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La correspondance insiste sur les erreurs et les oublis des officiers de justice et des administrateurs. Les subdélégués sont notamment prompts à rapporter les négligences et les refus des officiers de leur département. Ils sont régulièrement considérés comme les causes de retards et des défauts que subit l’enquête. Néanmoins, plusieurs se distinguent par leur exactitude à transmettre les informations exigées par la chancellerie.

1. Des officiers de justice et des administrateurs exacts

Un certain nombre d'administrateurs et d'officiers se caractérisent par leur application scrupuleuse à exécuter des ordres de la chancellerie. Le subdélégué d'Aurillac souligne ainsi la précision du greffier de Vic1 pour le premier semestre de 1759 :

« Le greffier de Vic m'a remis de bonne grâce l'état des crimes et délits commis dans le ressort de son bailliage, il m'en a même prévenu et m'a dispenser par-là de le demander à M. le lieutenant général. Il faut espérer, Monsieur, que vous aurés remis le bon ordre à cet égard dans un lieu où on s'en écarte volontier en ce qui touche la subdélégation ».2

En 1744, le procureur du roi de la châtellenie de Castelsarrasin3 met aussi en avant l'exactitude des officiers de justice de sa juridiction :

« Les officiers de justice de notre chatailenie sont si persuadés du soucy ou vous estés d’estre informé tous les six mois du nombre et de la qualité des delicts qui peuvent se commestre dans leurs juridictions que pour répondre aux ordres que je leur ai communiqué de notre part à ce sujet. Ils sont venus me rendre un compte exact de toutes les matières qui les ont occupés à raison de leurs charges. Je n’ai pas trouvé qu’il y est aucune cause criminelle, pour ce qui me regarde par raport à mon district je n’ai rien de nouveau à vous apprendre [...] ».4

Le procureur du roi de Capcir, Cerdagne et du Conflent se distingue aussi par son exactitude. En 1746, il précise ainsi que le greffier de la Cerdagne n'a pas fourni la date de la sentence d'un vol domestique

1 Aujourd'hui Vic-sur-Cère, Cantal, ch.-l. c., arr. Aurillac.

2 Arch. dép. Puy-de-Dôme, 1C.1551, Lettre : envoi de l'état des crimes de la subdélégation d'Aurillac pour les 6 premiers mois de 1759 - 9.07.1759.

3 Castelsarrasin, Tarn-et-Garonne, ch.-l. c., ch. l. arr.

4 Arch. dép. Hérault, C.1575, Lettre : aucun crime dans la châtellenie de Castelsarrasin pour les 6 premiers mois de 1744 - 2.07.1744.

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et que, sans attendre les avis de l'intendant, il lui a écrit concernant le retard que connaît cette affaire dans son instruction1.

Certaines juridictions se caractérisent par le soin minutieux qu'elles mettent à répondre à l'enquête. C'est notamment le cas du Conseil de Régence de l'Evêché de Strasbourg siégeant à Saverne et se trouvant dans la subdélégation du même nom. On comptabilise vingt-cinq états particuliers envoyés entre le premier semestre de 17542 et celui de 17803. De plus, cette juridiction apparaît également dans les états des crimes de la subdélégation de Saverne pour les années où il n’a pas transmis d’états des crimes particuliers directement à l’intendance. Ainsi, dans les vingt-et-un états généraux4 existant, les semestres où le Conseil n’a pas produit le sien propre, sa présence est clairement attestée dans tous. Enfin, dans les états des crimes généraux dressés au niveau de l’intendance, il est également présent pour les six premiers mois de 17645. En tout, cette juridiction a donc participé entre le premier semestre de 1754 et le dernier de 1787 à quarante-sept états sur les soixante-huit possibles. Si aucune des données allant du dernier semestre de 1780 à celui 1782 ainsi que du dernier semestre de l’année 1785 n’a été conservée à Strasbourg, les crimes recensés dans le registre de Paris montrent qu’elles existent néanmoins. En revanche rien n’a été conservé des six derniers mois de 1760 au dernier semestre de 1762 que ce soit pour le Conseil de Régence de l’évêché de Strasbourg ou les autres juridictions de l’intendance d’Alsace. En tenant compte de cela, le Conseil de Régence a donc fourni cinquante-trois états sur soixante-trois, soit une participation à l’enquête à hauteur de 84,1%.

2. Des administrateurs et des officiers zélés

Certains officiers et administrateurs n'attendent pas les remontrances de leurs supérieurs pour transmettre des compléments d'informations sur leurs états des crimes. C'est le cas du procureur du roi de la sénéchaussée et de la maréchaussée de Toulouse, Cortade de Betou dont nous avons déjà évoqué le zèle pour les affaires de la justice. Craignant d'avoir oublié une observation importante dans son état des six derniers mois de 1744, cet officier écrit un jour après avoir envoyé son état des crimes6 :

1 Arch. dép. Pyrénées-Orientales, 1C.1268, Lettre : envoi des états des crimes des vigueries et bailliages du Conflent, Capcir et Cerdagne pour les 6 derniers mois de 1745 - 18.01.1746.

2 Arch. dép. Bas-Rhin, C.396, Etat des crimes du Conseil de la Régence de l’Evêché de Strasbourg pour les 6 premiers mois 1754 - 28.06.1754.

3 Idem, C.398, Idem pour les 6 premiers mois de l’année 1780 - 14.07.1780.

4 Ces états courent du premier semestre de l’année 1763 au dernier de 1787. Idem, C.397, Etat des crimes de la subdélégation de Saverne pour les 6 premiers mois de 1763 - 9.07.1763 ; C.398, Idem pour les 6 premiers mois de l’année 1787 - 23.0.1787.

5 Idem, C.397, Etat des crimes de l'intendance d'Alsace pour les 6 premiers mois de l’année 1764.

6 Arch. dép. Hérault, C.1575, Lettre : envoi de l'état des crimes de la sénéchaussée et de la maréchaussée de Toulouse pour les 6 derniers mois de 1744 - 23.01.1745.

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« Comme je crains avoir manqué à une observation dans le dernier estat des crimes des derniers six mois de l’année 1744 que j’ay eu l’honneur de vous presanter il y a deus jours1, permettés moy s’il vous plait d’y suppléer. [...] La moindre obmission, Monseigneur, dans les estats des crimes me paroissant de consequance, permettés moy d’avoir l’honneur de suppléer par le mémoire cy inclus que je vous supplie de voulloir bien approuver qu’un de M[essieu]rs vos secrettaires veille bien le joindre par une petite attache à l’article dud[it] Duffour qui est le premier denommé aud[it] estat »2.

Un feuillet destiné à être rattaché au premier état accompagne la lettre3. Par contre, on note que si cette affaire est bien inscrite dans le premier état transmis, ce n'est pas le premier article, mais le deuxième4. Le subdélégué de Rochefort adresse lui aussi à l'intendant d'Auvergne un supplément 5 à l'état des crimes de son département pour les six premiers mois de 17596 pour lui faire part d'un crime dont il vient à peine d'avoir les détails à cause de la résistance que lui oppose le juge en charge du procès. Il en profite également pour préciser que les autres affaires présentes dans le premier état n'ont pas connu de nouveaux actes7. Le subdélégué de Troyes pour le second semestre de 1764, envoie son état des crimes le 14 janvier8. Le 20 janvier, il écrit à nouveau à l'intendant de Champagne car : « Je n'ai reçu qu'hier la notte ci jointe d'un meurtre commis au mois d'octobre dernier dans la paroisse de Villiers aux Corneilles9. J'ai l'honneur de vous l'addresser pour être ajoutée à l''etat des crimes que je vous ai fait passer il y a huit jours »10. La note en question est un état des crimes particulier11. Le subdélégué de Nîmes, après avoir transmis son état des crimes pour les six derniers mois de 1759, à la fin janvier 176012, justifie l'envoi d'un second13 – le seul qui a été conservé – un mois après, en expliquant qu'il a « fait insérer le nom des jurisdiction où ils ont été comis et celui des parties civiles ou publiques »14. Le subdélégué de Landrecies, pour le second semestre de 1784, envoie, lui aussi, un second état des crimes15

1 Bien qu'il affirme l'avoir envoyé il y a deux jours, la lettre accompagnant l'état des crimes est datée de la veille. Ibidem.

2 Idem, C.1575, Lettre : envoi du supplément de l'état des crimes de la sénéchaussée et de la maréchaussée de Toulouse pour les 6 derniers mois de 1744 - 24.01.1745.

3 Idem, C.1575, Supplément de l’état des crimes de la sénéchaussée et de la maréchaussée de Toulouse pour les 6 derniers mois de 1744 - 24.01.1745.

4 Idem, C.1575, Etat des crimes de la sénéchaussée et de la maréchaussée de Toulouse pour les 6 derniers mois de 1744 - 23.01.1745.

5 Arch. dép. Puy-de-Dôme, 1C.1551, Supplément à l'état des crimes de la subdélégation de Rochefort pour les 6 premiers mois de 1759.

6 Idem, 1C.1551, Etat des crimes de la subdélégation de Rochefort pour les 6 premiers mois de 1759.

7 Idem, 1C.1551, Lettre : envoi du supplément de l’état des crimes de la subdélégation de Rochefort pour les 6 premiers mois de 1759 - 5.07.1759.

8 Arch. dép. Marne, C.1787, Lettre : envoi de l’état des crimes de la subdélégation de Troyes pour les 6 derniers mois de 1764 - 14.01.1765 ; Etat des crimes de la subdélégation de Troyes pour les 6 derniers mois de 1764.

9 Villiers-aux-Corneilles, Marne, c. Vertus-Plaine Champenoise, arr. Epernay.

10 Arch. dép. Marne, C.1787, Lettre : envoi d’un crime à ajouter à l’état des crimes de la subdélégation de Troyes pour les 6 derniers mois de 1764 - 20.01.1765.

11 Idem, C.1787, Etat des crimes de la justice de Villiers-aux-Corneilles pour les 6 derniers mois de 1764.

12 Arch. dép. Hérault, C.1582, Lettre : envoi de l'état des crimes de la subdélégation de Nîmes pour les 6 derniers mois de 1759 - 28.01.1760.

13 Arch. dép. Hérault, C.1582, Etat des crimes du diocèse de Nîmes pour les 6 derniers mois de 1759.

14 Idem, C.1582, Lettre : envoi d'un nouvel état des crimes du diocèse de Nîmes pour les 6 derniers mois de 1759 - 29.02.1760.

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afin de compléter le premier1 où son greffier n'avait rien noté concernant l'affaire jugée contre Jean-Jacques Polier accusé d'avoir tué son frère lors d'une rixe :

« J'ai l'honneur de vous adresser [...] un second état des crimes [...] dans lequel mon greffier a eu soin de remplir le vuide qu'il avoit laissé dans le premier au sujet de la procédure qui s'instruit par contumace à l'office de Maroille2 d'autant plus facilement qu'il devra encore en être fait mention dans six mois d'après le jugement définitif »3.

Des officiers et des subdélégués se distinguent donc par leur zèle et leur volonté de fournir les informations les plus précises à l'intendant et au chancelier pour que l'enquête sur les crimes dignes de mort ou de peines afflictives puisse remplir son objectif. La chancellerie, si elle est prompte à adresser des critiques, est également sensible à l'exactitude des intendants et ne manque pas de les féliciter pour la précision de leurs états des crimes.

3. Des intendants félicités

Les critiques, comme cela a été vus à plusieurs reprises sont nombreuses et variées, mais la chancellerie sait aussi reconnaître quand les états des crimes sont en tout en point conformes à ses attentes. Elle n'hésite pas alors à féliciter les intendants même si cela reste au demeurant un phénomène assez rare.

Le chancelier d'Aguesseau salue ainsi la précision avec laquelle l'intendant du Languedoc a dressé son état des crimes pour le second semestre de 17364. Un an plus tard pour les six derniers mois de 1737, il lui fait de nouveau part de sa grande satisfaction à ce sujet :

« Je ne scaurois trop louer l’exactitude avec laquelle vous avés dressé l’état que vous m’avés envoyé des crimes commis dans votre généralité pendant les six derniers mois de l’année 1737. Il est fait avec un arrangement et une précision qui ne laissent rien à désirer »5.

Le chancelier de Lamoignon tient des propos similaires à l'intendant d'Alençon quant à son état des crimes pour les six premiers mois de 17586. Il félicite également l'intendant d'Auvergne pour son état

1 Il n'a pas été conservé.

2 Maroilles, Nord, c. Avesnes-sur-Helpe, arr. Avesnes-sur-Helpe.

3 Arch. dép. Nord, C.10339, Lettre : envoi d’un second état des crimes pour la subdélégation de Landrecies pour les 6 derniers mois de 1784 - 8.02.1785.

4 Arch. dép. Hérault, C.1570, Lettre : accusé de réception de l'état des crimes de l'intendance du Languedoc pour les 6 derniers mois de 1737 - 15.04.1737.

5 Idem, C.1570, Lettre : accusé de réception de l’état des crimes de l'intendance du Languedoc pour les 6 derniers mois de 1737 - 28.05.1738.

6 Arch. dép. Orne, C.757, Lettre : accusé de réception de l’état des crimes de la généralité d’Alençon pour les 6 premiers mois de 1758 - 12.08.1738.