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Une différenciation très marquée pendant le déroulement de l’instruction

Dans le document La place de la victime dans le procès pénal (Page 133-137)

B/ Un droit différencié en fonction de la qualité de la victime

1/ Une différenciation très marquée pendant le déroulement de l’instruction

cette phase. C’est pourquoi durant l’instruction, le droit à être informée va bénéficier en force à la seule partie civile (1). Enfin, le législateur a aussi forgé une place à la victime au sein de la phase de l’exécution des peines1. Ainsi, en cas d’une éventuelle condamnation de l’auteur de l’infraction, la victime bénéficiera à nouveau de ce droit mais le contenu de l’information qui lui est délivrée va toujours différer selon le statut qu’elle acquis au sein du procès (2).

1/ Une différenciation très marquée pendant le déroulement de

l’instruction

231. Le droit des victimes à être informée pendant le déroulement de l’instruction va

surtout bénéficier à celles qui se sont constituées parties civiles. Il faut préciser qu’il ne s’agit pas en l’espèce d’une rupture d’égalité entre les parties lésées. En réalité, la distinction relative au statut de la victime fondant le contenu de l’information qui doit être communiquée à celle-ci repose sur un raisonnement cohérent. On le sait, la victime est libre de se porter partie civile ou être considérée dans le cas inverse comme un simple témoin. Lorsque l’instruction est ouverte, devenir partie au procès est un choix personnel. Une fois cette qualité acquise, elle est donc associée à la procédure et de cette manière informée de ses droits au sein de celle-ci (a) ainsi que de la durée et de l’avancée de la procédure (b).

1 Notamment amorcée par la loi dite Perben II, préc. ; cf. à ce sujet, R. CARIO, « La place de la victime dans l'exécution des peines », D. 2003, p. 145 ; durant cette phase, la distinction du statut de la victime est plus limitée

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a/ L’information sur ses droits au sein de la procédure

232. Dès sa première comparution, l’alinéa 1 de l’article 89-1 du CPP prévoit que la partie

civile doit être avisée de son droit de formuler une demande d’acte ou de présenter une requête en annulation. Il est primordial que cette information apparaisse à ce stade car le juge d’instruction va procéder à tous les actes qu’il juge utile à la manifestation de la vérité1. Or, si la victime n’est pas informée qu’elle a la possibilité de demander des actes supplémentaires ou encore, d’exercer un recours en vue de l’annulation de certains actes qu’elle juge attentatoires ou non conforme à la loi, elle ne pourra pas exercer effectivement ces droits. Il y aurait alors atteinte à l’équilibre des droits des parties puisque la même information est fournie à la personne poursuivie par le juge d’instruction lorsqu’elle mise en examen2.

Toujours, lors de cette première audition, le juge d’instruction doit aviser la partie civile qu’elle pourra demander la clôture de la procédure à l’expiration d’un certain délai qu’il lui communique et qui ne peut dépasser un an en matière correctionnelle ou dix-huit mois en matière criminelle. Lorsqu’aucune durée n’est prévue, elle est informée qu’elle pourra demander la clôture à l’expiration de ce même délai3.

233. En cas de placement du mis en examen sous contrôle judiciaire avec interdiction de

prendre contact avec la victime, l’article 138-1 du Code de procédure pénale prévoit également que le juge d’instruction doit en informer la victime. Cette mesure est notifiée à toute victime sans distinction de statut ce qui est cohérent puisqu’il s’agit en l’espèce d’une mesure de protection où la victime n’a qu’un rôle passif, il importe donc peu qu’elle ait la qualité de partie ou non au sein de la procédure.

234. Cependant, les informations relatives à la durée et à l’avancée de la procédure vont

elles, bénéficier exclusivement à la seule victime ayant la qualité de partie au procès pénal.

1 Art. 81 CPP

2 Art. 113-8 CPP

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b/ L’information sur la durée et l’avancée de la procédure

235. Lors de sa première audition, l’alinéa 2 de l’article 89-1 du Code de procédure

pénale consacre l’information de la partie civile sur la durée prévisionnelle de l’instruction lorsque le juge estime qu’elle sera achevée en moins d’un an en matière correctionnelle et moins de dix-huit mois en matière criminelle.

236. Ensuite, au fur et à mesure que l’instruction se déroule, la partie civile se voit notifier

tous les actes qui l’intéressent, c’est-à-dire toutes les décisions pour lesquelles elle peut exercer un recours1 et les ordonnances de renvoi ou de mise en accusation par lettre recommandée, expédiée à la dernière adresse2. Elle sera de même avisée par le procureur de la République de la date à laquelle l’affaire sera appelée à l’audience le cas échéant, devant la chambre de l’instruction3. La loi relative à la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs4 a instauré l’obligation d’informer la partie civile, qu’elle ait interjetée appel ou non, de la date de l’audience d’appel en matière criminelle. En réalité, cette disposition ne fait que consacrer une pratique qui existait déjà devant les juridictions5. Cette loi a aussi prévu l’information de la victime d’un mineur, sans différence de statut, cette fois-ci, de la date d’audience de jugement afin de pouvoir se constituer partie civile. Cette disposition qui se trouve aujourd’hui à l’article 6 de l’ordonnance 1945 figurait auparavant à l’article 5 de celle-ci mais était réservée au seul cas d’une saisine du juge pour enfant par convocation par officier de police judiciaire (OPJ). L’avis communiqué à la victime est désormais étendue à toutes les procédures de jugement devant les juridictions pour enfant quelque soit leur mode de saisine6. Cette généralisation est bienvenue car la limitation antérieure aboutissait à une différence de traitement entre les victimes qui était injustifiée. Cependant, il a été précisé ci-dessus, que ce texte accorde le bénéfice de cette information à

1 Art. 183 al. 2 CPP ; l’article 186 al. 2 liste les ordonnances du juge d’instruction qui peuvent faire l’objet d’un recours par la partie civile.

2 Art. 183 al. 1 CPP

3 Art. 197 CPP

4

Loi n° 2011- 939, du 10 août 2011 relative à « la participation des citoyens au fonctionnement de la justice

pénale et jugement des mineurs », JORF n° 0185 du 11 août 2011

5

Circulaire n°2011-23/E8, JUS D 1122738 C, de présentation de la loi du 10 août 2011 relative à « la

participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs », du 11 août 2011,

n°1.3

6

Art. 6 de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à « l’enfance délinquante », modifié par la loi du 10 août 2011, préc., art. 26 et 29 ; circulaire de présentation de la loi du 10 août 2011, préc., n°3.1.3

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toute victime d’un mineur sans distinction de statut. Or, dans l’article 183 du Code de procédure pénale, les notifications des ordonnances de renvoi ou de mise en accusation informant la victime de la date d’audience de jugement ne sont délivrées qu’à la seule victime partie civile1. Il existe donc sur ce point une divergence injustifiée entre le droit d’information accordé à la victime d’une infraction commise par un majeur et celui dont bénéficie la victime d’un mineur2.

237. Par ailleurs, afin d’être en mesure de prendre connaissance de l’avancée de la

procédure, la partie civile peut aussi se faire délivrer, par l’intermédiaire de son avocat et à ses frais, « copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier »3. Une loi du 27 mai 2014 permet même à la partie civile de prendre connaissance de ces pièces sans passer par l’intermédiaire de l’avocat lorsque celle-ci n’en a pas4. De plus, en dehors des actes qui doivent être notifiés, le législateur a prévu l’obligation pour le juge d’instruction de communiquer à la partie civile tous les six mois l’état d’avancement de l’information, mais uniquement en matière criminelle et correctionnelle, lorsqu’elle est victime d’un délit contre les personnes ou d’un délit contre les biens accompagné d’atteinte à la personne5. L’article 90-1 du Code de procédure pénale prévoit aussi la communication de cet avis à toute association regroupant plusieurs victimes et qui s’est constituée partie civile conformément aux dispositions de l’article 2-15 du Code de procédure pénale 6. Elle devra elle-même en informer les victimes regroupées en son sein sauf si celles-ci se sont constituées parties civiles à titre individuel.

Cette communication sur l’avancée de la procédure avait été prévue dans la loi du 15 juin 20007 au bénéfice de toute victime constituée partie civile sans limitation en rapport avec l’infraction commise à son préjudice. La circulaire de 20018 avait précisé que l’un des

1 Certes, l’article 391 du CPP indique que toute victime qui a porté plainte doit être avisée de la date de l’audience mais il s’agit uniquement des victimes qui ont porté plainte à l’exclusion de celles qui sont identifiés mais ne sont pas à l’origine de la plainte.

2 Cf. infra n° 912

3 Art 114 al. 4 CPP

4 Ibid. modifié par la loi du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement

européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales,

JORF n°0123 du 28 mai 2014 p. 8864, art. 6

5 Art. 90-1 CPP

6 Cf. infra n° 637

7 Art. 175-3 CPP, abrogé ; Loi du 15 juin 2000, préc.

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principaux intérêts d’informer la partie lésée de façon régulière de l’état d’avancement de la procédure était de la dissuader d’exercer la procédure de contrôle prévue à l’article 175-1 du Code de procédure pénale lui permettant de demander la clôture de l’instruction. Cependant, la loi du 9 mars 2004 a abrogé cette disposition et la circulaire prise pour la présentation de cette loi avance qu'il s'agissait d'une charge particulièrement importante sans être toujours véritablement utile1. Selon le rapport de l’Assemblée Nationale portant sur le projet de loi ayant abrogé cet article, cette obligation est limitée aujourd’hui, « aux seuls cas où cette

information apparaît indispensable »2. Cette restriction est contestable car l’information sur

l’avancée de la procédure est réservée aux victimes d’un délit contre les personnes ou d’un délit contre les biens accompagné d’atteinte à la personne. Or, il existe des cas dans lesquels, quand bien même aucune atteinte à la personne n’est observée, la victime se retrouve dans une situation très grave. Il faut donc réexaminer cette limitation3.

238. Dans tous les cas, on constate que l’essentiel du devoir d’obligation pendant le

déroulement de l’instruction est imposée vis-à-vis de la seule victime partie civile, nonobstant le cas de l’information relative à la date de l’audience de la victime d’un mineur ou celui de l’obligation d’interdiction d’entrer en contact avec la victime éventuellement imposée au mis en examen lors d’une procédure de contrôle judiciaire. En réalité, il s’agit de la seule phase de la procédure où l’on peut considérer que le bénéfice du droit à être informé est quasi-exclusif à la seule victime partie civile. Avant le déroulement de l’instruction, cette obligation existe à l’égard de toute victime, et après le jugement définitif, au moment de l’exécution des peines, on peut remarquer qu’une distinction est toujours présente de façon plus limitée.

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