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L’avènement du contrôle de l’organisation du travail

dans les missions de contrôle des représentants élus du personnel

B. L’avènement du contrôle de l’organisation du travail

et de ses effets sur la santé

148. La quatrième loi Auroux du 23 décembre 1982 relative au comité d’hygiène de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) 446 apporte des évolutions substantielles en matière de repré-sentations élues du personnel. La création du CHSCT marque la naissance d’une véritable instance de contrôle (1.). Cette vocation ne se réalise pleinement que plus tardivement, par la conquête du contrôle de l’organisation du travail (2.).

1. La naissance d’une instance de contrôle, le CHSCT dans la loi Auroux du 23 décembre 1982

149. La quatrième loi Auroux du 23 décembre 1982 447 a profondément remanié les instances représentatives du personnel chargées des questions relatives aux conditions de travail et à la santé et sécurité du personnel. Par la fusion des anciennes commissions CHS et CACT, le législateur crée le CHSCT, institution chargée de contribuer, d’une part, « à la protection de la santé et de la sécurité des salariés de l’établissement » et, d’autre part, « à l’amélioration des conditions de travail » 448. L’évolution est d’ampleur. En créant une instance où conditions de travail et questions

442. Art. R. 231-6 c. trav., dans sa rédaction issue du décret no74-274 du 1er avril 1974.

443. Le Conseil économique et social était réservé sur la pertinence de créer une commission spécialisée, et également l’Assemblée nationale dans ses débats, cf. JORF Débats AN, 22, 27 novembre 1973.

444. B. Petitguyot, préc.

445. Décret du 20 mars 1979 no79-228 portant règlement d’administration publique relatif aux comités d’hygiène et de sécurité et à la formation à la sécurité ; JORF du 22 mars 1979, p. 639.

446. Loi no 82-1097 du 23 décembre 1982 relative aux comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ; JORF du 26 décembre 1982, p. 3858.

447. Loi no 82-1097 du 23 décembre 1982, préc. 448. Art. L. 236-2 c. trav.

sanitaires sont liées, la quatrième loi Auroux consacre pleinement une instance dont le champ de compétence est distinct de celui du comité d’entreprise dans l’ordre économique 449.

La recomposition de l’architecture des instances représentatives élues du personnel par les lois Auroux n’a pas eu pour effet de faire perdre entièrement au comité d’entreprise sa compétence en matière de conditions de travail. En revanche, la création du CHSCT et la nouvelle répartition des rôles entre les deux instances modifient le sens de la consultation du CE sur les conditions de travail.

150. Le comité d’entreprise et le contrôle des décisions de l’employeur dans l’ordre écono-mique. Dans le réaménagement des dispositions relatives au comité d’entreprise, la compétence générale du comité change de finalité. Elle est, pour l’essentiel, attachée à une compétence d’ordre économique 450. La référence à la coopération entre l’instance et la direction pour l’amélioration des conditions de travail issue de l’ordonnance du 22 septembre 1945 disparaît. Cette modification s’explique par la volonté des lois Auroux, en renforçant les institutions représentatives du personnel, de supprimer l’idée d’une simple coopération pour assurer un véritable contrôle du comité d’en-treprise sur les décisions de l’employeur 451. Cependant, cette suppression n’est pas sans effet sur le sens de la compétence du comité d’entreprise en matière de conditions de travail, compétence qui semble moins se rapporter à l’amélioration qualitative des conditions de travail qu’à leurs consé-quences économiques 452. Cette amélioration qualitative, désormais partie liée à la prévention de la santé et de la sécurité, relève de la compétence du CHSCT nouvellement créé.

151. Le CHSCT et le contrôle des décisions de l’employeur affectant la santé et la sécurité des travailleurs. Le recentrement des missions du comité d’entreprise sur le contrôle des décisions patronales relatives à l’organisation de l’entreprise permet le développement simultané du CHCST.

449. Grégoire Loiseau, Laurence Pécaut-Rivolier et Pierre-Yves Verkindt, Le guide du CHSCT, Dalloz, 2e éd.,

coll. « Guides Dalloz », Paris, 2017, p. 35.

450. L’ancien article L. 432-1 issu de l’ordonnance de 1945, qui ouvrait le chapitre relatif aux attributions et pouvoirs du comité d’entreprise, est supprimé et remplacé. Avec la loi du 28 octobre 1982, l’article L. 431-4 du code du travail, qui chapeaute l’ensemble des missions du comité d’entreprise, dispose que celui-ci a « pour objet d’assurer une expression collective des salariés, permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail et aux techniques de production ». Dans ce cadre, il doit donc être informé et consulté sur toutes les « questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise » (art. L. 432-1 c. trav.).

451. Jean-Pierre Le Crom, « La loi du 28 octobre 1982 sur le développement des institutions représentatives » in Jacques Le Goff (dir.), Les Lois Auroux 25 ans après (1982-2007). Où en est la démocratie participative ?, coll. « Pour une histoire du travail », PUR, Rennes, 2008, p. 103-118. Sur la réponse de Auroux et l’explication sur les termes : Maurice Cohen, Le droit des comités d’entreprise et des comités de groupe, LGDJ, Paris, 1984, p. 395.

452. Les éditions successives du traité de M. Cohen, Le droit des comités d’entreprise et des comités de groupe, marquent ce recentrement du rôle du comité d’entreprise sur ses attributions d’ordre économique. L’édition de 1977 notait que les attributions du comité d’entreprise lui conféraient un rôle consultatif, et non de coopération contrairement à la lettre de la loi. Au chapitre relatif aux consultations obligatoires du comité d’entreprise, après avoir noté une large compétence, l’ouvrage traite longuement des conditions de travail (Maurice Cohen, Le droit des comités d’entreprise, LGDJ, Paris, 1977, p. 469.). Le titre 6 est d’ailleurs relatif aux attributions du comité d’entreprise dans les « domaines professionnels, économiques et financiers ». L’édition de 1984, postérieure à l’entrée en vigueur des quatre lois Auroux, traite du tournant opéré par ces réformes : le comité d’entreprise a désormais un rôle de contrôle de la marche générale de l’entreprise (M. Cohen, Le droit des comités d’entreprise et des comités de groupe, op. cit., p. 393 et s.). L’information-consultation sur les conditions de travail est traitée comme une composante de la liste – non exhaustive – des quarante thèmes qui influent sur la marche générale de l’entreprise ibid., p. 513 et s. Le titre 6 ne porte plus que sur les attributions économiques du comité d’entreprise qui absorbent les attributions dans les domaines financier et surtout professionnel qui avaient droit de cité dans l’édition précédente de 1977 (ibid., p. 391.).

Né de la fusion du CHS et de la CACT, la nouvelle instance a pour mission autant la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs que l’amélioration des conditions de travail 453.

Au-delà de la correction des dysfonctionnements liés à l’existence redondante de la CACT et du CHS, la conjonction de la santé et de la sécurité d’une part, et de l’amélioration des conditions de travail, d’autre part, apporte une évolution substantielle. Renouant avec l’esprit du mouvement pour l’amélioration des conditions de travail des années 1968, la loi du 23 décembre 1982 consacre un « lien de causalité direct » 454 entre santé et amélioration des conditions de travail. Comme l’explicite une circulaire de 1983, « les risques professionnels sont souvent la conséquence directe de mauvaises conditions de travail liées à l’organisation du travail ou aux modes de production » 455.

Émerge ainsi de la rencontre de l’amélioration des conditions de travail et des questions sanitaires une instance, certes spécialisée, mais non plus uniquement technicienne 456. La quatrième loi Auroux, en renforçant la composition, le fonctionnement et les prérogatives des anciennes instances CACT et CHS, crée une véritable instance de contrôle des décisions patronales relatives aux conditions de travail, de santé et de sécurité. Sur le plan des prérogatives de l’instance, l’évolution majeure introduite par la loi du 23 décembre 1982 est la possibilité pour le CHCST de recourir à des expertises financées par l’employeur. Un observateur écrit alors qu’il s’agit là d’« une question cruciale, car c’est, à l’instar de ce qui se produit pour les comités d’entreprise, par ce biais que le CHSCT peut désormais, du moins en théorie, discuter à armes égales avec l’employeur » 457.

Sanctuarisant la spécificité de son domaine de compétence, le CHSCT fonctionne désor-mais comme une instance à part entière et non comme une commission spécialisée du comité d’entreprise. 458. Dans l’architecture de la représentation du personnel qui émerge des lois Auroux, le CHSCT constitue une authentique instance de contrôle des décisions de l’employeur. Loin de faire doublon avec le comité d’entreprise qui a une mission de contrôle de l’organisation de l’en-treprise « orientée vers la vie économique » 459, le CHSCT apparaît à même d’opérer un contrôle des décisions patronales relatives aux conditions de travail en vue d’assurer la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Ce contrôle des décisions patronales ayant un effet sur les conditions de travail, de santé, et de sécurité dévoile en filigrane toute l’étendue de la vocation du CHSCT. Il implique de saisir

453. Art. L. 236-2 c. trav.

454. Jacques Grinsnir, « Sécurité et conditions de travail : le point sur les questions en évolution », Droit ouvrier, 1989, p. 335.

455. Circ. du 25 octobre 1983 relative à l’application de la loi 82915 du 28-10-1982 relative au développement des institutions représentatives du personnel ; JORF, 20 décembre 1983, p. 11211.

456. Encore faut-il préciser que l’ancien CHS avait été présenté comme une instance technique, au sens où l’hygiène et la sécurité seraient imprégnées d’une sorte de « neutralité scientifique » et moins politique que d’autres questions sociales. La position, critiquable pour les CHSCT, l’était déjà pour les CHS : H. Seillan, préc.

457. J. Grinsnir, préc. Le CHSCT a également un droit d’alerte en cas de danger grave et imminent, qui s’articule avec le droit de retrait des salariés. Malgré des discussions doctrinales en ce sens, la loi de 1982 ne consacre pas la possibilité pour le CHSCT de décider l’arrêt des machines en cas de danger grave et imminent.

458. La composition du CHSCT laisse une place importante aux représentants du personnel ; le secrétaire du comité n’est plus désigné par l’employeur, les techniciens (médecins du travail, inspecteur du travail, agent chargé de la sécurité notamment), n’ont plus de voix délibérative (art. L. 236-5 c. trav.). En outre, depuis l’accord-cadre du 17 mars 1975, les syndicats peuvent désigner un représentant.

ces conditions dans l’acte de pouvoir qui les détermine. Progressivement, le contrôle du CHSCT remonte ainsi des conditions de travail, de santé et de sécurité à l’organisation du travail 460. 152. Doté des compétences auparavant dévolues à la CACT, et fort de celles de l’ancien CHS, le CHSCT est l’héritier de la question de l’organisation du travail qui y avait vu le jour. La clari-fication des rôles entre le CE et le CHSCT par les lois Auroux entérine la distinction entre d’une part, l’organisation économique de l’entreprise et, d’autre part, les questions relatives aux conditions de travail, de santé et de sécurité. Cependant, la vocation du CHSCT à participer à la prévention de tous les aspects de la santé et de la sécurité par le contrôle des décisions patronales en matière d’organisation du travail, quoique déjà en germe dans la quatrième loi Auroux, met de longues années à se réaliser pleinement.

2. La conquête du contrôle de l’organisation du travail, source de la montée en puissance du CHSCT

153. La « montée en puissance » du CHSCT est assez récente 461. Elle se caractérise par la conquête du contrôle des décisions patronales en matière d’organisation du travail, réalisant par-là la vocation de l’instance née de la quatrième loi Auroux. Cette montée en puissance s’explique moins par la transformation de l’instance elle-même que par l’évolution du contexte qui a porté sur le devant de la scène les impératifs de santé et de sécurité.

154. Un contexte normatif propice à la montée en puissance du CHSCT. La directive-cadre et sa transposition en droit français modifient le cadre de référence de la santé au travail 462. Il implique désormais la mise en place d’une véritable politique de santé dans l’entreprise 463. La trans-position de la directive-cadre par la loi du 31 décembre 1991 ne modifie que peu la physionomie du CHSCT, à une exception notable : l’introduction d’un nouveau cas de recours à l’expertise pour un « projet important modifiant les conditions d’hygiène et de sécurité ou les conditions de travail » 464. Sanctionnant les obligations de l’employeur en matière de prévention de la santé, la redécouverte de l’obligation de sécurité de résultat par les arrêts Eternit du 28 février 2002 465

constitue un levier d’action supplémentaire des CHSCT. La mobilisation de l’obligation de sécurité de résultat permet d’engager la responsabilité de l’employeur ex post, mais surtout elle permet ex ante

460. J. Grinsnir, préc ; G. Loiseau, L. Pécaut-Rivolier et P.-Y. Verkindt, op. cit., p. 35 ; Patrick Chaumette, « Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et le droit de retrait du salarié », Droit social, 1983, p. 425. 461. Pierre-Yves Verkindt, « La montée en puissance des CHSCT », SSL, 2007, 1332 ; Stéphane Béal, Anna Ferreira et Olivier Rault, « Le CHSCT : une instance en devenir », JSL, 2007, 212.

462. Marie-Ange Moreau, « Pour une politique de santé dans l’entreprise », Droit social, 2002, p. 817.

463. G. Loiseau, L. Pécaut-Rivolier et P.-Y. Verkindt, op. cit., p. 4-5 ; Michelle Bonnechère, « Santé-sécurité dans l’entreprise et dignité de la personne au travail », Droit ouvrier, 2003, p. 453 ; P.-Y. Verkindt, « Un nouveau droit des conditions de travail », préc.

464. Art. 20, Loi no 91-1414 du 31 décembre 1991 modifiant le code du travail et le code de la santé publique en vue de favoriser la prévention des risques professionnels et portant transposition de directives européennes relatives à la santé et à la sécurité du travail ; JORF no5, 7 janvier 1992, p. 319.

465. Cass. Soc., 28 février 2002, n° 99-18.389 (6 arrêts), Eternit ; Bull. civ., V, n° 81 ; Droit social, 2002, p. 828, comm. Matthieu Babin et Nathalie Pichon ; JCP G, 2002, II 10053, concl. Alexandre Benmakhlouf ; RTD civ., 2002, p. 310, note Patrice Jourdain ; D., 2002, p. 1285, obs. Philippe Langlois ; Droit social, 2002, p. 445, comm. Arnaud Lyon-Caen ; RDSS, 2002, p. 357, obs. Philippe Pédrot et Guylène Nicolas.

d’agir sur les décisions patronales avant leur mise en œuvre 466. Sur ce dernier point les missions du CHSCT sont déterminantes.

Par le truchement de l’information-consultation sur les « décisions d’aménagements importants modifiant les conditions d’hygiène et de sécurité ou les conditions de travail », et de l’expertise en matière de « projet important modifiant les conditions d’hygiène et de sécurité ou les conditions de travail », le CHSCT s’est investi dans l’évaluation et l’analyse des risques pour la santé avant la mise en œuvre des décisions patronales de réorganisation du travail 467. Cette inter-vention, couplée à l’obligation de sécurité de résultat, a permis des solutions originales de contrôle des décisions patronales.

155. Le CHSCT et la suspension des réorganisations. L’arrêt Snecma rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 5 mars 2008 468 a consacré la conquête par le CHSCT du contrôle des décisions d’organisation du travail. Le projet de réorganisation du travail envisagé par l’em-ployeur dans un établissement classé Seveso fait l’objet d’une information-consultation et d’une décision de recours à l’expertise par le CHSCT qui rend un avis négatif. Un recours devant le TGI formé par un syndicat demande l’annulation de la note interne décidant de l’adoption de la nouvelle organisation, et surtout, la suspension de sa mise en œuvre. La cour d’appel fait droit à sa demande. La Cour de cassation valide la suspension de la mise en œuvre de la réorganisation du travail au motif que « l’employeur est tenu, à l’égard de son personnel, d’une obligation de sécurité de résultat qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs ; qu’il lui est interdit, dans l’exercice de son pouvoir de direction, de prendre des mesures qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés ».

Dans cette décision, la chambre sociale affirme que l’impératif de protection de la santé et l’obligation de sécurité de résultat qui en découle prévalent sur le pouvoir de direction de l’em-ployeur. Ils en forment la limite. Dès lors, la réorganisation du travail attentatoire à la santé, sans dispositif suffisant de prévention, entraîne la suspension de sa mise en œuvre.

156. L’arrêt Snecma est emblématique du rôle du CHSCT dans le contrôle des décisions de l’employeur. La réorganisation des tâches, de la charge et des rythmes de travail en cause dans l’arrêt sont loin d’être les seuls types de décisions affectées par cette montée en puissance. Nombre de projets patronaux impactant les conditions de travail doivent faire l’objet d’une information utile et suffisante, d’une consultation du CHSCT, et d’un éventuel recours à l’expertise 469.

466. Marion Del Sol, « Les décisions et pratiques managériales à l’épreuve du droit à la santé au travail », RDSS, 2013, p. 868.

467. Pierre-Yves Verkindt, « Le rôle des instances de représentation du personnel en matière de sécurité », Droit social, 2007, p. 697.

468. Cass. Soc., 5 mars 2008, no 06-45.888, Snecma ; Bull. civ., V, no46 ; RJS, 2008/5, p. 403 ; JCP E, 2008, 1834, note Matthieu Babin ; SSL, 2008, 1369, note Pierre Bailly ; Droit social, 2008, p. 605, obs. Patrick Chaumette ; JSL, 2008, 231, obs. Marie Hautefort ; Droit ouvrier, 2008, p. 424, comm. Franck Héas ; Cah. Soc., 2008, p. 250, obs. Sabrina Kemel ; RDT, 2008, p. 316, obs. Loïc Lerouge ; 2008, obs. Sebastien Miara ; Droit social, 2008, p. 519, note Pierre-Yves Verkindt.

469. Sur l’extension des missions du CHSCT : Stéphanie Guedes da Costa et Emmanuelle Lafuma, « Le CHSCT dans la décision d’organisation du travail », RDT, 2010, p. 419 ; Jean-Philippe Lhernould et Laurence

Au-delà des décisions propres aux méthodes de management 470, telles l’introduction de nouveaux systèmes de contrôle ou d’évaluation des salariés 471, ou même l’introduction d’une méthode lean management 472, le CHSCT a compétence pour connaître largement de la modifica-tion des condimodifica-tions d’emploi et de travail , d’unsystème de rémunéramodifica-tion 473, révision des grilles de classification 474. Plus encore, il a compétence pour connaître de décisions qui relèvent, à première vue, du pouvoir de direction économique de l’employeur 475 : transfert d’entreprise 476, recours à la sous-traitance 477, réorganisation de l’entreprise 478, y compris lorsqu’elle inclut un projet de licenciement pour motif économique 479.

157. Le CHSCT, une compétence généralisée et un regard spécifique. Le CHSCT s’impose, à l’instar du comité d’entreprise, comme une véritable instance de contrôle des décisions de l’em-ployeur 480. Cette vocation au contrôle est désormais largement entendue, au point que l’on peut se demander si, par nature, des décisions patronales y échappent dès lors qu’elles ont un effet sur les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail 481. La longue liste des « projets importants » et « décisions d’aménagements importants » pour lesquels l’information-consulta-tion et le recours à l’expertise du CHSCT sont admises indique le contraire. La compétence du CHSCT est ainsi moins déterminée par la nature de la décision de l’employeur ou par son objet que par ses effets sur les conditions de travail ou les conditions de santé et de sécurité.

470. Florence Debord et Jean-François Paulin, « La santé au confluent du droit du travail et du management », SSL, 2013, suppl. 1576.

471. TGI Nanterre, 5 septembre 2008, no 08/05737 ; Droit ouvrier, 2008, note Patrice Adam ; D., 2009, p. 1124, note Antoine Lyon-Caen.

472. TGI Nanterre, 6 janvier 2012, no 11/03192. « Qu’en effet il s’en déduit que la méthode Lean, dans la mesure où elle s’inscrit dans une approche nouvelle de l’amélioration des performances ,peut impacter des transformations importantes des postes de travail découlant de l’organisation du travail, des modifications des cadences et normes de productivité, voire des aménagements modifiant les conditions de santé et sécurité ou les conditions de travail »

473. CA Paris, 30 octobre 2002, BHV c/ CHSCT ; Droit ouvrier, 2003, p. 332, note Mélanie Carles.

474. Cass. Soc., 7 mai 2014, no 12-35.009 ; inédit ; RJS, 2014/7, p. 468 ; Cah. soc., 2014, no 264, p. 370, note Florence Canut ; RDT, 2014, p. 633, note Valérie Pontif.

475. S. Guedes da Costa et E. Lafuma, préc.

476. Cass. Soc., 12 juillet 2005, no 03-10.633 ; inédit ; JCP S, 2005, p. 1264, note Jean-François Césaro ; Cass. Soc., 29 septembre 2009, no 08-17.023 ; Bull. civ., V, no 211 ; RJS, 2009/12, p. 828 ; JCP S, 2009, 1586, note Jean-Baptiste Cottin ; RDT, 2010, p. 48, note Fabrice Signoretto.

477. CA Versailles, 4 janvier 2006, no 05/07820 ; SSL, 2006, 1276, note Françoise Vélot. Encore sur le projet d’exter-nalisation, quoique le risque n’ait pas été retenu par les juges du fond, la Cour de cassation n’objecte pas l’incompétence

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