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PARTIE THEORIQUE

4. Relations aux autres

6.1. Grille d’entretien

6.1.1. Trame

Pour répondre à ces hypothèses, nous avons organisé les entretiens en fonction des 4 cadres de référence de l’individu étudiés préalablement.

- Rapport de l’individu à l’institution :

- Entrée : raisons/motivations, premiers pas

- Vécu de l’institutionnalisation : valeurs, ressenti, temporalité, intimité, liberté, vie en communauté/travail en institution

- Relations aux autres :

- Pour les professionnels uniquement, représentation de la vie de la population accueillie : ressenti, intimité, liberté, projets

- Relations avec le groupe d’appartenance - Relations avec l’autre groupe institutionnel - Relations avec les proches

- Rapport à la société :

- Représentations de la société par les sujets - Place des personnes accueillies dans la société - Regard social sur la population accueillie - Regard social sur les professionnels/novices

- Parcours individuels

- Présentations individuelles - Sens donné à la vie / au travail - Mort

- Projets

Nous avons également rajouté des questions sur l’entretien afin de connaître le ressenti du sujet, de savoir s’il voulait rajouter quelque chose ou poser une question.

6.1.2. Questions

Vous pouvez trouver la grille d’entretien qui découle des grands thèmes ci-dessus en annexe. Les questions ont été orientées en fonction qu’il s’agisse de la population accueillie ou des professionnels, ainsi qu’en fonction du type d’établissement. Nous allons vous expliquer comment nous les avons construites sans détailler chaque question mais en reprenant les éléments saillants.

Rapport de l’individu à l’institution - Entrée en institution

Pour les professionnels, nous nous sommes intéressés aux raisons pour lesquels ils ont décidé de travailler en gériatrie ou dans la pénitentiaire, et pas uniquement dans cet établissement. De même, nous nous sommes intéressés à leurs premiers pas de ce secteur, y compris s’ils avaient eu lieu dans un autre établissement.

- Vécu de l’institutionnalisation

Nous nous sommes intéressés au vécu de chaque individu dans l’institution (et pas uniquement à celui de la population accueillie) à travers les éléments suivant : valeurs, ressenti, intimité, liberté, vie en communauté/travail en institution. Tous les sujets ont été abordés avec chaque type de population, en dehors de l’intimité avec les professionnels. En effet, nous avons estimé que le lieu de travail n’était à priori pas un lieu d’intimité. Concernant cette notion de l’intimité, après l’avoir posée de façon générale, nous avons orienté les questions sur les sujets de la toilette et de la sexualité.

La question des valeurs n’était pas toujours claire pour les individus : « Est-ce que vous trouvez que cet établissement est porteur de valeurs ? ». Nous avons donc rajouté la question suivante : « Quel est l’objectif de cette institution ? » Dans les monastères, nous sommes partis du principe qu’il y avait des valeurs partagées donc nous avons directement demandé quelles étaient les valeurs pour eux. De même, la question de la liberté n’était pas évidente pour les professionnels. Nous avons donc rajouté la question suivante pour les individus qui n’arrivaient pas à y répondre : « est-ce que vous vous sentez entendus dans vos projets ? »

Relations aux autres

- Représentation de la population accueillie

Nous nous sommes intéressés à la représentation de la population accueillie, par elle-même et par les professionnels. Nous n’avons pas questionné les représentations des professionnels, l’institution ne leur étant pas prioritairement consacrée. Toutefois, nous les avons interrogés sur le regard social posé sur eux par la suite.

Nous avons également interrogé les professionnels sur la représentation qu’ils ont de la vie de la population accueillie dans l’établissement à travers les thèmes suivants : ressenti, intimité, liberté, projets. Leurs réponses seront mises en perspective avec celles des principaux intéressés. Nous n’avons pas pensé à leur poser la question de la temporalité, mais les professionnels l’ont souvent abordé spontanément lorsque nous avons parlé de leur propre temporalité pour nous expliquer le conflit entre les 2 groupes.

- Relation au groupe d’appartenance

Il s’agissait d’interroger le sujet sur son rapport avec les personnes de son groupe tel qu’il est déterminé par notre étude, par exemple, les relations avec les autres personnes âgées pour une personne âgée en EHPAD.

- Relation avec l’autre groupe institutionnel

Il s’agit de l’autre groupe déterminé par l’étude, c’est-à-dire la population accueillie pour les professionnels et inversement, et les novices pour les moines et inversement. Pour les professionnels, nous avons ajouté des questions sur la gestion de l’agressivité et de la dépression, deux problématiques qui nous semblaient importantes et communes en maison de retraite et en prison. Nous ne les avons pas posé à la population accueillie qui n’est pas sensée gérer les professionnels. Nous avons également demandé à ces derniers la façon dont ils se sentaient perçus par la population. Cette question n’a pas été posée à la

population accueillie car il nous a semblé qu’elle pouvait être insécurisante, mais nous avons accueilli les propos spontanés sur le sujet.

- Relation avec les proches

Cette question n’étant pas liée au travail, nous l’avons abordé de façon indirecte sous l’angle de l’influence du métier sur la vie privée, qui est plus large que le rapport avec les proches.

Rapports à la société

- Représentation de la société par les sujets

Ce thème n’a pas été abordé avec les professionnels, de façon involontaire. Cette question n’était pas en lien direct avec l’institution, mais j’ai osé en poser d’autres sur les croyances ou la mort. Lorsque j’abordais cette question, je demandais souvent aux sujets s’ils avaient un avis sur la politique. Est-ce que ce sujet me paraissait plus intime que les autres et délicat à aborder ? En tous cas, je me suis limitée aux questions sur la société et les personnes âgées.

- Place des personnes accueillies dans la société

La question a uniquement été abordée pour les personnes accueillies, les professionnels étant censés avoir une place plus naturelle dans la société.

- Regard social sur la population accueillie

- Regard social sur les professionnels

Nous avons posé cette question aux professionnels, mais nous n’avons pas pensé à la poser à la population accueillie puisque l’institution est sensée leur être consacrée. Pour autant, il aurait été intéressant de savoir s’ils avaient quelque chose à en dire, et de quelle façon.

Parcours individuel

- Présentations individuelles

La présentation était libre, puis orientée sur les points suivants : Âge, sexe, métier, et depuis combien de temps la personne vit ou travaille dans l’établissement. Ce qui nous intéressait particulièrement était plus les éléments que le sujet choisissait de nous présenter de son parcours. Pour la population accueillie, nous posions également des questions sur la vie de famille.

- Sens donné à la vie / au travail

Parfois, cette question n’était pas claire. Nous rajoutions donc : « A quels moments vous sentez-vous exister personnellement/professionnellement ? » La question des croyances n’a pas été posée dans les monastères, puisqu’il s’agissait de la raison d’être de l’institution.

Pour la population accueillie, nous demandions « Est-ce qu’il y a des choses que vous aimeriez pouvoir modifier dans votre vie ? » Cette question pouvait être en lien indirect avec l’institutionnalisation. En revanche, elle nous a paru trop lourde pour les professionnels que nous interrogions initialement à partir de leur travail. Nous les interrogions en revanche sur la façon dont leur métier a influencé leur vie privée, et plus particulièrement leur rapport à leur sujet de travail (vieillesse / délinquance).

- Mort

Le rapport à la mort était interrogé de façon générale dans les entretiens, et en lien avec le travail pour les professionnels exerçant en EHPAD.

- Projets

La question a été posée à tous les groupes rencontrés.

Entretien

Nous avons demandé à tous les sujets s’ils souhaitaient rajouter quelque chose, poser une question, et quel était leur avis sur l’entretien.

6.1.3. Passation

Il s’agit d’un entretien semi-directif. Les deux premières questions étaient fixes : le

parcours personnel ou professionnel (pour entrer en contact avec le sujet) puis les trois premiers mots qui viennent à l’esprit lorsqu’on évoque la population accueillie (pour évaluer les représentations à chaud). Ensuite, les thèmes étaient abordés en fonction de la façon dont l’échange se déroulait.

Le temps accordé à l’entretien était très variable selon les structures et les individus.

Parfois, je n’ai eu qu’un quart d’heure (notamment pour les professionnels qui acceptaient de me rencontrer durant leur pause), parfois j’ai eu presque 1h30 (notamment dans les monastères). Toutes les questions n’ont donc pas pu être abordées systématiquement, même si j’ai posé au moins une question par grand thème à chaque fois.

Une partie exploratoire était possible lors de chaque entretien, avec des questions

générées spontanément lors de l’échange. Notre objectif était ainsi de laisser de la place à la subjectivité du sujet et à la spontanéité de la rencontre. Nous souhaitions pouvoir nous laisser surprendre par ce que l’individu souhaitait aborder et laisser l’échange se dérouler

sans qu’il soit bloqué par la grille d’entretien initiale. Pour les mêmes raisons, les questions n’ont pas toujours été posées exactement de la même façon. Ce procédé ouvre un espace à la subjectivité du sujet, mais également à celle du chercheur qui risque d’influencer l’entretien en fonction de la façon dont il aborde les différents thèmes. Nous avons préféré prendre ce risque pour laisser de la place à l’imprévu et à la rencontre. Nous avions donc à la fois une base d’entretien stable qui nous permet de comparer les témoignages, et une souplesse qui rend chaque échange unique.

Toute une vie pour la chanson, A. Seve interroge Georges Brassens, Le centurion, Paris, 1975.

Georges BRASSENS : Tu sais, à force de réciter des poèmes en classe, et d’écouter des chansons, on voit à peu près comment ça se fabrique.

André SEVE : Mais, tu as travaillé la versification ?

Georges BRASSENS : La plupart de ceux qui écrivent des chansons n’ont jamais étudié la versification. On est fait pour écrire des chansons ou on n’est pas fait pour ça. Si on est fait pour ça on n’a pas tellement besoin d’apprendre des règles.

André SEVE : Toi, tu les as apprises ?

Georges BRASSENS : Oui, plus tard, parce que je raffinais un peu, mais…

André SEVE : Tu en as conservé de tes premières chansons ?

Georges BRASSENS : Non. On peut écrire des chansons sans… Tu ne m’écoutes pas ? André SEVE : Non, c’est parce que…

Georges BRASSENS : Tu suis ta pensée, je sens ça. Tu viens ici avec des idées préconçues et tu veux toujours suivre ton chemin, pas le mien. Quand j’avance quelque part sur une idée, il

faut me laisser partir et tu m’arrêtes. Là, j’aurais pu dire des choses mieux. Mais il faut le temps pour que ça vienne.

André SEVE : On y reviendra.

Georges BRASSENS : Il ne faut même pas dire qu’on y reviendra, il faut qu’on continue de parler sans que tu te préoccupes des questions que tu as fabriquées, ou que toi tu veux suivre. Veux-tu Brassens, ou veux-tu fabriquer Brassens ? Si tu suis ton idée, tu perds ce que moi, en suivant ce qui me venait, j’allais te dire…

André SEVE : Les spécialistes n’ont pas su m’ouvrir à tes musiques, ni même tellement à tes textes.

Georges BRASSENS : Parce que toi, tu ne t’ouvres que si tu veux. Depuis que tu me questionnes, je le vois bien. Quand je t’explique quelque chose qui ne coïncide pas avec ce que tu voulais que je dise, tu détournes la conversation.

André SEVE : Moins maintenant ? Après trois jours d’écoute.

Georges BRASSENS : « D’écoute », si on veut. Non, tu attends, tu attends, et quand ça coïncide avec ce que tu attends, pof, ça fait tilt, tu me regardes d’une façon vivante, tu es ouvert. Mais quand ça ne coïncide pas, je vois ton visage sans vie, je te surveille, tu sais, j’en apprends beaucoup sur toi en observant ton comportement d’interviewer. Tu arrives ici avec un Brassens entièrement fabriqué dans ta petite tête, et tu veux me faire entrer là-dedans. La seule chose qui t’intéresse, c’est de me faire dire, ce que d’après toi, Brassens doit dire, ce que Brassens doit être. Tu pourrais avoir le vrai Brassens, et en tous cas un Brassens inattendu. Mais tu t’es préparé au Brassens que tu veux. On attend toujours les êtres comme on les veut. On n’est pas prêt à la surprise.