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Section II : Les institutions parentes

B) Forfaitisation du dommage et clauses pénales

Les parties peuvent convenir à l’avance de la somme à verser en cas de violation du contrat, sous la forme d’une forfaitisation du dommage ou d’une peine conventionnelle (1), situations qui se rapprochent des clauses pour solde de tout compte dans la mesure de la fixation d’une indemnisation, mais s’en distinguent en raison de la connaissance factuelle du créancier au moment de la renonciation (2).

1) Notions

a) Forfaitisation du dommage

Par la conclusion d’une convention d’indemnisation forfaitaire antérieure à la survenance du dommage (ou « clause forfaitaire »), les parties arrêtent de manière anticipée le montant des dommages-intérêts potentiellement dus en cas de violation du contrat ou d’une norme légale212.

208 Le Tribunal a dans un tel cas laissé ouverte l’applicabilité de l’art. 100 al. 1 CO : TF, 4A_25/2014 du 7 avril 2014, c. 7.2, en lien avec l’opinion exprimée par BK-WEBER,97-109,CO100N6.

209 ZIRLICK, p. 9.

210 BUOL, N 288 ss ; CR CO I-THEVENOZ, CO 100 N 5; s’agissant spécifiquement de la remise de dette:

ZIRLICK, p. 257 et 10: « der Erlass hingegen wirkt sich auf bereits entstandene Forderungen aus und ist deshalb für den Gläubiger besser überblickbar und somit weniger “gefährlich” ».

211 Sur cette interprétation « prudente » : cf. N 425 ss.

212 COUCHEPIN,Clause pénale, N1023.

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« En cas de non-livraison, le client pourra demander au vendeur des dommages et intérêts en conformité avec les dispositions du droit suisse. Cependant, il est convenu que le montant du dommage subi par le client correspondra au montant forfaitaire de 10% du montant du prix. »213

La convention d’indemnisation forfaitaire a pour but de faciliter la mise en œuvre des prétentions par une appréciation anticipée du dommage214. Le créancier n’a à prouver le dommage que dans son principe, non pas dans sa quotité215. Le débiteur connaît, lui, par avance le montant auquel il s’expose s’il ne s’exécute pas ou pas correctement216. Pour le reste, les conditions de la responsabilité restent inchangées217.

L'hypothèse présente des traits communs avec la transaction, puisqu’elle a pour objectif de régler une incertitude ou un litige, en fixant le montant du dommage en cas de violation, et suppose une relation juridique préexistante entre les parties218. Elle est surtout proche de la clause pénale, mais s’en distingue dans la mesure où elle ne connaît pas la fonction répressive de cette dernière219 et est nécessairement subordonnée à l’existence d’un dommage220. Signe de la proximité entre les deux institutions, l’applicabilité par analogie de l’art. 163 al.

3 CO aux clauses de forfaitisation du dommage fait l’objet d’une controverse doctrinale221.

b) Clauses pénales

Les clauses pénales, qui ont pour objet la fixation d’une peine conventionnelle222, trouvent une réglementation générale aux art. 160 ss CO. Les parties fixent librement le montant de la peine (art. 163 al. 1 CO), laquelle est encourue même si le créancier n’a éprouvé aucun dommage (art. 161 al. 1 CO)223. Fixant la somme que le débiteur est tenu de payer en cas d’inexécution ou d’exécution imparfaite du contrat (art. 160 CO), les clauses pénales visent à protéger l’intérêt du créancier à l’exécution du contrat, tout en incitant le débiteur à se conformer à celui-ci. Elles connaissent ainsi trois fonctions principales : une fonction indemnitaire, dans la mesure où elles compensent

213 MARCHAND, p.214.

214 COUCHEPIN,Clause pénale,N1025.

215 BENTELE,p.19;FISCHER,p. 143 et 162.

216 COUCHEPIN,Clause pénale,N1035.

217 MARCHAND,p. 214 s.

218 TOLOU,Forfaitisation, N 310.

219 TOLOU,Forfaitisation, N 104et204.

220 TOLOU,Forfaitisation, N 189s.

221 COUCHEPIN, Clause pénale,N1041 et 1052 ss ; BK OR I-EHRAT/WIDMER,CO160N12 ;MARCHAND,p. 215 s. ;TOLOU,Forfaitisation, N 1170ss.

222 COUCHEPIN, Clause pénale,N24.

223 ATF 143 III 1 c. 4.1 ; COUCHEPIN, Clause pénale,N1039.

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économiquement la violation contractuelle, une fonction répressive, en ce qu’elles incitent le débiteur à exécuter son obligation sous peine de sanction, et une fonction de défense personnelle, puisque le débiteur renonce à un examen judiciaire du différend224.

Les clauses pénales se distinguent d’une forfaitisation du dommage, dans la mesure où elles sont dues indépendamment de la réalisation des conditions de la responsabilité, du simple fait de la violation du contrat225. Les conditions de la responsabilité, y compris le dommage dans son principe, ne sont donc pas à prouver par le créancier226. Ce n’est que si celui-ci estime que son dommage est supérieur à la clause pénale convenue qu’il lui appartient d’en rapporter la preuve (art. 161 al. 2 CO).

Les états de fait sont toutefois proches, de sorte que seule l’interprétation de la volonté des parties permet de distinguer s’il s’agit dans un cas d’espèce d’une clause d’indemnisation forfaitaire ou d’une clause pénale227. A noter que si la différence entre l’indemnité convenue et le dommage réel est trop importante, il est envisageable que la clause forfaitaire soit en réalité une clause pénale, dans la mesure du caractère répressif, non uniquement indemnitaire, qu’elle acquiert228.

2) Rapport avec les clauses pour solde de tout compte

Comme les clauses forfaitaires ou les peines conventionnelles, les clauses pour solde de tout compte fixent une indemnisation sans que le créancier doive prouver la hauteur de son dommage229. Elles se distinguent cependant de ces deux institutions par différentes caractéristiques, notamment le moment de leur conclusion et l’objectif poursuivi.

D’abord, les clauses pour solde de tout compte sont conclues postérieurement à la survenance du dommage. Le risque lié à une mauvaise anticipation y est donc plus faible qu’en matière de clauses forfaitaires, lesquelles supposent un pronostic des parties sur les conséquences d’un événement dommageable qui n’a pas encore eu lieu. Ensuite, les parties apprécient généralement les circonstances de l’espèce pour fixer la mesure d’une clause pour solde de tout compte, sans poursuivre aucune volonté répressive, puisqu’il n’y a pas à inciter le débiteur à respecter l’accord, les rapports de droit étant liquidés. Le besoin de protection est donc moins élevé que dans le cadre des clauses pénales, où le

224 COUCHEPIN, Clause pénale,N140 ss.

225 MARCHAND,p.214.

226 ATF 135 III 433 c. 3.1. ; ATF 122 III 420 c. 2a ; BK OR I-EHRAT/WIDMER,CO160N12.

227 COUCHEPIN, Clause pénale,N1042.

228 COUCHEPIN, Clause pénale,N1051 et 1063 ; TOLOU, Forfaitisation,N226et 898.

229 COUCHEPIN,Clause pénale,N1035 ;FISCHER,p. 110.

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montant est fixé indépendamment du dommage (art. 161 al. 1 CO), avec éventuellement une finalité répressive230.

Il sera revenu sur ces distinctions lors de l’examen de l’applicabilité de l’art. 163 al. 3 CO aux clauses pour solde de tout compte231.

§ II. Les autres institutions parentes

D’autres institutions sont proches des clauses pour solde de tout compte, mais s’en distinguent par leur caractère provisoire (A) ou par leur vocation à s’appliquer dans un contexte particulier (B).

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