrètes de l’activité de travail et d’exercice du pouvoir, par-delà la nature des relations contractuelles, c’est-à-dire au-delà de l’apparence d’indépendance entre les travailleurs du sous-traitant et la société donneuse d’ordre, et au-delà même de leur mise à disposition 565. Ces formes concrètes d’exercice du pouvoir sont constituées dans l’arrêt, par la fixation des objectifs ou la qualité du personnel d’encadrement sous lesquels sont placés les travailleurs.

562. En ce sens : A.-L. Mazaud, Note sous Cass. Soc., 7 décembre 2016, no 15-16.769, CHSCT Euriware c/ Euriware et Proservia, préc. Le second moyen semble d’ailleurs exclure tout pouvoir de sanction, à tout le moins concernant l’ir-respect des normes de productivité fixées unilatéralement pas la société donneuse d’ordre.

563. Sur la « vision fonctionnelle de l’organisation » en droit du travail : E. Peskine, préc. 564. Sur ces rapports, cf. supra n° 5, p. 16 et s.

565. Sur l’éventuelle qualification de prêt illicite de main-d’œuvre qu’auraient pu suggérer les faits de l’espèce : A.-L. Mazaud, Note sous Cass. Soc., 7 décembre 2016, no 15-16.769, CHSCT Euriware c/ Euriware et Proservia, préc.

Cette attention aux formes concrètes d’exécution du travail et de leur détermination dénote d’une « exigence de réalisme » 566 dans la qualification du travailleur placé sous l’autorité. L’exigence de réalisme permet de saisir quelle entreprise, entre l’entreprise donneuse d’ordre et l’entreprise sous-traitante, participe effectivement à la détermination des conditions d’exécution du travail par l’autorité qu’elle exerce sur les travailleurs.

184. L’autorité partagée sur les travailleurs. Dans l’arrêt Euriware, l’exigence de réalisme dans la recherche de l’exercice effectif de l’autorité au regard des règles relatives à la prévention n’a pas pour but de déterminer l’employeur véritable et unique. En l’espèce, les travailleurs du sous-trai-tant sont placés sous l’autorité ausous-trai-tant de l’entreprise sous-traisous-trai-tante que de l’entreprise donneuse d’ordre, les deux entreprises détenant une parcelle d’autorité. Telle qu’elle se dégage de l’arrêt, la figure du travailleur placé sous l’autorité au sens de l’article L. 4111-5 se satisfait d’une pluralité de liens d’autorité.

Ainsi, pour l’application des règles relatives à la santé et à la sécurité au travail, l’appré-hension des conditions empiriques d’exécution du travail et des formes concrètes d’exercice du pouvoir servent à déterminer les entreprises qui participent à organiser le travail et ainsi à maîtri-ser les conditions de travail, de santé ou de sécurité des travailleurs. La figure du travailleur placé sous l’autorité dévoile ainsi une appréhension du pouvoir, non pas unitaire, mais constituée d’une variété de pôles qui participent chacun à la détermination des conditions d’exécution du travail. Le démembrement de l’exercice du pouvoir dans l’entreprise permet ainsi d’admettre la compétence concomitante de plusieurs instances élues du personnel, ou l’imputation d’obligations préventives à plusieurs employeurs.

185. La pluralité de liens d’autorité qu’admet la chambre sociale de la Cour de cassation dans

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