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Un dilemme : mettre suffisamment d’énergie pour trouver/franchir le passage, mais en garder pour la suite du bloc

la méthode des acteurs

1. La non-validation du bloc : deux profils de grimpeurs pour deux explorations antinomiques explorations antinomiques

1.3. Thierry : la recherche de la méthode dans l’exploration du passage

1.3.1. Un dilemme : mettre suffisamment d’énergie pour trouver/franchir le passage, mais en garder pour la suite du bloc

Les résultats montrent la grande importance des premiers essais de Thierry au cours desquels de nombreuses attentes sont formulées. Dans cette exploration initiale du bloc, ces attentes sont pour la plupart non satisfaites et aboutissent à une révision radicale des jugements initialement portés sur le bloc à partir de la lecture au sol.

Extrait verbatim RP 5

T : Ce qu'il y a de sûr c'est que l'intensité que tu vas mettre dans les mouvements et l'énergie que tu vas y mettre. C'est ça qui a changé surtout. Maintenant je sais que c'est en déséquilibre, et que c'est super dur, alors que je m’attendais à quelque chose de bien meilleur.

Les essais consécutifs de Thierry ont abouti à l’usage d’un nouveau jugement relativement complexe. Il est question dans l’extrait précédent d’une nouvelle lecture prospective qui

160 agglomère les jugements synchrones des essais précédents et pose des attentes relatives à 1) l’intensité, 2) l’énergie, 3) la difficulté et 4) l’équilibre dans le bloc.

Plusieurs raisonnements pratiques ont été formulés par l’acteur à propos du rapport entre l’énergie dépensée et la méthode d’ascension. Ils ont permis également d’établir le lien entre l’identification de la méthode et la difficulté de l’ascension.

Capture d'écran 10. Thierry saisit le trou de la main gauche, puis le plat main gauche. Les deux prises se révèlent moins bonnes que prévu.

Extrait verbatim RP 6 Ch : Lorsque tu dis l’énergie ? T : de la force de la vitesse. Ch : tu donnes tout ?

T : (T regarde le bloc) Lors du premier essai je pensais que j’allais chercher cette prise et qu’elle était bonne. Je pensais que j’allais pouvoir chercher ce plat et qu’il était bon aussi.

Ch : Tu mets plus d'énergie dans cet essai là que dans le premier finalement ?

T : Non pas sur le premier, mais sur ce mouv' là. Le bloc fait cinq mètres de haut. Faut gérer ton effort pour pouvoir arriver en haut. Donc je ne vais pas mettre 100% de ce que je suis capable de mettre dans le premier mouvement parce qu’après je ne tiens plus le deuxième. Tu vois ce que je veux dire ? Je ne vais pas mettre haaaaa (visage qui mime l'effort) sur le premier mouv’ !

Ch : Oui, mais si tu ne mets pas 100 % au premier mouv' tu ne tiens pas non plus. T : Oui bah je pensais que j'allais tenir finalement

Ch : Ok

Le raisonnement pratique 6 peut être formulé ainsi. RP 6

« Gérer son effort » / vaut pour / (a) « ne pas mettre 100 % dans le premier mouvement » / parce que sinon / (b) « je ne tiens pas après » / dans les circonstances où/ « le bloc fait cinq

mètres de haut » / et que / (c) « je pensais lors du premier essai que j’allais chercher cette petite prise et qu’elle était bonne » / et / (d) « Je pensais que j’allais pouvoir chercher ce plat et qu’il était bon aussi ».

Le raisonnement pratique rend compte d’attentes non satisfaites relatives 1) à la qualité d’une préhension (c) et 2) à l’anticipation d’un mouvement (d). La non obtention de résultats satisfaisants a abouti chez Thierry à la production d’un jugement relatif au découpage du bloc

161 d’un point de vue énergétique (a). Ce dernier est appuyé sur l’identification d’une difficulté à tenir les prises sur différentes sections du bloc (b).

Un autre raisonnement pratique formulé par l’acteur permet de mieux comprendre le lien entre la méthode et la lecture. L’acteur juge le bloc « à méthode ». Ce terme couramment utilisé par les grimpeurs signifie ordinairement soit qu’une méthode spécifique est la seule qui permet la réalisation du bloc (le passage est alors jugé impossible sans cette méthode) soit que cette méthode permet de faciliter grandement son ascension (les autres méthodes possibles étant jugées bien plus difficiles).

Extrait verbatim RP 7

T : (T stoppe la vidéo et regarde le bloc) Je pensais que la cotation était (bien) répartie sur l'ensemble du bloc. En fait (hésitation), en réalité c'est sur les trois premiers mouv'. Et en plus je n’étais pas dans la bonne méthode (en parlant des premiers essais). Le bilan que je fais après coup c'est que (hésitation). Parce qu’à mon avis ce bloc ne passe pas autrement. C'est vachement plus dur si tu te trompes de main comme je l'ai fait sur les premiers mouv'. C'est un bloc à méthode. Faut chercher la méthode. Ça demande de faire des essais, des essais, des essais.

Le raisonnement pratique de l’acteur a été formulé ainsi :

« Un bloc à méthode » / vaut pour / « un bloc où la cotation est sur les trois premiers mouvements » (b) / parce que / « c'est vachement plus dur si tu te trompes de mains comme je l'ai fait dans le premier mouvement » / dans les circonstances où / « Je pensais que la cotation était répartie sur l’ensemble du bloc » (a) / et que/ « je ne suis pas dans la méthode » / ce qui a pour résultat que / « c’est vachement plus dur si tu passes autrement » (c) / et que/ « ça demande de faire des essais, des essais, des essais » (d) / pour / « chercher la

méthode ».

Thierry a produit un jugement général de l’intensité énergétique du bloc détaillé au travers d’un découpage par mouvements de cet investissement. Des jugements établis en amont des premiers essais guident particulièrement l'investissement énergétique du sujet. « je pensais que la difficulté était répartie sur l'ensemble du bloc ». Suite à quelques essais, ces jugements ont évolué pour produire 1) une segmentation de la difficulté du bloc en rapport avec l’investissement énergétique de l’acteur (b) et 2) un étiquetage nouveau du bloc dit « bloc à méthode ». Ces deux jugements ont eu des conséquences sur 1) les modalités de recherche de la méthode désormais orientées sur le tâtonnement (MS) (d) et 2) sur les attentes prospectives qui accompagnent les essais suivant puisqu’il est maintenant question de trouver « la » méthode efficace et non plus une méthode possible parmi d’autres (c).

162 Les raisonnements pratiques suivants nous apportent un étayage supplémentaire du lien étroit établi par l’acteur entre l’investissement énergétique et la recherche de « la » méthode sur un bloc dit « à méthode ».

Capture d'écran 11. Thierry se fait pousser par le pareur pour aller voir le haut du bloc.

Extrait verbatim RP 22

T : Donc là c'est l'essai où tu me pousses. Ch : Qu'est-ce que ça t'apporte là ?

T : Bah ça, ça m'apporte d'aller faire le haut sans forcer dans le bas parce que le bas me fait mal aux doigts.

Ch : C'est de l’économie d’énergie ?

T : Voilà c'est de l'économie d'énergie. Je vais travailler le haut du bloc. Voilà. Ch : Ça ne t'apporte pas d'info supplémentaire sur la lecture du bloc ?

T : Du bas non.

Le raisonnement pratique est consécutif à l’enchainement du début du bloc. Il a été formulé comme suit.

RP 22

« Se faire pousser » / pour / « aller faire le haut » / ce qui a pour résultat de / « ne pas forcer et me faire mal aux doigts en bas » / et / « économiser de l’énergie »

Cette gestion de l'énergie par le découpage en sections dont nous avons parlé précédemment transparait également dans la stratégie employée lors des essais. Cette démarche est également accentuée par la volonté de repérer et marquer les prises en dehors des essais.

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Capture d'écran 12. Thierry lors de l’essai poussé saisit en main droite la prise verticale qu’il a marquée peu de temps avant la tentative.

Extrait verbatim RP 23

T : Non par contre (T arrête la vidéo) entre-temps (avant l'essai visionné) je suis allé repérer la prise qui me manquait tout à l’heure donc maintenant je sais exactement quoi faire. Je sais qu'il y a une prise main droite qu'il faut aller saisir. J'en ai vu deux. Il y en a une des deux que j'ai marquée. J'en ai repéré une verticale.

Le raisonnement pratique a été formulé ainsi. RP 23

Pour / « Savoir exactement quoi faire » / il faut / « aller repérer la prise qui manquait tout à

l’heure » / ce qui a pour résultat que / « j'ai marqué deux prises » / et que/ « je sais qu'il y a une prise main droite qu'il faut aller saisir ».

Cet extrait nous montre comment Thierry aménage l’environnement avant son essai « poussé ». Cet aménagement consiste en le repérage et le marquage d’une prise clef dans la réalisation du haut du bloc.

Synthèse

La dimension énergétique est très présente dans l’établissement de la méthode par Thierry. Cette économie d’énergie lui a permis 1) d’étiqueter le bloc comme relevant d’une seule solution possible, 2) de gérer son effort entre les essais par l’adoption d’un mode de recherche plus économique et plus sûr et 3) d’orienter la recherche de méthode par la réalisation d’un grand nombre d’essais exploratoires. Le coût énergétique est directement intégré dans la construction des attentes prospectives et synchrones aux essais en question. En d’autres termes, Thierry a formulé des RP relatifs à la dépense énergétique dans chacune des sections du bloc en s’appuyant sur un usage circonstancié de ses capacités. L’optimisation de ces dernières est posée comme une attente en lien avec la méthode et la difficulté des sections du bloc et caractérise une singularité de l’exploration de l’acteur sans doute liée à son expertise.

164 1.3.2. De la difficulté de lire sans se faire abuser : deux régimes de construction de la

méthode

Tout au long du protocole, de nombreuses attentes construites sur la base d’une lecture prospective ont été déçues au cours des essais.

L’extrait suivant est caractéristique de la difficulté pour Thierry d’établir une lecture prospective efficace. Il décrit la méthode initialement envisagée et celle finalement réalisée pour enchainer le bloc.

Capture d'écran 13. Thierry réalise une méthode initialement envisagée, mais non féconde appuyée sur les traces de magnésie et l’emplacement des prises.

Capture d'écran 14. Thierry réalise un essai avec le plat dit en « gouttière » en épaule.

Extrait verbatim RP 11, 12, 13 T : Finalement ce trou c'est un piège.

Parce que tu as l'impression qu'il est bon, tu le vois bien main gauche, c'est bien poffé main droite (mime les mouvements en regardant le bloc). Quand tu lis d'en bas tu te dis que c'est ça, ça, ça. Ça parait évident. Après tu ne sais pas trop si la prise est bonne et comment tu vas pouvoir monter. C'était un peu hasardeux, mais (hésite). Telle que la magnésie est placée, ça t'indique un truc qui n'est pas ça du tout en fait.

165 T : (regarde le bloc, hésite) Bah disons que de toute façon je serais quand même allé chercher ce trou parce qu’il parait tellement bon du bas que (réfléchit). Bah après fallait voir que c'était l'épaule, fallait monter super haut. C'est quand même super dur à lire !

Ch : Pourquoi c'est super dur à lire ?

T : Parce que lorsque tu mets ta main gauche (mime une prise en épaule en regardant le bloc) alors que tu as des prises à gauche c'est trompeur.

Ch : Les mouvements ne se font pas de façon naturelle ?

T : Surtout lorsque tu as un bon bi-doigt (mime les mouvements regardant le bloc) là tu ramènes la main là (la main droite) et tu vas chercher comme ça là-haut. En plus tu as une bonne rampe de pied. Moi je voyais le mouvement comme ça. Un peu de face dans cette proue. Mais en fait c'est ça (mime la bonne

méthode en regardant le bloc). Il y a ce gros croisé.

Le RP 11,12,13 est relativement élaboré. Il peut être formulé ainsi.

« Un bloc dur à lire » / vaut pour / « un bloc trompeur » / parce que / « ce trou est un piège » / parce que / « le trou parait bon du bas » / et que/ « tu le vois bien main gauche » /

et que / « c’est poffé main droite » / et que / « la magnésie indique quelque chose qui n'est

pas ça du tout » / que / « tu ne sais pas trop si la prise est bonne et si tu vas pouvoir monter » / « que la proue te donne une bonne rampe de pieds » / dans les circonstances où / « tu le lis d'en bas et que tu te dis que c’est ça, ça, ça » / ce qui a pour résultat que / « ça parait évident » / de / « voir le mouvement de face avec le bi-doigt » / et que / « (pour) voir que c'était l'épaule » / il faut / « monter super haut »

La lecture prospective engage chez Thierry une multitude d’attentes étayées par (a) le positionnement des prises les unes par rapport aux autres, (b) leurs tailles, et (c) les traces de magnésie. Elles permettent à Thierry d’établir prospectivement une séquence de mouvements ainsi qu’une méthode macroscopique nécessitant de grimper « de face » par rapport au bloc. Cette anticipation est trahie par l’action durant laquelle l’acteur se fait abuser parce que « c’est trompeur » et aboutit à 1) un jugement relatif à la difficulté d’identification de la méthode d’ascension (« c’est super dur à lire ») et 2) à écarter de la méthode certaines prises initialement retenues.

L’extrait suivant permet de saisir avec précision l’évolution des jugements relatifs à la lecture du bloc. L’acteur interprète les circonstances du bloc et pose un nouveau jugement sur la méthode qui induit un usage circonstancié de la lecture prospective dans les futurs essais.

Extrait verbatim RP 14

CH : (coupe T) En fait dans cette lecture, tu prends des informations lorsque tu es dans le bloc.

T : Tu en prends avant. Mais ce que je veux dire c'est que lorsque c'est un bloc à méthode, tu y vas, tu expérimentes une fois : ça marche, ça ne marche pas. Là ça marche, mais ça t’amène dans une impasse.

166 Le raisonnement pratique peut être formulé ainsi :

RP 14

« Lire » / dans les circonstances / « d’un bloc à méthode » / vaut pour / « prendre des informations avant d’aller dans le bloc et y aller » / pour / « expérimenter » / « pour voir si ça marche ou pas » / ce qui obtient pour résultat / « ça t’emmène dans une impasse » Ce dernier rend compte de la difficulté pour Thierry de trouver une méthode satisfaisante sur la base d’une lecture prospective, malgré des avancées notables dans le bloc. Débute alors pour le grimpeur une recherche, synchrone aux essais, parce que les circonstances du bloc ne lui permettent pas d’exploiter une lecture prospective efficace.

À cet égard, l’un des obstacles à la détermination de la méthode d’ascension s’est révélé être la difficulté pour Thierry à identifier la nature et le nombre de prises sur le bloc. L’activité de « lecture » a fait l’objet d’un échange spécifique en EAC entre Thierry et le chercheur.

Extrait verbatim RP 15,16

CH : Tu m'as dit que la lecture était difficile. Mais la lecture c'est plus dans l'anticipation. Ici tu as nourri ta lecture de tes essais successifs ?

T : Exactement. Mais c'est tout le temps comme ça. En tout cas en bloc tu fais un essai, tu te rends compte que ce n'est pas le bon, soit tu recommences (la même chose) soit tu recommences autre chose en mettant plus d'effort, plus d'énergie, plus d'intensité... Soit tu te dis je me suis trompé et c'est autre chose qu'il faut faire.

Et dans ce bloc il y a finalement beaucoup de possibilités de saisie de prises. Tu as donc beaucoup d'alternatives, de choix, il faut donc expérimenter.

Le RP énoncé peut être formalisé ainsi :

« La lecture » / vaut pour / « nourrir la méthode dans les essais successifs » / parce que / « ce bloc a beaucoup de possibilités de saisies de prises » / ce qui a pour résultat / « qu’il y a beaucoup d'alternatives qu'il faut expérimenter ».

Elle rend compte du double lien entre la quantité des prises disponibles et 1) la facilité à les discriminer et 2) à la difficulté à s’investir énergétiquement dans une méthode.

Thierry se fait « abuser » lors de la lecture prospective sur le séquençage des mouvements à partir du jugement sur la qualité des prises et leurs discriminations comme nous l’avons développé précédemment. Ces déconvenues se traduisent notamment par la trahison d’attentes secondaires relatives à l’investissement énergétique, comme on le voit dans le raisonnement pratique suivant.

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Capture d'écran 15. Thierry tâtonne de la main droite pour trouver une prise.

Extrait verbatim RP 18

T : Donc là. Je réussis le mouvement. Le reste ce n'est pas très, très dur. Et là encore je ne trouve pas la prise de main droite. Je cherche, je tâtonne. Pareil, je n’avais pas trop, trop repéré du bas. Franchement… Je pensais que lorsque j'allais avoir ça là-bas, ça allait être plus facile (regarde le bloc et mime la prise main gauche). Et que ça (mime la prise main droite), ça serait comme ça. Et en fait il y a une petite réglette que je suis allé voir après. Je pensais que ça allait serrer plus facilement lorsque j’étais dans le triangle (mime la compression). Donc du bas je me suis fait un peu abuser. C'est ce que je te disais tout à l’heure. Lorsque ça à l'air facile c'est dur et quand ça à l'air dur c'est infaisable. Bon bah la ça avait l'air facile donc je m'étais dit que je n'allais pas galérer là-haut. Pas plus que ça. Parce qu’il me semblait que la rampe était super bonne et que main droite ça allait prendre. En fait lorsque je suis arrivé là-haut j'ai tâtonné, tâtonné, et en fait ça prend à un seul endroit et sur cet essai là je ne le trouve pas.

168 RP 18

« Ne pas trouver la prise main droite » / a pour résultat que / « je cherche, je tâtonne » / parce que / « je n’avais pas trop regardé du bas » / parce que / « je pensais que ça allait être

facile lorsque j’étais dans le triangle (mime une compression) » / parce que / « il me semblait que la rampe était super bonne et que main droite ça allait prendre » / dans les

circonstances où / « ça prend à un seul endroit » / ce qui a pour résultat que / « je me fais

abuser » / et que/ « il y a une petite réglette que je suis allé voir après ».

Le haut du bloc, étiqueté comme ayant la forme d’un « triangle » par Thierry, lui permet d’anticiper une gestuelle en compression sur cette section du bloc. Cet étiquetage a initialement suffi à Thierry pour poser une attente quant à la facilité de la section. Cette anticipation a été resignifiée au cours de l’ascension. En effet, Thierry s’est fait abuser par une prise qu’il n’avait pas vue lors de la lecture prospective et qu’il ira marquer par la suite. La première signification (macro-méthode « en compression ») construite lors de la lecture prospective a cependant été gardée sur les essais réussis du grimpeur moyennant l’utilisation de la prise verticale main droite.

Synthèse

La lecture prospective chez Thierry est une succession de rectifications relatives tantôt à ce qu’il a vu et étiqueté avec précision et qu’il a cependant évacué de la méthode par la suite, et tantôt relatives à ce qu’il n’a pas vu avec précision, et pourtant conservé par la suite, moyennant quelques micro-ajustements au cours de l’ascension. De fait, les lectures opérées lui ont certes permis de poser en attente à la fois une gestuelle et un investissement énergétique, mais elles se sont révélées trompeuses et ont nécessité la multiplication d’essais exploratoires, ainsi que la révision des jugements initialement formulés. Les résultats montrent que la lecture prospective de Thierry s’est caractérisée par des attentes relatives à 1) la qualité de certaines préhensions et 2) la fiabilité de certaines macro-méthodes. Les premières ont été régulièrement et rapidement évacuées de la méthode suite à des tâtonnements synchrones aux essais donnant lieu à de nouvelles lectures rétrospectives. Les secondes en revanche se sont révélées moins nombreuses et plus persistantes dans le temps.

169 Les macro-méthodes ont été construites à partir d’une description globale de la forme du bloc (ici une « proue » et un « triangle »). Elles ont permis d’orienter une série de tâtonnements synchrones. De ces macro-méthodes a dépendu la discrimination des prises et l’efficacité du tâtonnement de Thierry.

Ces résultats sont à reconduire aux circonstances spécifiques de ce bloc qui est considéré par Thierry comme « difficile à lire » et « à méthode », « dans ce bloc il y a (…) beaucoup d'alternatives, de choix, il faut donc expérimenter » (RP 15 et 16).

1.3.3. L’apparent paradoxe d’une lecture pour planifier ou pour improviser la

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