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La construction de la figure du harcèlement moral managérial

dans les missions de contrôle des représentants élus du personnel

A. La construction de la figure du harcèlement moral managérial

par l’organisation du travail

191. L’actuel article L. 1152-1 du code du travail définit le harcèlement moral comme des « agis-sements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié, susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou

571. Ulrich Beck, La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Flammarion, rééd., coll. « Champs. Essais », Paris, 2003, p. 311. L’auteur parle ainsi de « taylorisme de l’emploi ».

572. Loïc Lerouge, La reconnaissance d’un droit à la protection de la santé mentale au travail, LGDJ, 40, coll. « Bibliothèque de droit social », Paris, 2005.

573. Voir notamment : Patrice Adam, « La prise en compte des risques psychosociaux par le droit du travail français », Droit ouvrier, 2008, p. 313. Pour une critique de ce terme : Loïc Lerouge, « Les « risques psychosociaux » en droit : retour sur un terme controversé », Droit social, 2014, p. 152. Loup Wolff et Yves Clot, « Faut-il encore parler des RPS ? », RDT, 2015, p. 228.

574. Gollac et Bodier, préc.

575. Le terme de risques « socio-organisationnels » a pu être proposé afin de mieux souligner les causes de ces risques : N. Tarhouny, op. cit., p. 26, n° 17.

de compromettre son avenir professionnel ». L’article L. 222-33-2 du code pénal, depuis la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes 576 précise désormais qu’en fait d’agissements répétés, il peut s’agir de « propos ou comportements répétés ». Cette définition presque inchangée depuis son introduction a progressivement accueilli une conception caractérisée par sa dimension organisationnelle : le « harcèlement moral managérial » 577.

Dans cette figure, l’organisation du travail occupe une place déterminante : certains de ses aspects sont envisagés en ce qu’ils participent d’un processus de harcèlement. L’élaboration de la notion de harcèlement au croisement de conceptions scientifiques divergentes (1.), la reconnaissance de sa dimension organisationnelle dans la négociation collective (2.) et les évolutions jurispruden-tielles ayant abouti au harcèlement moral managérial (3.) éclairent le rôle et les traits saillants de l’organisation du travail dans ses liens avec la santé mentale.

1. L’élaboration de la notion légale de harcèlement moral, au croisement de conceptions scientifiques divergentes

192. La question de l’usure psychique 578 ou de la souffrance 579 n’est pas entièrement dans le débat public à la fin des années 1990, mais elle se cristallise avec une force sans précédent au travers de la notion de harcèlement moral 580. L’ouvrage de la psychiatre Marie-France Hirigoyen paru en 1998, Le harcèlement moral, la violence perverse au quotidien 581, connaît un grand retentissement auprès du public. Très vite, le législateur est sommé d’intervenir pour consacrer la notion, sanctionner ce phénomène et instaurer une prévention efficace. À peine un an après la publication de l’ouvrage, le député Christian Hage dépose un amendement auquel la ministre du Travail, Martine Aubry, se déclare favorable, quoique préférant d’abord saisir le Conseil économique et social pour avis. La notion sera finalement consacrée par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 582, trois ans à peine après la parution de l’ouvrage de M.-F. Hirigoyen. Au fil de l’élaboration législative de la notion de harcèlement moral, plusieurs conceptions se dégagent, les unes axées sur la dimen-sion de violence interpersonnelle, les autres sur la dimendimen-sion organisationnelle. L’avis du Conseil

576. Loi no 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, art. 40.

577. L’expression est essentiellement doctrinale. Patrice Adam, « La « figure » juridique du harcèlement moral managé-rial », SSL, 2011, 1482. Toutefois, dans un arrêt récent mais isolé, la chambre sociale emploi l’expression de harcèlement moral managérial. Cass. Soc., 15 juin 2017, no 16-11.503 ; inédit ; Gaz. Pal., 2017, 29, p. 17, note Gaëlle Deharo. 578. Alain Cottereau, « Usure au travail : interrogations et refoulements », Le Mouvement Social, no 124, 1983, p. 3 ; Nicolas Hatzfeld, « Les risques psychosociaux : quelles correspondances anciennes aux débats récents ? », Travail et emploi, no 129, 2012, p. 11 ; Nicolas Hatzfeld, Usure physique, usure psychique : entre convergences et décalages, quelques repères historiques, Communication au 3e Congrès francophone sur les troubles musculosquelettiques, Grenoble, 26 et 27 mai 2011. Voir également, sur la construction sociale de la catégorie de fatigue : Marc Loriol, Le temps de la fatigue. La gestion sociale du mal-être au travail, Anthropos, coll. « Sociologiques », Paris, 2000.

579. Christophe Dejours, Souffrance en France. La banalisation de l’injustice sociale, Ed. du Seuil, rééd. (1er éd. 1998), coll. « Points. Essais », Paris, 2009.

580. Pour une étude sociologique de la réception de l’ouvrage et de la notion elle-même : Laïla Salah-Eddine, « La reconnaissance du harcèlement moral au travail : une manifestation de la « psychologisation » du social ? », SociologieS, [en ligne] mis en ligne le 27 décembre 2010, http ://journals. openedition. org/sociologies/3354, consulté le 18 janvier 2018. Article tiré d’une thèse de doctorat : Le harcèlement moral au travail : analyse sociologique, Université Paris-Descartes, 2008.

581. Marie-France Hirigoyen, Le harcèlement moral. La violence perverse au quotidien, Syros, Paris, 1998. 582. Loi no 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ; JORF du 18 janvier 2002, p. 1008.

économique et social rendu le 11 avril 2001 en vue d’une consécration législative offre un aperçu de ces divergences scientifiques et des débats sur les causes du harcèlement 583.

193. L’avis du Conseil économique social du 11 avril 2001, écho de la littérature scientifique. Le rapport du Conseil économique et social, confié au médecin Michel Debout, est riche d’ensei-gnements sur les différentes conceptions du harcèlement qui irriguent les débats parlementaires autour de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002. Le rapport retrace les différentes analyses sur les causes du harcèlement moral tirées de la littérature scientifique. Y sont exposées autant les conceptions individuelles qu’organisationnelles du harcèlement.

194. Les travaux de M.-F. Hirigoyen sont évidemment cités. Le harcèlement moral est décrit essentiellement comme un harcèlement pervers, c’est-à-dire « individuel, pratiqué dans un but de destruction de l’autre et de valorisation de son propre pouvoir » 584. Si initialement l’auteure ne traitait pas exclusivement du harcèlement moral dans le cadre du travail, elle a par la suite précisé sa conception du phénomène en le distinguant notamment de la « maltraitance managériale ». Le premier a un caractère occulte, individuel et pervers tandis que le second serait visible de tous et collectif 585. Ainsi, dans la conception du harcèlement moral de M.-F. Hirigoyen, l’organisation du travail occupe une place très réduite. Tout au plus, les changements organisationnels forment un contexte qui favorise l’apparition ponctuelle de situations de harcèlement 586.

195. L’avis du Conseil économique et social cite également les travaux précurseurs du psychoso-ciologue suédois Heinz Leymann sur le mobbing 587, qui désigne les comportements de persécution d’une ou plusieurs personnes à l’encontre d’une autre, la « cible », le plus souvent sur une période assez longue. Issu de l’anglais mob 588, la foule, le concept définit par H. Leymann insiste sur la dimen-sion collective de ces pratiques et s’ouvre à la recherche de responsabilités collectives. Plus encore, l’auteur s’est attaché à découvrir les ressorts du mobbing, au-delà des relations interpersonnelles. Selon lui, la source essentielle du phénomène réside dans les défaillances de l’organisation du travail. 196. Cette conception des phénomènes génériquement classés comme violence au travail, se rapproche de celle des travaux du psychodynamicien C. Dejours sur la souffrance sociale 589 et de l’ergonome F. Hubault, également cités par l’avis du Conseil économique et social. Ces auteurs

583. Michel Debout, Le harcèlement moral au travail, CESE, avril 2001, p. 20.

584. Ibid., p. 18. Autrement dit, « véritable technique de destruction visant de manière délibérée la décompensation du sujet » : Marie Grenier-Pezé, « Le harcèlement moral : approche psychosomatique, psychodynamique, thérapeu-tique », Droit ouvrier, 2000, p. 186.

585. Marie-France Hirigoyen, Malaise dans le travail. Harcèlement moral, démêler le vrai du faux, La Découverte, nouv. éd., Paris, 2004, p. 22 et s.

586. « Il faut donc éviter, d’un côté de psychologiser à outrance et, de l’autre, de déresponsabiliser les personnes, en reportant la faute uniquement sur l’organisation (inhumaine) du travail », ibid., p. 143.

587. Heinz Leymann, Mobbing, la persécution au travail, Seuil, Paris, 1996, p. 166 et s. L’auteur se base essentiellement sur les études épidémiologiques menées sur le stress (degré d’autonomie et charge de travail). S’ajoute à l’organisation du travail, la conception des tâches, la direction des exécutants et la dynamique sociale du groupe.

588. Le terme mob en anglais renvoie à la foule avec une connotation péjorative. Passé sous sa forme verbale, to mob, il signifie agresser collectivement. Les deux étymologies se retrouvent dans différents rapports. L’avis du CES fait référence au nom (M. Debout, préc.) tandis qu’un document remis au Parlement européen fait référence à la forme verbale (Frank Lorho et Ulrich Hilp, Harcèlement moral au travail, SOCI 108 FR, Document de travail remis au Parlement européen, 2001, p. 7.)

voient dans les nouvelles formes d’organisation du travail mises en place depuis les années 1990 les conditions d’apparition de phénomène de harcèlement moral. La forte sollicitation des travail-leurs, l’évaluation individualisée des performances et la destruction des collectifs engendrées par ces nouvelles formes d’organisation du travail, associées à une rhétorique de la guerre économique qui interdit toute critique, rend possible la désignation dans les milieux de travail d’un bouc émis-saire, dont le sort sert d’exemple au reste de la collectivité 590. L’avis du Conseil économique et social souligne ainsi que pour ces auteurs, « c’est moins la question de la perversité des individus qui serait aujourd’hui posée que celle de la tolérance des organisations vis-à-vis de l’expression de cette perversité » 591.

Entre ces différentes conceptions, phénomène essentiellement interpersonnel ou révélateur d’organisations du travail pathogènes, le Conseil économique et social ne tranche pas. Au contraire, il cite la classification proposée par la Commission consultative des Droits de l’Homme dans son avis du 19 juin 2000. On y distingue trois formes de harcèlement : le harcèlement institutionnel qui participe d’une stratégie de gestion ; le harcèlement professionnel à l’encontre de certains salariés destiné à contourner les procédures de licenciement ; et enfin le harcèlement individuel ou pervers. Le Conseil économique et social reprend l’essentiel de cette typologie pour proposer une définition législative qui comprenne aussi bien le harcèlement individuel que le harcèlement dit institutionnel 592.

197. La définition ouverte du harcèlement moral dans la loi de modernisation sociale du 17 août 2002. La définition légale du harcèlement moral issue la loi de modernisation sociale reprend en partie la structure de la définition proposée par le Conseil économique et social 593. La définition retenue par le législateur a donné lieu à des interprétations divergentes sur les conceptions du harcèlement moral. Paradoxalement, alors même que les travaux parlementaires, relayés par des publications doctrinales 594, se faisaient l’écho d’une dimension institutionnelle ou organisationnelle du harcèlement, la jurisprudence a dans un premier temps réduit son interprétation au harcèlement

590. V. également, Christophe Dejours et Paul-André Rosental, « La souffrance au travail a-t-elle changé de nature ? », RDT, 2010, p. 9. Dans cette perspective : François Gaudu, Raymonde Vatinet, Florence Canut, Droit du travail, Dalloz, coll. « Cours », 6e éd., 2018, no 281, p. 233-234.

591. M. Debout, préc.

592. Ibid., p. 66. : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés du harcèlement moral d’un employeur, de son représentant ou de toute personne visant à dégrader les conditions humaines, relationnelles, matérielles de son travail, de nature à porter atteinte à ses droits et à sa dignité, pouvant altérer gravement son état de santé et pouvant compromettre son avenir professionnel ».

593. L’article L. 122-49 devenu l’article L. 1152-1 du code du travail dispose qu’« aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

594. Dans la lignée des travaux de C. Dejours sur la souffrance sociale, plusieurs articles de psychologues sont publiés dans la revue Droit ouvrier au début des années 2000, plaidant parmi les juristes pour une conception du harcèlement moral comme « symptôme d’un mode de rapport social au travail qui produit des relations intersubjectives souffrantes et perverses ». Jean-Claude Valette, « Point de vue sur le harcèlement moral. L’action collective pour la santé mentale », Droit ouvrier, 2000, p. 217 ; M. Grenier-Pezé, préc. Ces deux auteurs ont fait partie par la suite de la commission « Violence, travail, emploi et santé », chargée sous la direction de C. Dejours de produire le rapport préparatoire à l’élaboration du Plan Violence et Santé de 2005 en application de la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004. Christophe Dejours (dir.), Conjurer la violence. Travail, violence et santé, rééd., coll. « Petite bibliothèque Payot », Paris, Payot & Rivages, 2011.

individuel. L’interprétation restrictive de la jurisprudence s’explique sans doute par les insuffisances du texte, nécessitant d’en circonscrire les contours.

198. En effet, au cours des débats parlementaires, les modifications apportées à la définition forgée par le Conseil économique et social rendent la définition moins lisible quant aux contours du harcèlement moral. La référence à l’auteur des agissements est supprimée, de même que la spécification des conditions de travail qui recouvraient, dans la version du Conseil économique et social, l’ensemble des conditions humaines relationnelles et matérielles du travail. Ces changements peuvent sembler ténus. Littéralement, la définition inscrite dans la loi n’exclut ni une conception élargie des conditions de travail affectées ni la variété des auteurs des agissements en cause. Pour autant, la dimension pédagogique et explicative de la rédaction proposée par le Conseil économique et social est fortement atténuée. L’élargissement de la définition légale aux agissements « qui ont pour objet ou pour effet » une dégradation des conditions de travail ne contribue pas non plus à la clarté de la conception du harcèlement moral visé. La définition proposée par le Conseil écono-mique et social, mentionnait seulement les agissements « visant » une telle dégradation. Dans le même sens, l’amendement déposé en 1999 par le député C. Hage, retenait la dégradation délibérée des conditions de travail 595.

2. La reconnaissance en demi-teinte de la dimension organisationnelle du harcèlement moral dans la négociation collective

199. L’accord-cadre européen du 16 avril 2007 sur le harcèlement et la violence au travail. Parallèlement aux débats parlementaires français, le Parlement européen s’intéresse aussi à la notion. La direction générale des études du Parlement européen rend un rapport sur le harcèlement moral en août 2001. Après de longues négociations, le processus aboutira à l’accord-cadre européen du 26 avril 2007 sur le harcèlement et la violence au travail 596. Au niveau national, les interlocuteurs sociaux signent par la suite l’accord national interprofessionnel du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail 597.

L’accord-cadre européen décrit le harcèlement comme des « comportements inaccep-tables d’individus entre eux ». Il reconnaît tout de même que l’exposition à ce phénomène peut « dépendre de l’environnement de travail ». Centré sur une conception individuelle du harcèle-ment, l’accord-cadre européen sur le harcèlement moral et la violence au travail peine à prendre en compte la dimension organisationnelle du harcèlement.

200. L’accord national interprofessionnel du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail. La négociation au niveau national est l’occasion pour les organisations syndicales et patronales de négocier sur la reconnaissance du rôle de l’organisation du travail dans les phéno-mènes de harcèlement ou de violence au travail. En effet, l’accord national interprofessionnel sur le

595. Proposition de loi relative au harcèlement moral au travail, no2053, enregistrée le 22 décembre 1999. 596. Accord-cadre européen sur le harcèlement et la violence au travail du 26 avril 2007

597. Cette négociation articulée avait été précédée de peu par les négociations sur le stress au travail et la signature d’un accord-cadre européen du 8 octobre 2004 sur le stress professionnel (work-related stress), dont les termes sont repris au niveau national par l’ANI sur le stress au travail du 2 juillet 2008. Cf. infra, n° 220, p. 131.

harcèlement moral opère de sensibles évolutions comparé à l’accord-cadre européen. Il va au-delà lorsqu’il précise que « les phénomènes de stress lorsqu’ils découlent de facteurs tenant à l’organisation du travail, l’environnement de travail ou une mauvaise communication dans l’entreprise peuvent conduire à des situations de harcèlement et de violence au travail plus difficiles à identifier » 598.

Cette phrase est le fruit d’âpres négociations entre organisations syndicales et patronales 599, et sa construction laisse place à plusieurs interprétations 600. Il est possible d’y voir la réitération de la reconnaissance du rôle des facteurs organisationnels dans l’apparition du harcèlement inter-personnel 601. Mais il peut s’agir aussi d’une consécration, en demi-teinte, de la reconnaissance de modes d’organisation du travail ou de management qui, en eux-mêmes, causent du stress pouvant dégénérer en situation de harcèlement. Reste que, si l’accord de 2010 ouvre, d’une phrase, la voie à une conception du harcèlement moral véritablement systémique et organisationnelle, il la referme, d’une autre, sur une idée de défaillance individuelle des managers 602. En effet, la « meil-leure sensibilisation et formation adéquate des responsables hiérarchiques » ou leur formation au management, sont placées au premier plan des mesures de prévention » 603. Les mesures améliorant « l’organisation, les processus, les conditions et l’environnement de travail » n’interviennent que dans un second temps 604.

La reconnaissance par les interlocuteurs sociaux nationaux du rôle que joue l’organisation du travail dans l’apparition du harcèlement moral est concomitante à l’évolution de la jurispru-dence de la Cour de cassation consacrant ce qu’il est convenu d’appeler le « harcèlement moral managérial » 605.

598. Art. 2.1, ANI du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail.

599. Patrice Adam, « Une lecture de l’accord du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail », RDT, 2010, p. 428.

600. Laurent Rabbé, « Les méthodes de gestion et le harcèlement moral en droit du travail (Première partie) », JSL, 2013, 346. : rapportant les propos des négociateurs du Medef et de la CGT, mettant en cause, l’un le simple dysfonction-nement d’un service prouvant l’origine individuelle du harcèlement, et l’autre, quasi-systématiquement l’organisation du travail et le manager. Le Monde, 29 mars 2010. V. également : Laurent Rabbé, « Les méthodes de gestion et le harcèlement moral en droit du travail (Deuxième partie) », JSL, 2013, 347.

601. En ce sens, P. Adam, « Une lecture de l’accord du 26 mars 2010… », préc ; P. Adam, « La « figure » juridique du harcèlement moral managérial », préc.

602. P. Adam, « Une lecture de l’accord du 26 mars 2010… », préc. V. également Sandrine Laviolette, « Violence, harcèlement et management : quelle prise en compte juridique en termes de risques psychosociaux au travail en France » in Loïc Lerouge (dir.), Risques psychosociaux. Approche juridique comparée France/Europe/Canada/Japon, Dalloz, Paris, 2014, p. 148-167.

603. Art. 4.1., ANI du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail.

604. Art. 4.2., ANI du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail. À cet égard, il faut noter que les ambi-valences de formulation de l’accord national interprofessionnel sur le harcèlement et la violence au travail et les enjeux sociaux qu’elles révèlent ne sont guère une nouveauté. L’accord-cadre du 17 mars 1975 sur l’amélioration des conditions de travail et ses deux avenants du 16 octobre 1984 et du 20 octobre 1989 montrent la même ambivalence dans la mise en cause possible de l’organisation du travail. L’accord de 1975, avec beaucoup de nouveauté, y consacre son titre premier. L’organisation du travail y est développée et dotée d’un contenu. Le glissement vers des mesures de prévention centrées sur la formation des salariés et de leurs représentants est sensible dans l’avenant de 1989 (Avenant du 20 octobre 1989 à l’accord-cadre du 17 mars 1075 modifié par l’avenant du 16 octobre 1984. Les articles 6,7 et 9 font état de l’attachement des signataires à la formation à la sécurité). Sur les effets de cette conception du harcèlement moral comme défaillance du management en matière de médiation, cf. infra, n° 1041, p. 550 et s.

3. L’évolution jurisprudentielle : du harcèlement moral interpersonnel au harcèlement moral managérial

201. La chambre sociale de la Cour de cassation a progressivement fait émerger la figure du harcèlement moral managérial autour de cinq évolutions.

202. Acte I, le rabattement de la notion de harcèlement moral sur une conception individuelle.

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