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Philippe Malrieu nous explicite la socialisation en ce qu’elle « ne peut se concevoir en dehors d’un effort pour concilier dans le temps de vie – sur des périodes plus ou moins longues – l’ensemble des activités proposées à l’individu par ses multiples groupes d’appartenance »208. Sylvia parle des effets de la formation continue en DEIS en ces termes :

« En tout cas de ce que je vois de moi et des autres de la promo, ceux dont, pour le moment je me

sens proche - parce que je pense que cela peut changer- c’est que cela donne du plaisir et donc de l’estime de soi, de l’estime des autres, une espèce d’ouverture, d’appétit ».

Précisons avec Isabel Taboada-Léonetti, que pour la sociologie, il ne peut exister d’identité -pour soi- substantialiste ; il n’y a que des identités en situation, produites par les interactions. « Dès le début de la vie (et même avant, dans l’imaginaire des parents (Lipiansky, 1986) le nom, la place de l’enfant dans la famille, sont déjà fixés d’avance), le regard des autres renvoie à chacun un visage, une personnalité, des rôles sociaux, que l’individu peut accepter ou rejeter mais par rapport auxquels il ne peut éviter de se déterminer. Si la formule "soi c’est l’autre" est peut-être excessive, il reste que c’est dans le rapport à l’autre que s’élabore le "soi" »209.

206 André MOISAN, Institutionnalisation de l’autoformation : entre individualisation de formation et

formes collectives d’échanges de savoirs dans Les enjeux de la formation tout au long de la vie pour l’intervention sociale : promotion sociale et citoyenne ou gestion de l’employabilité, sous la direction de

Mejed HAMZAOUI, Éditions de l’Institut Européen de l’Action Sociale (IEIAS), Marcinelle, Belgique, 2013, page 92.

207 Everett HUGHES, op.cit., page 76.

208 Philippe MALRIEU, La crise de la personnalisation, op.cit., même page. 209 Isabelle TABOADA-LÉONETTI, op. cit., page 44.

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Yves parle des transformations que la formation permet d’enclencher :

« Sur ce qu’on est aussi. Et d’avoir une autre approche, une autre vision de ce qu’on va produire, de ce qu’on est, avec les gens, dans nos relations. C’est pour cela que je disais justement je le souhaite à beaucoup de gens. Parce que je pense que c’est ce qu’il manque peut- être à beaucoup de personnes ».

Lors de transitions professionnelles telles qu’une reprise d’études, l’individu est amené à redéfinir ses liens d’appartenance, à procéder à un retour sur sa propre biographie, avant de modifier sa position sociale. Les visions qu’il a de son parcours sont influencées par les "autruis significatifs" et l’accord ou le refus de leur reconnaissance.

Comme le précisent Christian Lazzeri et Alain Caillé, les processus de reconnaissance sont par ailleurs marqués par la perception que l’individu se fait du regard d’autrui, ses attentes de reconnaissance et les perceptions des attentes d’autrui sur les capacités de celui-ci. L’essentiel réside dans la représentation que l’individu se fait de son environnement social210.

Nous pouvons considérer alors que l’intervenant social, de retour en formation, est aussi sous l’influence des «autruis significatifs » pour lui dans le processus qu’il a engagé pour faire évoluer ses champs d’investissement. Avec Georges Herbert Mead nous comprenons que « les individus sont capables, dans l’acte social, d’adopter les attitudes des "autres spécifiques", et de répondre à leurs propres gestes comme ces autres le font ».

Mais nous comprenons aussi qu’ « ils peuvent adopter non seulement les attitudes des personnes particulières avec lesquelles ils entrent en interaction, mais aussi celles de la communauté tout entière, autrement dit celles d’Autrui généralisé. Dès lors que ces conditions sont remplies, « un système de significations sociales partagées par une collectivité a pu s’instaurer, et le langage devenir un "principe d’organisation sociale" »211.

Lors de cette partie de notre travail nous avons pu analyser quels étaient les éléments principaux permettant de mieux comprendre la démarche de reprises d’études des intervenants sociaux. Nous avons pu voir que l’attraction pour l’université est flagrante, qu’une discipline universitaire telle que la sociologie pour les étudiants toulousains prenait une place importante. Les intervenants sociaux accordent une importance certaine à la dimension de la recherche, tout en manifestant la volonté de donner un virage à leur parcours professionnel. Ils sont venus aussi pour faire des rencontres et témoignent de l’importance de ces nouvelles interactions pour eux. Des enjeux identitaires sont également apparus lors de notre analyse. On continue de se construire et de se transformer en lien avec les "autruis" côtoyés en formation.

Nous allons dégager à présent les raisons exprimées par les narrateurs concernant leur décision d’entreprendre le diplôme du DEIS et Master afin d’essayer ensuite de comprendre quel sens prend cette démarche dans la globalité de leur parcours respectif.

210 Alain CAILLÉ et Christian LAZZERI, La reconnaissance d’aujourd’hui : enjeux théoriques, éthiques

et politiques du concept, Revue du MAUSS, n°23, 2004, pages 88 à 115.

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3-7 – POURQUOI LE DEIS ?

Le DEIS est choisi pour différentes raisons exprimées par les narrateurs. Il semble correspondre aux attentes de la totalité des interrogé-e-s et son choix a été mûrement réfléchi en fonction de son référentiel de compétences. Tout d’abord il est le prolongement d’un parcours qui, pour beaucoup revêt des aspects engagés.

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