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LA FORMATION DES ENSEIGNANTS

2.2. Les besoins de formation des enseignants

2.2.1. En lien avec la formation initiale

2.2.1.1. La formation initiale en IFM

Suivant les études relatives à l’analyse des besoins de formation des enseignants, le dispositif de formation initiale relevant des IFM comporte des lacunes, des lacunes qui expliquent pour une large part les besoins des produits issus de cette structure de formation. Ces lacunes peuvent être regroupées en deux catégories. La première concerne la qualité des candidats à la formation. La seconde, plutôt conceptuelle, se rapporte au dispositif lui-même (programme de formation, compétences des formateurs, etc.).

La qualité des candidats à la formation

Rappelons qu’on accède à l’IFM avec le DEF ou avec le Baccalauréat. Selon que le candidat est titulaire de l’un ou de l’autre de ces deux diplômes, son cursus de formation est de quatre ans ou de deux ans. Les deux années supplémentaires imposées aux titulaires du DEF sont consacrées à une formation générale et à l’introduction de quelques notions de psychopédagogie en deuxième année et à un stage de sensibilisation. La troisième année est davantage une formation « professionnalisante », formation en psychopédagogie et en didactique, avec un stage d’initiation d’un mois pendant les vacances. La quatrième année se passe entière dans une classe pour le stage en responsabilité. La formation de deux ans pour les candidats titulaires du Baccalauréat se passe sensiblement aux deux dernières années qui viennent d’être décrites. Il semble qu’une forte proportion des candidats à la formation, aussi bien les détenteurs du DEF que du Baccalauréat ne possèdent pas les pré-requis nécessaires leur permettant de suivre la formation.

Le dispositif de formation

Les constats établis à propos du dispositif de formation des enseignants concernent différents aspects de ce dispositif. En effet, l’« analyse des besoins de formation des enseignants » réalisée par le MEN en 1999, reprise, en 2004, relève beaucoup de lacunes liées au dispositif de formation initiale des enseignants, lesquelles font que les produits des IFM sortent alors qu’ils ne sont pas suffisamment préparés pour l’exercice du métier d’enseignant.

Ces lacunes concernent en premier lieu le programme d’enseignement en vigueur dans les IFM. Le contexte de développement d’un nouveau curriculum de l’enseignement fondamental basé sur l’approche par les compétences et ayant comme socle les langues nationales fait que les nouveaux maîtres sont inopérants sur le terrain, d’autant que leur programme de formation ne prend pas encore en compte cette innovation.

« Une formation initiale qui ne prend pas en compte l’approche par compétence : une innovation majeure du PRODEC a consisté à introduire l’enseignement par compétence dans l’enseignement fondamental. C’est ainsi que le développement d’un curriculum pour ce niveau a été engagé, ce qui a nécessité une formation conséquente

des enseignants impliqués. Les Instituts de Formation des Maîtres sont restés jusqu’ici en dehors de cette innovation alors que l’on amorce une généralisation du curriculum au fondamental. La prise en compte dans les IFM de l’enseignement par compétence s’avère donc une nécessité17 ».

En ce qui concerne l’enseignement des langues nationales à travers la pédagogie convergente, Traoré (2000) note : « les langues nationales sont utilisées dans l’enseignement formel depuis 1979. Mais ce n’est qu’en 1992 qu’elles ont été timidement, et pendant une courte durée (1992-1994), prises en compte dans le programme de formation initiale des maîtres. (…) Cette activité, telle que pratiquée, avait plus l’allure d’une sensibilisation que d’une véritable formation, car le programme qui était dispensé au cours de cette initiation ne prévoyait pas de formation linguistique, sociolinguistique et culturelle à ces élèves-maîtres en langues nationales. (…) L’utilisation des langues nationales dans l’enseignement ne bénéficiait donc pas d’une politique cohérente de formation des maîtres18 ».

Aujourd’hui, les programmes de formation initiale des maîtres en IFM intègrent les langues nationales. Cela ne semble pas toutefois résoudre la question relative aux langues nationales, notamment pour leur enseignement par les futurs enseignants. Cet enseignement leur pose d’énormes difficultés, auxquelles leur formation n’apporte pas de réponses adéquates. En effet, il n’est pas évident que la langue nationale enseignée à l’IFM où le futur enseignant a été formé, soit la langue nationale de l’école ou des écoles où il enseignera. Or, le nombre de langues nationales passant dans l’enseignement est relativement important (11 langues nationales). Toutes n’ont pas de transcription écrite, du moins sont à des niveaux d’évolution très divers.

Les études antérieures pointent du doigt également la persistance des difficultés liées aux didactiques dans la formation des enseignants.

« Comme en 1999, la formation psychopédagogique est considérée comme un point fort du programme, alors que l’enseignement des didactiques des disciplines laisse à

17 Politique de formation initiale des maîtres de l’enseignement fondamental, 2006, p. 8.

18 Traoré, La formation des maîtres du premier cycle de l’enseignement fondamental au Mali : problèmes et perspectives, 2000, p. 38.

désirer. De plus, il est toujours reproché de ne pas intégrer les innovations pédagogiques, notamment la pédagogie convergente19 ».

Le programme de formation des futurs maîtres en IFM semble en effet accordé peu d’attention à la didactique (didactique générale et didactiques spécifiques). L’enseignement des didactiques spécifiques en IFM relève, non pas des didacticiens mais, de professeurs de psychopédagogie. Les disciplinaires n’ont pas reçu de formation à cet effet, pas davantage que les psychopédagogues ne sont pas formés à l’enseignement des didactiques spécifiques puisque celles-ci sont intimement liées à la maîtrise des connaissances disciplinaires.

Ce constat pose la problématique de la qualification et de la compétence du corps professoral. La grande majorité des professeurs qui interviennent dans les IFM sont sortis de l’Ecole normale supérieure (ENSUP) et ont été formés pour l’enseignement secondaire général ; ils ne possèdent donc pas de formation appropriée pour intervenir dans les programmes de formation de maîtres destinés à l’enseignement fondamental. D’où un besoin de reconversion qui nécessite le plus souvent des moyens, tout au moins de la motivation de la part de ces formateurs pour arriver à combler leurs propres lacunes. Il semble que cela ne soit pas le cas. Or, lorsque l’enseignant manque de motivation et de dynamisme, il se complaît dans un enseignement traditionnel de type routinier, au lieu d’imaginer des moyens permettant de compenser certaines lacunes des programmes.

En marge de la formation théorique, le dispositif prévoit une formation pratique. Cette formation pratique est constituée de stages dans les écoles et vise la professionnalisation des futurs enseignants. Toutefois, la question se pose de savoir si, tels que conçus et dans leur dynamique de fonctionnement ces stages sont susceptibles de satisfaire cet objectif.

En effet, le stage ne commence pour les futurs maîtres avec le profil DEF, qu’à la fin de

la 3ème année. Il s’agit d’un stage d’initiation d’un mois. Pour le profil bachelier, le stage

intervient à la fin de la première année. Pour les candidats des deux profils, la dernière année de la formation est entièrement consacrée à un stage en responsabilité. Cette année complète passée en classe correspond au quart de la durée de la formation pour le

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premier profil et à la moitié de la formation pour le second. On en déduit une importance relative accordée au stage en tant que facteur d’intégration de la formation théorique et de la formation pratique.

Toutefois, méritent-ils d’être questionnés à ce sujet. En effet l’expérience du stage fournit en principe une matière première riche d’exploitation dans les cours. Mais, telle qu’elle se passe, cette expérience n’est pas exploitée et utilisée dans le cadre de la formation des enseignants ni lors du stage d’initiation ni lors du stage en responsabilité, puisque les élèves-maîtres ont alors terminé leur cours. Le stage d’initiation a lieu pendant les vacances et les élèves-maîtres ne reviennent pas à l’IFM avant l’année scolaire suivante. Pour le stage en responsabilité qui se déroule sur l’année complète, les élèves-maîtres sont constamment dans les écoles et ne revoient presque plus leurs professeurs d’IFM, sauf quelques rares fois où ils peuvent recevoir la visite d’un de leurs professeurs en classe. De plus, quand les stagiaires finissants sont placés en milieu rural, où le manque d’enseignants est criard, il arrive fréquemment que ces stagiaires possèdent leur propre classe, quand ils ne dirigent pas immédiatement l’école en tant que directeur, avant même d’avoir terminé officiellement leur formation.

Par ailleurs, du fait même de l’organisation des stages, les stagiaires n’ont que peu d’expérience de l’ensemble du programme du fondamental, puisqu’aux termes de leurs stages, chaque stagiaire n’aura connu que deux niveaux du fondamental.

Le suivi des stagiaires est également problématique. Le manque de didacticiens fait que les stagiaires sont peu ou pas encadrés. Il faut y ajouter le manque d’expérience d’enseignement au niveau fondamental des formateurs ; la lourdeur de la tâche qui incombe aux psychopédagogues qui doivent compenser l’absence de didacticiens ; l’immensité du territoire à couvrir pour le dernier stage ; le manque de formation des superviseurs, aussi bien formateurs que directeurs d’écoles ou maîtres d’application ; de même que le manque d’instrument de suivi, particulièrement au regard de l’évaluation qui demeure faite dans une perspective de sanction et l’absence de communication entre les différents intervenants.

Tous ces facteurs font que le dispositif de formation initiale des maîtres de l’enseignement fondamental recèle des lacunes. Ces lacunes se rapportent à leur programme de formation, notamment les aspects liés à la didactique et aux didactiques,

la formation pratique ; à l’adéquation de la formation des formateurs. Tous ces aspects qui, du reste, ne dépendent pas d’eux-mêmes, les limitent véritablement dans l’exercice de leur métier futur d’enseignant.