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ENTRETIENS MAISONS DE RETRAITE - PROFESSIONNELS

3.2. Représentation de la vie des résidents

3.2.1. Choc de l’entrée et adaptation

Le choc et les pertes dont nous ont parlé les résidents sont bien identifiés par les soignants. Les soignants perçoivent l’entrée des résidents en institution comme un choc. Mme Ba : « l’entrée en institution ben c’est... traumatisant. On laisse tout... tout son passé

à la maison, on a le droit de ramener que quelques effets personnels... on a des habitudes à domicile qu’on ne peut pas avoir en institution... on a des horaires, on est obligé à de... de se plier à des règles qui fait que des fois on a des voisins qu’on ne... qu’on ne souhaiterait pas, on a un horaire de lever , un horaire de coucher, des aliments qu’on aimerait peut être pas même si les soignants essaient de faire le maximum on peut pas être comme à la maison. »

M. De : « faut qu’ils réapprennent à vivre dans un endroit où ils sont plusieurs déjà il y a une

communauté. » M. Fi : « Il est vrai il y en a ceux qui arrivent et qui s’y plaisent, heureusement d’ailleurs sinon je pense qu’ils seraient tous freinés... fermés. (…) mais il y en a quand même beaucoup beaucoup qui ne s’y plaisent pas. »

L’évolution peut être positive ou négative dans l’établissement. Mme Di : « ce

monsieur que je vous parle et ben il est arrivé on va dire on va dire en bas puis il est remonté vraiment... il a va en progressant en fait. » A l’inverse, pour Mme Ca : « c’est par rapport aux repas surtout on voit la régression », mais également lors des toilettes « on sait plus quels mots on doit prendre pour qu’ils comprennent. » Dans les discours, trois facteurs semblent influencer l’adaptation. Le premier facteur évoqué est la question du choix. Mme Da : « les personnes âgées sont quand même beaucoup prises au piège dans la société et elles sont pas forcément enfin maitre de leur... de leur devenir. » Mme Du : « ceux qui l’ont choisi c’est vrai que ça se passe bien. Mais ceux qui l’ont pas choisi ils sont... on voit ça... ils ont un gros temps d’adaptation. » « Des fois ils s’adaptent pas du tout. Ca peut arriver qu’ils s’adaptent pas. » Le deuxième facteur abordé par les soignants est l’information donnée par les familles. Mme Co : « Il y a des gens qui s’adaptent très bien et d’autres ça se passera plus ou moins bien jusqu’à... jusqu’à leur départ. » « Les familles ne leur disent pas toujours la vérité non plus. Qu’ils préparent pas toujours leur papa leur maman à l’entrée en... en institution. »

lesquels ce n’est pas le cas. « Elle le vit très bien elle a toujours été en institution. Mais... les personnes nouvellement arrivées le vivent souvent très mal, il y en a qui ne l’acceptent jamais hein. » Il évoque également le fait d’avoir conscience ou non de sa situation.

3.2.2. L’intimité

 La chambre

Tout comme les résidents, beaucoup de professionnels identifient la chambre et les espaces aménagés avec les proches comme espaces d’intimité, avec toutefois des limites.

Les résidents sont souvent plusieurs dans la même chambre. Mme Be : « c’est vrai qu’il y a

les deux autres mais... la toilette se fait... personnellement avec la personne même quoi. C’est... mais c’est vrai qu’il y a pas forcément d’intimité. » Les professionnels peuvent entrer

à n’importe quel moment dans la chambre, parfois sans s’annoncer, « parce qu’il faudra

surveiller la personne. » (Mme Fe) M. Ga : « Beaucoup de soignants, surtout du par... du...de par le fait qu’ils ont pas le temps, ils ont pas le temps et les moyens, sont pressés et vont rentrer dans une chambre sans fra... enfin ou en frappant, en entrant direct. » Les personnes

démentes entrent aussi dans les chambres. M. Ga : « Ca arrive qu’il y ait des personnes qui

déambulent, qui rentrent dans les chambres donc là c’est quand même un... un... un viol de l’intimité hein... » Plusieurs estiment même que les espaces d’intimité n’existent pas en maison de retraite. M. De : « On peut pas dire qu’ils soient vraiment, qu’ils aient vraiment un espace à eux, un espace privé... non. Je pense pas. » « Même leurs habitudes de vie, on connait pas leurs habitudes de vie. » Mme Di s’interroge : « c’est tous les objets personnels c’est ça la vie privée ? » M. Fa : « Ouais qu’on prend leurs meubles pour qu’ils mettent leurs choses oui mais c’est pas... c’est pas chez soi. »

 La toilette

Alors que les résidents ne l’ont pas du tout évoqué, certains professionnels considèrent la salle de bain et les toilettes comme des espaces d’intimité. Mme Fe : « la salle de bain. » « parce qu’en fait c’est c’est la personne et moi. Je veux dire c’est... il y aura que nous deux et et souvent c’est là que... c’est là que ben que les liens vont se faire ce sera

pas dans la chambre, ce sera dans la salle de bain. Quand je vais m’occuper par exemple d’un monsieur qui est pudique et puis que je lui dis « vous inquiétez pas, je lui dis, personne le sait que je vous fais la toilette là il y a personne qui vous voit. » » La majorité des soignants a conscience que la toilette peut être un moment difficile et s’assure de préserver un maximum d’intimité. Mme Di : « moi je me dis d’être toute nue sur un lit ça doit pas être... confortable, humiliant... enfin... donc on essaie de la couvrir, de faire le haut, de l’habiller après de faire le la petite toilette intime. » M. Fa : « Moi je me souviens que le monsieur était valide ou qu’il allait dans... dans le cabinet de toilette pendant ce temps là je faisais madame. » Certaines institutions sont bien équipées, avec des paravents, d’autres en

réclament.

 La sexualité

Dans les mêmes établissements, des soignants disent avoir été confrontés à des situations de sexualité et d’autres non. Il s’agit d’un sujet qui reste encore relativement

tabou pour les familles et pour les soignants. M. Fu : « Parfois dans certaines équipes voilà on va presque dire au patient c’est pas bien de faire ça... il faut pas faire ça. » Mme Ca :

« c’est qu’ils sont incontinents quoi donc là quelque part je me dis bon c’est... il y a... c’est pas

propre (rires). C’est surtout par rapport à ça après bon. » Mme Gi : « à la limite même si... il y avait un travail quand même au niveau des équipes soignantes, on avait beaucoup de familles aussi choquées, qui s’y opposaient. » Pourquoi d’ailleurs, les familles et notamment les enfants, doivent-ils avoir un droit de regard sur la sexualité de leur proches ? La

maladie pose souci, pour évaluer le consentement, mais aussi pour le respect des autres résidents. Mme Ce : « c’était même problématique parce que ben ils faisaient pas toujours

attention à ce qu’il y avait autour. » Les mentalités commencent à évoluer. M. Fu : « c’était un processus naturel parce que ça fait partie des besoins... aussi de... de l’être humain. » M.

Ga : « on savait que telle personne âgée... était... avait des relations avec une autre. Et dans

ce cas-là ben les soignants... évitent enfin ne vont pas dans la chambre. » M. De : « ils nous avaient demandé « Est-ce qu’on... » s’ils pouvaient mettre sur leur chambre vous savez une petite pancarte comme dans les hôtels. Et parce qu’ils avaient besoin de moment d’intimité. Et j’ai trouvé ça très bien. »