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Effet de la demande pour la production d’une information comptable de qualité

CHAPITRE I Conséquences attendues sur l’instabilité bancaire de l’adoption des normes

3. Conséquence attendue n°2 : la réduction, induite par la qualité supérieure des états

3.2. arguments justifiant la qualité supérieure des normes IAS/IFRS

3.3.1. Effet de la demande pour la production d’une information comptable de qualité

l’information privilégiée, par exemple par le biais d’une représentation au conseil d’administration), ces derniers requièrent, en contrepartie de l’apport de fonds, la production

gérer les comptes dans leur intérêt, d’où une remise en cause des bénéfices à attendre du passage aux normes IAS/IFRS. Ramana et Watts (2007), Beatty et Weber (2006) et Hodder et al. (2006) offrent, sur ce point, des résultats intéressants. Dans des contextes différents, ces auteurs trouvent que les dirigeants ne se privent pas pour faire une utilisation opportuniste de la discrétion attachée à l’utilisation de la comptabilité en juste valeur. Ramana et Watts (2007), notamment, étudient l’incidence, sur les pratiques de gestion des comptes, de

l’adoption par les firmes américaines de la norme SFAS 142, qui requiert que le goodwill soit déprécié lorsque sa

juste valeur (à déterminer par les préparateurs des états financiers) devient inférieure à sa valeur comptable. Conformément à l’hypothèse de gestion des comptes, les auteurs trouvent qu’en moyenne, les firmes présentant des signes objectifs de diminution de la valeur du fonds commercial (ces firmes sont celles dont le ratio « market-to-book » passe sous le seuil de l’unité au titre d’un exercice comptable) manquent à déprécier de façon

opportune leur goodwill. Par ailleurs, il apparaît que l’enclin des dirigeants à ne pas déprécier de manière

opportune le goodwill croît avec le degré de non vérifiabilité des actifs et avec l’incitation des managers à

reporter à plus tard les pertes (par exemple pour des motifs contractuels).

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Nous nous focalisons sur les facteurs spécifiques aux banques et renvoyons le lecteur au papier de Soderstrom et Sun (2007), pour une revue de littérature plus générale des facteurs conditionnant l’ampleur des effets économiques à attendre du passage aux normes IAS/IFRS.

d’états financiers reflétant au mieux la performance et la situation financière, condition pour l’exercice du contrôle de l’usage des ressources déléguées aux agents (Burgstahler, Hail et Leuz 2006). Toutes choses égales par ailleurs, il suit que l’incitation des dirigeants à produire

des comptes de qualité doit croître avec l’importance des besoins de financement externe. A

contrario, lorsque l’apport de fonds n’est pas subordonné à la fourniture d’une information comptable de qualité, les dirigeants ne sont pas incités à supporter le coût de la production d’états financiers transparents. Dans ces firmes, on s’attend, par exemple, à ce que le volume et le détail des communications fournies en notes annexes au bilan et au compte de résultat soient réduits, à ce que les normes soient systématiquement interprétées en fonction des solutions les moins coûteuses – qui ne sont pas forcément celles menant à plus de transparence –, ou à ce que les procédures de contrôle interne soient moins rigoureuses. Conformément à cet argument, Ball, Kothari et Robin (2000) trouvent que le résultat

comptable des firmes situées dans les économies de droit civil (« code law »), où la plus forte

concentration de la propriété et la plus grande immixtion des banques dans la gestion des entreprises mènent à une demande de transparence plus faible, reflète d’une manière moins opportune la performance économique (mesurée par le changement de valeur de marché des capitaux propres). Dans la même veine, Burgstahler, Hail et Leuz (2006) et Ball et Shivakumar (2005) trouvent que la qualité de l’information comptable publiée par les firmes non cotées à capital concentré est plus faible que celle des firmes cotées à capital diffus, alors même que ces firmes recourent aux mêmes normes comptables pour la préparation de leurs états financiers.

Outre la forme des systèmes économiques et la structure de propriété, le degré de soumission à la discipline de marché apparaît constitué, en banque, un facteur majeur d’incitation à la transparence. Les banques financées principalement par dépôts assurés sont isolées de la discipline de marché et ne s’exposent qu’à la discipline des superviseurs (Billett, Garfinkel et O’Neal 1998, par exemple). Comparativement aux banques ayant recours à de la dette de marché, il s’exerce sur ces établissements une pression plus faible pour la production d’une information financière de qualité, ce pour les raisons suivantes. Premièrement, les besoins d’information des déposants assurés étant nuls, du fait du transfert de l’assomption du risque de faillite bancaire au garant des dépôts, l’apport de dépôts n’est pas subordonné à la fourniture par les banques d’états financiers transparents. Deuxièmement, les assureurs des dépôts ayant un accès à l’information privilégiée, par le biais des audits sur site (Berger, Davies et Flannery 2000, Berger et Davies 1998, par exemple), il est vraisemblable que la

demande de transparence comptable émanant de ceux-ci soit plus faible, comparativement à

celle émanant des apporteurs de ressources n’ayant pas accès à l’information d’insiders. Par

extension, la demande de transparence à laquelle font face les banques apparaît dépendre de l’étendue de la protection offerte par l’assureur des dépôts. Plus cette protection est généreuse (ou perçue comme étant généreuse), plus la discipline de marché s’exerce de façon laxiste (Hovakimian, Kane et Laeven 2003, Demirgüc-Kunt et Detragiache 2002) et moins il doit s’exercer sur les banques une pression forte pour la production d’une information comptable de qualité. Malgré l’intérêt de la problématique, nous n’avons pas connaissance d’études analysant les effets des mécanismes d’assurance sur la qualité de l’information comptable publiée par les banques.

Notons que les effets positifs à attendre du passage aux normes IAS/IFRS doivent décliner avec le degré d’insoumission des banques à la discipline de marché, même si l’incitation des dirigeants à produire une information comptable transparente n’importe pas. De fait, les déposants et les autres créanciers assurés (explicitement ou implicitement) n’étant pas exposés au risque de faillite bancaire, ils n’ont pas d’intérêt à supporter le coût de l’exercice du contrôle des décisions managériales et n’ont donc pas d’intérêt à traiter l’information financière produite par les banques (Hamalainen, Hall et Howcroft 2005, Hyytinen et Takalo 2002). Dans la mesure où des états financiers de qualité ne génèrent des bénéfices économiques que s’ils sont utilisés, il suit, une nouvelle fois, que les effets positifs à attendre de l’adoption des normes IAS/IFRS doivent croître avec l’exposition des banques à la discipline de marché.

Au final, il est probable que les avantages économiques à attendre de l’introduction des normes IAS/IFRS dans les banques bénéficiant de garanties soient plus faibles que ceux à attendre dans les banques non assurées, même si le passage aux normes internationales conduit les deux types de banques à produire des états financiers reflétant intrinsèquement mieux la performance et la situation financière. Conformément à cette hypothèse, nous vérifions, dans l’étude empirique du Chapitre II, que l’effet positif du passage aux normes IAS/IFRS sur le niveau d’adéquation des capitaux propres de banques européennes décline avec la part des dépôts–clients (assurés) dans le total des dettes et, dans une moindre mesure, croît avec la part des dettes subordonnées (non assurées) dans le total des dettes. Dans une veine similaire, Baumann et Nier (2006) trouvent que, si les banques communiquant plus d’informations sur leur exposition aux risques tendent à détenir plus de fonds propres, à

risque du portefeuille d’actifs constant, cet effet est plus faible dans les banques peu exposées à la discipline de marché.