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THEORIES ET PRATIQUES DE FORMATION DES ENSEIGNANTS

3.2. La formation des enseignants : des théories et des pratiques 1. Essai de définition de la fonction enseignante

3.2.2. Description de la fonction enseignante

Il existe dans la littérature, différentes descriptions de la fonction enseignante. Il s’agit en fait de modèles descriptifs et qui servent de cadre d’analyse aux situations d’enseignement-apprentissage à partir d’un certain nombre de variables pour mieux cerner leurs relations et interrelations.

Dans le cadre de l’analyse des situations d’enseignement-apprentissage, Donnay et Charlier (1990) ont proposé un modèle qu’ils nomment modèle META (Matière, Environnement, temps, Apprentissage). Ce modèle est conçu suivant trois niveaux : un niveau macro, un niveau méso et un niveau micro qu’ils nomment respectivement le macrosystème, le mésosystème et le microsystème. Ces trois niveaux sont imbriqués les uns aux autres et entretiennent une sorte de relation hiérarchique. Le niveau macro contient le niveau méso qui contient le niveau micro.

Selon N’Diaye (2003), les mêmes concepts se trouve chez Lave (1988) et Casalfiore (2000) qui parlent de contexte macro-social, méso-social et micro social. Le contexte macro social traduit l’ensemble des structures, à la fois sociales, économiques, politiques et culturelles de l’environnement national et international ; le contexte méso-social renvoie à l’environnement immédiat où se déroule l’activité au quotidien ; le contexte micro-social est un espace opérationnel, un espace de signification au sein duquel se déroulent les interactions.

Par rapport au modèle de Donnay et Charlier, le macrosystème renvoie aussi bien au contexte international que national en rapport avec l’environnement institutionnel, politique et administratif. Le macrosysème contient le mésosystème. A ce deuxième niveau se rattache l’ensemble de la communauté éducative (au sens large). Ce deuxième niveau contient un autre qu’ils appellent le microsystème, le niveau de la classe, constitué de l’enseignant et des élèves.

Lorsqu’on s’évertue à analyser les situations d’enseignement-apprentissage à partir de ce modèle, il importe, par rapport aux niveaux méso (mésosystème) et micro (le microsystème) de privilégier cinq entrées ou macrovariables qui sont en interaction dynamique :

Le contenu matière : inclut la discipline enseignée, de même que l’ensemble des démarches et attitudes de l’enseignant par rapport à cette discipline ;

L’apprenant : renvoie l’individu apprenant avec ses caractéristiques personnelles et ses caractéristiques en tant que membre d’un groupe ;

L’environnement : est analysé suivant les conditions favorisant l’apprentissage et renvoie à toute la panoplie constituée des ressources matérielles, humaines et spatio-temporelles.

Le contexte : désigne la culture institutionnelle dans laquelle évoluent les acteurs (enseignants et élèves), c’est-à-dire la structure organisationnelle.

Le temps : renvoie aux perspectives d’évolution du système dans le temps en termes de changement et de transformation.

Par rapport à ce modèle et notamment par rapport à la prise en compte de la macrovariable « temps », N’Diaye (2003) trouve que l’intégration de ce facteur dans le modèle « constitue un indicateur supplémentaire sur le caractère dynamique des situations pédagogiques en tant que système évolutif formé par un ensemble d’éléments en interactions constantes en vue d’une finalité d’un but (…) » (N’Diaye, 2003, p. 38). Il épouse ainsi le point de vue d’Altet (1994) qui a repris le « triangle pédagogique » (Houssaye, 1988) avec une composante « communication » pour l’analyse des situations

pédagogiques. Cette dimension « communication » permet selon elle de mettre en

évidence ce qu’elle appelle la « (…) causalité réciproque et circulaire, de ses phénomènes de rétroaction et de régulation » (Altet, 1994, p.8).

Selon Doyle (1986) les situations d’enseignement-apprentissage ont sept

caractéristiques principales. Ces caractéristiques concernent leur multiplicité, leur simultanéité, leur immédiateté, leur imprévisibilité, leur rapidité, leur visibilité et leur historicité.

La « multiplicité » fait référence à deux types d’événements plus ou moins antagoniques, d’autant qu’ils relèvent de deux champs opposés. En effet, certains événements de classe sont déclenchés par l’enseignant lui-même pour pouvoir progresser dans l’atteinte de ses objectifs pédagogiques ; dans le même temps, d’autres événements se produisent et ont tendance à perturber ceux provoqués par l’enseignant lui-même. D’où une situation de conflit entre ces deux types d’événements de manière simultanée. La « simultanéité » des événements de classe rend sensible à leur « multiplicité » et à leur « immédiateté », d’autant qu’ils ne s’annoncent pas et sont sans détours. Ces événements sont également caractérisés par leur « imprévisibilité »,

c’est-à-dire la quasi impossibilité de l’enseignant de les planifier. Ils s’imposent et se posent comme allant de soi avec une telle « rapidité » qui les installe dans une sorte de fluidité apparente, du fait de leur succession, sans pause perceptible aux yeux des acteurs (enseignants et élèves) qui sont à la fois participants et témoins. Cela leur confère une « visibilité » et tend à les relier et à les insérer dans une temporalité qui intègre à la fois le passé, le présent et le futur (« historicité »).

Il existe bien d’autres modèles en dehors de ceux qui viennent d’être décrits. N’Diaye (2003) évoque celui de Mitzel (1960), de Dunkin et Bidle (1974), de Shulman (1986), de Porter et Brophy (1988), etc.

Si selon le modèle proposé par Mitzel (1960, cité par N’Diaye, op.cit.), les situations d’enseignement-apprentissage s’analysent suivant trois types de variables : l’enseignant et les élèves ; les interactions entre eux et le produit de ces interactions. Selon N’Diaye (2003) ce modèle a inspiré Dunkin et Bidle (1974, cité par N’Diaye, op.cit) qui ont proposé un cadre d’étude plus englobant qui porte sur quatre critères qu’ils nomment variables de présage, de contexte, de processus et de produit.

Dans le modèle de Dunkin et Bidle (1974), les variables de présage concernent l’enseignant, ses caractéristiques personnelles, sa formation et l’ensemble de son arrière plan culturel. Les variables de contexte désignent les élèves (caractéristiques personnelles, arrière plan culturel) et environnement de la classe (école, communauté). Les variables de processus ciblent la conduite ou le comportement des acteurs (maître, élèves) et les changements induits de leurs comportements. Enfin, les variables de produit s’intéressent au développement des élèves à court et à long termes induit de l’action du maître.

Pour N’Diaye (2003), ces deux auteurs ont introduit dans l’analyse des situations d’enseignement-apprentissage des critères extra scolaires. Avec eux, l’analyse sort du cercle restreint de la salle de classe pour prendre en compte des éléments susceptibles d’influer sur ce qui se passe en classe (école, milieu). Une posture systémique qui nous semble s’inscrire dans la dynamique de l’action et de l’interaction des différents éléments, comme cadre d’analyse.

Toutefois, fait-il remarquer que le modèle de Mitzel et celui de Dunkin et Bidle se positionnent dans une posture plutôt pédagogique étant donné qu’ils privilégient la dimension relative à l’analyse des actions et interactions entre l’enseignant et les élèves d’une part, et d’autre part, entre les élèves eux-mêmes. Ce faisant, ils traitent peu ou prou des aspects liés à la prise en charge des procédures d’analyse des contenus disciplinaires que prend en compte les modèles les ayant suivi qu’ils n’ont pas manqué d’inspirer.

Dans tous les cas, une remarque s’impose. C’est que les situations de classes peuvent s’analyser suivant plusieurs approches. Ce qui fait dire à N’Diaye (2003) que « les modèles de lecture des situations d’enseignement-apprentissage convergent dans leur évolution sur le constat de la complexité de ces situations d’une part, à cause du nombre élevé et de la diversité des variables et, d’autre part à cause de la multiplicité des interactions » (N’Diaye, 2003, p. 39). La complexité de la fonction enseignante est consécutive à cette complexité des situations d’enseignement-apprentissage. En effet, la fonction enseignante se présente comme un sable mouvant. A certaines certitudes ou stabilités dans l’accomplissement de la tâche d’enseignant, s’opposent certaines incertitudes et instabilités.